Répercussions du gel : Interview de Patrice Fradet, directeur de territoire, CERFRANCE

22 mai 2017

Globalement, les exploitations viticoles sont solides mais, pour celles qui ont gelé et, plus encore, celles qui ont vécu le cumul de la grêle et du gel, l’année 2017 risque de s’avérer compliquée en termes de trésorerie. Commentaires de Patrice Fradet, directeur de territoire Cognac / Saintonge à Cerfrance Poitou-Charentes.

Les répercussions de la gelée, à quel niveau les estimez-vous ?

 

C’est très variable, selon le degré d’atteinte, selon que l’on dispose de réserve climatique, selon que l’on est assuré ou pas. Je n’ai pas l’impression que beaucoup de gens soient assurés contre le gel alors que l’assurance grêle s’est bien développée. Censément, va se poser un problème de trésorerie. Je pense que nos exploitations sont solides sur la durée mais il va y avoir un passage compliqué. Outre les points déjà listés, peut-être des personnes ont-elles encore un peu de stock, notamment dans les crus périphériques, sur du hors contrat. Ce stock, qui se vendait mal ces derniers temps, va peut-être se libérer plus facilement. Mais une fois l’inventaire réalisé des rentrées, il va falloir se tourner vers les banques, pour voir comment elles vont pouvoir suivre. Nous irons forcément vers des prêts de trésorerie, en repoussant éventuellement quelques annuités.

 

Vous parlez d’exploitations solides mais existait-il, déjà, des exploitations en difficulté.

 

Il y en avait en effet et, pour celles-là le risque est encore plus élevé. En général, la principale source de difficulté provenait de rendement pas toujours au niveau. Un problème qui pouvait être structurel et que la gelée voire la grêle n’ont pu qu’amplifier.

 

Et le niveau d’endettement ?

 

Bien sûr, il joue aussi. D’ailleurs, il est conséquent pour tout le monde. En moyenne, on estime à 8,5 hl AP ha le seuil de trésorerie lié aux annuités. Une année en dessous est donc synonyme de difficultés. Le problème, c’est le cumul des accidents climatiques : plus de réserve climatique, des trésoreries en berne..

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Y a-t-il un effet taille ?

 

Pas vraiment. Si les dépenses sont plus importantes, les ressources le sont aussi. Certes l’endettement avait fortement augmenté ces dernières années mais les trésoreries s’étaient également consolidées. Non, pour moi, le principal effet est celui du cumul, entre une grêle conséquente l’an dernier, un gel cette année…

 

Existe-t-il des mesures d’accompagnement ?

 

Oui bien sûr mais je ne pense pas que ce soit là l’essentiel. Le dégrèvement de la taxe sur le foncier non bâti ne va pas changer la face du monde. Si vraiment un dispositif fait la différence, c’est celui de la réserve climatique. Vraiment une excellente solution.

 

En matière fiscale, de quels moyens dispose-t-on ?

 

Il y a notamment le mécanisme de la sous-réalisation pour le calcul du prix de revient. Il permet de constater les charges dès l’année de la mauvaise récolte. Vis-à-vis de ce genre d’outils, il ne faut s’attendre ni à un miracle ni à une catastrophe. Nous avons les moyens de lisser les choses. D’ailleurs, normalement, qui dit aléas climatiques dit baisse du résultat. L’an dernier, avec la grêle, cela pouvait être différent avec la prime à la parcelle. Avec la grêle, nous n’avons pas ce phénomène.

 

Dans quel état d’esprit avez-vous trouvé vos adhérents touchés par la gelée ?

 

J’en ai appelé pas mal le jour même. Ils accusaient le choc bien sûr mais se positionnaient d’emblée en chefs d’entreprise, dans le prévisionnel, dans la gestion de la situation. Ils ne baissaient pas les bras. Aujourd’hui, ils ont en tête leur schéma pour l’année à venir. C’est important. C’est là-dessus que nous allons pouvoir les accompagner auprès des banques , en chiffrant leurs besoins. C’est triste à dire mais les exploitants commencent à avoir l’expérience des sinistres. La plupart ont vécu plusieurs épisodes de grêle très sérieux. Aujourd’hui, l’accident climatique commence à faire partie de la gestion d’entreprise.

 

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