20 novembre 2009.
« J’ai l’impression que nous ne nous sommes pas trompés. » En tenant ces propos, Lionel Breton, P-DG de Martell Mumm Perriet-Jouët, faisait certes allusion à la prévision de reprise, prévue pour le 1er semestre 2010 et que des signes encourageants confirment, notamment en Chine. Mais, plus globalement, ses propos embrassaient sans doute la stratégie de premiumisation (montée en gamme) lancée par la marque de Cognac voici quelques années. Avec – 4 % en volume mais + 13 % en valeur, les performances de Martell dépassent aujourd’hui celles de la région. Elles valent à la Sica UVPC d’obtenir pour la campagne 2009-2010 son niveau de commande le plus élevé, à hauteur de 30 305 hl AP. Tous les interlocuteurs ont mis en avant le chemin parcouru : 3 205 hl AP en 2003, 4 361 hl AP en 2004, 9 003 hl AP en 2005, 12 519 hl AP en 2006, 21 891 hl AP en 2007, 25 789 hl AP en 2008 et, pour finir, le franchissement du seuil des 30 000 hl AP sur la récolte 2009. Lionel Breton a chaleureusement remercié les partenaires viticulteurs de la Sica. « Ce n’était pas évident de nous croire, pas évident de me croire lorsque j’essayais de vous faire passer le message du redressement. Nous avons vécu ensemble des moments difficiles voire très difficiles. Finalement, nous n’avons pas trop mal passé la crise. Sincèrement, merci de votre fidélité. » Jean-Marc Morel a repris le terme de « partenariat de confiance » déjà utilisé le 8 septembre dernier, lors de la réunion d’information d’avant-vendanges. « Ce partenariat de confiance doit nous permettre de pérenniser nos activités respectives, vous vos entreprises et nous nos approvisionnements. » J.-M. Morel, directeur général adjoint de Martell, a confirmé la place de la Sica dans le dispositif d’achat de la maison. « L’UVPC est au cœur du partenariat entre Martell et ses fournisseurs, un partenariat fondé, d’une part, sur une relation contractuelle caractérisée par une durée, un volume, un prix et, d’autre part, sur les grandes orientations qualitatives des vins et des eaux-de-vie. » Le directeur général adjoint de la société a rappelé que l’année 2010 serait celle du renouvellement des contrats. Au printemps prochain, Dominique Métoyer devrait livrer une première mouture de ces nouveaux engagements. « Nous sommes conscients de l’importance que revêt un contrat pour vous viticulteurs » a commenté Jean-Marc Morel. « Il satisfait votre besoin de visibilité à moyen terme, vous permet de piloter votre entreprise, y compris vis-à-vis des banques. En ce qui nous concerne, nous avons aussi besoin d’une certaine flexibilité dans nos approvisionnements. Ainsi chacune des deux parties peut envisager avec sérénité ce que nous avons appelé le 8 septembre un “partenariat de confiance” ». Le directeur général adjoint a confirmé officiellement ce qui avait déjà largement filtré lors de la réunion de pré-vendanges : les prix des eaux-de-vie nouvelles de la récolte 2009 resteront stables par rapport à la récolte précédente. Concernant ces prix, Bernard Laurichesse, président de la Sica, a indiqué une modification de la grille de paiement en fonction de la qualité. Jusqu’à maintenant, à la Sica UVPC, s’appliquaient deux prix : le prix de base pour la qualité A et le prix de base – 2 % pour la qualité B. Au final, une eau-de-vie exceptionnelle n’était guère mieux traitée qu’une qualité plus moyenne. Le maître de chai Benoît Fil a souhaité que s’instaure une réflexion sur la grille tarifaire. Cette réflexion a débouché sur la mise en place de cinq prix au lieu de deux : prix de base, prix de base – 2 %, prix de base – 4 %, prix de base + 2 %, prix de base + 5 %, cette dernière bonification ayant vocation à récompenser les très très belles qualités. « Il s’agit d’une évolution importante, pour tirer la qualité vers le haut. Cette politique s’inscrit parfaitement dans notre stratégie premium et notre besoin d’eaux-de-vie d’excellente qualité. » « Dans ce contexte, a précisé le maître de chai, nos standards d’acceptation seront à la mesure de nos ambitions. » L’assemblée générale de l’UVPC a voté la modification de l’article 3 du règlement intérieur pour prendre en compte cette modification dès la campagne 2009-2010. Sur proposition du conseil d’administration de la Sica, l’article 4 du même règlement intérieur a lui aussi subi un lifting. Cet article vise les modalités de versement des acomptes de 10 ou 80 %, selon l’option choisie par les apporteurs. Jusqu’à présent, il était possible d’obtenir le versement de 50 % de l’acompte en janvier, payable par billet à ordre. Dorénavant, cette possibilité s’interrompt pour les acomptes de 10 %, les petites sommes en jeu ne justifiant pas la lourdeur du travail administratif. Le versement anticipé de la moitié de la somme ne subsiste donc que pour les acomptes de 80 %.
