Début 2004, la coopérative ACV espérait encore atteindre son rythme de croisière en 2005-2006. Espoir déçu. Les ventes en bouteilles s’avèrent loin de l’objectif de 1,2 million de cols fixé à l’époque, lié à la montée en charge progressive des vignes en production. Avec l’équivalent de 350 000 cols commercialisés l’an dernier (300 000 bouteilles, le reste en Bag in Box), la coopérative écoule sous forme de produits embouteillés 25 à 30 % de ses volumes. Ses intentions de départ, rappelons-le, consistaient à vendre la totalité de la récolte de ses adhérents en produits finis, soit, à terme, 2 millions de cols, correspondant à la production de 350 ha de vigne. Elle ne renonce pas à cette ambition première mais admet que « ça sera un peu plus long que prévu ». La faute en revient entre autres à cette crise du vin qui rend la compétition plus rude, notamment sur des marchés export que la coopérative envisageait volontiers comme son débouché naturel. Mais « mettre le pied à l’export » n’est pas chose aisée, surtout en la période actuelle. Les commerciaux de MMI* (Maison des Maines Internationale, filiale commerciale de l’ACV) en font tous les jours l’expérience. C’est pourtant la mobilisation maximale dans leurs rangs, comme l’a confirmé Jean-Louis Brillet lors de l’AG de la coopérative. « Nous espérons franchir un grand pas en 2006 même si les choses ne vont pas aussi vite que nous le voudrions. » Signe encourageant. Les vins du Domaine du Grolet, appartenant à la famille Hériard-Dubreuil et apportés à l’ACV, vont être distribués par Rémy Amérique, le réseau de Rémy Martin aux Etats-Unis. Une ouverture pour les autres vins de la cave ? En tout cas la propre force de vente de la cave entend bien rencontrer les importateurs et distributeurs des différents pays cibles et profiter des opportunités qui se présenteront. Au niveau des ventes intra-régionales, le président Brillet s’est réjoui de la belle performance enregistrée par la marque « Maison des Maines » : doublement du volume de cols en un an, multiplication du nombre des clients par deux fois et demie, développement de l’image. « La marque représente le fer de lance d’une production de qualité en Charentes. Maison des Maines devient incontournable. »
Ces bons résultats n’ont pourtant pas suffi à éponger tous les volumes, loin s’en faut. C’est pourquoi la coopérative s’est résolue, lors des dernières vendanges, à expédier en vrac des volumes sous forme de jus de raisin, moûts de vinif et vins de table. L’idée ? Sortir du marché les quantités excédentaires pour ne pas s’auto-concurrencer, s’organiser « pour vendre au mieux et au meilleur prix ». Et comme il ne s’agissait pas d’engager les mêmes frais aux deux destinations, bouteilles et vrac, la coopérative a autorisé la vendange mécanique pour les vignes destinées aux débouchés vracs. Selon les chiffres cités par Jean-Louis Brillet au cours de la réunion, la vendange manuelle a concerné 94 ha (80 ha de vignes rouges et 14 ha de vignes blanches) et la vendange mécanique 230 ha (182 ha de vignes rouges et 48 ha de vignes blanches).
