Le 1er août 2009, la totalité des vins de pays de France, soit environ 150 dénominations, a versé automatiquement dans la catégorie européenne des vins sous IGP (indication géographique de provenance). Mais le passage sera vraiment officiel et définitif en 2011, quand les vins de pays feront leur demande de reconnaissance en IGP auprès des autorités communautaires. Entre-temps, ils auront dû répondre à une série d’obligations : modification des statuts pour être reconnu ODG, écriture des cahiers des charges (soumis à homologation du Comité national INAO), établissement des plans de contrôle. Les vins de pays qui ne s’y soumettraient pas se verraient ravaler au rang de vins sans IGP. Pour certains, ce peut être un choix.
En devenant IGP, les vins de pays rejoignent la grande famille des vins sous signe de qualité, ce qu’ils étaient déjà mais à un degré moindre de reconnaissance. Du même coup, ils héritent de tout l’arsenal réglementaire des vins d’appellation. L’INAO devient leur organisme de tutelle et, surtout, les contrôles changent de nature. Exit le contrôle systématique du produit à l’agrément, conçu comme unique point de passage. Désormais, les contrôles se réaliseront de manière aléatoire tout au long de la chaîne de production, du pied de vigne jusqu’à sa mise en marché, comme pour les AOC (Pineau et Cognac dans la région des Charentes). Il s’agit-là d’un changement radical, au moins dans les pratiques de travail du syndicat. Le syndicat devient ODG et se trouve chargé d’une partie de la gestion du Plan de contrôle – les contrôles internes – tandis que les contrôles externes relèveront d’un Organisme certificateur ou d’inspection choisi par l’ODG. En septembre, le Syndicat des vins de pays charentais a choisi son organisme certificateur. Il s’agit de Qualisud, comme pour le Pineau des Charentes.
Pour couvrir la période transitoire de 2009 à 2011, les autorités de tutelle nationales ont élaboré un plan de contrôle type, qui a vocation à s’appliquer jusqu’à l’approbation des propres plans de contrôle des vins de pays. Courant juillet, l’INAO a émis une note qui précise le contenu de ce plan de contrôle type, applicable à toutes les IGP à compter du 1er août 2009. Il prévoit :
* Le contrôle des conditions de production à la vigne (zone et cépage).
* Les contrôles documentaires du CVI et, si besoin, le contrôle sur place.
* Le contrôle documentaire du rendement.
* Le contrôle produit sur les vins en vrac et sur les vins conditionnés ; les vins conditionnés prélevés ne sont pas bloqués, contrairement aux vins en vrac, bloqués pour un maximum de 11 jours.
* Le contrôle de l’ODG par l’organisme de contrôle une fois par an.
Les fréquences de contrôle produit sont les suivantes :
l 50 % des vinificateurs chaque année, sur 50 % de leurs lots et au moins un lot par an chez les opérateurs contrôlés.
l 100 % des non-vinificateurs situés dans l’aire, sur 10 % de leurs lots par an.
l 10 % des non-vinificateurs situés hors de la zone, sur au moins un de leurs lots par couleur et par an.
Il est dit que la répartition des contrôles se fera entre l’ODG (90 % des contrôles) et l’organisme de contrôle (10 % des contrôles). La note de l’INAO apporte quelques éléments relatifs aux sanctions. « Suite à un manquement relevé en contrôle externe par l’organisme de contrôle, des sanctions seront prononcées à l’encontre de l’opérateur, en application d’un gradient de sanction prédéfini. Les sanctions pourront être les suivantes : avertissement, contrôle supplémentaire, retrait du bénéfice de l’indication géographique, suspension d’habilitation de l’opérateur. Toutefois, suite au relevé d’un défaut non rédhibitoire sur un vin, le lot peut être retravaillé mais pas assemblé avec un autre lot. »
une habilitation automatique
Au sujet de l’habilitation des opérateurs, il est dit que cette habilitation est automatique. « Les opérateurs ont le droit de produire de l’IGP, tant que ce droit ne leur aura pas été retiré suite à un contrôle. » Si l’habitation n’appelle pas d’initiative particulière, les opérateurs devront, avant le 31 décembre 2009, signer un engagement à respecter le cahier des charges et à se soumettre aux contrôles auprès de l’ODG. Quant aux nouveaux opérateurs qui souhaiteront entrer dans l’IGP, ils devront déposer une déclaration d’identification auprès de l’ODG.
