Bache Gabrielsen mise sur la diversité des débouchés et des approvisionnements

8 mars 2009

bouteille_xo.jpgLe cognac Bache Gabrielsen est une entreprise familiale qui connaît depuis le milieu des années 90 un développement commercial régulier. Actuellement, plus de 3 000 hl d’AP de Cognac sont vendus presque intégralement en bouteilles avec ces dernières années une montée en puissance des qualités VSOP et XO. La marque B. Gabrielsen possède une bonne notoriété en Norvège, en Europe du Nord et dans de nombreux autres pays les responsables ont tissé des relations étroites avec de petits importateurs à la recherche de Cognacs « sur mesure ». Une politique d’achats d’eaux-de-vie bien structurée a été mise en place depuis dix ans et les courtiers et les bouilleurs de cru y tiennent une place prépondérante. L’approche en terme de volume d’achats, de qualité et de niveaux de prix découle directement de l’évolution de la commercialisation.

 

La société Bache Gabrielsen est une petite maison de négoce installée à Cognac qui réalise un chiffre d’affaires de 8 millions d’€. A l’origine, l’entreprise créée par M. Dupuy à Jarnac en 1852 est venue s’installer à Cognac vers 1890 et M. Thomas Bache Gabrielsen a racheté la petite maison de négoce en 1905. Ce jeune entrepreneur arrivé à Cognac à 20 ans était issu d’une famille en Norvège où l’on faisait du commerce de spiritueux et les premières bouteilles de Cognac ont été exportées dans ce pays en 1910. Des relations commerciales fortes se sont tissées entre les pays scandinaves (la Suède et la Norvège) et elles perdurent toujours. L’entreprise est une société familiale dirigée actuellement par M. Christian Bache Gabrielsen et son fils Hervé, âgé de 27 ans, a pris récemment des responsabilités commerciales. L’activité de cette maison de négoce a toujours suivi les grandes évolutions du marché du Cognac et les ventes de Cognac et de Pineau représentent plus de 90 % du chiffre d’affaires.

Un marché Norvégien très porteur depuis le début des années 90

ph_bergier.jpgDu milieu des années 80 au début de la décennie 90, la société Bache Gabrielsen a connu une bonne expansion de ses ventes en Asie et tout particulièrement au Japon, mais ces marchés ont ensuite fortement régressé. Le chiffre d’affaires de l’entreprise qui en 1992 dépassait 5 millions d’€ a ensuite chuté brutalement et c’est à partir de cette époque que la société a redynamisé ses efforts vers les pays scandinaves. Les ventes ont commencé à rebondir à partir de 1995 grâce au développement du marché norvégien, principalement sur des qualités VS. La société B. Gabrielsen a connu une activité en croissance régulière jusqu’au début des années 2000 et le chiffre d’affaires s’est stabilisé autour de 8 millions d’€ depuis trois ans. Les ventes à l’exportation (97 % du total) sont réalisées à 60 % en Europe du Nord, en Asie pour 15 % et pour le reste en Europe et sur le continent américain. Le Cognac B. Gabrielsen a conquis sur le marché norvégien une part de marché importante et les ventes de qualités supérieures VSOP et XO montent en puissance ces dernières années (plus de 30 % du volume). L’entreprise, qui emploie 16 salariés, gère en interne toute sa stratégie marketing et commerciale et aussi l’ensemble de l’activité de production de Cognac. M. Ch. B. Gabrielsen a en charge la commercialisation des Cognacs et du Pineau, et M. J.-Ph. Bergier occupe la fonction de maître de chai et de responsable du packaging. Depuis une trentaine d’années, la société a toujours entretenu des relations historiques avec un groupe de bouilleurs de cru et avec des marchands en gros. Avec l’arrivée dans l’entreprise à la fin des années 80 de M. J.-Ph. Bergier, l’activité d’achat d’eaux-de-vie et la gestion des coupes de Cognac a été progressivement redéfinie dans l’entreprise. Depuis un certain nombre d’années, la société B. Gabrielsen travaille avec un stock d’eaux-de-vie équivalent à deux années de ventes qui est constitué d’une bonne proportion d’eaux-de-vie rassises.

