Passions et Passionnés … Samuel Mage, « Un passion pour le vivant ! »

28 août 2019

Installé sur l’île d’Oléron, Samuel Mage a choisi de vendre en direct son cognac, son pineau et ses vins charentais. En conversion bio depuis quelques mois, cela fait près de 15 ans que le jeune viticulteur a compris que le sol et la nature devait être traités avec respect, et qu’il était urgent de changer pour que le terroir reste vivant !

« Je suis né dans la viticulture et c’était mon choix que d’en faire mon métier, explique-t-il. Les premières années, j’ai travaillé en conventionnel, mais passée la trentaine, j’ai commencé à me remettre en question, à m’interroger sur l’utilisation de la chimie : j’étais de plus en plus conscient que nous étions en train de stériliser la nature. Je suis un cartésien qui aime le travail bien fait, mais j’aime encore plus être en accord avec mes convictions, des convictions dictées par la simple observation de ce qui m’entoure. »

 

Retrouver des sols vivants et fertiles

 

C’est ainsi qu’en 2013, Samuel Mage franchit une première étape, en arrêtant l’herbicide sur 70% de son vignoble. « C’était un investissement, cela m’a obligé à me former, à former les salariés, à adapter le matériel, mais ça me permettait surtout d’être en accord avec ma conviction, de plus en plus forte, que l’herbicide est un tueur. » Pour mettre toutes les chances de son côté, Samuel se fait accompagner dans sa démarche par un technicien. Sur ses conseils, il utilise un traitement alternatif à base d’oligo-éléments qui stimule les défenses naturelles de la vigne et la protège des agressions extérieures. Le résultat est probant.

 

Deuxième étape : Après un test sur une parcelle de merlot, il passe à une seule latte, pour « lisser » son rendement : « Avec 2 lattes on a eu 150 hectolitres de rendement une année et seulement 50 l’année suivante, alors qu’avec une seule latte, on est toujours à l’équilibre, à 75 hectos environ.  Rien ne sert de courir, il faut partir à point…Une latte, ça prend moins de temps donc moins de main d’œuvre, moins de fumure… ».

 

Samuel décide par ailleurs d’abandonner l’herbicide sur l’ensemble de son vignoble, Cependant, pour aller plus loin, il lui faut trouver une solution pour lutter contre les maladies de la vigne. Il se rapproche alors de Julien Frumholtz. Cet œnologue cognaçais a mis au point des bio stimulants, avec François de Conti, un viticulteur de Bergerac,. « Je les utilise depuis 2016, et il suffit de le constater : mes vignes sont belles. »

 

Nouvelle étape en 2018, lorsqu’il il découvre sur les réseaux sociaux l’association « Ver de terre et production », qui prône l’agriculture du vivant. Le but de cette association, créée par un agronome Konrad Schreiber et deux maraîchers, François Mulet et Vincent Levavasseur, est de former le plus possible d’agriculteurs dans leur transition agroécologique vers les sols vivants et fertiles. Grâce à ces formations, Samuel Mage comprend mieux les effets de la culture sur les sols : les outils les érodent et la quantité de terres fertiles décroit. Lorsqu’il y a ravinement, la terre fertile se retrouve dans les rivières, ce qui explique aussi la prolifération des algues, qui se nourrissent des traitements. « Le nombre de vers de terre ne cessent de décroître, on est passé de 2 tonnes à l’hectare à 150, 200 Kg. Si l’on continue comme ça, on peut dire au revoir au terroir: avec la raréfaction de la couche de sol fertile, les racines des vignes sont de plus en plus traçantes. Elles vont finir en hors sol, comme les tomates espagnoles. » Samuel décide alors d’opter pour le couvert végétal sur tout son vignoble, en poly-espèces, de manière à capter l’azote de l’air pour nourrir le sol: Une allée sur deux, il sème de la fèverole, de l’avoine et du seigle, et dans les autres allées, un mélange de radis, de vesse, de trèfle incarnat, de trèfle blanc, de lin… Il sème ces graines en semi-direct, sans travail prèalable du sol. Ces plantations seront ensuite roulées, ce qui permet entre autre de piéger le carbone. « Couvert de végétaux, mon sol est vivant et la biodiversité très présente: il y a des bourdons, des abeilles…sous les couverts roulés ça grouille. Rouler les couverts, ça permet aussi d’avoir besoin de moins d’eau, la litière agit comme un feutre et la piège. Il y a plein d’araignées et de gendarmes qui mangent les nuisibles, des oiseaux aussi et le sol est très meuble. L’important c’est d’agir pour la vie, de ramener la fertilité naturellement. Mon objectif c’est que d’ici 5 ans, tout l’engrais vienne de la nature. »

Pour protéger mieux encore ses sols, Samuel Mage a décidé de se lancer dans l’agroforesterie, un mode d’exploitation des terres agricoles associant des arbres et des cultures ou de l’élevage. L’association arbres et agricultures présente des avantages considérables, notamment dans le domaine de la protection des sols. Il a entrepris de planter des haies pour s’isoler des voisins qui travaillent en conventionnel et pour se protéger des effets dévastateurs du sel en cas de tempête. Ces haies lui permettront aussi de favoriser la biodiversité et de voir revenir les oiseaux, les insectes, les hérissons.

 

Une démarche partagée

 

Cette évolution vers l’agro-écologie, Samuel Mage ne l’a pas vécue seul. L’un de ses collègues viticulteurs d’Oléron, David Pradère l’a accompagné dans toutes ces étapes, jusqu’à leur récent passage à la viticulture biologique. « C’était enrichissant de vivre cette évolution avec lui, de pouvoir échanger… ». Il l’a également partagée avec son épouse, qui est aussi sa collaboratrice, en charge de la boutique, et avec ses trois salariés, qui sont, dit-il, « des pièces-maitresses de l’entreprise. »

Du bio, il n’attend pas l’étiquette, mais une façon d’être en accord avec ses idées : « Le sol n’est pas qu’un support, il faut le respecter. Jusqu’à la seconde guerre mondiale, on travaillait en polyculture, c’était naturellement un système vertueux. Après la guerre, il fallait nourrir tout le monde, on a utilisé la chimie pour augmenter les rendements et ça a d’autant mieux marché que les sols étaient fertiles. Mais on les a épuisés ! De cinq à six pourcents de matières organiques dans les sols en début de siècle, on est passé à un demi-pourcent aujourd’hui et notre seule réponse a été d’augmenter la chimie…  Aujourd’hui, il faut réapprendre à réfléchir à ce qu’est le sol, le comprendre et le respecter».

 

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