Vitiavenir : « Faire le métier de distributeur » en misant sur la technicité

22 juillet 2010

La Rédaction

Apporter de l’encadrement technique aux viticulteurs pour les aider à piloter judicieusement la protection du vignoble et à utiliser avec mesure les intrants est devenue une véritable philosophie d’entreprise aux établissements VitiVista-David à Touvérac. Cette société de négoce en approvisionnement et en collecte de céréales a choisi « de faire le métier » de distributeur en misant avant tout sur l’apport de technicité. L’approche repose sur la mise en œuvre d’un dialogue de confiance dans la durée pour travailler la technique avec les viticulteurs afin de véritablement raisonner la protection et la conduite du vignoble.

 

 

vincent.jpgL’adaptation des calendriers de traitements aux niveaux de risques réels de chaque cycle végétatif oblige la société David à gérer la commercialisation des approvisionnements différemment. Vendre en morte-saison des calendriers de traitements complets reposant sur 8 à 10 applications préétablis et parfaitement calés pour le cycle végétatif à venir plus de trois mois avant l’éclosion des bourgeons n’est plus prioritaire. Les engagements d’achats en morte-saison couvrent seulement 5 à 6 traitements jugés essentiels et dont le positionnement n’est jamais prédéfini. Par contre, l’entreprise tient à la disposition de ses clients en cours de cycle végétatif un stock de produits permettant de faire face aux besoins de millésimes difficiles comme 2007 ou 2008. Le « portage » du stock de phytos est assuré par le distributeur pour tous les viticulteurs qui s’engagent dans les démarches de suivi personnalisé de vignoble. L’intégration depuis presque deux ans de la société David dans le groupe d’agro-distribution VitiVista n’a pas remis en cause la philosophie de travail d’origine. Des collaborations entre les techniciens des différentes filiales de ce distributeur rayonnant sur un vaste secteur, le Bordelais, la vallée de la Garonne et Cahors se sont mises en place. Néanmoins, la volonté du groupe VitiVista est de donner à chacune de ses filiales les moyens de développer des actions spécifiques adaptées aux réalités des aires de production. La sarl Vitivista-David qui a misé sur un engagement technique véritable a construit une prestation de suivis de vignoble personnalisée et cette initiative semble confortée par les nouveaux propriétaires de l’entreprise. L’équipe technique, animée par Dominique Bonnet, s’est étoffée à l’automne dernier avec l’arrivée d’un deuxième spécialiste de la vigne, Yoann Lefèbvre.

Essayer de proposer aux viticulteurs des services correspondant à leurs attentes

Les Ets VitiVista-David se sont donnés les moyens d’aborder la commercialisation des approvisionnements différemment en proposant un véritable apport de technicité tenant compte des besoins réels des viticulteurs. La formule semble séduire un nombre croissant d’exploitations de la région de toutes tailles (de petites, moyennes ou grandes surfaces) situées sur une vaste zone. M. Dominique Bonnet, le responsable technique et commercial vigne, est à la fois l’initiateur et le principal acteur de cette philosophie de travail. Cet homme d’une nature discrète pensait depuis longtemps que la vente en hiver de calendriers de traitements complets présentait pour les viticulteurs des inconvénients majeurs. La principale incohérence réside dans le fait de ne pas tenir compte de la pression parasitaire au cours du cycle végétatif au moment de l’achat des produits. Depuis 15 ans, cette conviction l’a amené à construire des démarches d’expérimentation et d’observation au niveau de la protection du vignoble en s’entourant au départ de compétences extérieures. Au début des années 90, un partenariat entre la société David et Yvon Bugaret avait été mis en place pour réaliser des essais de stratégie de lutte contre diverses maladies, la nécrose bactérienne, le mildiou et l’oïdium. Les enseignements de ces initiatives ont incité D. Bonnet à aller plus loin. La démarche d’expérimentation de stratégie de lutte s’est rapidement enrichie d’un protocole d’observation de l’évolution du parasitisme au vignoble qui à l’origine avait pour vocation de doter la société David d’un pool technique destiné à assurer la formation interne de l’équipe de technico-commerciaux. D. Bonnet s’est beaucoup investi dans cette activité et, avec le recul, il estime que cela a été l’élément déclencheur de la philosophie de travail actuelle. Dès la fin des années 90, les résultats du travail d’observation au vignoble ont commencé à être utilisés pour établir les préconisations de traitements auprès de la clientèle et leur diffusion a suscité auprès de certains viticulteurs un vif intérêt. Parallèlement aux approches techniques vignes, la société David a aussi proposé à ses clients un accompagnement œnologique pour élaborer des vins de distillation, des vins de pays, des vins techniques d’Ugni blanc et des Pineaux en nouant un partenariat avec le Laboratoire Micheaud. Cette initiative a connu un certain succès et se poursuit encore aujourd’hui avec l’équipe de François Mornet.

