Campari passe à la vitesse supérieure : Grand Marnier priorité N°1 du groupe

10 avril 2018

La Rédaction

 

Voilà un an et demi que le Campari a fait l’acquisition de la liqueur au Cognac, et en seulement quelques mois le groupe a mobilisé d’importants moyens pour prémiumiser son offre dans le monde des Cocktails, le secteur où il excelle. Pour son galop d’essai, Grand Marnier a tenu toute ses promesses et même dépassé ses objectifs de progression. En 2018, Campari espère encore mieux. Les Milanais ont investis d’importants moyens pour mettre en valeur les atouts de la liqueur qu’ils qualifient à la fois de sophistiqué et d’excentrique…

Lorsque Francesca Arcangeli, directrice marketing du groupe Campari, a pris la parole à la fin de l’assemblée générale de la Sica Cognac, on a senti comme un souffle d’air frais et revigorant qui a envahi a grande salle du Chateau de Bourg. D’un coup, les anciennes boiseries est les dorures qui ornent les murs sont apparues comme en décalage avec l’image que le Groupe souhaitait insuffler à la marque. Depuis plus d’un an que Grand Marnier est propriété de Campari, les Milanais ont pris le temps d’en mesurer pleinement le potentiel. « Nous sommes allés à la rencontre des consommateurs et des barmen du monde entier pour bien comprendre quelle était la connaissance et la perception du produit sur chacun de nos marchés » explique Francesca Arcangeli, avec son accent italien particulièrement tonique et charmant. Cette capacité à relancer la liqueur, les charentais de la salle y croient dur comme fer, à l’image de Jean-Bernard de Larquier le président de la Sica. « Il a beaucoup de talent chez Campari, et surtout celui de savoir repérer des marques qui n’exploitent pas pleinement leur potentiel et de les révéler par la suite. ».

 

Le challenge du Luxe pour Campari

 

Francesca Arcangeli ne s’en cache pas, la liqueur est aujourd’hui le produit le plus prémium du groupe et pour illustrer son propos, elle n’hésite pas à projeter à l’écran une équation qui illustre l’impact de la liqueur pour le groupe : 1 bouteille Grand Marnier = 1 bouteilles de Bourbon Wild Turkey + 1 bouteilles du Rum Jamaicain Appleton Estate. Ces deux derniers produits figurant parmi les spiritueux phares de la gamme milanaise, on comprend à quel point Grand Marnier est précieux pour le groupe. Campari fait donc ses premiers pas dans l’univers du luxe et la direction générale a mis d’emblée la pression pour que l’initiative soit un succès : « Le nouveau lancement de Grand Marnier renforce notre position d’acteur principal dans le monde du cocktail. Cela met en lumière la volonté de notre groupe de se renforcer dans le monde du luxe. Echouer n’est pas une alternative ! » a annoncé Bob Kunze-Concewitz, le n°1 de Campari, à ses équipes. Manifestement le message a été perçu puisque dès les premiers mois de prise en main de la marque, les succès sont au rendez-vous : « Sur le marché des Etats Unis (NDLR : 63% des ventes), notre progression fût excellente en 2017, au-delà de nos prévisions. » explique Patrick Raguenaud aux viticulteurs adhérents de la Sica Cognac. Et les choses devraient s’accélérer puisque les dirigeants du groupe ont décrété que 2018 serait l’année du Grand Marnier à l’international. Ainsi, une nouvelle stratégie commerciale sera développée tout particulièrement aux Etats Unis, au Canada et en Europe.

 

Mixologie prémium.

 