Si, pour les vendanges manuelles, la coopérative espère tenir le prix d’objectif de 80 € par hl vol., pour les vendanges mécaniques, la structure dit devoir tenir compte du prix de marché vrac et des résultats pour calculer la rémunération 2005 de ses adhérents. « Le prix de marché vrac s’est dégradé de 30 à 40 % d’avril 2004 à avril 2005. » L’idée de péréquation entre rémunérations vendanges manuelles et vendanges mécaniques, un temps évoquée, a été abandonnée. Elle s’avérait difficilement tenable. Et puis, dit-on à la Cave, « des viticulteurs s’avouent intéressés par des vendanges mécaniques et des rendements un peu plus élevés que ceux des vins de pays ». Si, comme espéré, la marque se développe assez pour renouer avec le pacte de départ – écouler tous les volumes en bouteilles – le retour vers une production de haute qualité ne risque-t-il pas d’être problématique ? S’exprimant sous le contrôle de l’œnologue chargé de ces questions, le directeur de la cave Jean-Manuel Geral estime qu’un vignoble bien implanté au départ n’aura pas de mal à accomplir sa mutation qualitative sur une année culturale. « Nous allons continuer à suivre nos adhérents vendangeant à la machine. Ils pratiqueront toujours une taille de qualité et un éclaircissage léger. Seule différence avec les autres : ils ne feront pas tomber de grappes. Car, même la vente en vins de table exige une qualité minimale. C’est vrai que les acheteurs ont tendance à profiter de la conjoncture actuelle pour demander “le beurre et l’argent du beurre “. Mais c’est la loi de marché. J’ai souvent l’impression que les gens pensent que la Maison des Maines se trouve dans une situation particulière. Ce n’est pas vrai du tout. Nous sommes dans le monde du vin et, à ce titre, nous partageons la même problématique que les autres opérateurs vin. »
Sur l’exercice 2004-2005, le prix d’objectif avait été fixé à 80 € par hl vol. sur l’ensemble de la récolte alors que la cave avait déjà été contrainte de se porter sur le marché du vrac. D’où une perte de 400 000 € qui a été contrebalancée par un abandon de créance de la somme équivalente par la filiale MMI au bénéfice de la maison mère ACV. Le remboursement est renvoyé à une clause de « retour à meilleure fortune ». Quelles sommes vont toucher les adhérents sur cette même récolte 2004 ? Réponse de J.-M. Geral : « Nous avons essayé de tenir le plus longtemps possible le prix d’objectif de 80 € par hl vol. mais nous sommes obligés de revenir dessus, compte tenu de la situation du marché des vins, de nos débouchés et du chiffre d’affaires réalisé (2,269 millions d’€). » Des acomptes vont remonter au capital, pour le conforter. A noter qu’au départ, l’ACV a été constituée avec de très faibles apports en capitaux. Dans beaucoup de coopératives, le premier acompte versé constitue la totalité du prix. Quelle position prendra l’ACV pour la récolte 2004 ? La coopérative y réfléchissait début avril.
Opiniâtre, Jean-Louis Brillet n’en démord pas : « Ce projet ne peut que marcher, la Maison des Maines fait son chemin. Simplement, il faut lui laisser un peu de temps. » « L’idée de base, ajoute-t-il, consistait à installer durablement un produit qui puisse faire jeu égal avec le Cognac en terme de rémunération. Car tout le monde sait que le Cognac connaît des cycles. Ainsi sommes-nous en train de préparer la prochaine crise, en souhaitant qu’elle soit la plus lointaine possible.”
* MMI est détenue à 50/50 par l’ACV et par Grande-Champagne Patrimoine, entité créée entre les vignobles Rémy Martin et des deux coopératives Champaco et Prochacoop, qui se retrouvent aujourd’hui dans Alliance Fine Champagne.
Les œufs d’hiver de mildiou
sont mûrs depuis le 6 avril
Les pluies abondantes du mois de mars et de début avril ont permis aux œufs d’hiver de mildiou d’atteindre leur maturité (en moins de 24 heures en chambre humide) dès le 6 avril dernier. Cela signifie que dès l’éclosion des premiers bourgeons, la vigne pourrait être réceptive à la maladie si les conditions climatiques s’y prêtent. Les indications des modèles seront donc déterminantes pour détecter les premières contaminations et ensuite commencer à raisonner la protection. Comme le débourrement est nettement plus tardif qu’en 2005, les risques de contaminations sur les Ugni blanc et la plupart des cépages hormis le Chardonnay (et quelques plantations situées sur des terroirs précoces) étaient inexistants à la mi-avril. La climatologie de la deuxième quinzaine d’avril et de début mai devra être observée avec attention.