Miser sur la technique : « le seul moyen de redonner un sens véritable au métier de distributeur »

L’initiative n’a pas fait « recette » auprès de tous les viticulteurs car ce type d’engagement repose sur une prise de risque et un engagement
responsable pour pousser le raisonnement de la lutte contre les parasites le plus loin possible. La société VitiVista-David travaille aussi avec des viticulteurs à la recherche de stratégies plus sécurisées, mais D. Bonnet observe au fil des années un intérêt grandissant de ces producteurs pour les approches de lutte plus raisonnées. Les structures à dimension humaine de la société ont permis de construire à la fois une approche technique poussée et une organisation de la commercialisation des approvisionnements reposant moins sur la recherche d’un chiffre d’affaires stratégique au moment de la morte-saison. D. Bonnet estime que le développement de méthodes de travail visant à raisonner judicieusement la protection du vignoble constitue le préalable incontournable pour commercialiser des produits phytosanitaires : « Avoir une forte volonté d’aider les viticulteurs à gérer au mieux les applications en fonction de la situation de chaque exploitation, du climat et de l’appréciation du niveau de risque est pour nous essentiel. Cela nous paraît être la voie de la sagesse pour concilier les aspects environnementaux et les aspects économiques au niveau des propriétés viticoles de la région. Aujourd’hui, beaucoup de viticulteurs sont conscients que la protection du vignoble doit être abordée en intégrant trois priorités : l’obligation d’avoir des niveaux de production satisfaisants et les plus constants possibles au fil des années, un impératif de maîtrise des coûts de l’utilisation des intrants phytosanitaires et un engagement fort dans des démarches de respect de l’environnement. C’est pour essayer de répondre à l’ensemble de ces attentes que notre société a mis en place une méthode concrète de la lutte raisonnée engageant de façon conjointe la responsabilité de chaque viticulteur et celle de l’entreprise. Apporter de l’information technique pour aider les responsables des propriétés à prendre ou pas la décision de traiter est aujourd’hui le fondement de notre métier de distributeur. Vendre en hiver 9 à 10 traitements préétablis et cadencés à l’avance nous paraît être dépassé. Nous misons sur une approche de conseils personnalisés reposant sur la mise en place de plates-formes d’observation englobant la gestion de l’entretien des sols, le suivi du parasitisme et les aspects agronomiques liés à des systèmes de conduites et à la fumure. »

Vitiavenir : Une prestation globale et personnalisée de suivi raisonné de vignobles