Une politique d’achat reposant sur une diversité de lots de 10 à 15 hl d’AP maximum

Le maître de chai a « construit » ce stock dans l’objectif de pérenniser les qualités commerciales de Cognacs VS, VSOP et XO, et c‘est l’évolution de la commercialisation qui conditionne en permanence la politique d’achat d’eaux-de-vie. Actuellement, plus de 70 % des achats sont réalisés auprès d’environ 150 bouilleurs de cru soit en direct soit avec des courtiers référencés. Néanmoins, l’entreprise ne s’est pas réellement engagée dans une démarche formelle de politique contractuelle, mais elle privilégie une démarche d’engagement moral d’achats réguliers (tous les ans) de petits volumes de 10 à 15 hl d’AP maximum à des niveaux de prix intermédiaires et constants depuis 10 ans. La maison de négoce s’appuie sur les compétences d’une dizaine de courtiers qui possèdent à la fois une parfaite connaissance du stock d’eaux-de-vie disponible en propriété et du type de produit recherché par la société B. Gabrielsen. M. J.-Ph. Bergier considère que cette organisation des achats est en phase avec les contraintes de fonctionnement d’une petite société de négoce : « La taille de notre entreprise et surtout l’incertitude de nos marchés nous conduisent à acheter auprès de chaque bouilleur de cru tous les ans de petits lots de 10 hl d’AP. Dans notre organisation, les courtiers jouent un rôle de fidélisation et de présélection car ils côtoient de près les bouilleurs de cru avec lesquels nous souhaitons conserver des relations constantes dans le temps. Ce sont de vrais interlocuteurs dans la relation petite maison de négoce/viticulteur, qui interviennent comme des régulateurs pour harmoniser les demandes et les attentes des deux parties. Un bon courtier est quelqu’un qui connaît nos besoins qualitatifs, nos critères de sélection, et ces éléments sont essentiels pour l’instauration d’un dialogue efficace. Les simples déposeurs d’échantillons ne nous intéressent pas. Une entreprise comme la nôtre n’est pas en mesure d’avoir la constance d’achat d’une grande maison même si, depuis 1995, on a été en mesure d’acheter régulièrement chez les mêmes livreurs. Entre 1995 et 2002, le développement des ventes a permis de pérenniser des engagements moraux d’achats et les marges dégagées ont aussi rendu possible la mise en œuvre d’une politique de prix plus en phase avec les prix de revient à la propriété. Durant cette période très dure pour la viticulture, nous nous sommes placés à des niveaux de prix sur les comptes 2 supérieurs de 35 à 40 % au second marché et pour les comptes 9 on était entre 100 et 200 % au-dessus. Nos achats sont très liés à l’évolution des ventes en terme de volumes et de prix. Une petite société de négoce comme la nôtre répond à la demande de petits importateurs et distributeurs. Il faut être honnête, ce sont les grandes maisons qui créent la demande de Cognac et génèrent le marché. Nous, nous profitons de cette dynamique commerciale pour travailler sur des niches et ramasser les miettes. Par exemple pour vendre 100 caisses en Russie, on se plie en quatre tout en sachant que la pérennité de ce débouché est incertaine et que les prix sont souvent bataillés. Notre activité commerciale est soumise à une forte vulnérabilité qui nous oblige à dimensionner nos achats et il me paraît impossible de signer des contrats écrits pluriannuels. ».

