Bilan des expéditions de la campagne : L’nalyse des metteurs en marché

8 novembre 2017

Considérable ! Pour la 3e année consécutive, les sorties de Cognac augmentent pour atteindre le niveau record de 577 132 hl AP à la fin de la campagne viticole. Une progression globale de +10 % en volumes qui est le résultat d’une surperformance de la quasi-totalité des marchés. Et comme une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, la progression en valeur des expéditions bat également des records en atteignant le seuil symbolique des 3 milliards d’Euros. C’est la conséquence d’une prémiumisation continue de l’offre en particulier sur l’Alena et l’Extrême-Orient.

Philippe Coste Chef de famille du Négoce au BNIC et Patrice Pinet le président du SMC (Syndicat des maisons de Cognac) font part de leur analyse au Paysan Vigneron.

Alena : prémiumisation de la catégorie VS.

 

L’Alena maintien sa place de zone leader pour le Cognac avec une progression (+9,3 % en volume) qui concerne toutes les qualités de vieillissement. Au niveau de la valeur, la progression est nettement supérieure (+ 13,5 %). Elle s’explique en partie par une prémiumisation de la catégorie VS : la progression des VS est de +9,5 % en volume et +17 % en valeur.

 

 

Philippe Coste : Les États-Unis poursuivent leur progression importante et rien ne semble menacer cette tendance à moyen terme. On se soucie du positionnement de nos VS sur ces marchés et c’est tant mieux car le segment des jeunes spiritueux bruns est concurrentiel avec des Whiskies et des Bourbons dont le coût de la matière première n’est aucunement comparable au nôtre. Généralement les spiritueux à base de grains se positionnent à 15 $ lorsque nos VS sont à 25 $. Nous avons donc à cœur de mettre en valeur tout ce qui fait l’identité du Cognac pour justifier cet écart de prix. On ne le dira jamais assez : le VS c’est aussi l’avenir, c’est généralement la porte d’entrée pour les nouveaux consommateurs qui découvrent le Cognac

 

Patrice Pinet : Le Marché des États-Unis profite, il faut le dire, du dynamisme du leader qui entraîne avec lui l’appellation. D’une façon plus générale, la tendance profite à l’ensemble de la catégorie des alcools bruns, tels que les Malts ou les Bourbons, au détriment des alcools blancs. Concernant les VS,les facteurs qui contribuent à l’augmentation de la valeur du segment sont multiples : positionnement prix,  mise en avant de séries limitées, « value added pack », (coffrets visant à améliorer la valeur ajoutée). D’une façon générale, il faut dire que le marché Nord Américain nous inspire de la confiance et nous pensons avoir encore devant nous de belles opportunités de progression en particulier au travers des cocktails.

 

L’Extrême-Orient : prémiumisation des VS et ambitions sur les qualités vieillies.

 

L’Asie progresse également sur l’ensemble des qualités. Mais le fait marquant de cette campagne est le regain d’intérêt des consommateurs pour les vieilles qualités (+8 812 hl ap/12 mois). Par ailleurs, comme sur l’Alena, le prix moyen des VS a augmenté : la catégorie progresse là aussi deux fois plus vite en valeur (+67 %) qu’en volume (+30 %).

Les très bons résultats affichés sur la Chine (+52 % en valeur) doivent être expliqués et pondérés. La menace d’une complication des procédures administratives d’importation (N.D.L.R. : cf. article certificat sanitaire vers la Chine page… ?) a contraint les metteurs en marché à anticiper des expéditions régulières de quelques mois. Pour comprendre l’ampleur du phénomène, la seule augmentation des importations directes de la chine entre les mois de mai et juillet (les chiffres d’août ne sont pas connus au moment de la rédaction de l’article) représente un peu plus de 10 000 hl ap. soit près d’un tiers des importations totales de la Chine sur la campagne 2016-2017.

 

Philippe Coste : Les négociants qui travaillent avec des importateurs indépendants conservent les calendriers d’expédition habituels. À cause de l’effet « certificat Chine », les chiffres dont nous disposons ne nous permettent pas connaître avec précision quelle est réellement la part vendue mais ce qu’il faut retenir c’est que nous constatons tous des progressions conséquentes sur l’Extrême-Orient.

 

Patrice Pinet : L’Asie repart sur des bases normales de consommation, conformes aux prévisions du business plan de la filière. Les difficultés que nous avions connues ces derniers mois étaient directement liées à la mise en place des mesures contre l’affichage des signes ostentatoires décidés par le gouvernement Chinois. Les expéditions avaient baissé plus que les ventes car il a fallu épurer les stocks importants qui avaient été constitués sur place. Le retour à la croissance des qualités supérieures et même des qualités très supérieures est en phase avec les stocks dont nous disposons au négoce et en viticulture, et c’est une bonne chose.