La société David propose une prestation de suivi de vignoble, Viti-avenir, qui repose sur un dialogue d’information technique durant une campagne complète. La réflexion inclut le désherbage, la fumure, la protection du vignoble et une approche agronomique concernant l’entretien des sols. Le dispositif mis en place fonctionne à la fois en réseau et de façon personnalisée sur chaque exploitation. D. Bonnet considère qu’il est indispensable de multiplier les points d’observation au sein d’une même zone de production pour bien appréhender l’évolution du parasitisme. Le fondement de la prestation repose sur un travail d’observation réalisé dans les propriétés sur des micro-parcelles représentatives d’îlots de production homogène sur le plan de la nature des sols et des systèmes de conduite. Par exemple sur une propriété de 20 ha, le vignoble sera scindé en 5 à 6 îlots terroir/mode de conduite et les observations sont réalisées sur 5 à 6 micro-parcelles identifiées durant toute la campagne. Dans le cadre de cette prestation, un dialogue technique de fond est instauré pour la définition d’un plan de raisonnement de lutte globale tenant compte de la capacité d’intervention pour réaliser les traitements, du type et de la qualité de la pulvérisation (face/face, une allée sur deux…), des effets terroirs, des contraintes d’organisation des travaux à certaines périodes (les disponibilités en personnel pour réaliser les traitements, la durée des relevages, les délais de réentrée…), du niveau d’engagement de chaque viticulteur dans les démarches de raisonnement, de la phénologie, du climat, des prévisions de risque émanant de la modélisation (modèle positif) et de la pression de parasitisme observée sur les micro-parcelles et les témoins. Le travail d’encadrement technique commence par une réunion hivernale de bilan de la campagne précédente mettant en avant les résultats encourageants et aussi les points décevants. Cela permet d’engager le débat sur les projets de la campagne à venir et aussi de réserver les achats de produits pour 5 à 6 traitements en essayant de privilégier les stratégies d’alternance de matière active pour anticiper l’apparition des phénomènes de résistance. Dans le courant de l’hiver (de janvier à mars), une visite de tous les îlots a lieu pour observer le développement de la flore (et adapter les programmes de désherbage), repérer d’éventuels symptômes sur bois d’excoriose ou de nécrose bactérienne et apprécier la vigueur des parcelles (volume de bois présent dans le palissage). Dès la fin mars, le suivi des risques mildiou et oïdium par la modélisation est mis en route avec le modèle Positif sur le site de Baignes et sur d’autres secteurs permettant d’obtenir des relevés météo fiables. La société David adhère au réseau régional de modélisation de Charente et de Charente-Maritime mis en place par les Chambres d’agriculture. Le suivi en végétation des micro-parcelles et des témoins non traités commence à partir du débourrement avec des visites très régulières (toutes les semaines) et les techniciens passent aussi régulièrement dans les différents îlots de vignes. Le travail d’observation de l’évolution du parasitisme se poursuit jusqu’à la fin août. Toutes les semaines, les viticulteurs reçoivent un bulletin d’information et ont un contact personnel avec les techniciens pour affiner les préconisations de lutte. La démarche Vitiavenir va permettre en 2010 de suivre un réseau de 120 micro-parcelles réparties dans une aire vaste de Charente et de Charente-Maritime.

Une prestation facturée de manière totalement différenciée « du business » des phytos

