Cycle végétatif 2010 : un beau potentiel à confirmer

22 juillet 2010

Le cycle végétatif 2010 va-t-il se dérouler dans un contexte plus facile que celui des trois dernières années ? Un débourrement un peu tardif mais très homogène, une sortie de grappes bien au-dessus de la moyenne, des phases de croissance séquencées, un parasitisme discret en début de saison, bref une série d’éléments laissant à penser que ce millésime pourrait être généreux et plus facile à conduire. A la fin mai-début juin, les viticulteurs étaient assez confiants et optimistes car le cycle végétatif « démarrait » bien. La fraîcheur et les pluies de la mi-juin vont-elles perturber ce contexte ? La floraison s’est déroulée dans des conditions fraîches et humides, et le mildiou a fait une arrivée remarquée dans un certain nombre de parcelles à partir des 27-28 juin. D’ici la mi-juillet, on aura une idée plus juste sur la tenue des baies et des conséquences d’une pression de mildiou en hausse. L’état d’avancement du cycle végétatif marqué par une alternance de phase de « chaleur et croissance et de fraîcheur et latence » est aussi un sujet de préoccupation vis-à-vis de l’hétérogénéité des stades végétatifs.

Les années 2007 et 2008 avaient été marquées par des pressions de mildiou exceptionnelles et un potentiel de production difficile à « conserver » tout au long de la saison. En 2009, la sortie de grappes moyenne et des incidents météorologiques majeurs (un orage de grêle d’une ampleur exceptionnelle début mai) avaient mis « les nerfs à vif » de nombreux viticulteurs de la région. Les vinifications 2009 ont été délicates à conduire compte tenu des fortes chaleurs de l’automne et une brutale chute du thermomètre à la mi-octobre a détruit de nombreux bourgeons dans les jeunes plantations et les vignes adultes. Après le contexte difficile de ces trois années, le début de cycle végétatif 2010 semble jusqu’à présent beaucoup plus serein.

Un débourrement un peu tardif mais homogène et rapide

Après un hiver rigoureux marqué par un nombre de jours de gelée nettement supérieur à la moyenne, les cépages précoces comme le Chardonnay et le Colombard ont commencé à débourrer dans les situations précoces début avril. Les bourgeons d’Ugni blancs plus tardifs ont profité d’un climat chaud à partir de la mi-avril pour éclore. La Station Viticole du BNIC, qui suit depuis trente ans la phénologie d’un réseau de parcelles, a observé l’éclosion des premiers bourgeons d’Ugni blanc en situation précoce le 6 avril. La date moyenne d’éclosion des premiers bourgeons d’Ugni blanc sur ce réseau au cours des 10 dernières années est le 3 avril. Le climat clément à partir du milieu de ce mois a littéralement « boosté » le débourrement et au 20 avril beaucoup de bourgeons d’Ugni blanc avaient atteint le stade pointe verte. Le Colombard, le Chardonnay et le Merlot ont aussi profité de cette belle période, et à cette même date leurs bourgeons étaient en moyenne au stade 1 à 2 feuilles étalées. La dernière décade d’avril douce, ensoleillée et peu pluvieuse a accéléré la pousse qui s’est faite de manière homogène sur le plan des stades.

Le taux de débourrement a été globalement bien supérieur à la moyenne dans tous les cépages sauf dans les parcelles (adultes et plantations) ayant subi des dégâts de gel en octobre dernier. Le décalage naturel de la pousse entre les situations de sols dites précoces et tardives était cette année beaucoup plus réduit. Le démarrage du cycle végétatif s’est donc déroulé dans d’excellentes conditions.