Concernant l’effet du certificat Chine, il vient, c’est clair, perturber provisoirement notre visibilité sur les expéditions. J’ai pour habitude d’attendre fin mars, après les festivités du nouvel an, pour analyser avec précision la tendance de ce marché. L’Asie progresse, c’est une évidence, mais nous allons devoir patienter pour en faire une analyse plus précise.

 

Le retour en force du continent Européen… En volume

Le marché du vieux continent qui paraissait empêtré dans la crise depuis plusieurs années semble renouer avec la croissance (+10,1 en volume et + 8,1 en valeur). Les marchés traditionnels tels que le Royaume uni, l’Allemagne et même la France semblent à nouveau avoir le vent en poupe. Mais les commerçants reconnaissent qu’il s’agit d’un marché plus difficile du fait, notamment du contexte économique. La chute du taux de change de la Livre Sterling, après l’annonce du Brexit a considérablement pénalisé le marché Anglais. Le VS en fait directement les frais : malgré une progression de 7 % des ventes de VS, le chiffre d’affaires de la catégorie reste identique l’an passé.

La Russie, de son côté, connaît un développement spectaculaire avec +73,2 %. En réalité, lorsqu’on intègre les volumes qui transitent par les pays baltes, la hausse serait plutôt de l’ordre de 25 %. Dans tous les cas, il semble que les effets de la crise économique de 2015 s’estompant, les importateurs ont relancé leurs achats pour renouer avec des volumes d’affaire comparables à 2014. Bien sûr, nous sommes encore loin des quelque 15 000 hl ap des années 2006 mais le retour à la croissance de la Russie est de bon augure pour les experts qui ont confiance dans ce marché de référence pour les eaux-de-vie de vin en général et le Cognac en particulier.

 

Philippe Coste : Il y a quelques zones d’ombre dans le tableau idyllique des chiffres de la campagne. Je pense en particulier aux pays scandinaves où le contexte d’économie générale est plus difficile. Ces marchés étaient matures et nous y perdons durablement des parts de marché à cause des hausses tarifaires des dernières années cumulé à une augmentation régulières des droits et des taxes sur chacun de ces pays. C’est la preuve que les équilibres demeurent subtils et que nous devons rester collectivement vigilants à la régularité des cours.

Les Russes sont des amateurs avertis de Cognac. Ils savent le déguster et l’apprécier. La France en général et le Cognac souffrent beaucoup l’embargo russe qui a favorisé l’importation de brandies arméniens au détriment de nos produits. Les ventes qui ont été réalisées sur la dernière campagne, correspondent à une tendance que nous pensons durable. Un surstockage lié à l’effet devise ? Je n’y crois pas, simplement parce que les importateurs russes sortant de la crise n’ont pas encore retrouvé une superficie financière suffisante pour spéculer.

 

Patrice Pinet : Avec 25 % des ventes, le Royaume-Uni est de loin le premier marché Européen, la chute de la Livre Sterling, de l’ordre de 10 %, a lourdement impacté le taux de rentabilité de ce marché. Mais, ce qu’il faut retenir, c’est que les opérateurs présents sur ce pays ont maintenu leurs efforts commerciaux pour conserver et même développer les sorties. L’effet taux de change est généralement cyclique, c’est un risque que les distributeurs connaissent bien, il ne doit pas impacter la stratégie de vente à moyen et long terme.

Concernant la Russie, le retour à la croissance, malgré l’embargo, est la conséquence de l’intérêt des Russes pour la qualité du Cognac. C’est un pays où l’image de marque fait durablement la différence.

 

Les petits marchés porteurs de grands espoirs.

Les nouvelles « zones d’opportunité » telles que définies par le BNIC représentent 6,5 % du marché global du Cognac.

L’Afrique du sud fait figure de proue dans ce groupe. Elle pèse aujourd’hui 6 500 hl ap et progresse de 31 % en valeur. Les Caraïbes, le Nigeria et la république démocratique du Congo connaissent également une croissance soutenue et durable.

 

Patrice Pinet : Nous sommes beaucoup à penser que l’Afrique représente un potentiel intéressant pour nos produits. L’amélioration de la situation économique de nombreux de pays y est propice aux affaires et il existe des liens certains avec les communautés afro-américaines dont l’intérêt pour le Cognac n’est plus à démontrer.

 

 

 

 

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