Exit les crêpes au Grand Marnier ! Définitivement, la communication du groupe ne sera plus axée sur la gastronomie afin de privilégier une consommation directe en phase avec la sophistication du produit. « Le marché de la cuisine est intéressant mais sur le plan de la communication, nous préférons clairement que le Grand Marnier soit présenté dans un verre à côté de la crêpe plutôt que mélangé dans la pâte… parce qu’on en consomme plus… » Répond habilement la directrice marketing après avoir été interpellée par l’assemblée. Pour 2018, la priorité du groupe sera donc de concentrer les efforts marketing sur le secteur de la mixologie, ce réseau de distribution où le groupe excelle au travers des marques qu’il distribue. « Ce marché a d’autant plus d’intérêt qu’il cible les 35-45 ans, les consommateurs de demain » explique Francesca Arcangeli. En un an et demi, les italiens ont battu le pavé pour bien s’imprégner des valeurs de la marque en jaugeant les perceptions des consommateurs. Et il en ressort beaucoup de leçons : La première est que le consommateur labda connait le Grand Marnier et l’identifie comme un produit haut de gamme, sophistiqué et authentique. La seconde est liée à la consommation. La cible correspond à un public jeune (35/45 ans) « qui ne boivent pas pour boire » indique Francesca Arcangeli. En revanche, ces derniers ne pensent pas toujours à servir la liqueur ou ne savent pas comment la boire ou l’associer. Enfin, la dernière nouvelle qui flattera les Cognaçais concerne la composition : la plupart des consommateurs ne savent pas que la liqueur est composée à 51 % de Cognac mais lorsqu’ils l’apprennent, c’est une bonne surprise qui connote positivement l’image du produit.

 

Sophistication et excentricité

 

« Capitalisons sur ce que nous sommes ! » Ainsi pourrait-on résumer la conclusion de la tournée  des bars (strictement professionnelle) par les équipes marketing de Campari. En clair, la force de la liqueur tient à sa qualité et à son caractère inimitable. Pour illustrer ces valeurs, Campari, communiquera dorénavant avec le slogan suivant « Sophistication with a twist of eccentricity », que l’on pourrait traduire par « sophistication dotée d’une touche d’excentricité ». Le message est plutôt détonnant dans le sens où il casse les codes traditionnels de la liqueur : A Cognac, la sophistication, ça parle… et l’intérêt de communiquer sur cette valeur, particulièrement outre atlantique, semble évidente. Mais le brin d’excentricité… ça, ce n’est pas vraiment dans les gènes cognaçais… Et pourtant, cette touche de fraicheur et d’originalité matérialisée par l’extrait d’orange, c’est précisément ce qui fait que le Grand Marnier contraste dans l’univers du Cognac, et c’est, selon les dirigeants du groupe, une valeur clé à mettre en avant pour attirer de nouveaux consommateurs et tout particulièrement les jeunes.

 

L’atout Cognac pour les Barmen

 

Côté BarTenders, la réaction aux 51% de Cognac est aussi une surprise qui renforce l’image de la liqueur. Les Barmen’s sont habitués à  travailler le Cognac et le principe d’une liqueur prémium « à base de » peut, soit faciliter l’association avec d’autres spiritueux, soit carrément remplacer le Cognac dans les cocktails classiques. Pour percer ce marché et séduire les prescripteurs dans les bars, le groupe Campari saura faire valoir son expertise. En tout premier lieu, Campari a redessiné le packaging. Le Sceau, l’étiquette, le coffret ont été allégés et modernisés et le fameux cordon rouge signe identitaire de la marque sera décliné sur chaque vecteur de communication. De nouveaux outils d’animation des vente tels que des verres, des plateaux ou des shakers seront mis à disposition des bars et des campagnes publicitaires télévisées seront lancées dès les prochaines semaines dans l’état de New York, au Canada et à Mexico. En exclusivité, les adhérents de la coopérative ont eu le privilège de visualiser le premier clip publicitaire du Grand Marnier façon Campari. S’agissant d’une exclusivité confidentielle, nous ne pourrons pas l’évoquer… Sauf pour dire, peut-être, qu’il illustre parfaitement la sophistication à la française, avec un brin d’excentricité…

 

Après 1 an de Campari : le bilan pour la viticulture

 

