Elu en ce début 2014 à la présidence du syndicat, Thierry Jullion s’attache à partager avec ses adhérents un peu de l’enthousiasme qui l’habite, pour revendiquer haut et fort la place du vin de pays charentais dans le paysage viticole des Charentes.
Pourquoi devient-on président du Syndicat des vins de pays charentais ?
Pas pour obéir à un plan de carrière en tout cas… Je fais du vin depuis très longtemps – plus de 30 ans, je fais partie des précurseurs. J’ai toujours cru au vin, malgré l’hégémonie du maestro cognac et de son petit frère pineau, que je produis tous deux aussi par ailleurs. Mais le vin, c’est autre chose : on voit ses clients plus souvent, on crée des relations… J’ai beaucoup reçu du vin de pays charentais. Devenir président, c’est lui rendre un peu de ce qu’il m’a donné…c’est dans cette optique que j’ai adhéré au syndicat il y a cinq ans. La présidente de l’époque m’a lancé un jour à propos d’une décision que je discutais : « Vous n’êtes pas d’accord avec ce qu’on fait, vous n’avez qu’à venir pour que ça change… » Je l’ai prise au mot et un an plus tard, j’étais responsable de la communication.
Parlons communication justement. lle a beaucoup évolué pendant que vous vous en occupiez…
Le moins qu’on puisse dire de la communication telle que je l’ai trouvée il y a 4 ans, c’est qu’elle était très plan plan. Toujours le même schéma, année après année : affichage, dotation de bouteilles sans véritable suivi, participation à Blues Passions, mais sans plus, et insertions presses.
Avec le président élu à cette époque, mon prédécesseur Jean-Louis Barraud, nous étions d’accord sur ce constat. Nous avons donc diligenté un audit. Il nous a confirmé que notre image était vieillotte et que nous avions besoin de nous faire aider par des professionnels pour la rajeunir. C’est l’agence Outdoo qui a été choisie pour apporter de la fraîcheur, de la nouveauté, de la vivacité, pour redynamiser l’ensemble.
Comment cette cure de rajeunissement s’est-elle traduite ?
Avec l’agence, nous nous sommes attelés à balayer cette image peu novatrice : redéfinir une cible rajeunie, les 25-45 ans hommes et femmes qui sortent, qui aiment les restos, les bars à tapas… mettre en avant un mode de consommation qui valorise le consommateur et le vin…
Nous avons adopté un nouveau logo décliné sur de nombreux outils de PLV : outils, flammes, kakémono, stands, affiches, cartes des producteurs à disposition dans des lieux touristiques… et puis surtout nous nous sommes équipés pour une communication web 2.0 : un nouveau site avec une carte interactive, une page Facebook, des vidéos sur You tube…
Comment cette évolution a-t-elle été vécue par les adhérents ?
Pour réussir ce pari, il est essentiel que l’ensemble des producteurs adhère. La nouvelle signature l’affiche d’ailleurs clairement : 600 vignerons, une signature. Mais en parallèle, il faut soigner la communication interne et convaincre nos adhérents de leur importance dans le paysage viticole charentais. Ils doivent comprendre le rôle essentiel que joue le vin dans la défense des valeurs du terroir, des valeurs du bien-vivre à la charentaise… le vin de pays charentais a sa place à côté du pineau et du cognac et je veux que les producteurs de vins soient reconnus par les autres producteurs, je veux qu’on cesse de les dénigrer…mais ils sont les premiers que nous devons convaincre… il y a beaucoup à faire, mais ça bouge. Par exemple, nous commençons à organiser des dégustations entre producteurs, en fin d’hiver, pour qu’ils puissent échanger, découvrir les productions de leurs collègues, apprendre à connaître les vins et à en parler.
Les études nous montrent que si notre vin est consommé en grande partie dans la région, ce ne sont pas les locaux qui le boivent… il faut aussi agir sur les Charentais pour qu’ils consomment et qu’ils en parlent… nous avons trop longtemps baissé les bras face à des remarques blessantes…on ne devrait plus voir une manifestation organisée par des instances charentaises sans vins de pays charentais sur la table.Pour parvenir à ce résultat, il faut déjà que nos producteurs soient fiers de leur produit et aiment leur vin… c’est un travail de tous les jours. Mais attention, tout ce travail de conviction se déroule dans une atmosphère très conviviale : les adhérents doivent être contents de se rencontrer et de rencontrer le syndicat.
Quels sont vos objectifs, vos espoirs pour la filière dans les années qui viennent ?
Mon objectif premier, c’est que les producteurs de vins de pays charentais soient respectés, que nous soyons incontournables dans la région. Pour y parvenir, nous avons besoin d’outils adaptés. La première étape, c’est d’aller plus loin que l’IGP et d’obtenir une AOC. C’est un travail de longue haleine, sur lequel un groupe de travail a déjà commencé à plancher.
Et puis, pour prendre vraiment notre place aux côtés du pineau et du cognac, symboliquement il est important de disposer de notre propre espace. Pourquoi pas une maison des Vins de Pays Charentais ?
Bien sûr tout cela demande des moyens et les subventions sont plutôt à la baisse. Si l’on veut notre indépendance, ce sont des cotisations que viendront les financements. Pour qu’elles augmentent il faut accroître la production, or nos vignes commencent à vieillir. C’est pour cela que nous avons demandé un plan de plantation sur 4 ans, de 100 hectares par an pour passer de 1 600 à 2 000 hectares à l’horizon 2018, afin d’augmenter les volumes de production. Et je ne m’inquiète pas pour la commercialisation de ce supplément. Tous les vins, entrées de gamme, cœur de la production et locomotives…, sont concernés par ce projet.
Pour gagner le respect, il nous faut gagner notre indépendance mais aussi nous professionnaliser : les opportunistes qui arrachent pour revenir au cognac quand les cours remontent ne nous intéressent pas. Nous avons besoin de vrais professionnels qui ont investi, qui savent faire du vin et qui aiment leurs vignes. Signe encourageant pour l’avenir : les superficies ont cessé de baisser !
Les missions du syndicat
Le Syndicat des producteurs et de promotion des vins de pays charentais est officiellement reconnu organisme de gestion depuis le 29 juin 2011. Il a donc en charge, sous la tutelle de l’INAO, l’identification des producteurs et le suivi des lots de vin revendiqués sous le signe de qualité Indication Géographique Protégée Vin de Pays Charentais (IGP).
Ses missions sont les suivantes :
● Elaborer le cahier des charges, proposer des modifications, contribuer à son application par les opérateurs et participer à l’élaboration et la mise en œuvre du plan de contrôle notamment en réalisant les contrôles internes qu’ils prévoient auprès des opérateurs.
● Participer aux actions de défense et de protection du nom, du produit et du terroir, à la valorisation du produit (organiser la communication et la promotion des Vins de Pays Charentais) ainsi qu’à la connaissance statistique du secteur.
● Mettre en œuvre les décisions du Comité national de l’INAO qui le concernent.
● Assurer la défense des droits et des intérêts des producteurs de vins à IGP Charentais.
● Représenter les vins à IGP charentais dans les différentes instances professionnelles, locales, régionales, natio-nales et communautaires.
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