Dégustation d’eaux-de-vie : La pédagogie du verre qui circule

21 février 2013

Au cours de la campagne de distillation, les Chambres d’agriculture 16 et 17 proposent des séances de dégustation, quasi quotidiennes. Un service gratuit en Charente (faible coût en Charente-Maritime), ouvert à tous les viticulteurs, qu’ils travaillent ou non avec les Chambres. Et une excellente manière de se former au contact des autres.

C’est un service qui existe depuis 20 ou 25 ans, autant dire une institution. Les viticulteurs qui participent à ces séances de dégustation ne tarissent pas d’éloges.

« On progresse beaucoup, non seulement par l’avis des dégustateurs sur nos échantillons mais par les échanges entre viticulteurs. Les gens s’expriment sans tabou, livrent leurs doutes, leurs craintes, leurs petits trucs. Et puis le fait de faire circuler les verres autour de la table permet de repérer les défauts majeurs. Toute chose impossible chez soi. »

En Charente, une séance de dégustation est organisée quotidiennement, de 10 h à midi, en décembre et janvier. Le rythme s’allège les autres mois de la campagne de distillation (voir calendrier). Patrick Vinet et Grégory Martonnaud animent ses séances, avec le concours d’intervenants du négoce, sur 30 ou 40 % des dates. En Charente-Maritime, Valérie Baumann, l’œnologue de la Chambre, pratique de même à Jonzac, une matinée par semaine. Particularité de ce service : il est ouvert à tous, sans exclusive, que le viticulteur soit ou non client de la Chambre. La prestation est gratuite en Charente, à faible coût en Charente-Maritime (forfait de 35 € pour l’ensemble des séances).

Les « grands jours », au cœur de la distillation, 80 ou 100 échantillons passent de main en main durant les 2 heures. Les dégustateurs donnent leur avis, les viticulteurs glissent un mot, livrent une explication. Mais sans débordement, à bas bruit, dans la retenue. Sans doute la dégustation impose-t-elle ce relatif silence, ce climat apaisé, elle qui nécessite une telle concentration. Par ailleurs, si les viticulteurs ne jouent pas leur tête à chaque fois qu’ils apportent leurs échantillons, on subodore l’importance que cela revêt pour eux. La dégustation délivre un avis sur un travail de plusieurs jours.

« Comment faire bon ? » C’est un peu la quête de tout un chacun et notamment de ceux qui acceptent de se remettre en cause en jouant le jeu de la dégustation « à ciel ouvert ».

Doutes, remises en cause

Parfois, les incertitudes l’emportent, l’irrationnel n’est pas loin. Un viticulteur a installé un équipement qui, normalement, devait améliorer la qualité. Pourtant, l’arrivée du nouvel outil a coïncidé « pile-poil » avec une perte d’esters dans les eaux-de-vie. Hasard ou avatar ? Le bouilleur de cru en discute avec Patrick Vinet en fin de réunion. L’œnologue lui suggère d’introduire une variante dans son parcours. Et de voir ce que cela donne. Au fil de l’eau, dégustation et formation se font la courte échelle. C’est ainsi qu’au gré d’un commentaire sur un échantillon, les échanges partent sur l’azote dans les moûts, son impact sur la qualité, la meilleure manière de l’apporter (en fractionné ou en une seule fois), mais attention aux conséquences sur la montée en température… Suit un commentaire sur la forme du col de cygne et la rectification des eaux-de-vie. Toutes discussions où les savoir-faire, les connaissances acquises ou à acquérir, donnent un peu le vertige au non-initié. La distillation, une science inexacte et tentaculaire. Les viticulteurs apprécient cette liberté d’expression dans un lieu « neutre » comme la Chambre. « On peut tout dire. On sait qu’il n’y aura pas de répercussion commerciale. »

Patrick Vinet souligne la progression de la qualité de la distillation au fil des années, « peut-être pas aussi importante que sur la vinification mais tout de même ». « Il y a vingt ans, note-t-il, on ne parlait pas de la mise au courant progressive, des températures de coulage. » Ce progrès, il l’attribue au suivi qualité des maisons mais aussi aux automatismes, aux électro-vannes et autres équipements. Ce qu’il oublie de dire, c’est que son service – et celui de Valérie Baumann en Charente-Maritime – ont puissamment aidé à cette avancée de la distillation.

En Charente, l’an dernier, Patrick Vinet et Grégory Martonnaud auront dégusté quelque 2 500 échantillons, apportés par 200 viticulteurs différents (800 participants).

Calendrier des dégustations
Chambre d’agriculture de Charente

l Sur les mois de décembre et janvier, séances de dégustations tous les jours, de 10 h à 12 h : à l’antenne de la Chambre à Segonzac, le lundi et le jeudi ; sur les sites extérieurs les autres jours de la semaine (Châteauneuf, Bouteville, Barbezieux, Blanzac, Malaville, Saint-Sulpice-de-Cognac, Verrières) – Voir calendrier précis sur le site internet de la Chambre (www.charente.chambagri.fr).
l Sur les mois de novembre et de février, les séances de dégustation ont lieu 2 jours par semaine, le lundi et le jeudi (en mars, uniquement le lundi, à Segonzac).

Chambre d’agriculture de Charente-Maritime

l De la mi-novembre à la mi-février, à la Chambre d’agriculture de Jonzac, de 10 h à midi. Environ 25 personnes inscrites au cours de la campagne (15 à 20 participants par séance). En période de pointe, 40 à 45 échantillons dégustés. Présence de représentants des courtiers et du négoce, comme en Charente.
l Valérie Baumann intervient aussi à Macqueville, en dégustation eaux-de-vie, pour un groupe constitué d’une quinzaine de viticulteurs travaillant déjà ensemble (Cuma de vendange..). Rendez-vous tous les 15 jours au cours de la campagne de distillation.

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