« Ils n’ont pas trahi l’alambic »

28 mars 2009

Ils, ce sont les bouilleurs de cru qui, durant plusieurs siècles, firent preuve d’un savoir empirique mais magistral dans l’art de la distillation. Pour annoncer les « Bonnes chauffes » 2005 qui se sont déroulées courant décembre, les bouilleurs de cru sont revenus sur les bases de leur métier.

 

On dira ce que l’on voudra mais les « Portes ouvertes des bouilleurs de cru », lancées en 1998, auront en quelque sorte révélé les bouilleurs de crus à eux-mêmes, elles les auront désinhibés, décomplexés. En quelle autre occasion entend-on un viticulteur parler de la distillation, autrement que pour échanger avec ses collèges sur les « plus » ou les riens obtenus de son acheteur. Prenez Didier Lambert, le président de l’Association des bouilleurs de cru. Ce n’est pourtant pas un monstre d’éloquence en public. Eh bien, lors de la conférence de presse annonçant les Bonnes Chauffes, il s’est laisser aller à une digression sur les esters d’acide gras qui en a laissé plus d’un sur le flanc. Rien de cuistre ni de pédant dans ses propos mais une présentation quasi filmique. On y était : « Les lies contiennent des acides gras qui libèrent des esters aromatiques. C’est pour cela que certains vins blancs sont élevés sur lies. En pratiquant le chauffage à feu d’un milieu acide, la distillation charentaise crée un effet de catalyseur. C’est un principe bien connu en cuisine, où l’on ajoute du vin, du vinaigre ou citron pour exalter les saveurs. Le vin bout à 100° mais la température sous la marmite de cuivre grimpe jusqu’à 600 °. Les esters d’acide gras passent en tête de chauffe. L’art du bouilleur de cru va consister à trier entre la première et la deuxième partie de tête. Au moment de la mise au courant, tout se joue à un demi-litre près. Je garde ou je ne garde pas ? La décision doit se prendre très vite car, après, arrivent des odeurs désagréables de scotch ou de vernis à ongle. Piloter le feu, trouver le bon compromis entre les gains à attendre et les pertes à redouter… voilà un peu les bases du métier de bouilleur. C’est assez fascinant de se dire que ce savoir empirique de la distillation existe ici depuis 400 ans et qu’il a été validé scientifiquement lors des vingt ou trente dernières années. Grâce aux marqueurs, aujourd’hui, l’on sait pourquoi il faut distiller avec les lies. Le bagage scientifique est venu conforter un outil séculaire. »

Miser sur le collectif

dans_la_distillerie_de_francois_et_veronique.jpgLe virage avait été amorcé en 2004 mais il se précise cette année. Les « Bonnes chauffes » perdent beaucoup de leur caractère individuel pour miser sur le collectif. Est-ce l’effet « mécanique » d’un certain essoufflement où une volonté délibérée ? C’est en tout cas l’expression d’un constat. « Il ne suffit pas de mettre un panneau au bord de la route pour attirer du monde. Une fois recruté le voisinage immédiat, c’est presque un métier de faire venir des gens dans une distillerie. » En 1998, ils étaient 400 à ouvrir leurs portes, sur une population de bouilleurs de cru à domicile estimée à environ 1 500. Cette année, ils ne sont plus que 36 bouilleurs de cru à renouveler l’expérience individuelle. Revendiquant le statut d’Association régionale fédérant des cantons, le mouvement des Bouilleurs de cru s’est recentré sur l’idée d’animation, une animation cantonale en partenariat avec un groupe constitué : rallye de vieilles voitures, camping-caristes, randonneurs… Ce principe de visites « pré-vendues » permet au moins de s’assurer d’une fréquentation minimale. Car il n’y a rien de pire que d’attendre le chaland… même quand on n’a rien à vendre. L’Association des bouilleurs de cru mise sur un média « moderne » comme internet pour communiquer autour de l’événement. Son site abc-cognac.com offre en temps et en heure toutes les informations nécessaires. Cela suffira-t-il pour renouer avec l’enthousiasme et l’ampleur des débuts ? Peut-être pas mais sans doute est-il déjà bien de maintenir un « bruit de fond », pour le jour où il viendrait l’envie à la région de recapitaliser sur les hommes et les femmes qui, l’hiver, rejouent les mystères de la « Bonne chauffe ».

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