Chantier de « l’Hermione » : Du radoub sort la coque

13 mars 2009

 

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Le chantier a reçu 2 millions de visiteurs en 10 ans.

Quinze ans… c’est le temps qu’il faudra sans doute pour que « l’Hermione » sorte de sa coque ou plutôt la coque sorte de la forme de radoub dans laquelle elle est enchâssée depuis le 4 juillet 1997, lancement du chantier.

 

 

 

 

 

Tout le monde le dit. La cheville ouvrière, le fédérateur des énergies, l’inspirateur du projet, ce fut Jean-Louis Frot, maire de Rochefort pendant 30 ans, jusqu’en 2001. La ville au bord de la Charente avait restauré son patrimoine maritime, Corderie royale, jardin des Retours. Pourtant il manquait quelque chose. « Un bateau » diagnostique J.-L. Frot. De l’Hermione, échouée au large du Croisic en 1793, il ne restait rien, alors que cette frégate et ses semblables avaient incarné en leur temps une sorte de sommet de l’architecture navale. L’Hermione, mise en chantier à Rochefort en décembre 1778 sur commande du ministre de la Marine de Louis XVI, Antoine de Sartine, est une frégate de 44,2 mètres

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Des bois courbes correspondant aux formes du bateau.

de long, légère, rapide et maniable, vouée à la chasse aux navires de commerce et aux corsaires anglais. Vouloir refaire au plus près un bâtiment vieux de trois siècles relevé de la gageure. Le savoir-faire n’existait plus et, surtout, les plans avaient disparu. C’est de « l’espionnage industriel » avant la lettre que viendra la solution. En 1783, les Anglais capturent la sœur jumelle de l’Hermione et relève les cotes. Ce sont ces plans qui serviront au chantier. Il s’ouvre le 4 juillet 1997… et n’est pas encore refermé, dix ans plus tard. Il s’achèvera peut-être en 2011, après des milliers d’heures passées à scier, raboter, riveter, calfater. Au XVIIIe siècle, l’Hermione avait été fabriqué en quelques mois. Mais plusieurs centaines d’hommes s’y étaient mis, dont beaucoup de bagnards, qui soulevaient des pièces de bois de plusieurs tonnes. Aujourd’hui, si le relevage n’est plus un problème, ce sont les bras qui manquent. Conséquence : le temps s’étire, le bois se fend et joue, rendant la construction plus difficile. Bon an mal an, le chantier emploie seulement sept à huit personnes, un chiffre qui montera à trente en phase finale. Paradoxalement, les charpentiers de marine ne sont pas à la manœuvre. Leur métier a par trop évolué. Les bonnes compétences, la société Asselin, spécialisée dans la restauration des monuments historiques, les a trouvés chez les charpentiers traditionnels. A l’aube du chantier, ces derniers sont partis en quête des arbres de grandes tailles, présentant la courbure naturelle correspondant aux formes du bateau (le chantier n’utilise que très peu de pièces étuvées). Un défi quand on sait que la forêt n’est plus exploitée pour ses arbres courbes mais pour ses fûts bien droits. Même casse-tête au niveau de la forge où il a fallu retrouver la manière de fabriquer les clous et les chevilles, en l’absence de tout modèle ancien. L’Hermione sera-t-elle reconstruite à l’identique ? Si la volonté d’historicité préside bien au chantier, à l’impossible nul n’est tenu. Les bois d’iroko ou de teck remplacent le chêne sur quelques pièces (0,5 % du total). Le bureau Veritas a imposé des détecteurs d’incendie un peu partout dans le bâtiment et la frégate sera équipée d’un moteur pour rentrer au port. Sinon, la réplique se veut le plus fidèle possible à l’original. La frégate va être équipée de 20 km de cordage, de 1 500 m2 de voilure. Du bois, de la pierre, de la gueuse de plomb et de fer vont lester la cale. Prêt à naviguer, le bateau pèsera 1 200 tonnes. Pour le voyage inaugural, embarqueront une quarantaine de personnes dont 20 à 30 professionnels de la navigation. Comme au XVIIIe siècle, ils logeront dans le faux pont, obscur et bas de plafond mais sans doute dans de bien meilleures conditions qu’au XVIIIe siècle. A l’époque de La Fayette, l’équipage de l’Hermione comptait trois cent douze hommes, dont trente mousses. Tous dormaient sur des hamacs, dans la plus grande promiscuité. En même temps embarquait à bord toute une ménagerie, moutons, volailles, pour la nourriture de l’équipage et des officiers. Les barriques servaient de contenant à tout, seul moyen d’arrimer solidement les marchandises et de tenir la gîte. Les navires du type de l’Hermione cassaient énormément lors des tempêtes. Les vergues s’abattaient sur le pont, faisant de nombreuses victimes. Sur un équipage de 312 hommes, bien souvent la moitié des marins disparaissait au cours de la traversée, moins pour fait de combat que par scorbut, maladies, accidents divers. En période de gros temps, interdiction de feu à bord. La cuisine n’était pas mise en route et l’équipage mangeait froid, pendant des semaines. En fond de cale, le Cognac – le brandy – voisinait avec la poudre et les munitions. Il faut dire que c’était la partie la mieux gardée du bateau. En 2012, l’eau-de-vie de Cognac retrouvera sa place initiale mais pour un périple d’un tout autre confort. A moins que les éléments n’en décident autrement…

 

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