Une charge d’inflorescences bien supérieure à ces deux dernières années à la fin mai

Fin avril et tout début mai, des températures assez exceptionnelles pour la saison ont accéléré la pousse (7 cm d’allongement au cours de la semaine), ce qui a permis de rattraper le retard. Au 4 mai, les Ugni blancs avaient atteint en moyenne le stade 2 à 3 feuilles étalées et les rameaux les plus avancés portaient déjà 6 à 7 feuilles. Le Chardonnay et le Colombard se sont aussi développés rapidement et le stade grappes visibles était atteint à cette époque. Le débourrement des Merlot, du Sauvignon et des Cabernet s’est aussi déroulé dans de très bonnes conditions, et l’ensemble des cépages précoces portaient une charge d’inflorescences supérieure à celle des trois millésimes précédents. Seul les Chardonnay portaient une charge normale de grappes. Par la suite, un net refroidissement du climat jusqu’au 18 mai a ralenti la croissance des rameaux mais, sur les Ugni blancs et les autres cépages, la sortie de grappes s’annonçait toujours aussi généreuse. Seules, les parcelles situées dans les zones basses affectées par le gel d’automne précoce des 16, 18 et 19 octobre 2009 et par le gel de printemps de la nuit du 13 au 14 mai ont vu leur potentiel de récolte s’étioler. A la mi-mai, l’importance de la sortie de grappes dans les parcelles a « donné le moral » à la plupart des viticulteurs. Le nombre d’inflorescences était supérieur de 15 à 20 % aux deux dernières années et dans les Ugni blancs, leur taille importante avec des tailles bien charpentées étaient de bon augure. Le potentiel de production en 2010 à la fin mai semblait important.

Une gelée de printemps le 14 mai dans les zones traditionnellement sensibles

Les dégâts du gel de printemps ont concerné prioritairement les zones basses de la région délimitée avec un gradient plus fort dans les secteurs éloignés du littoral. La chute du thermomètre entre 0 et – 2 °C explique le caractère très dispersé des dégâts. Les effets de topographie des parcelles, de hauteur d’établissement des souches ont souvent amplifié les dégâts ou sauvé les pousses. Les bas de parcelles, les petites cuvettes, les vignes très basses ont été les plus touchés. Entre une latte située à 0,40 cm du sol et un bras de cordon haut à 1,50 m, le niveau de dégât a été très différent. D’une façon générale, ce sinistre n’aura pas d’incidence sur le niveau de production de la région délimitée mais, localement, certaines exploitations ont vu leur vignoble touché à 30 %. Comme le stade végétatif des pousses « grillées » par le gel était assez avancé, l’espoir de voir ressortir des contre-bourgeons porteurs d’inflorescences était très limité. Dans le secteur du Pays bas, plusieurs techniciens estiment qu’en moyenne le gel de printemps a concerné à peine 8 à 10 % des surfaces. Par contre, dans de nombreuses parcelles le débourrement avant ce sinistre n’était pas bon. Il semble que les dégâts liés au gel précoce de l’automne dernier aient été plus lourd de conséquences dans beaucoup de plantations en première et deuxième feuilles et dans de nombreuses parcelles adultes situées dans la région délimitée. La présence d’une proportion significative de bourgeons « sourds » (de l’ordre de 40 à 70 % sur le total) sur les bois de taille a réduit le potentiel de production.

Mortalité importante de jeunes plants et mauvais débourrement dans les zones basses

