Comment faire rêver avec du Cognac bio

8 mars 2009

cyril_camus.jpgExplication de texte de Cyril Camus, P-DG de la maison Camus qui, très gentiment, s’est pliée au jeu des bio et leur a livré quelques-unes de ses recettes.

 

« Dans un monde où le respect de la nature et les notions de développement durable prennent de plus en plus de signification, vous êtes à la pointe et très utiles pour le Cognac en général. » C’est par ces propos que Cyril Camus a démarré son intervention. A la demande de l’association Vitibio, sa contribution visait à transmettre un peu de cette culture commerciale qui fait défaut à la plupart des bio (et pas seulement à eux). « Je ne prétends pas tout savoir » a prévenu le jeune P-DG qui a souligné l’importance du bon sens en la matière. « Les techniques marketing sont souvent là pour nous permettre de vérifier que l’on ne se trompe pas trop. » Prenant l’exemple de la création d’une marque – ou d’un identifiant collectif pour les vignerons bio des Charentes – Cyril Camus en a décliné les différentes étapes. Mais avant cela, il a présenté sa maison. Avec 250 000 caisses commercialisées annuellement, il s’agit de la cinquième maison de Cognac, « douze à treize fois plus petite qu’Hennessy, quatre fois plus petite que la quatrième maison Courvoisier et sensiblement plus importante que la sixième. « Nous sommes, a-t-il dit, un peu à la frontière entre les grandes maisons et les moins grandes. Finalement, cette position de challenger nous plaît bien. » Heureux de rappeler que sa famille était présente dans le monde du Cognac depuis cinq générations, il n’a pas oublié de signaler que Camus était la plus grande des maisons de Cognac indépendante, une caractéristique qui confère une certaine liberté. « Nous pouvons prendre un certain nombre de risques même si les chiffres ne sont pas bons en fin de mois. » Spécialisé dans le haut de gamme pour le Cognac (50 % des ventes réalisées en VSOP, 40 % en XO, le reste en VS), avec du Brandy commercialisé en contre-marque et un peu de Pineau, Camus représente, au dire de son P-DG, un « type de maison » à côté du type Hennessy ou du type Rémy Martin. « Le haut de gamme n’a pas vraiment le vent en poupe mais ça reviendra. »

Définir sa cible

Entrant dans le vif du sujet, Cyril Camus a émis une idée simple. Quand on crée un produit – une marque ou une catégorie de produit – il faut savoir à qui on veut le vendre, à quel prix et ce que l’on veut en faire. Veut-on recruter de nouveaux consommateurs, construire de l’image ou gagner de l’argent ? Parfois, il est possible de remplir deux cases – recruter de nouveaux consommateurs et gagner de l’argent par exemple – mais décrocher les trois objectifs est bien plus rare. « En lançant une marque distributeur en Angleterre, nous savons bien que nous ne recruterons pas de nouveaux consommateurs et que nous ne ferons pas d’image non plus. Par contre elle nous rapportera de l’argent, ce qui nous permettra d’investir derrière Camus. A l’inverse, notre XO “Extraordinaire” va nous aider à construire une image, en espérant bien que le produit, par son positionnement prix, sera également source de profitabilité. » « Par contre, poursuit-il, une image ne se bâtit pas n’importe où. Pour décrocher la perception que l’on souhaite, le marché doit y être suffisamment préparé. Dans un pays où Camus serait perçu comme “le roi du VS”, il serait parfaitement illusoire d’arriver avec un Extra. Le label ne serait pas identifié. « Le recrutement de consommateurs s’avère quelque chose de compliqué, poursuit C. Camus. Il n’y a qu’à voir les efforts prodigués par le BN au niveau français. En ce qui nous concerne, nous pensons qu’un produit comme notre Borderies XO est de nature à pouvoir chasser sur les terres du Scotch Whisky. »

