On ne le sait peut-être pas assez. Dans le petit monde de la musique noire américaine, Cognac Blues Passions joue dans la cour des grands. Des spécialistes « qui savent de quoi ils causent », le classent comme l’un des plus grands festivals de blues européen, le seul à rivaliser avec le Lucerne Blues festival, une référence en la matière. « Des musiciens américains de San Francisco ou de Chicago donneraient beaucoup pour jouer à Cognac. C’est “le” festival français du blues » note le rédacteur en chef d’un trimestriel voué corps et âme à la musique des bords du Mississippi. D’ailleurs, en quinze années d’existence (déjà), Cognac a reçu les plus grands, de Ray Charles à BB King en passant par Joe Cocker, Taj Mahal, Ottis Clay ou Buddy Guy. Si tous n’étaient pas des représentants patentés du Work song, le « chant de travail » des plantations de coton, tous pouvaient revendiquer une filiation avec le blues, par la soul, le rythm and blues, le gospel… Avec la programmation de cette année, le lien se fait plus ténu. Michel Rolland, le directeur & fondateur du festival et Joël Joanny, son président, n’ont-ils pas invité sur la grande scène du Blues paradise une icône du folk, Joan Baez (le vendredi 25 juillet à 21 heures) ou le groupe de rock aux 150 millions d’albums vendus, Status Quo, créé en 62 dans la banlieue sud de Londres. Avec un tel plateau, où se côtoieront Massive Attack et Leningrad Cowboys, le festival ne court-il pas le risque du « décentrage » ? Michel Rolland refuse de se laisser enfermer dans un débat de puriste « où il n’y aurait que le blues et rien que le blues ». « Nous sommes en 2008, dit-il. Le blues ne se découvre plus et ne s’apprécie plus comme il y a 30 ou 40 ans. Il y a deux ans, j’ai essayé de programmer Aretha Franklin, l’une des dernières figures « historiques » de la soul. J’aurais adoré ! Malheureusement, cela n’a pas été possible et maintenant
c’est trop tard. Aujourd’hui, l’époque est davantage au métissage, à la résonance des musiques entre elles. Hip hop, R & B, rock… tous ces genres s’interpénètrent. Eric Clapton, que j’aimerai beaucoup faire venir à Cognac, est-il ou non un blues man ? » Michel Rolland avoue également sans ambages qu’aucun artiste de blues n’est susceptibles de rassembler sur son nom 6 000 entrées payante où alors, dit-il, « ils sont déjà venus à Cognac ». Une pointure comme Taj Mahal n’a « fait » que 3 000 spectateurs. Or le festival, pour équilibrer ses comptes, a besoin d’une billetterie de 20 000 entrées. C’est aussi pour cela et sans avoir l’impression de renier son projet artistique, que le festival joue l’ouverture. Quitte à revenir à une programmation plus traditionnelle l’an prochain. « Nous ne nous mettons pas de contraintes. Peut-être serons-nous sur du pur blues voire du jazz. Une seule chose compte, le talent. »
Paradoxalement, le blues bénéficie d’une très belle couverture en cette 15e édition mais pas forcément sur la grande scène et les concerts payants. Des blues men de la plus pure tradition vont hanter les scènes gratuites : Bobby Rush, témoin vivant du blues originel ou encore Dave Riley, bijou du Deep South, du sud profond. Et puis, surprise cette année, le festival s’offre une thématique particulière, celle des “Ladies songs”. Sur la scène de l’Eden blues, seize concerts gratuits seront totalement dédiés aux femmes avec, parmi elles, Marie Knight, grande dame du blues née en 1925, Phoebe Killer, passée récemment à l’émission Taratata, Donna Angelle & Zydeco Possé, groupe fondé en Louisiane, berceau de la musique Zydéco… Sans aller aussi loin que le festival de blues de Chicago, où tous les concerts sont gratuits, Cognac fait une nouvelle fois la part belle aux concerts accessibles à tous. Pour Michel Rolland, il s’agit d’une sorte de philosophie. « L’idée est de se dire que tout le monde peut avoir accès à la « belle culture » et ce qui est gratuit ne doit pas être inférieur à ce qui est payant. »
Ce parti pris artistique et presque « éthique » n’est évidemment possible que grâce aux partenaires du festival, partenaires institutionnels (Ville de Cognac, Conseil général de la Charente, Conseil régional…) comme partenaires privés. Au titre des partenaires premium, Martell rejoint cette année Jas Hennessy, Rémy Cointreau et le Bureau national interprofessionnel du Cognac. Le BNIC alloue une enveloppe de 40 000 € à l’événement. Pour terminer la fête en beauté, le festival a programmé une série de concerts gratuits sur la place François-Ier le 27 juillet. Une belle façon de faire résonner le blues au plus près de la vie des gens.
Billetterie du Festival
– Sur place.
– Office de tourisme
16 rue du 14-Juillet – 16100 Cognac – Tél. 05 45 82 10 71.
Pour plus de renseignements : 05 45 36 11 81.
Tarifs :
Mardi 22 juillet : 12 €.
Mercredi 23 – Vendredi 25 – Samedi 26 juillet : 40 € (tarif réduit : 37 €).
Jeudi 24 : 32 € (tarif réduit : 30 €).
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