un renforcement en borderies et grande champagne
Sur l’exercice 2008 examiné en assemblée générale, la mise en stock de la Sica UVPC s’est soldée par 25 799 hl AP, pour un volume contractualisé de 27 697 hl AP, soit une livraison de 93 % du volume engagé. Les quantités se sont réparties de la manière suivante : 3 964 hl AP en Grande Champagne, 5 475 hl AP en Petite Champagne, 5 285 hl AP en Borderies et 11 075 hl AP en Fins Bois (Fins Bois : 43 % de l’ensemble). En 2008, la Sica avait accueilli 24 nouveaux adhérents, portant le nombre total de contrats à 261. Sur la récolte 2009, le maître de chai de la société Martell a demandé à la Sica UVPC une meilleure répartition des volumes par cru, avec un renforcement des Borderies et Grande Champagne. Ce qui fut fait. Les nouveaux adhérents recrutés en 2009 viennent essentiellement de ces deux crus. Dans sa présentation du rapport du conseil d’administration, clos au 30 juin 2009, Patrick Béguin a évoqué les chiffres de financement de récolte. Ils évoluent de façon parallèle à la progression des volumes. Ainsi, l’article 26 des statuts a-t-il été modifié pour faire passer le plafond d’emprunt du conseil d’administration de 15,2 millions d’€ à 25 millions d’€. En conclusion de la réunion statutaire, Bernard Laurichesse a remercié « messieurs les P-DG et directeur général adjoint de Martell pour la confiance accordée à la Sica ».
Dans une seconde partie de réunion, Jean-Marc Morel a présenté le Plan d’action environnemental du groupe Pernod-Ricard, avec l’éclairage Martell et les objectifs chiffrés à horizon 2012 (voir article). A son tour Lionel Breton a brossé en quelques traits la Charte Global Compact des Nations Unis signée en 2003 par le groupe Pernod-Ricard. Mais comme, en matière d’environnement, rien ne vaut de revenir au « plancher des vaches » ou, en l’occurrence, au rang de vigne, la Sica et la maison Martell avaient eu la lumineuse idée de s’assurer de la présence d’un des « pontes » de la microbiologie des sols, le professeur Claude Bourguignon.
En une heure, l’éminent scientifique a fait vivre aux viticulteurs présents une plongée assez enthousiasmante dans le tréfonds de la science du vivant, matière aussi peu connue que fondamentale pour l’activité viticole. Les viticulteurs en sont ressortis la tête un peu dans les étoiles, avec le sentiment d’avoir décroché quelques réponses à leurs questions.
« rester dans notre métier »
Lionel Breton n’a pas laissé repartir les adhérents de la Sica sans leur livrer quelques éclairages sur « la marche des affaires ». Comme déjà dit, il envisage le bout du tunnel à la fin du 1er semestre 2010. « Je viens de passer six ou sept jours en Chine et je puis vous assurer que là-bas, la croissance est repartie. Globalement, le marché du Cognac en Asie se porte plutôt bien, situation dont nous sommes, à vrai dire, assez fiers. Des « vibrations » se font sentir sur le marché américain, certainement plus visibles en 2010. Les marchés européens fonctionnent pas mal, à l’exception peut-être de l’Europe de l’Est, davantage à la peine. Toutes choses qui me font dire que la problématique marchés devrait être résolue, pour le Cognac, en 2010. »
A ces facteurs d’ordre externe liés à la sortie de crise, Lionel Breton n’a pas omis d’en ajouter un, lié à l’entreprise. « Le vrai moteur du groupe, la volonté de Pernod-Ricard, c’est de rester dans son métier des vins et spiritueux et de s’y développer. Cette fidélité que nous avons su conjuguer ensemble va se traduire par de meilleurs résultats pour vous, pour nous, en volume et avec des prix qui, je l’espère, vous satisferont. »
Millésime 2009 : