Pérennité de l’exploitation, sécurité des parents, équité des enfants non exploitants… autant d’équilibres à respecter pour la transmission d’entreprise, une transmission souvent déclenchée par la retraite des parents. Plus les exploitations grandissent, plus la transmission devient compliquée. Nombreuses sont les transmissions – et avant elles les installations – à s’exercer aujourd’hui dans un cadre sociétaire. Les outils pour transmettre existent, éprouvés : nue-propriété, réserve d’usufruit, donation-partage, bail à long terme, GFA. Suffiront-ils toujours à organiser la transmission ? Moment fondamental de la vie de l’exploitation, la transmission réclame temps de réflexion, approche pluridisciplinaire, transparence et clarté. Juriste en droit rural au CER France Poitou-Charentes, Bruno Braud accompagne depuis plus de 25 ans les adhérents du Centre de gestion en zone délimitée Cognac. Il livre son expérience.
« Le Paysan Vigneron » – A quel moment intervient la transmission de l’exploitation ?
Bruno Braud – Souvent, le projet de départ à la retraite des parents donne le signal de la réflexion. C’est l’élément déclencheur. Quand les parents s’en vont, il faut bien transmettre leurs parts sociales, dans la mesure, bien sûr, où l’exploitation est sous forme sociétaire. Dans la foulée, va généralement se poser la question de la transmission patrimoniale élargie à l’ensemble des enfants et non seulement à l’unique repreneur de l’exploitation.
« L.P.V. » – Pourquoi devrait-on envisager de manière concomitante transmission d’exploitation et transmission patrimoniale ?
B.B. – Pour une raison simple. En agriculture, il est rare de pouvoir transmettre une entreprise sans prévoir une partie de donation à celui qui reprend l’exploitation. Et qui dit donation à l’un des enfants dit, peu ou prou, donation aux autres. D’où la dimension patrimoniale quasi automatique revêtue par la transmission d’exploitation.
« L.P.V. » – Vous parlez de transmission de parts sociales. Mais toutes les exploitations viticoles ne sont pas des EARL, des SCEA…
B.B. – Certes mais aujourd’hui le cadre sociétaire concerne bien deux tiers à trois quarts des exploitations. Quand, dix ans plus tôt, le fils s’est installé, il l’a souvent fait, avec les parents, dans un cadre sociétaire. L’installation sur une exploitation individuelle existe mais c’est assez rare. Après tout, la société constitue encore le meilleur moyen d’organiser le travail ensemble. A la base, elle est faite pour ça. Elle permet de rémunérer le foncier, le travail, le capital social et, éventuellement, les comptes courants associés. Avec la société, on possède un outil qui permet de gérer la vie professionnelle en commun. Cela ne se passe pas toujours bien mais au moins les règles existent.
« L.P.V. » – Par où commence-t-on, quand on veut transmettre son exploitation ?
B.B. – On commence d’abord par en parler au sein de la famille et puis à ses conseillers proches, comptables, conseiller de gestion, conseiller juridique, notaire, banquier. Rendez-vous est pris pour déterminer les objectifs, expliquer les enjeux, voir là où les personnes veulent aller. En général, plusieurs objectifs cohabitent : un objectif de sécurité financière pour les parents, un objectif de sécurité financière pour l’entreprise, gage de pérennité de cette dernière, et un objectif d’équité envers les enfants non exploitants. A mon sens, tout ceci doit se faire dans la plus grande clarté, dans la plus totale transparence. En matière de transmission, clarté et transparence sont vraiment les maîtres mots. Il ne faut pas hésiter « à mettre les chiffres sur la table ».
« L.P.V. » – Doit-on s’y prendre longtemps à l’avance ?
B.B. – Je dirais qu’une réflexion comme ça réclame bien un an, le temps de bâtir un vrai projet de transmission d’entreprise et potentiellement de patrimoine. On peut s’y préparer à l’avance, anticiper mais ce n’est pas la peine non plus de démarrer trop tôt. Il faut au moins attendre que tous les enfants soient majeurs et, mieux encore, aient commencé à s’orienter dans la vie. On évite ainsi les erreurs d’allotissement.
« L.P.V. » – Quelle trame suivez-vous pour organiser une transmission ?
B.B. – Cette trame est toujours un peu la même. On va d’abord examiner de quoi se constitue le patrimoine des parents. Est-il uniquement basé sur l’exploitation, est-il en partie diversifié avec des immeubles d’habitation… ? On envisagera ensuite les besoins financiers des parents, ce qu’ils devront conserver pour assurer leurs besoins financiers et ce qu’ils vont pouvoir donner. C’est vrai que des transmissions peuvent s’envisager sans donation mais économiquement, c’est délicat. Les tailles d’exploitations grossissent avec, à la clé, des valeurs plus importantes. Dans le même temps, le revenu agricole reste limité. Souvent les banques refusent d’assumer seules le risque. C’est pourquoi, dans beaucoup de cas, on va mixer les outils : un peu de remboursement de parts sociales, un peu de remboursement de compte courant associé, un peu de donation.
« L.P.V. » – De quels outils juridiques disposez-vous ?
B.B. – On va pouvoir recourir au démembrement de propriété entre nue-propriété et réserve d’usufruit sur certain biens. On s’interrogera sur le principe de donations égalitaires entre enfants. Il est toujours possible d’avantager l’un par rapport à l’autre, en jouant sur la quotité disponible des deux parents. Mais est-ce souhaitable ? Si ça se fait, cela devra être très bien expliqué et compris par la fratrie. Par ailleurs, les parents sont, la plupart du temps, animés d’un désir de justice envers leurs enfants. A une certaine époque, la charge de soin des parents servait de contrepartie. Mais c’est le genre de cadeau empoisonné qui n’est plus de mise aujourd’hui.
En ce qui concerne la mise à disposition de l’outil de production, on recourra fréquemment au bail rural à long terme. Le bail à long terme demeure un outil incontournable de la transmission, dans la mesure où il sécurise le repreneur et lui donne une visibilité sur des biens dont il n’est pas propriétaire.
« L.P.V. » – Comme outil, vous avez évoqué la donation-partage.
B.B. – En effet, la donation-partage entre tous les enfants est souvent utilisée dans le cadre de la transmission d’exploitation. Elle permet d’allotir chacun des enfants du vivant des parents mais aussi au même moment. Psychologiquement, c’est important. Elle présente un autre intérêt, celui de figer la valeur des biens à un instant T, le même pour tous. Imaginons une donation simple (dite encore en avance de succession) au profit de celui qui reprend l’exploitation. Au moment de la succession, le bien devra être rapporté à la valeur constatée à la date de la succession. Entre les deux – entre la donation et la succession – le bien aura pu prendre de la valeur. Pour toutes ces raisons, la donation-partage entre tous les enfants est de loin préférable.
« L.P.V. » – Dans cette donation-partage, que va-t-on attribuer à l’enfant exploitant ?
B.B. – Si la transmission s’effectue dans un cadre sociétaire, l’enfant exploitant va recevoir en priorité les droits sociaux de la société (parts sociales représentatives du matériel et des stocks appartenant à la société – comptes courants…). Une question va alors se poser. Est-il judicieux ou non de transmettre des parts de la société d’exploitation aux autres enfants ? En la matière, il n’y a pas de réponse toute faite. A noter cependant que les enfants non exploitants ne partagent pas forcément les mêmes intérêts que l’enfant exploitant. Si certains peuvent accepter de laisser du résultat dans les comptes courants associés pour développer l’entreprise, d’autres souhaiteront récupérer l’intégralité du résultat, qui pour acheter une maison, qui un fonds de commerce… Assez souvent, les enfants non exploitants ne figurent pas dans la société d’exploitation. Ce n’est pas systématique mais cela s’observe dans de nombreux cas.
« L.P.V. » – Que vont recevoir les enfants non-exploitants ?
B.B. – En priorité, les enfants non-exploitants auront vocation à recevoir du foncier en nue-propriété et/ou, quand les parents ont pu diversifier leur patrimoine, maison d’habitation, biens immobiliers à usage locatif… Si cela ne s’avère pas suffisant, ils recevront des soultes de la part du repreneur. Quand la maison d’habitation est imbriquée dans le corps de ferme – comme cela se voit fréquemment – c’est compliqué de l’attribuer aux enfants non exploitants. Elle revient souvent à l’enfant exploitant.
