Ses homologues du SVBC ne sont-ils pas allés un peu vite en besogne en annonçant comme « bouclé » le dispositif de rendement 2010 ? C’est le sentiment qui traverse Christophe Forget à la lecture des articles relatant l’AG du syndicat. Il s’inquiète : « Nos viticulteurs risquent de penser que les discussions sont beaucoup plus avancées que ce que nous leur avions dit. » Certes, les thèmes du rendement plancher et de la réserve de gestion ont effectivement été débattus à la FVPC (Fédération des viticulteurs producteurs de Cognac), la structure ombrelle qui rassemble les deux syndicats viticoles. Cependant, le président du SGV Cognac estime que « tout n’est pas calé », ne serait-ce qu’en attente de l’avis de ses collègues du SGV. « La position prise par quelques hommes à la tête de la fédération n’engage pas le syndicat. Ce projet doit être soumis à une approbation plus large de nos membres. » Il y a ensuite tous les « éléments modérateurs » qu’il voit à l’application d’une réserve de gestion. « L’année 2010 sera une année de renouvellement des engagements contractuels, chez la plupart des négociants. Si les contrats affichent une tendance à la baisse, cela ne plaidera pas pour une confiance dans l’avenir de la part des négociants. La viticulture veut bien croire à l’intérêt d’une réserve de gestion en cas de soubresauts du marché à la hausse mais pas à n’importe quelles conditions. Ce serait trop facile ! » Le niveau des prix représentera un autre indicateur clé.
message discordant
En clair, le SGV considère que « trop de messages discordants ruineraient l’avenir de la réserve de gestion ». « Ce fut rappelé aux négociants » a indiqué Jean-Bernard de Larquier, chef de famille de la viticulture au BNIC. Celui qui a vocation à porter la parole de tous les viticulteurs à l’interprofession a rappelé le contexte dans lequel était intervenu l’accord sur le rendement plancher et la réserve de gestion. « C’est le fruit d’une négociation obligée, avec forcément des concessions de part et d’autre. » Pour mieux expliciter l’idée, le chef de famille de la viticulture a passé en revue les attentes des uns et des autres. « Le SGV était demandeur d’un rendement plancher, car aucune exploitation n’est capable de tenir à un rendement de 7 ou de 7,4 hl AP/ha. Le SVBC défendait pour sa part une réserve de gestion, pour un volume de 2,5 hl AP/ha. Nous avons transigé à 9, en estimant que c’était largement suffisant. Ses représentants voulaient geler le système pour 5 ans. La durée a été ramenée à deux ans. Pour la libération de la réserve, nous aurions préféré le compte 8 au compte 6 mais finalement c’est le compte 6 qui a prévalu. Pour avancer, il n’y a pas d’autres méthodes que la négociation. »
Que Stéphane Roy parle « d’obligation de moyens » et non « d’obligation de résultat » pour la validation juridique de la réserve de gestion a semblé une bonne chose à J.-B. de Larquier. « Cela relève du principe de réalité. Dans ces domaines, la baguette magique n’existe pas. »
validation juridique
Concernant la réserve de gestion, une question récurrente se pose : celle de sa validation juridique. Possible ou pas possible ? Par rapport à la réserve climatique, déjà compliquée à verrouiller, la réserve de gestion pose un problème supplémentaire, dans la mesure où elle fait intervenir le vieillissement. Qu’en pense Janine Bretagne, la référente régionale en matière de droit viti-viticole ? Sa réponse est intéressante car elle dépasse le seul cadre de la réserve de gestion. « La faisabilité de la réserve de gestion ? Pourquoi pas, mais il faudra l’inclure dans un dispositif « rendement » beaucoup plus général qui couvrira le rendement annuel, la réserve climatique, la réserve de gestion. Il y a une forme de « tuilage » à trouver entre le cahier des charges, les règles interprofessionnelles et un dispositif chapeau qui pourrait être le Code rural, pour sécuriser l’ensemble. » La juriste n’est pas loin d’y voir l’occasion « de rebattre les cartes, mettre tout sur la table et essayer d’extraire quelques grands principes. Car, dit-elle, tout est dans tout. » A l’évidence cependant, si une partie doit l’emporter sur le reste, ce sera celle liée au cahier des charges, car elle déterminera la capacité de sanction, par la puissance régalienne du droit des appellations. Mais la LMA (loi de modernisation agricole) qui arrive promet également d’avoir des interactions sur les interpro ; des évolutions se dessineraient aussi au plan communautaire, vers moins de libéralisme… Quoi qu’il en soit, la juriste ne le cache pas. « Il y aura un gros dispositif réglementaire à mettre en place avec les pouvoirs publics. Et nous ne sommes pas les seuls dont ils doivent s’occuper. » En terme de calendrier, une application de la réserve de gestion aux vendanges 2010 semble à Janine Breagne un objectif « ambitieux ». « Je suis prudente dit-elle. »
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