« Un groupe soudé »

27 juin 2009

La Rédaction

Entre Hiersac et Châteauneuf, la coopérative vouée aux vins de pays charentais garde le cap, avec l’état d’esprit qui fut le sien dès le début. Pour continuer à investir, les adhérents consentent des efforts financiers. En gardant la dynamique d’un groupe soudé, avec la satisfaction « de faire quelque chose qui sort de l’ordinaire. » Interview de Jacques Mounier, président de la structure.

 

« Le Paysan Vigneron » – Comment s’est passée la dernière récolte ?

cotx_ang_opt.jpegJacques Mounier – Des volumes bien plus faibles que d’habitude, surtout en rouge – moitié moindre sur les Merlot, autour de 30 hl/ha – se sont forcément répercutés sur la trésorerie de ce début d’année. J’espère que le manque à gagner sera compensé par de meilleures ventes. Les vins blancs s’avèrent de très bonne facture et, en volume, ils ont un peu moins pâti de la petite récolte. Les rouges, qui suscitaient quelques doutes au départ, expriment au final une qualité très satisfaisante.

« L.P.V. » – De quelle manière se comportent les ventes ?

J.M. – Les ventes au magasin continuent de progresser. Ces ventes assurent à peu près 20 % de l’écoulement des produits finis de la cave. Il s’agit d’un très bon score, sachant que le chiffre moyen de structures comme les nôtres est souvent plus proche de 10 %. Le magasin n’a pas changé de place. Il se situe toujours à l’ancienne perception de Hiersac et il est toujours ouvert le samedi toute la journée et le dimanche matin. De même ce sont toujours les adhérents qui le tiennent par roulement. Si l’on constate une légère progression des produits bouteilles, la plus grosse augmentation provient des BIB (Bag in Box). La remplisseuse acquise il y a trois ans fonctionne à plein régime.

« L.P.V. » – Et en ce qui concerne les ventes hors magasin ?

J.M. – Nous sommes bien implantés sur les CHR – cafés, hôtels, restaurants – mais nous aimerions nous orienter davantage vers la petite et moyenne distribution. Ce débouché nous semble offrir de meilleures perspectives que les CHR. Déjà, dans le périmètre proche, nous avons des magasins qui marchent très bien. Ce type de commerce de proximité colle à notre identité. Les gens sont contents de trouver les vins qu’ils connaissent à portée de chez eux. Par ailleurs en terme de logistique, le petit et moyen commerce offre un approvisionnement régulier – tous les 15 jours-trois semaines – et une facilité de livraison. Les commandes des CHR se font au jour le jour et réclament un service rapide. Qui plus est, cette catégorie de clientèle ne paie pas toujours très bien. Il faut souvent la relancer.

« L.P.V. » – En terme commercial, où en êtes-vous ?

J.M. – Après avoir eu deux commerciaux, un qui travaillait plutôt sur la moyenne distribution et un consultant qui officiait sur la grande distribution, nous n’avons plus qu’un commercial à plein-temps, Patrick Olivier, tandis que le consultant est rémunéré à la commission. P. Olivier, la cinquantaine, connaît bien le milieu des CHR car il travaillait auparavant pour une société importante du secteur. Par ailleurs, une réflexion est en cours pour savoir si nous n’aurions pas intérêt de recourir aux services d’un distributeur type Angoulême Boisson, qui se chargerait des commandes, des expéditions ainsi que des recouvrements. Ne resterait plus dès lors qu’à assurer la production. Des collègues indépendants font déjà appel à ce type de prestataires qui, en fin de compte, se comportent comme des représentants multi-cartes avec, dans leur porte-folio, des Bordeaux, Bourgogne, Vins de pays charentais…

« L.P.V. » – Sur le dernier exercice, quels furent vos résultats ?

J.M. – Sur l’exercice 2007-2008 clos le 31 juillet 2008, la coopérative a dégagé un résultat positif de 19 000 €. Pour une structure comme la nôtre, il s’agit d’un résultat honorable. Le chiffre d’affaire, quant à lui, s’élève à 240 000 €.

« L.P.V. » – Quid de la rémunération des adhérents ?

J.M. – La rémunération servie aux adhérents sert à couvrir les charges courantes de la vigne mais, pour le moment, ne permet pas dégager de supplément. Les adhérents acceptent d’être moins rémunérés pour que la cave équilibre ses comptes et continue d’investir.

« L.P.V. » – A votre avis, sur quoi repose ce « pacte collectif » ?