« L.P.V. » – De quelle manière transmet-on le foncier agricole à ceux qui n’exploitent pas ?
B.B. – Le foncier agricole (terres, vignes) pourra être attribué de différentes façons : soit parcelle par parcelle, soit par lots mais l’on pourra aussi faire appel à une société immobilière foncière type GFA. Les enfants non exploitants recevront alors des parts de GFA, souvent en nue-propriété, l’usufruit des terres restant aux parents, pour percevoir un fermage en guise de complément de revenu. Dans ce cas, c’est le GFA qui devient propriétaire et donne à bail à long terme à la société d’exploitation détenue par l’enfant exploitant. Ce montage présente plusieurs intérêts. Le GFA évite de « dépecer » l’exploitation. Avec les parts de GFA, l’égalité des lots est préservée dans le temps (par exemple, une parcelle de terre devient constructible : l’enrichissement profite à tous). L’enfant exploitant peut acheter à son rythme les parts de GFA. Les associés du GFA peuvent transmettre des parts sociales en nue-propriété à leurs propres descendants. Ce montage juridique soulève cependant une interrogation de fond, celle de l’équité. En fait, s’affrontent au sein du GFA deux intérêts contradictoires : celui de l’entreprise, symbolisé par le bail à long terme, gage de sécurité et de pérennité pour l’enfant exploitant ; et celui des enfants nus-propriétaires, qui ne perçoivent même pas de revenu (en cas d’usufruit) et qui verront leurs biens immobilisés. Pour être compris et admis, ce montage devra reposer sur un « pacte social » : que l’enfant exploitant se donne sa durée de vie professionnelle pour racheter les parts de ses frères et sœurs. Car ce qui a pu être accepté par les frères et sœurs risque de ne pas l’être par les neveux et nièces. Qui plus est, ce montage sera d’autant mieux « digéré » que la rémunération du foncier – le fermage – sera jugée acceptable.
« L.P.V. » – Vous avez évoqué à plusieurs reprises la notion de sécurité financière des parents. Comment va-t-elle être garantie lors de la transmission d’exploitation ?
B.B. – Comme déjà dit, un premier élément est lié au versement de fermages. Il y a ensuite tout ce qui relève du remboursement des parts sociales et du compte courant associé.
« L.P.V. » – Qu’est-ce qu’un compte courant associé ?
B.B. – Partons d’une société créée entre les deux parents et leur fils exploitant. Les comptes courants associés constatent tout simplement ce que la société doit à chacun des trois associés. Il s’agit de l’ensemble des revenus qui n’ont pas été prélevés par eux. Les associés laissent de l’argent à disposition de la société et servent donc, quelque part, de banquiers. Ces comptes courants associés peuvent avoir plusieurs origines. A la création de la société, une partie des biens a pu être transférée sous forme d’apport en capital mais aussi sous forme de compte courant, en guise de fonds de roulement. C’est le cas par exemple des parents qui apportent à la société l’argent dégagé par la vente d’un stock constitué à titre individuel.
Une autre origine tient à la quote-part de résultat qui revient aux uns et aux autres et qui n’a pas été prélevé au cours de la vie de la société. Cet argent sert à alimenter la trésorerie, à développer l’entreprise. Il participe à l’autofinancement des investissements, au financement des stocks. Plus l’entreprise grossit, plus les comptes courants associés ont tendance à croître. Certes, cet argent pourrait aussi aller à l’augmentation du capital social. Mais généralement, ce n’est pas le cas. D’où des comptes courants associés qui, au bout de dix ou quinze ans, peuvent représenter des sommes relativement importantes, de l’ordre de 200, 300 000 €, voire davantage.
« L.P.V. » – Mais n’est-ce pas de l’argent virtuel. Dans la mesure où il est réinvesti, il n’est pas disponible ?
