Provocation ou pédagogie ? La seconde option tient la corde avec, cependant, une conviction forte du syndicat : « les ha Cognac doivent être rentables ». Et ils le seraient plus à 9 de pur qu’à 8,20. Le SVBC espère-t-il voir exhausser sa demande ? Peut-être moins que d’être en ligne avec sa propre histoire, tout en boostant l’affectation. Un pari toujours difficile à Cognac.
Le syndicat présidé par François-Jérôme Prioton a tenu une série de réunions courant avril. A Hiersac, le lundi 27 avril, dans cette région au cœur des Fins Bois Charente, l’assistance était moins monochrome qu’elle aurait pu y prétendre. Sans brandir le drapeau noir de l’anarchie, des viticulteurs jeunes et moins jeunes ont porté la contradiction, créant les conditions d’un vrai débat. Evidemment après une copieuse et fouillée entrée en matière sur les coûts de production, commise par Olivier Louvet, la discussion a tourné autour du rendement Cognac, des prix et de l’affectation. Un peu comme partout, la salle s’est partagée selon un clivage désormais traditionnel : le camp de ceux qui croit aux vertus du rendement cadenassé, le camp des anti, pour qui le rendement est tout sauf un problème et le camp des hésitants et/ou les observateurs. Bernard Vaudon, d’Echallat, se classe résolument parmi les tenants d’un rendement « décomplexé ». Les 6 de pur/ha, il les a en travers de la gorge. Et dit pourquoi : « Quand la QNV était à 6 et qu’il en fallait 8 pour faire tourner les exploitations, on a bradé notre stock à des prix défiant toute concurrence. Or, sans le stock, la viticulture n’existe plus. Elle n’a plus les moyens de peser en quoi que ce soit devant le négoce. » Prolongeant son argumentaire, le viticulteur s’est insurgé contre l’idée selon laquelle « la production fait le prix ». « La production n’a rien à voir avec le prix. C’est la demande qui fait le prix. A meilleure preuve, quand la QNV était à 6 les prix étaient bas et l’an dernier, avec un rendement supérieur à 10, ils flambaient. » « Il ne faut quand même pas laisser croire qu’une QNV haute va faire monter les prix » a réagi un participant. « Certes mais entre 800 000 hl AP et 400 000, il y a tout de même de la marge » a rétorqué B. Vaudon qui dénonce « l’idée fixe de cette région qui consiste à penser qu’une QNV basse fait monter les prix ». « Le vrai problème du Cognac, c’est son marché extrêmement compliqué à appréhender. La production de l’année N va pouvoir être vendue de l’année N + 2 jusqu’à l’année N + 10 et suivantes. En 2009, nous allons produire pour l’année 2019. Impossible de se projeter aussi loin. Par contre la pire des choses pour le Cognac consiste à ne pas produire. Car ce que l’on ne produit pas, on est sûr de ne pas le vendre. De cette manière, le Cognac a perdu récemment des parts de marchés, reprises par le Whisky. Si l’on a besoin d’un schéma pour comprendre ça ! »
« TROP D’HA »
Animateur de la commission production au SVBC, Stéphane Roy estime que le problème de fond est « qu’il y a trop d’ha en face des besoins du négoce ». « On nous dit qu’il faut diminuer le rendement. Nous, nous disons que chaque viticulteur doit être capable d’ajuster la bonne surface au bon rendement. » Le rendement Cognac aujourd’hui, le syndicat le verrait davantage autour de 9-9,5 qu’à 8,20-8,5. Pourquoi un tel niveau ? « Parce que si le rendement est à 8,20 on ne couvrira pas les frais de production. Les gens ayant investi dans la qualité auront la tête sous l’eau. Aujourd’hui nous dénonçons ce système. ». En début de réunion, O. Louvet avait estimé, après études, le coût de production d’un ha Cognac à 6 300 €. « A 10,85, ça passait, à 8,20, cela ne passera plus. On enregistrera des pertes sur les surfaces Cognac. » Le syndicat dit vouloir travailler sur les deux variables d’ajustement que sont le rendement Cognac et la surface affectée. « Clairement nous préférerions 60 000 ha à 9 que 75 000 à 6. En disant aux viticulteurs : profitez d’un rendement relevé pour affecter aux autres débouchés. Sans oublier de se donner rendez-vous avant récolte. Si après affectation, on s’apercevait que les gens n’ont pas joué le jeu, on reviendrait à la case départ. » « En fait, c’est le quota par exploitation que nous voulons » se charge de décoder F.-J. Prioton. « Mais comme nous n’avons pas pu l’obtenir par le passé, nous essayons de le présenter autrement. Nous sommes tout à fait conscients que ce n’est pas un discours facile à transmettre mais, en même temps, ce n’est pas un discours démagogique. » Et le président du syndicat de revenir sur ce qui constitue le leitmotiv de sa formation : « que chaque ha affecté au Cognac soit rentable ».
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