Dans le courant des mois de février et mars, beaucoup de viticulteurs se sont inquiétés lorsqu’ils ont taillé des jeunes plantations de première et deuxième feuilles. Bon nombre de bois de sarments présentant un bel aspect se sont révélés complètement secs sur toute leur longueur et ces plants de première et de deuxième feuilles avaient aucune chance de se développer. Les jeunes parcelles les plus vigoureuses situées dans des zones basses de l’ensemble de la région délimitée (le Pays bas, la vallée du Né…) ont été durement touchées. Il arrivait que plus de 50 à 80 % des plants devaient être remplacés. Lionel Dumas Lattaque, le technicien viticole de la Chambre d’agriculture de la Charente-Maritime, a été alerté par beaucoup de viticulteurs et de pépiniéristes qui s’interrogeaient sur les causes de cette mortalité importante de jeunes plants. Les observations étaient assez troublantes puisque les plus gros dégâts concernaient généralement des plantations vigoureuses qui avaient toutes subi les 16, 18 et 19 octobre dernier une défoliation précoce en raison d’un brutal –5 à –6 °C. Des plantations plus chétives ont été souvent beaucoup moins touchées par les effets du gel, ce qui pouvait paraître assez paradoxal. Dans les vignes adultes toujours situées dans des secteurs bas, le débourrement s’est parfois mal passé. Parfois de 40 à 70 % des bourgeons ne sont pas sortis et un nombre important de bourgeons secondaires (peu fertiles) ont poussé sur les têtes de souches. Après la gelée de printemps du 14 mai, plusieurs viticulteurs dans le secteur du Pays bas ne cachaient pas que les dégâts liés aux effets cumulés du gel de printemps, d’automne et peut-être aussi aux fortes gelées de l’hiver auraient un impact significatif sur le niveau de production de 2010. L. Dumas Lattaque explique que l’hiver 2009-2010 a été particulièrement froid : « Entre début novembre et la fin mars, on a enregistré dans la région plus de 40 jours de gel, ce qui atteste de la rigueur de l’hiver. Par ailleurs, durant les mois de décembre, janvier et mars, il y a eu pendant 5 à 6 jours des niveaux de température très bas (en dessous – 8 à – 10 °C) qui ont pu détruire des bourgeons. Le phénomène est plus marqué dans les parcelles qui en 2009 avaient porté une belle récolte et n’avaient pas fini leur phase de mise en réserve au moment du gel d’automne. Le cumul des effets du gel d’automne et du gel d’hiver a été en mesure de pénaliser le débourrement et le potentiel de récolte 2010. »

Une insuffisance de réserve en sucres assimilables qui a amplifié l’effet du gel d’automne

La fréquence des dégâts sur les jeunes plantations a amené les techniciens de la région à explorer les causes de ce problème. Vincent Dumot, à la Station Viticole du BNIC, a fait une analyse fine des conditions climatiques du mois d’octobre 2009 : « La première décade d’octobre 2009 a été particulièrement chaude et agréable. Les températures moyennes jusqu’au 6 octobre se situaient autour de 20 °C, ce qui était bien supérieur aux valeurs normalement observées à cette époque de l’année. La période de beau temps s’est maintenue jusqu’à la mi-octobre et beaucoup de plantations et de parcelles adultes étaient encore dans une phase d’activité végétative intense. Le 12 octobre, les températures minimum à Cognac étaient supérieures à 12 °C et 4 jours plus tard, les minimales sont descendues à – 5 / – 6 °C. Les 18 et 19 octobre, deux autres gelées un peu moins fortes ont fini de détruire la végétation des parcelles situées dans les zones basses. Une chute des températures aussi importante dans un délai très court a malmené certains tissus végétaux qui présentaient une sensibilité naturelle accrue aux basses températures. Les effets les plus spectaculaires ont été observés dans les plantations en première et deuxième feuilles, toujours situées dans des zones basses. Parfois 80 % des jeunes plants avaient un bois de greffons complètement sec et dans certaines vignes adultes, le taux de débourrement ne dépassait pas 50 %. Alors, que s’est-il passé ? Pourquoi les tissus végétaux des belles plantations ont été plus affectés que celles dont le développement était plus chétif ? Dans les phénomènes de gel d’automne, l’état physiologique de la vigne s’avère plus déterminant que l’effet direct des basses températures. A partir de la mi-août, le processus de mise en réserve s’enclenche et se poursuit jusqu’à la mi-novembre, c’est-à-dire quand le feuillage des ceps arrive en fin de vie. Les dégâts au niveau des tissus des bois ont été beaucoup plus forts dans les parcelles en pleine activité. Le fait d’avoir des plantations (souvent réalisées tardivement) et des vignes adultes présentant une forte vigueur et encore en phase poussante (bien verte avec des entre-coeurs nombreux) accentuent les risques de sensibilité au gel d’automne précoce. En effet, le processus de mise en réserve se scinde en deux phases distinctes. Une première à partir de la mi-août (à la véraison) où les souches commencent à stocker prioritairement de l’amidon et une seconde (un peu décalée dans le temps) où ce composé est lui-même transformé en sucres solubles conférant aux tissus végétaux leur capacité de résistance aux basses températures. Si leur teneur s’avère insuffisante, l’incidence d’un gel d’automne précoce devient beaucoup plus importante. Un certain nombre de plantations très vigoureuses en fin de saison et réalisées tardivement au printemps n’avaient sûrement pas encore accompli complètement leur deuxième phase de mise en réserve de sucres solubles, d’où l’importance des dégâts. »

Une floraison des ugni blancs étalée et perturbée par la semaine froide et pluvieuse du 13 au 20 juin.