B.B. – Effectivement, il ne s’agit pas d’argent disponible, mobilisable à court terme. C’est pour cela, sans doute, que la notion de comptes courants associés a autant de mal à passer dans les esprits. Les personnes ont l’impression que ces droits sociaux ne représentent rien. Ils ont tort. Les droits sociaux sont représentatifs de valeurs sonnantes et trébuchantes. Il faut bien comprendre que dès qu’il y a constitution de société, on n’est plus propriétaire de ses biens ou détenteur de son stock. On est juste propriétaire de droits sociaux, parts sociales ou comptes courants associés, qui se substituent aux biens d’avant. Ainsi, le stock individuel disparaît au profit de ces fameux comptes courants associés qui constatent, le plus souvent, l’argent investi pour financer le stock.
« L.P.V. » – Comment s’apprécie la valeur des comptes courants associés ?
B.B. – C’est très simple. Chaque année, lors de l’assemblée générale ordinaire de la société, un état des lieux est dressé, qui consigne l’état du compte courant de chacun des associés. Comparaison est faite entre débit et crédit, entre ce qui est apporté et ce qui prélevé.
« L.P.V. » – Ne pourrait-on pas « oublier » les comptes courants associés ?
B.B. – Fiscalement, l’abandon de comptes courants associés serait considéré comme un profit exceptionnel pour la société et requalifié comme tel, avec les conséquences fiscales et sociales. On n’a d’autres choix que de « faire avec ». Les comptes courants associés drainent des enjeux financiers importants. D’ailleurs, cela ne présente pas que des inconvénients.
« L.P.V. » – C’est-à-dire ?
B.B. – En demandant le remboursement de tout ou partie de leurs comptes courants associés, les parents vont pouvoir se constituer un complément de retraite. Au risque de me répéter, je vous précise qu’en structure sociétaire, on ne peut plus compter sur la vente de son stock d’eau-de-vie pour se constituer un complément de retraite. Car, par définition, ce stock ne vous appartient plus. Il appartient à la société. Par contre vous disposez d’un droit de tirage sur le compte courant associé, c’est-à-dire sur l’argent qui a servi à financer ce stock.
« L.P.V. » – Concrètement, comment va-t-on procéder ?
B.B. – Du point de vue juridique, le compte courant associé s’assimile à une dette potentiellement exigible immédiatement, du jour au lendemain. Mais dans les faits, cela ne se passe pas exactement comme ça. Il va falloir tenir compte de la faculté contributive de l’entreprise. Clairement, on ne peut pas demander au fils repreneur de rembourser en 7-8 ans ce que son père a mis 30 ans à constituer. Entre le remboursement de l’intégralité du compte courant associé et, à l’autre bout de l’échelle, la donation de la totalité du compte courant associé à l’enfant ou aux enfants exploitants, c’est généralement la voie médiane qui est retenue. Une partie va être transmise à titre gratuit, autrement dit donnée et une autre partie remboursée. La ligne de partage tient compte ipso facto de la faculté contributive de l’exploitation. Si une entreprise a une capacité de remboursement de 100, il ne faudra pas que les 100 passent dans la dette familiale. Elle devra conserver un volant pour faire face aux investissements. Mieux ! L’organisme prêteur sera souvent le père, par le biais d’une reconnaissance de dette assortie à un échéancier. La banque, seule, accepte rarement de tout porter.
« L.P.V. » – Des tailles d’entreprises importantes rendent-elles la transmission plus compliquée ?
B.B. – Ce n’est pas le seul facteur qui joue. A l’évidence, la transmission à un enfant unique sera plus simple à réaliser qu’en présence d’une fratrie de dix. Même chose s’il y a ou non diversification du patrimoine. Ceci dit, plus la structure est importante, plus les droits sociaux sont élevés et, de façon mathématique, moins le fils exploitant recevra de foncier dans son lot, le foncier servant, dans la majorité des cas, à compenser les parts des autres frères et sœurs. Maintenant, il faut bien voir qu’un important capital d’exploitation constitue également une richesse, en terme de stock comme de fonds de roulement. Plus la valeur d’entreprise est élevée, plus elle est censée dégager du revenu. Sinon il y a du souci à se faire.
« L.P.V. » – Face à l’agrandissement des exploitations agricoles, ne devra-t-on pas recourir un jour à de nouveaux outils. On parle de la holding comme d’une piste ? Mais qu’est-ce qu’une holding ?
