Passions et Passionnés … Laurent Delaunay, « Sa passion ? la distillation … mais pas que ! »

28 août 2019

Laurent Delaunay aime au plus haut point le rôle de magicien que lui offre la distillation. Il aime que ses chaudières lui obéissent au doigt et à l’œil et que chaque vin lui donne ce qu’il a de meilleur. Mais par-dessus tout, Laurent Delaunay aime son métier.

« Si l’on n’est pas passionné, on ne fait pas ce métier, sourit-il. Moi, je l’adore mais c’est un métier difficile physiquement…et moralement, quand les aléas climatiques s’en mêlent. » Sur son domaine de 47 hectares, il travaille ses vignes de A à Z : entretien, vendanges, vinification, avant de passer à son moment préféré, la distillation. « J’ai en plus la chance de travailler pour quatre maisons différentes, donc, outre l’avantage de ne pas avoir tous mes œufs dans le même panier, je peux conduire trois méthodes de distillation différentes. »

 

Une expérience toujours renouvelée

 

Ce qui passionne Laurent dans la distillation, c’est que le travail est toujours différent : aucune année, aucune citerne n’est la même, d’autant que son vignoble est situé dans les borderies, sur plusieurs communes, d’où une grande diversité des sols. Les vins sont différents, la distillation le sera aussi. « La distillation, c’est une alchimie, qui doit bien sûr obéir aux règles de chaque cahier des charges. Sans lie, c’est très carré, très systématique, plus théorique… la lie n’est pas là, pour masquer les éventuels défauts du vin. La distillation avec lie permet parfois d’apporter sa touche personnelle, une part de créativité, en fonction des vins et de la qualité des lies, et les acheteurs savent le reconnaître, quand c’est bien…et quand c’est mal aussi. » Pour optimiser son travail, Laurent sait aussi échanger avec des partenaires de confiance, comme l’œnologue de la Chambre d’Agriculture, ou son courtier Patrick Beguin, « des gens disponibles qui font partie intégrante des campagnes réussies ».

 

 

Son matériel est automatisé, mais Laurent Delaunay passe quand même beaucoup de temps dans sa distillerie : « Il faut être là pour la mise au courant, le tirage des têtes, j’aime sentir le produit à toutes les phases de sa transformation. Ce savoir-faire est précieux, mais le plus important, là où tout se joue, ça reste le végétal. Si la qualité n’est pas au rendez-vous à ce niveau, on ne la retrouvera pas dans le produit fini.

Si le vin manque d’acidité, le produit fini s’en ressentira et avec les bouleversements climatiques de plus en plus fréquents, le taux de sucre est de plus en plus important. Pour obtenir un vin qui se rapproche le plus possible de ce que doit être un bon vin charentais distillable, il faut du rendement. »

 

Chaque année, depuis 2010, Laurent Delaunay travaille pour lui une partie de sa production qu’il choisit de distiller comme il l’entend, une partie avec lie, une autre sans lie. « Je veux avoir mes propres comptes 10, explique-t-il. Je n’en avais pas en reprenant l’exploitation, et je fais en sorte de me préparer de vieux comptes, sans trop savoir pour l’instant ce que je vais en faire. Mais je ne prends pas le temps de m’occuper suffisamment du stockage et ça me coûte cher. Pourtant, j’achète le bon pourcentage de fûts neufs mais je ne les utilise pas de façon optimale. Je ne dis pas que je fais du mauvais travail, mais les coûts doivent pouvoir être réduits. A ma décharge, mon chai est situé à 5 km de l’exploitation, ce qui ne facilite pas les choses. Je suis d’ailleurs en train de revoir mon organisation : aménager quelque chose sur place, laisser ce qui a fini de vieillir là-bas et rapprocher ce qu’il faut encore travailler. »

 

 

Pas tout à fait serein pour l’avenir

 

« Quand on est passionné on essaie de voir plus loin que le bout de son nez. »  Et Laurent Delaunay s’interroge, avec quelque appréhension, sur l’incidence des futures règles écologiques qui s’annoncent.

« Réduire les désherbants, c’est mieux pour la santé, c’est certain. Mais je crains que cette nouvelle façon de soigner la vigne ait forcément des conséquences sur le produit fini. Certaines de mes vignes je ne les trouve pas propres, je n’ai pas l’habitude de les voir comme ça. Toutes cette herbe ne va-t-elle pas influer sur le goût final ? Aujourd’hui j’ai un peu l’impression de partir à l’aventure, sans plan d’action défini. Pourtant j’ai su évoluer, innover par rapport aux pratiques de mon père, un passionné lui aussi, un excellent viticulteur qui aimait partager son savoir. J’avais besoin de faire des essais, de tester, et j’en ai retiré les fruits, même si, pendant les mauvaises années, ce métier devient un sacerdoce. C’est pour ça que j’insiste pour que mes enfants pèsent le pour et le contre avant de reprendre l’exploitation. S’ils le font, ils devront, comme au rugby, aller au bout de l’action. »

 

 

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