Distiller avec une énergie produite sur la propriété

16 mars 2009

m_mass_1_opt.jpegDominique Massé est un jeune bouilleur de cru qui s’intéresse beaucoup aux consommations énergétiques de son alambic. Il a mené une réflexion personnelle intégrant à la fois la volonté de minimiser les frais de distillation et de respecter les nouvelles attentes environnementales. C’est le fait de monter un nouvel alambic de 21 hl qui l’a amené à se demander si le gaz était vraiment le combustible d’avenir pour les vingt ans à venir.

 

 

 

 

 

Remplacer le Gaz par une énergie cultivée

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Le foyer au moment de sa construction.

Sur le plan technique, le gaz permet de conduire la distillation avec un confort sans équivalent mais par contre son prix a déjà augmenté depuis 5 ans et comme le propane est un dérivé du pétrole, il est très peu probable qu’il baisse dans l’avenir. Cette réflexion a incité D. Massé à imaginer d’utiliser un combustible de distillation « plus propre » et aussi en phase avec sa philosophie d’agriculteur investi dans les méthodes de production raisonnée. Le fait de cultiver à la fois des céréales et de la vigne (26 ha) l’a amené à envisager de produire lui-même l’énergie nécessaire à la conduite de la distillation. Au cours de l’hiver 2005, il a acheté une chaudière de 21 hl en ayant l’intention de la faire fonctionner avec un autre combustible que le gaz, mais pas du bois ou du charbon. A l’époque, les cours du maïs étaient si bas qu’il s’est dit pourquoi ne pas brûler une partie de ma récolte sous l’alambic. L’idée peut paraître au départ farfelue mais les arguments de D. Massé sont le fruit d’une réflexion cohérente : « Sur l’exploitation, je cultive du maïs sans irrigation dans des terres où il est impossible d’implanter des cultures d’automne, et comme à l’époque le prix de cette céréale était bas j’ai pensé qu’elle serait mieux valorisée en devenant le combustible de ma chaudière. Ensuite, le fait de pouvoir moi-même produire le combustible nécessaire à la distillation me paraissait être une démarche qui va dans le sens du respect de l’environnement. Le maïs devient alors une énergie renouvelable alors que ce n’est pas le cas du gaz ou du charbon. Toute la difficulté a été ensuite de transformer cette idée en réalisation concrète. En effet, l’utilisation de ce nouveau combustible suscitait beaucoup d’interrogations et nécessitait un aménagement complet du foyer. Il n’a pas été facile de convaincre des entreprises de se lancer dans ce projet et ce sont des artisans locaux qui se sont le plus investis. J’ai d’ailleurs assumé seul l’ensemble des investissements pour mener à bien cette idée. »

Un essai d’alimentation au grain de maÏs sec

Au cours de l’été 2006, le projet de distillerie s’est finalisé avec l’optique de la faire fonctionner au maïs sec et éventuellement au charbon petit grain si les essais n’étaient pas concluants. L’alambic a été monté avec un foyer inversé traditionnel en briques (ventilé mécaniquement) dont le dimensionnement a été établi en prenant comme référence les anciens foyers à charbon petit grain. Le foyer inversé a permis de monter un système de trémie et de transfert automatique du combustible (par une vis sans fin) en dehors de la distillerie (ayant une autonomie correspondant à la durée d’une chauffe). La vitesse de rotation variable de la vis permet de moduler les apports de combustible dans le foyer et de s’adapter aux niveaux de demande d’énergie très différents pendant le cycle de distillation. Une soufflerie régulée de façon électrique vient compléter l’équipement du foyer afin de pouvoir moduler aussi l’intensité de la combustion.

Au cours de l’hiver 2006-2007, D. Massé a donc commencé sa distillation en utilisant du maïs comme combustible et cet essai grandeur nature a soulevé beaucoup de nouvelles interrogations : « J’ai été cherché du maïs séché par la coopérative qu’ensuite je chargeais dans la trémie du foyer. Lors des premières chauffes, j’ai été pénalisé par deux choses, le fait que le foyer soit neuf et ensuite un taux d’humidité latent du maïs autour de 15 %. Le système donnait satisfaction mais les mises au courant étaient longues et au mieux j’arrivais à faire un tour et demi par jour. Cette situation devenait compliquée à gérer pour la bonne organisation de la distillation car j’étais en permanence décalé au niveau des horaires. Par ailleurs, des phénomènes de condensations liés au taux d’humidité du mais ont créé par moment de petits écoulements d’eau au niveau des tours à feu. J’ai le sentiment que le mécanisme d’alimentation du maïs dans le foyer n’était pas suffisant pour assurer les mises au courant des vins dans des délais corrects. Au bout de quelques jours, j’ai décidé d’arrêter le maïs et de passer au charbon petit grain que je maîtrise parfaitement. Les contacts avec mon fournisseur nous ont permis d’utiliser un charbon flambant petit grain 6 – 35 d’origine colombienne qui fait peu de cendre et de mâchefer. Depuis deux campagnes, je travaille avec le charbon et tout se passe bien mais ce n’est pas mon objectif. J’ai toujours l’intention d’utiliser un combustible produit sur mon exploitation et j’avoue que les exposés sur les granulés de bois m’ont beaucoup intéressé lors du forum d’Archiac. L’année prochaine je vais essayer les granulés de bois car sur la propriété nous avons la possibilité de produire ce combustible. »

D’un point de vue économique, le coût de la distillation au charbon se situe autour 17 à 20 €/hl d’AP avec certes un peu plus de travail autour de la chaudière. Il faut remplir la trémie et enlever régulièrement les cendres et le mâchefer. Le petit automatisme de régulation de l’arrivée d’air au niveau du foyer est un accessoire particulièrement utile pour moduler les allures de chauffe. D. Massé souhaite continuer de travailler la piste d’une énergie de distillation propre et produite sur l’exploitation.

L’utilisation des granulés de bois ou de fragments de bois déchiquetés fait partie de ses projets pour la prochaine campagne mais en s’entourant de compétences et en recherchant des appuis techniques pour maîtriser les problèmes de combustion et la qualité des eaux-de-vie. Il est fort probable que la distillerie de D. Massé devienne un site d’essais pilote dans le courant de l’hiver prochain.

 

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