Comme vu plus haut, la procédure d’agrément disparaît et la demande qui l’accompagne aussi. Pour les vinificateurs, elle est remplacée par une déclaration de revendication auprès de l’ODG et de l’organisme de contrôle. Cette déclaration intervient lorsque le vin est prêt à être commercialisé. Elle peut concerner un ou plusieurs lots et doit indiquer si le ou les lots sont destinés à la vente en vrac ou au conditionnement. Cette déclaration doit être faite avant la transaction ou le conditionnement des lots concernés et, en tout état de cause, avant le 31 décembre de l’année suivant la campagne.
Les vinificateurs ont la possibilité d’assembler différents lots qui ont fait l’objet de déclaration de revendication, avant une transaction en vrac. Mais ils s’engagent à corriger leur déclaration s’ils modifient le vin avant le conditionnement.
Les vracqueurs non-vinificateurs doivent faire une déclaration de vente en vrac à l’export auprès de l’ODG et de l’organisme de contrôle, avant la transaction à l’export des lots concernés. Ils s’engagent à corriger leur déclaration s’ils modifient le vin avant le conditionnement.
Tous les opérateurs peuvent faire une déclaration de changement d’IGP ou de déclassement en vin sans indication géographique. Le déclassement d’AOP en IGP n’est pas possible en tant que tel.
« pas de surcoût »
Si la nouvelle procédure de contrôle va concerner l’immense majorité des vins de pays, une exception a tout de même été prévue. Elle vise le cas particulier de vins qui n’auraient pas encore été agréés au 1er août 2009. A ce titre, ils seraient soumis à l’agrément ancienne formule jusqu’au 31 décembre 2009. Toutefois, cette exception ne concerne pas les vins de pays charentais. Comme l’explique Caroline Quéré-Jelineau, présidente du Syndicat des vins de pays charentais, « notre décret vins de pays précise que tous les vins doivent être au moins inscrits à l’agrément avant le 31 août et, dans les faits, nous n’avons aucun vin 2008 inscrit à ce jour. Ainsi, tous les producteurs vont rentrer en même temps dans le nouveau régime. » Le syndicat va se réunir fin octobre pour établir une règle du contrôle, car si les contrôles sont aléatoires, faut-il au moins prévoir l’aléatoire. En ce qui concerne le coût du contrôle, le syndicat avait posé comme condition sine qua non que le coût du nouveau contrôle ne dépasse pas celui de l’ancien, lié à l’agrément. « Il nous faudra rentrer dans les clous. Nous refuserons de demander plus aux viticulteurs » signale C. Quéré-Jélineau.
Quand la réforme des vins de pays IGP sortit des limbes, en début d’année, beaucoup de questions se posèrent au sujet de l’étiquetage. La dénomination Vin de pays allait-elle disparaître au profit de la seule mention d’IGP ? Il s’avère qu’il n’en est rien. La liberté est la règle, comme l’indique la note de l’INAO. En clair, l’étiquetage et la présentation des vins peuvent comprendre aussi bien la mention IGP, la mention traditionnelle « vin de pays » ou les mentions associées « IGP – vin de pays ». L’ordre des termes n’est pas réglementé. Le logo IGP pourra figurer sur l’étiquette de manière facultative. La profession des Vins de pays de France, rassemblée au sein de la CFVDP (Confédération française des vins de pays), avait émis un souhait : que la mention « indication géographique protégée » se retrouve sur toutes les étiquettes, seule ou associée aux autres mentions. Sa proposition n’a pas été retenue. Ainsi, la plus grande liberté prévaut. Les organisations professionnelles formulent tout de même une recommandation : que toutes les IGP fassent le choix de porter la mention « indication géographique protégée » en toutes lettres sur leur étiquetage. « Si l’on ne vise pas un minimum de langage commun, à quoi sert la réforme ? »
Concernant toujours l’étiquetage, la règle des 85 % perdure : la mention du millésime pourra figurer sur l’étiquetage à condition que 85 % des raisins utilisés aient été récoltés pendant l’année considérée. Même chose pour la mention de cépage. Elle est autorisée quand au moins 85 % des raisins utilisés proviennent de ce cépage. Pour être complet sur le sujet, en cas d’emploi de plusieurs cépages, ils peuvent être mentionnés sur l’étiquetage à condition que le produit soit issu à 100 % de ces cépages. Dans ce cas, aucun des cépages ne peut représenter moins de 20 % de l’assemblage, un pourcentage pouvant être plus restrictif en fonction des cahiers des charges des différents vins de pays. A noter que l’étiquetage pourra désormais comporter la mention d’une zone géographique plus petite ou plus grande que l’IGP (note de l’INAO de juillet 2009).