Durant la semaine du 18 au 26 mai, le climat chaud et sec a été propice à une croissance active de la vigne, mais l’arrivée d’une fleur_de_vigne.jpgpériode plus fraîche (et sans pluie) a ensuite ralenti le cycle végétatif. Les premières fleurs des cépages précoces, le Chardonnay et ensuite le Colombard, sont apparues tout début juin et la pleine floraison a été atteinte vers les 6-8 juin. Les Ugni blancs avaient début juin un niveau de pousse peu important et sur le plan de la phénologie, un retard d’une semaine était observé. Le retour d’une nouvelle séquence chaude à partir du
6 juin a relancé la croissance végétative jusqu’au 10. Les premières fleurs d’Ugni blanc en situations précoces ont été repérées vers le 6 juin. Malheureusement, la première phase de la floraison s’est déroulée durant la semaine pluvieuse et particulièrement fraîche (5 à 6 °C certaines matinées) du 13 au 20 juin. Le retour d’une climatologie plus clémente à partir des 21 et 22 juin a permis de finir la floraison dans de meilleures conditions. Le beau temps chaud et orageux (avec de nouvelles pluies le 28 localement abondantes) s’est poursuivi jusqu’à la fin du mois. La floraison s’est étalée durant pratiquement deux semaines avec souvent un net décalage de stade des grappes sur les ceps. Certaines inflorescences en pleine fleur le 25 juin côtoyaient des grappes fécondées au stade grain de plomb. Il est indéniable que la floraison des Ugni blancs ne s’est pas déroulée dans des conditions idéales et certains observateurs craignent un fort millerandage. L’incidence cumulée du froid et des basses températures a gêné le dégagement des capuchons floraux et le processus de pollinisation. Les parcelles très précoces et très tardives sont celles qui ont le moins souffert. Par contre, pour celles qui étaient en pleine floraison autour du 15 juin, la situation est plus préoccupante. Le début de la nouaison a permis d’observer des différences de taille de baies notables sur les grappes qui sont souvent les prémices à un phénomène de tri important. L’état physiologique des parcelles aura aussi une incidence sur la tenue des baies. L’humidité et la fraîcheur ambiante de la mi-juin ont parfois provoqué un jaunissement rapide des vignes dans les situations sensibles à la chlorose. Ces jaunissements de la surface foliaire s’apparentent plus à une insuffisance d’alimentation qu’à une véritable chlorose. Plusieurs techniciens observent également des différences de tenue des grappes importantes entre les vignes exprimant une vigueur normale et les parcelles plus chétives. Il faut atteindre la mi-juillet pour bien apprécier les effets de tri des baies sur le potentiel de production régional. On peut tout de même penser que l’étalement de la floraison aura des conséquences sur la date de vendanges (probablement plus tardive qu’en 2009) et sur l’état physiologique des grappes qui risque d’être hétérogène. Le nombre de grappes important et bien supérieur à celui des dernières années est un élément susceptible de limiter l’incidence des mauvaises conditions de floraison.

Un peu de coulure sur le merlot mais heureusement, le potentiel de grappes est là