B.B. – La holding est une structure financière chapeau qui permet de faire circuler du résultat et de la trésorerie entre les sociétés filles (société de production, société de commercialisation, société foncière…) et la société mère, la holding. Par ce biais, les apporteurs de capitaux – en l’occurrence les enfants non exploitants – peuvent recevoir du résultat sous forme de rémunération de parts. Ainsi n’est-on plus obligé de rembourser le patrimoine à chaque génération. Par contre, il faut bien comprendre que ce montage révolutionne le fonctionnement des entreprises. En plus de la rentabilité court terme des parts s’ajoute une approche globale de groupe, avec des flux de trésorerie à gérer. Avec la holding, on passe d’une société d’hommes à une société de capitaux. Pour l’heure, ce phénomène reste encore marginal.
« L.P.V. » – Dans quel climat s’effectue généralement les transmissions ?
B.B. – Dans la plupart des cas, cela se passe plutôt bien. Et cela se passe d’autant mieux que les gens acceptent de regarder le problème en face. Beaucoup de parents on a cœur de réussir la transmission. J’entends souvent la réflexion suivante : « Je ne veux pas que ça se passe comme ça s’est passé pour moi. » Certains parents se disent « hantés » par le sujet. Ils ne veulent pas être suspectés de favoriser un enfant au détriment des autres.
« L.P.V. » – Quels sont les écueils les plus fréquemment rencontrés ?
B.B. – Une étape un peu délicate concerne l’évaluation des biens servant de base à l’évaluation des parts sociales (matériel, stock viticole) et du foncier. Il faut que cette évaluation soit à la fois équitable au plan familial et cohérente vis-à-vis de l’administration fiscale en terme de valeur vénale. On demande souvent à un expert foncier de s’en charger. D’autres situations de blocage peuvent également se présenter : au niveau de la quotité disponible par exemple, qui soulève tout un aspect psychologique ; au niveau de la perception de la situation économique par les enfants non exploitants. Quand la période est faste, la tentation est forte d’aller vers des valeurs élevées. En 1990-1991, on a vu des exploitations se transmettre à des coûts disproportionnés. Prudence donc sur la valeur des biens. Cela dit, le dialogue entre les trois principaux interlocuteurs techniques – le banquier, le cabinet comptable et le notaire – relativise ce genre de danger. Tout le monde a intérêt à ce que l’entreprise perdure.
« L.P.V. » – Quels conseils préconiseriez-vous pour une transmission réussie ?
B.B. – Bien entendu, il faut tenter d’anticiper l’événement mais sans exagérer non plus, afin d’éviter les erreurs d’aiguillage. Je n’insisterai jamais assez sur les notions de transparence et de clarté.
Pour les parents, la transmission de l’outil peut être synonyme de perte de pouvoir, même s’ils restent toujours dans l’entreprise. Ils doivent s’y préparer. Et bien sûr, l’on ne peut qu’encourager la diversification du patrimoine. Mais ce n’est pas toujours facile à réaliser. Quelquefois l’exploitant est obligé de tout laisser dans l’entreprise. Il n’a pas vraiment le choix.
« L.P.V. » – Vous êtres conseiller juridique au CER depuis plus 25 ans. Vous avez dû voir passer des générations d’agriculteurs.
B.B. – Effectivement, je commence à voir arriver des gens à la retraite que j’ai suivi au début de leur carrière et dont j’ai installé les enfants dans le cadre sociétaire.
« L.P.V. » – S’installe-t-on aujourd’hui comme on s’installait hier ?
B.B. – Après une période marquée par très peu de reprises, les installations ont redémarré mais de manière un peu différente. On constate parfois des installations différées, avec des enfants qui reviennent plus tard, vers la trentaine. On voit aussi des reprises où le repreneur n’est pas présent à 100 % sur l’exploitation. Il recourt à de la main-d’œuvre salariée ou à des prestations de service tandis que le père jette un œil, voire plus qu’un œil, sur la marche des affaires. En matière de transmission, il n’y a pas deux cas identiques. Chaque famille a sa vérité.