Une fois identifié ce dont on a besoin en terme de produit, il ne reste plus qu’à essayer de le faire rentrer dans le cadre assez formel des 5 P, méthode américaine qui s’appuie sur le bon sens. Le premier P est pour “People”. On se pose la question évidente de savoir qui achète le produit. Vient ensuite le terme “Product”. Il recouvre les attributs du produit, ses caractéristiques, son goût, sa classification (VS, VSOP…). Tandis que “Price” traite du positionnement prix, la liste se poursuit par “Promotion” pour se conclure par “Place”, le lieu de vente. De manière quasi naturelle, la maison Camus expérimente au quotidien cette technique. « Notre société a la culture de l’innovation explique Cyril Camus. Pour nous, l’année 2003 fut une année un peu lente. Elle ne s’est traduite que par la sortie de 19 nouveaux produits. » Et de rappeler la sucess story de Joséphine, la bouteille de Cognac spécialement conçue pour les jeunes Japonaises de 25-30 ans, en quête de cadeaux dans les halls d’aéroports. Lancée en 1995, il s’en est vendu 1 million de cols la première année. Identifier sa cible, c’est aussi se demander à qui l’on veut vendre du Cognac : aux gens qui consomment déjà du Camus (ou du Cognac bio), aux consommateurs de Cognac en général, aux consommateurs d’alcool ? « Notre univers se réduit un peu à ces trois catégories, résume C. Camus. La stratégie qui consiste à prendre des parts de marché aux autres alcools représente souvent la meilleure approche, à condition de l’accompagner du message suivant : “venez goûter le Cognac et essayer plutôt Camus (ou le Cognac bio) !” » « L’utilisation de cette technique, précise Cyril camus, a très vite amené la profession à identifier une cible, celle de l’homme de 35-50 ans, appartenant à la catégorie socioprofessionnelle ”+”, consommateur de Single malt. Il s’agit de notre première cible, repérée depuis bien longtemps. »

« Plus cognac que les autres cognacs »

A trop vouloir s’inspirer du monde du parfum, le jeune P-DG de Camus estime que le Cognac a un peu perdu de ses racines. Ainsi souhaite-t-il que le Cognac de sa maison soit perçu « plus Cognac que les autres Cognacs ». La société a sorti il y a environ six mois un Ile de Ré XO s’adressant à un consommateur très conservateur, plutôt asiatique, qui reçoit chez lui et est prêt à débourser 200 € pour un Cognac. Cyril Camus parle de la difficulté de créer un nouveau besoin. Pour savoir si le produit répond bien à une attente, il livre un nouveau moyen mnémotechnique, qui se décline cette fois sous le sigle APB pour Attributs, Preuves et Bénéfices. Sans surprise, les attributs ont à voir avec la qualité, le goût. La preuve, c’est quand le consommateur est devant un rayon et qu’il va chercher à faire son choix. La preuve, ce pourra être la marque, ou encore le logo AB, la PLV (publicité sur les lieux de vente), l’étiquette, le coffret… Les Bénéfices quant à eux ont trait aux petits (ou aux grands) « plus » attribués à la marque ou au produit. Pour accréditer ce bénéfice, on va parfois recourir à quelques objets symboles comme un bouchon lourd, synonyme de qualité ou encore la peau de chamois glissée dans le coffret, qui distingue le véritable petit bijou à polir. Bien sûr, tout cela n’est pas gratuit et le prix se raisonne souvent en fonction du bénéfice apporté au consommateur, reconnaissance de ce « petit plus » qui fait la différence, qui désigne en d’autres termes le plaisir. Le prix, c’est bien connu, fait passer un message. Un Cognac plus cher qu’un autre sera à priori meilleur. CQFD. Encore faut-il le prouver. « Si vous vendez 200 $ un Cognac plein de défauts vous avez perdu un client. La même bouteille, avec les mêmes défauts et le même goût, vendue 90 $ peut être perçue comme une “bonne affaire”. » On ne le redira jamais assez. Le prix est essentiel pour asseoir le positionnement. L’acheteur de Cognac est quelqu’un qui se fait plaisir. Une personne qui achète une bouteille de VS doit ressentir le même plaisir que celle qui achète une bouteille d’Extra cinq fois plus cher. Simplement, il faut bien se « calibrer » avant de lancer un produit. C’est le b.a.-ba du métier mais il vaut mieux y penser avant. Car autant il est facile de baisser un prix, autant il est compliqué de le remonter. Le prix dépend aussi beaucoup de l’usage. Un magnum se doit d’être notablement plus cher qu’une bouteille normale. Car il véhicule un message de prodigalité, de générosité voire de « flambe ». Et si en prime vous l’assortissez d’une belle nacelle dorée, vous n’aurez aucun mal à justifier d’un prix élevé. Il correspondra à l’attente du consommateur. Il sera considéré par lui comme « tout bénéfice ».

