Régulation des plantations : Un ouf de soulagement

8 janvier 2013

Piloté par la Commission européenne, le 4e et dernier « GHN » (Groupe à Haut Niveau sur les plantations viticoles) envoie un signal positif. Certes, les droits de plantation vont disparaître mais ils seront remplacés par un système d’autorisations et ce « pour tous les pays et toutes les catégories de vins ». Ouf de soulagement dans les rangs des pro-régulation. Pour autant, la vigilance reste de mise. Il va falloir s’assurer que les recommandations « politiques » du GHN se traduisent bien dans les textes. Par ailleurs, des points cruciaux restent à préciser. Comme le dit la formule, « le diable se cache dans les détails. »

 

 

C’est à Bruxelles, le 14 décembre dernier, que s’est tenu le 4e et dernier GHN. Son objet ? Emettre des recommandations sur la façon de gérer les plantations viticoles en Europe. Jusqu’au dernier moment et malgré l’intense travail de lobbying conduit en amont par les pro-régulation, une forte dose d’inconnu subsistait. Tout pouvait encore basculer. D’où un profond sentiment de soulagement à la lecture des recommandations du GHN, favorables à l’encadrement des plantations. « S’il n’y avait pas eu accord, note Pascal Bobillier-Monnot, directeur de la CNAOC, c’eut été beaucoup plus compliqué. Il fallait repartir en négociations avec le Conseil, le Parlement, la Commission, en sachant qu’une vague de renouvellement va toucher toutes ces institutions. Par ailleurs, il était stratégique de s’extraire du cadre global de la PAC (politique agricole commune). Sinon, nous redevenions une variable d’ajustement. Car, au niveau budgétaire, tout est sujet à marchandage. »

Tel qu’il se dessine, le nouveau système se définit dans ses grandes lignes par :

l La mise en place d’un système d’autorisation des plantations nouvelles dans tous les Etats membres producteurs et pour toutes les catégories de vins (y compris les vins sans IG, ex vins de table).

l Les plantations nouvelles sont encadrées à la fois au niveau communautaire et au niveau de chaque Etat membre. L’Europe délivre annuellement une enveloppe de plantations nouvelles à l’Etat membre producteur (France, Italie, Espagne…) ; c’est sous la responsabilité de l’Etat membre que s’organise ensuite la distribution des autorisations. L’Etat membre a la possibilité de prendre en compte les recommandations émises par les organisations professionnelles.

Si la Commission européenne et notamment le commissaire Ciolos avaient déjà fait bouger les lignes entre « les deux tours » – entre le 3e et le 4e GHN – l’accord a pu s’établir parce que des points de blocage furent levés. Ces points de blocage concernaient principalement deux volets : le volume d’autorisations de plantations nouvelles et les critères d’attribution. En ce qui concerne le premier volet – le volume d’autorisation des plantations nouvelles – au départ, la Commission proposait une autorisation ouverte (sans fixation de plafond) avec pour seul frein le déclenchement d’une clause de sauvegarde en cas de crise ou de plantations massives. Ce qui revenait, ni plus ni moins, à libéraliser les plantations. Sous la pression des professionnels, les fonctionnaires européens ont revu leur copie. Dans sa dernière mouture, le GHN propose un plafond d’autorisation fixé a priori (avant le lancement des campagnes de plantation). Par ailleurs, n’existe plus qu’une seule possibilité d’évolution des autorisations, à la baisse (réduction du plafond) alors qu’au départ, il était envisagé de le faire varier dans les deux sens, à la hausse comme à la baisse (en plus ou en moins). Sur le second volet – les critères d’attribution – il est dit que ces critères devront être « objectifs et non discriminatoires ». La proposition initiale de la Commission prévoyait une délivrance automatique d’autorisations à tous les demandeurs, à concurrence du plafond. L’instauration d’un droit de tirage en quelque sorte.

Reste que de nombreux éléments méritent d’évoluer ou, au moins, d’être précisés. Par exemple, quand on parle de critères d’attribution « objectifs et non discriminatoires », à quoi faut-il se référer ? La profession viticole réclame que le postulat d’équilibre de marché s’inscrive noir sur blanc. « Sinon, on aura du mal à justifier d’un critère objectif ». Autre exemple des vides à combler : qui fixera, au plan communautaire, le pourcentage de plantations nouvelles ? La Commission seule, le Conseil en association avec la Commission ? Sans surprise, la viticulture plébiscite la seconde option.

Au sujet des vins sans IG, se pose la question de la remontée de leurs besoins vers l’échelon étatique chargé de la régulation des plantations nouvelles. Qui devra être investi de ce rôle, sachant que ni en région ni même au plan national les vins sans indication géographique ne disposent d’organes représentatifs ? Un aspect largement aussi important concerne les replantations. Seront-elles soumises à contrôle et si oui, par qui et comment ? Pourrait-on imaginer des transferts « sauvages » à l’intérieur d’un même bassin viticole voire entre deux bassins viticoles différents ? Une brèche ouverte dans les grands équilibres régionaux. Les représentants professionnels entendent également obtenir des assurances sur la date d’entrée en vigueur du régime. Ils plaident pour le 1er janvier 2019 et non le 1er janvier 2016. Dacian Ciolos, le commissaire européen à l’Agriculture, semblait ouvert sur ce point. Par ailleurs, la Commission a évoqué une durée de 6 ans pour le nouveau régime d’autorisation. La viticulture défend le principe d’un système permanent et non transitoire.

« La négociation avance dans le bon sens mais le combat est loin d’être gagné. Restons vigilants et mobilisés » estiment dans leur ensemble les acteurs du dossier. Première des choses ! Que les recommandations « politiques » du GHN se traduisent en acte ou du moins dans un document. Si tout se passe bien, un premier texte « stabilisé » sur l’avenir des plantations pourrait voir le jour en mars 2013. Pour la version définitive, il faudra attendre la réforme de la PAC. Ce qui risque d’être plus long.

 

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