Pour la mise en place de la réforme, les vins de pays charentais ont été choisis comme site pilote. FranceAgriMer disposait d’une enveloppe à cet effet. Un consultant a été désigné pour intervenir aux côtés du syndicat. Il s’agit de Blézat consulting, cabinet lyonnais spécialisé dans l’agro-alimentaire. La société a aidé les professionnels à lancer leur appel d’offre vis-à-vis des organismes de contrôles. Il travaille sur la modification des statuts du syndicat, son équipement en nouveaux logiciels ainsi que sur l’information destinée aux ressortissants.
Vins de pays de l’Atlantique : Sur la voie de la sécurisation
Les Vins de pays de l’Atlantique sécurisent leur dénomination, jusqu’à présent en balance avec deux vins de pays de département et acquièrent automatiquement le statut d’IGP.
La dénomination « Vins de pays de l’Atlantique « allait-elle connaître le même avatar que « Vignobles de France » ou « Vin de pays des Gaules » ? Bruxelles a retoqué ces deux dénominations sous prétexte de confusion avec des mentions existantes. En ce qui concerne la dénomination « Vins de pays de l’Atlantique », deux vins de pays de département pouvaient revendiquer une antériorité d’utilisation du terme « Atlantique » : le vin de pays de Loire-Atlantique et le vin de pays des Pyrénées-Atlantiques. Après une période de flottement, les vignerons de Loire-Atlantique ont spontanément renoncé à l’idée d’utiliser l’IGP « Vin de pays de Loire-Atlantique ». Pour la mention « Vin de pays des Pyrénées-Atlantiques », l’affaire est en train de se régler autrement. Cette dénomination n’intéressait en fait que 10-12 producteurs, revendiquant 400 ou 500 hl vol. Il a été décidé de demander une extension du périmètre des Vins de pays de l’Atlantique au département des Pyrénées-Atlantiques. Le vin de pays des Pyrénées-Atlantiques deviendrait alors une sous-dénomination des Vins de pays de L’Atlantique. C’est d’autant plus possible que les nouvelles normes européennes d’étiquetage prévoit explicitement le système des sous-dénominations. Officiellement inscrite à Bruxelles, la mention « Vins de pays de l’Atlantique » devrait être validée avec le cahier des charges.
En 2009, les Vins de pays de l’Atlantique entament leur 4e récolte. Après deux premières revendications à 30-40 000 hl vol., les volumes sont tombés à 6 000 hl en 2008. Dominique Saintout, directeur de la FCVA (Fédération des coopératives vinicoles d’Aquitaine) – qui assure le secrétariat des VDPA – y voit le simple effet de la petite récolte 2008. « En Gironde notamment, les vignerons ont accordé la priorité aux AOC ». Selon lui, 2009 devrait permettre de retrouver un volant d’activité normal. Caroline Quéré-Jelineau, présidente du Syndicat des vins de pays charentais, regrette quant à elle un certain détournement du positionnement des Vins de pays de l’Atlantique. « Initialement, ils étaient conçus pour conquérir de nouveaux débouchés, marchés export, vins de marque. Or des bouteilles de Vins de pays de l’Atlantique se sont retrouvées sur le marché régional, à des prix très très bas. C’est dommage. »
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