Tout changement d’actionnaire représente potentiellement des risque ou opportunités d’évolution pour les livreurs d’une maison à Cognac. Lors de la dernière assemblée générale de la Sica, Fabio di Fede, le directeur général de la maison Grand Marnier avait voulu rassurer chacun : « on ne change rien sauf à faire en sorte d’augmenter les volumes d’achats ». Depuis l’an passé, Fabio di Fede a quitté la direction de Grand Marnier pour prendre en charge les projets d’acquisition du groupe à Milan mais les engagements ont été tenus et Patrick Raguenaud l’a reprécisé devant ses livreurs : « Pour notre SICA, l’arrivée de Campari ne change rien, ni dans le fonctionnement ni dans la politique d’achat sauf dans l’hypothèse d’une croissance des ventes où nous pourrions envisager une augmentation des achats ». Sur la question des prix, il confirme que la Sica a procédé à une majoration de 3% par rapport à l’exercice ce qui lui permet de se maintenir au niveau des autres maisons de la place. Et le directeur du site en a profité pour se coiffer de son nouveau couvre-chef de président de l’interprofession pour argumenter sur la nécessité d’accroitre régulièrement la taille du vignoble : « La région va bien mais certains négociants ont des difficultés à alimenter leurs marchés».  Il a aussi insisté sur la nécessité de tenir les prix dans une situation équilibrée en évitant à la fois les chutes ou des emballements de cours. La croissance des prix doit se faire, selon lui, de manière progressive pour ne pas perturber les prix de vente.

 

Planter pour préparer l’avenir.

 

Selon Patrick Raguenaud, le business plan qui fonctionne « à peu près bien » se doit d’être réactif pour ne pas générer des situations de tension néfastes à l’équilibre des marchés. Jean-Bernard de Larquier, le président de la Sica avait tenu, les mêmes propos quelques minutes auparavant en précisant que le gel du millésime 2017, venait accentuer les tensions sur les approvisionnements. « Si on fait un bilan des dernières projections du business plan, on constate que les deux familles de la viticulture et du négoce se sont trompées dans leurs prévisions, mais en sens opposé. Cet écart accentue les tensions sur les stocks ». Le président développe son analyse chiffres à l’appui en expliquant que le déficit de Cognac représente bon an mal an 35 000 hl soit l’équivalent de 3500 ha de plantations nouvelles.

Pour le viticulteur qui était encore il y a quelques mois, le président du BNIC, la progression à deux chiffres des ventes de Cognac n’est pas tenable. En revanche, du côté de la viticulture, il n’est pas non plus tenable de tabler sur des perspectives de rendements aussi fortes que par le passé. Il est selon lui probable que la productivité du vignoble régresse du fait de la suppression progressive des outils de protection du vignoble. Dans le business plan, la viticulture devra donc réviser à la baisse son potentiel de production à l’hectare pour passer de 12 à 11 voire 10,5 hl ap/ha.

 

Le contrat interprofessionnel rassurerait

 

Jean-Bernard de Larquier a passé une partie de son mandat de président de l’interprofession à tenter de convaincre les deux familles de l’intérêt de s’accorder sur un contrat interprofessionnel. Et il n’est pas homme à lâcher sa prise à la première occasion… Car pour lui, si la viticulture a encore des réticences à planter massivement de nouvelles vignes, c’est parce qu’elle ne se sent pas suffisamment sécurisée avec le système en place. Le contrat interprofessionnel est un moyen de faire accepter les défis exceptionnels qui se présentent à la viticulture. Il clarifierait et uniformiserait les clauses encadrant les transactions à l’échelle de la région délimitée. Ce support étendu par les pouvoirs publics rendrait obligatoire un certain nombre de dispositions pour chaque contrat, qu’il soit annuel ou pluriannuel. Parmi les dispositions obligatoires, on pourrait retrouver le volume, le délai de livraison, le mode de règlement et le prix. Et comme un exemplaire de ces contrats est destiné à l’interprofession, cette dernière connaitrait la réalité précise des prix,  des transactions, et la part des volumes contractualisés à court et moyen terme. La réalité des prix de marché, la fluidité de l’approvisionnement sont autant de données indispensables pour la construction du Business plan. CQFD. Si le président insiste sur ce sujet, c’est qu’il sait que des discussions sont aujourd’hui en bonne voie à l’interprofession et qu’elles pourraient aboutir dans les prochains mois. Dans le cas contraire, et comme il a accepté de prolonger son mandat pour quelques année encore, il est probable que cet argumentaire soit à nouveau à la tribune de l’assemblée générale de la Sica Cognac en 2019. On peut lui faire confiance…

 

 

 

 

 

 

 

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