Augmenter la distillation et lisser les hausses de prix dans le temps

Les responsables de la société B. Gabrielsen s’inquiètent actuellement de la raréfaction des comptes 2 et aussi des mises en stocks insuffisantes de comptes plus âgés depuis 1996 qui rentreront dans les coupes de VSOP et d’XO d’ici 5 à 10 ans. Leur souhait est de voir les volumes distillés augmenter significativement en relevant le curseur de la QNV à plus de 7 hl d’AP/ha pour préparer l’avenir et constituer un volant de stock disponible pour le consommateur. Au niveau des prix des eaux-de-vie, une augmentation du cours du second marché ne constitue pas une inquiétude majeure dans la mesure où celle-ci sera lissée dans le temps. M. J.-Ph. Bergier tient sur l’ensemble de ces sujets un discours cohérent et en phase avec les réalités des marchés : « Sur le second marché, les comptes 2 dont le prix se situe actuellement autour 4 500 F/l’hl d’AP (690 €) vont sûrement atteindre le seuil des 5 000 F (762 €) en fin d’année. Ces niveaux de prix ne sont en soi pas inquiétants mais par contre, dans l’avenir, la répercussion de fortes hausses sur des qualités commerciales VS serait toujours risquée. Pourquoi pas acheter très cher des comptes 2, mais par contre le prix de nos VS va grimper jusqu’au moment où le consommateur va considérer que le Cognac sera trop cher. Sur certains marchés, le consommateur est sensible au facteur prix et n’hésitera pas à délaisser nos produits au profit du Whisky. La satisfaction du consommateur est un gage de pérennité pour l’ensemble de la filière Cognac, les négociants comme les viticulteurs. Si les prix des eaux-de-vie jeunes viennent à flamber, les viticulteurs vont à court terme retrouver une capacité économique leur permettant de se remettre à distiller et à stocker ; mais, dans le même temps, la filière commerciale aura subi de très fortes hausses impossibles à répercuter. Les marges des petites et moyennes sociétés de négoce seront alors amputées au détriment des efforts de communication et de promotion, et l’impact sur les ventes de Cognac sera rapide. Le cap des 5 000 F pour des comptes 2, c’est jouable dans la mesure où la dynamique commerciale ne sera pas cassée et c’est pour cette raison qu’il me paraît nécessaire de lisser les hausses dans le temps. Il ne faut pas perdre de vue que le petit négoce vend simplement du Cognac auprès d’un public de consommateurs ayant un pouvoir d’achat inférieur à celui des grandes marques, ce qui oblige nos entreprises à avoir une attitude réactive sur le plan du marketing et des prix. En Norvège, nous avons réussi à cultiver la notoriété de la marque Bache Gabrielsen mais ce succès reste local. Ailleurs, notre société ne possède pas une image de marque suffisante pour réellement se positionner sur le marché en terme de volume et de niveau de prix. Les grandes marques de Cognac se donnent les moyens de construire au quotidien leur notoriété en dégageant des budgets communication importants dont ils valorisent le bienfait à long terme. Nos marchés ne nous permettent pas de fonctionner ainsi. C’est pour cette raison que j’estime que des entreprises de notre taille ont besoin de souplesse au niveau des achats d’eaux-de-vie. »

Le créneau des Cognacs « sur mesure »

La société B. Gabrielsen dispose actuellement de structures adaptées à une commercialisation très diversifiée reposant sur un réseau de petits distributeurs. Le fait d’être en mesure de proposer des coupes spéciales à de petits importateurs vendant seulement 100 ou 200 caisses représente une forme de réactivité qui capte l’intérêt d’une certaine clientèle et cette approche est envisageable grâce à la politique d’achat de petits lots de 10 hl d’AP. M. J.-Ph. Bergier considère que l’entreprise évolue sur un créneau de marché du Cognac différent de celui des grandes marques au niveau de la production comme de la commercialisation : « Notre entreprise travaille sur une strate de marché bien différente de celle des grandes maisons. Nous disposons d’un savoir-faire qui nous permet de répondre à toutes les demandes sur le plan de la qualité comme du packaging et cela correspond aux attentes de petits importateurs à la recherche de qualité commerciales de VS, VSOP et XO sur mesure. Notre créneau, c’est de colmater le marché et ce métier est utile à la cause et à la dynamique globale du Cognac. Au niveau de la production, nous avons aussi une place à tenir et des achats de petits lots de 10 hl d’AP de comptes 2, 6, ou 9 ont capté l’intérêt de certains bouilleurs de cru soucieux, eux aussi, de répartir leurs risques commerciaux. Le climat actuel de ressaisissement des cours du second marché est bienvenu pour les viticulteurs, mais il convient maintenant de lisser les hausses pour ne pas casser la dynamique commerciale plutôt favorable depuis quelques années. »

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