Les cépages précoces comme le Chardonnay et le Colombard avaient fini leur floraison avant les « fraîcheurs » de la mi-juin. A cette période, ils avaient atteint le stade début nouaison. Leur potentiel de production semble avoir échappé à la coulure. Les Sauvignon était par contre en pleine fleur au moment où la mauvaise période climatique s’est installée. Une certaine inquiétude sur le potentiel de production du Sauvignon existe mais la charge de grappes était importante au départ. Dans le vignoble du Blayais, M. Jérôme Ossard, le technicien de la cave des Hauts de Gironde à Marcillac, a aussi observé un peu de coulure sur les Sauvignon mais, au final, il estime que les parcelles atteindront quand même le niveau de rendement régional. En Charente et en Charente-Maritime, les effets de la coulure sur le Sauvignon sont un peu perceptibles mais les niveaux de productions seront dans l’ensemble corrects. L. Dumas Lattaque, le technicien de la Chambre d’agriculture de Charente-Maritime, observe tous les ans que le Sauvignon fleurit une semaine après le Colombard et se récolte 15 jours plus tôt. Il explique ce phénomène par le fait que le Colombard a un cycle de végétatif plus court dans l’intervalle débourrement/floraison et ensuite la deuxième phase de développement jusqu’à la récolte est beaucoup plus longue. La somme de températures nécessaire à la croissance et à la maturation des grappes de Sauvignon est inférieure à celle du Colombard, d’où la précocité de ce cépage et une avance à la récolte d’environ 15 jours. Les mauvaises conditions de floraison sont beaucoup plus inquiétantes sur le Merlot qui est naturellement sensible à la coulure. Les parcelles précoces et tardives qui n’étaient pas en fleur dans la mauvaise semaine du 13 au 20 juin ont effectivement échappé à la coulure. Dans les situations qui étaient en pleine fleur à cette période, un phénomène de tri plus ou moins important semble se produire. Les effets âge des parcelles, clones, sol et état physiologique ont fortement influencé la tenue des baies. Dans le vignoble charentais, la coulure sur les Merlot a réduit le potentiel de production mais, comme le potentiel de grappes était au départ important, l’espoir d’avoir une récolte correcte demeure. J. Ossard, de la cave des Hauts de Gironde, estime que, d’une façon générale, la coulure aura effectivement réduit les niveaux de rendements mais avec de grandes disparité selon les parcelles et les natures de sols. Les niveaux de rendement dans le nord Blayais devraient être corrects et il ne sera pas nécessaire de pratiquer de vendanges en vert pour aérer les grappes. Dans d’autres secteurs de gironde, il semble que les phénomènes de coulure soient importants. Les Cabernet franc et Sauvignon ont fleuri un peu plus tardivement et apparemment la coulure les a moins affectés.

Une situation parasitaire calme en début de saison mais fin juin le mildiou est apparu

Le début du cycle végétatif 2010 a aussi été marqué par un parasitisme très discret. Le climat sec d’avril et de mai a considérablement gêné le développement des épidémies précoces de mildiou. Les œufs d’hiver ont eu du mal à germer et ensuite il a fallu attendre les 15-20 mai pour trouver les premières tâches primaires. La rareté des premiers symptômes atteste de la faible pression du champignon le plus redouté dans notre région. Les viticulteurs ont commencé leur protection contre le mildiou plus tardivement sans prendre de risque. Le danger de la première partie du cycle végétatif a plutôt été l’oïdium dont la modélisation annonçait un niveau de risque fort et précoce. La plupart des techniciens ont conseillé d’appliquer une protection sans faille en encadrant le cycle du stade boutons floraux séparés jusqu’à la fermeture de la grappe. La découverte de rares symptômes dans les témoins non traités n’a pas confirmé l’importance du risque oïdium à la fin juin. Néanmoins, l’identification des dégâts sur feuilles en juin reste délicate sur un cépage comme l’Ugni blanc. Les risques de confusion avec d’autres affections sont nombreux alors que, fin juillet, les dégâts au niveau des baies sont très caractéristiques. En ce début juillet, les messages techniques continuent de préconiser une protection contre l’oïdium sans faille jusqu’au stade fermeture de la grappe, qui sera cette année plus difficile à apprécier compte tenu de l’étalement de la floraison. A la faveur des pluies de tout début juin, du milieu de ce mois, le risque mildiou est nettement remonté. Des attaques foliaires sont apparues à partir du 28 juin dans les parcelles qui étaient mal couvertes dans la semaine du 15 au 20 juin et les orages locaux des 28 et 29 ont favorisé les repiquages. Dans les témoins non traités, quelques symptômes de rot gris en fin de floraison sont apparus. Les modèles indiquent une nette remontée du risque mildiou dont les conséquences seront liées à la pression existante dans les parcelles et au climat jusqu’à la fin juillet. Dans les parcelles totalement indemnes de symptômes, la protection sera beaucoup plus facile à aborder dans les semaines à venir. Par contre, dans les situations où une pression de tâches foliaires significative existe déjà, il conviendra de rester très vigilant pour éviter les attaques de rot brun sur les baies jusqu’à la fin juillet. Le climat des trois prochaines semaines de juillet sera déterminant vis-à-vis de l’agressivité du mildiou en fin de saison.