« éduquer, éduquer et encore éduquer »

Vis-à-vis de la promotion, Cyril Camus nourrit quelques principes bien établis. « Quand vous n’avez pas les moyens de dépenser des millions en publicité, il faut éduquer, éduquer et encore éduquer. » Ce qui se traduit par un corollaire – « du terrain et toujours du terrain » – pour faire sortir les bouteilles des étagères. Afin de créer le lien avec le consommateur, la mise en avant du produit dans le magasin paraît essentielle. C’est ainsi que Camus a des équipes dont l’activité principale est de construire des vitrines à travers le monde. Cette recherche de visibilité détermine en partie le lieu de distribution. Elle conduit à vendre le produit « là où il peut être mis en valeur ». La classification des produits n’aide pas toujours à cette visibilité. C. Camus considère que le consommateur connaît bien le sigle HHH et la dénomination XO. « Après, cela devient plus compliqué. » Il relève que Rémy parle de Grand cru aux Etats-Unis, ce qui est bien plus signifiant et qu’Hennessy utilise le joli mot de Fine de Cognac pour désigner son VSOP. Si dans des pays comme la Corée et, dans une moindre mesure, la Chine, la classification traditionnelle du Cognac (VS, VSOP…) conserve encore des adeptes, dans le reste du monde, elle a tendance à dégager une image de luxe un peu vieillotte. C’est en tout cas l’avis du jeune manager de Camus. Pour lui « l’attitude Camus » consiste à simplifier la compréhension de ses produits, à offrir toujours plus de bénéfices au consommateur (le petit avantage supplémentaire au-delà de la qualité du liquide). La marque croit aussi très fort au concept de « tradition actualisée ». La force du Cognac, c’est sa tradition mais une tradition qui ne doit pas être « vieux jeu » ; respectueuse de certaines valeurs tout en étant de son siècle, sans être forcément « contemporaine ». Cette définition lui semble bien coller à celle de produit d’AOC et de terroirs. Avec son Ile de Ré XO ou ses Borderies XO, la société veut exploiter ce créneau de la diversité du goût « pour faire rêver les consommateurs ». Quant au concept bio, le P-DG de Camus estime que sa charte éthique et son message environnemental représentent des éléments extrêmement vendeurs. « Il ne faut pas dénigrer les autres mais s’appuyer sur eux. On ne vendra jamais un Cognac en disant que son voisin n’est pas bon. On le vendra en mettant en avant ses spécificités, en se positionnant comme “plus Cognac que Cognac”. “Si moi je devais vendre du Cognac bio…” » A la réunion de Vitibio, Cyril Camus était déjà en train de dessiner la bouteille.

CER Charente (Antenne de Jarnac)

de verre et de pierre

Inaugurée voilà plusieurs mois déjà, l’antenne de Jarnac du CER 16 a l’ambition d’incarner dans son architecture et sa conception son attachement aux valeurs de proximité et de décloisonnement.

cerf_jarnac.jpg« On n’oublie pas nos racines. » Par cette phrase, Marie-Luce Spenjers, la présidente du CER 16, également présidente du réseau national des CER, a voulu signifier l’ancrage terrain des centres de gestion. L’architecture de la nouvelle antenne de Jarnac en porte témoignage par un bel emploi de la pierre dans le hall d’entrée et par la présence de la tuile. Les verrières, la lumière qui pénètre partout, c’est pour symboliser la transparence, la réactivité et la volonté de décloisonner les tâches. Fini les dossiers claquemurés dans les armoires de chaque comptable ou conseiller. Ils se retrouvent classés dans une salle commune qui rayonne sur les bureaux. Objets inanimés, avez-vous donc une âme… Le souhait formulé par la présidente lors de l’inauguration fut que ces locaux possèdent une âme et que l’on s’y sente bien. En tout cas les salariés comme les adhérents y seront moins à l’étroit que rue Pasteur, l’ancienne adresse du CER. Jean-Marie Guilloton, responsable des deux antennes de Cognac et de Jarnac, a indiqué que l’agence avait été conçue pour accueillir 14 collaborateurs. A l’heure actuelle, ils sont dix à travailler à l’antenne de Jarnac, pour le compte de 400 adhérents. L’agence de Jarnac connaîtra-t-elle la croissance exponentielle de Cognac qui, de 9 collaborateurs lors de l’inauguration des bâtiments en 1989 est passée à 14 ? Pour le responsable de l’antenne le challenge n’est peut-être pas là mais plutôt de faire de cet endroit un vrai lieu d’échange et de rencontre entre le CER et ses adhérents, sachant que la lettre de mission va de plus en plus s’imposer comme la norme dans les relations entre l’adhérent et son conseiller.

 

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