J.M. – C’est le plaisir de faire ensemble quelque chose qui sorte de l’ordinaire, en l’occurrence pousser le vin jusqu’à la bouteille. Et puis bien sûr, le groupe s’est soudé petit à petit. Aujourd’hui existe entre nous un esprit de camaraderie assez exceptionnel. Qu’il s’agisse de travailler autour du bâtiment, de mettre en bouteille, de tenir le magasin, on ne fait jamais appel en vain au groupe. Il est même fréquent de se retrouver en surnombre. Le chantier du bâtiment représente un bon exemple. Voilà deux campagnes qu’il fonctionne mais nous avons décidé cette année de terminer la façade et de réaliser un quai de déchargement de la vendange, afin que tout le monde puisse venir vider à la cave, sans passer par les bennes élévatrices. Les adhérents vont se mobiliser pour les travaux. En ce qui concerne les vinifications, Eric Montigaud et Isabelle Clochard continuent de s’en occuper. Espérons qu’ils puissent le faire encore longtemps.

« L.P.V. » – Que pensez-vous des menaces pesant sur le complément national aux aides à la restructuration ?

cotx_ang_4_opt.jpegJ.M. – C’est inadmissible. En ce qui nous concerne, notre coopérative n’aurait peut-être jamais vu le jour sans ce complément d’aide. Il a représenté le petit plus, le facteur déclencheur qui fit que nous avons pu lancer les travaux. Au plan des principes, il semble assez irresponsable d’engager des gens à investir – pour notre part 300 000 € – et ensuite leur demander de rembourser une partie des aides.

« L.P.V. » – Regrettez-vous d’avoir fait le choix des vins de pays ?

J.M. – Tout d’abord, il s’agit d’un engagement partiel. En moyenne, nous avons retiré du marché du Cognac 10 % de nos vignes. Ensuite, je ne suis pas partisan de regretter les choix faits dans le passé. Pour juger de leur opportunité, il faut se replacer dans le contexte du moment. A l’époque, les mots d’ordre se succédaient. Souvenez-vous ! Etat comme Chambre d’agriculture nous disaient de planter deux tiers de rouge et un tiers de blanc. Or, aujourd’hui, nous aurions besoin de l’inverse, deux tiers de blanc et un tiers de rouge. Les adhérents de la cave ont exercé d’eux-mêmes une pondération : cépages blanc et rouge font à peu près jeu égal.

« L.P.V. » – Que souhaitez-vous pour le futur ?

J.M. – J’aimerais bien que les jeunes s’investissent un peu plus. En fin de compte, c’est pour eux que nous travaillons. Un certain nombre d’entre nous voient l’horizon arriver. Un bon groupe d’adhérents flirte avec les 55-60 ans, un autre oscille entre 40 et 50 ans et la coopérative compte 3 ou 4 jeunes. Ce que je souhaiterais surtout, c’est que la nouvelle génération reprenne le flambeau pendant que nous sommes encore actifs, afin que nous puissions les soutenir et les aider dans le travail.

La coopérative des Coteaux de l’Angoumois compte 19 adhérents pour une surface en Vin de pays charentais d’une cinquantaine d’ha, un effectif et un potentiel de production stables. La seule modification concerne 97 ares de Gamay, de retour en Ugni blanc. Un regret sans l’être car la coopérative avait un peu de mal à valoriser ces Gamay présents en trop faible quantité. A l’inverse le Pinot noir, autre cépage exogène à la région, représente un peu la « marque de fabrique » de la coopérative, sa touche originale. Le vin commence à trouver sa clientèle. La cave dispose de 3 000 hl vol. de logement, un volume loin d’être suffisant par rapport aux surfaces. Pour contourner la difficulté, la cave effectue une première vinification des moûts à expédier immédiatement et une seconde pour les vins à conserver, après sélection parcellaire effectuée par une commission. Le groupement vient d’équiper son chai d’une régulation de température. Situé à Saint-Simeux, sur la zone artisanale de la commune, le site de vinification et de stockage fonctionne depuis deux campagnes. La coopérative a obtenu une récompense aux dernières Saveurs Poitou-Charentes pour son Excellence 2006, un assemblage Merlot/Cabernet élevé en fût. A côté de ses vins de cépages blanc, rouge (Chardonnay, Sauvignon, Merlot, Cabernet, Pinot noir), ses vins rosés et d’assemblage, la cave commercialise également un « Champagne des enfants », un jus de raisin gazéifié qui se prête très bien aux goûters sucrés.

 

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