La prestation de suivi du vignoble Vitiavenir nécessite un investissement humain et logistique important pour réaliser les observations de terrain, les synthèses et proposer aux viticulteurs des préconisations fiables toutes les semaines de début avril à la mi-septembre. Depuis le départ, la société David a eu la volonté de facturer cette prestation sur une base totalement indépendante du « business » des produits phytosanitaires. Un engagement contractuel de suivi technique Vitiavenir est signé chaque année en début de saison et certaines propriétés adhérant à la démarche achètent une partie de leurs produits à d’autres fournisseurs. Le montant de la tarification est proportionnel à la surface en vignes, au nombre d’îlots implantés et au degré de technicité souhaité de chaque viticulteur. D. Bonnet et Y. Lefèbvre situent le niveau de coût/ha de la prestation Vitiavenir entre 60 et 150 € ht/ha. En plus des prestations de base citées précédemment, des démarches spécifiques concernant, par exemple, l’appréciation des niveaux de rendements, des notations plus poussées au niveau de parasites comme les maladies du bois, le taux de botrytis à l’approche des vendanges peuvent se rajouter. En contrepartie de l’engagement des viticulteurs dans Vitiavenir, la société VitiVista-David commercialise les produits en ayant une politique tarifaire attractive tout au long de la saison. Le travail d’observation important pour assurer les suivis de micro-parcelles d’avril à septembre mobilise l’énergie des deux techniciens de la société et actuellement environ 1 200 ha sont suivis dans le cadre de la démarche Vitiavenir. La prestation concerne un groupe de viticulteurs motivés qui s’est étoffé au cours des dernières années avec notamment l’intégration d’une propriété de surface importante conduite en viticulture bio. Parallèlement aux suivis de vignoble, un travail technique de fond continue d’être mené avec la mise en place de plates-formes d’essais sur des thématiques d’avenir, l’efficacité des fongicides SDN vis-à-vis du mildiou et de l’oïdium, la mise en œuvre stratégies de pratiques de désherbage chimique raisonnées (parfois associées à du travail mécanique en été), des réflexions long terme sur l’intérêt de plans de fumure, l’étude de programmes de nutrition foliaires et des réflexions concernant le travail du sol et les aspects de conduite du vignoble. Le fait d’avoir constitué un groupe technique a créé des liens constructifs entre les techniciens et les viticulteurs qui débouchent sur des échanges de point de vue, des réflexions sur des sujets plus fondamentaux comme l’organisation des travaux, la conduite du vignoble… Une émulation s’est créée au sein du groupe de viticulteurs et les idées qui en émergent, sont le moteur de l’évolution de la prestation Vitiavenir depuis plus de 10 ans.

Le fonctionnement de Vitiavenir à l’origine de la conception du logiciel de traçabilité de production Travinagri

Le développement des démarches de suivi personnalisé de vignoble a nécessité au sein de la société David la mise en place de moyens technologiques performants pour collecter et archiver toutes les données de terrain. D. Bonnet a dû s’entourer de compétences extérieures pour créer un outil informatique performant : « Au départ quand on suivait moins de 10 parcelles de vignes, le traitement des données issues des observations était réalisé en utilisant le tableur Excel mais dès que le groupe Vitiavenir a commencé à s’étoffer, on a ressenti le besoin de se doter de moyens beaucoup plus performants. Dans le même temps au début des années 2000, les démarches HACCP se mettaient en place dans le vignoble charentais. la conjonction de ces deux éléments nous a amenés à construire un outil informatique adapté à la fois aux besoins de Viti-
avenir et aux exigences HACCP des viticulteurs. La démarche a été initiée en partenariat avec la société Bertrand Informatique à Saintes. Avec un petit groupe de viticulteurs, on a mis en commun nos besoins pour construire un logiciel intégrant les spécificités de la région de Cognac. L’idée de départ était de proposer un produit englobant les aspects vignoble et chai en intégrant une traçabilité complète en phase avec les exigences HACCP de l’interprofession et des grandes maisons de négoce. En 2004, un premier prototype du logiciel Travinagri a été testé dans une petite dizaine de propriétés. Le partenariat entre la société David, les viticulteurs et la société d’informatique s’est avéré très constructif et le produit Travinagri est opérationnel depuis 2007. Le logiciel est organisé autour de trois modules : un concernant le vignoble, un deuxième dédié à la vinification et à l’élevage (incluant la distillation) et un dernier pour la commercialisation. La saisie des données s’effectue à la parcelle ou au chai à partir d’un poket PC, ce qui permet de réaliser le transfert sur le l’ordinateur sans manipulation supplémentaire. L’autre intérêt du logiciel Travinagri est son prix relativement abordable de 960 € HT. Actuellement, une trentaine de viticulteurs l’utilisent et en reconnaissent
l’efficacité ».

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