Le point sur les mécanismes de mise en réserve
La situation de certaines plantations dans un versant de coteau a malheureusement illustré parfaitement ces propos. Dans la fraction basse de ces parcelles où le gel d’octobre a détruit toute la végétation, le taux de mortalité des plants est bien supérieur à celui du haut où les jeunes ceps ont conservé leurs feuilles jusqu’à la mi-novembre. Un certain nombre de données scientifiques confirment le rôle déterminant de la phase de mise en réserve dans le comportement des cycles végétatifs des jeunes plantations et des vignes adultes. V. Dumot nous a fait part des éléments qu’il a recueillis sur ce sujet et des conclusions qui s’en dégagent : « Dans le processus de la photosynthèse, la production de sucres assimilables au cours du cycle végétatif se répartit en trois affectations, au niveau des jeunes pousses, au niveau des grappes et pour la mise en réserve (dans les sarments, le tronc et les racines). Si une vigueur excessive se poursuit tard en saison, jusqu’à la fin octobre, un phénomène de concurrence alimentaire des sucres se produit entre la demande des jeunes rameaux et les besoins nécessaires à la constitution de réserves. Dans les vignes adultes portant une charge de grappes abondante, le même phénomène de concurrence se produit entre la demande des raisins et celle nécessaire à la constitution des réserves. Le « stock » de réserve en amidon et en sucres assimilables au niveau des sarments, des troncs et des racines durant chaque automne joue un rôle important vis-à-vis de la résistance au gel des bourgeons et du comportement de la vigne en année N + 1. La qualité du débourrement, le bon déroulement de la première phase du cycle (jusqu’au moment où les feuilles adultes acquièrent une activité photosynthétique positive), la fertilité des bourgeons et la capacité des souches à transporter le fer. Ces réflexions, qui peuvent paraître théoriques, ont déjà été confirmées au vignoble certaines années. En 1992, l’année suivant le gel de printemps historique, les vignes portaient une charge de raisins très importante (un rendement régional supérieur à 160 hl/ha) et le cycle végétatif était tardif (pousse tardive d’entre-cœurs en octobre). La présence de mildiou mosaïque en fin de saison avait aussi altéré la fonctionnalité du feuillage et au final, le phénomène de mise en réserve ne s’est pas effectué de manière complète. Résultat, au printemps 1993, le débourrement a été très mauvais et un nombre important de parcelles avait exprimé des symptômes de chlorose d’une rare intensité. Notre mission de technicien est d’aider les viticulteurs à mieux appréhender ces problèmes de mise en réserve mais, dans ce domaine, aucune solution curative ne peut être envisagée. Il faut essayer de faire preuve de bon sens pour ne pas favoriser l’allongement des cycles végétatifs. Au niveau des plantations, les apports de fumure azotée, les mises en terre tardives représentent des facteurs de risques supplémentaires. Dans les vignes adultes, les excès de vigueur, les trop fortes productions en 4e et 5e années sont des éléments qui pénalisent les métabolismes des mises en réserve en fin de saison. Dans des parcelles trop vigoureuses, introduire de l’enherbement de façon raisonnée et raisonnable par rapport à la nature du sol peut être une solution. D’une façon générale, il faut essayer de piloter les itinéraires culturaux des parcelles avec sagesse et sens de la pérennité pour concilier la production de raisins et la longévité des souches. La physiologie de la vigne obéit à des principes qui reposent sur la recherche d’équilibres alimentaires dont la définition s’appréhende en tenant compte du contexte sol/climat de chaque parcellaire. »

 

 

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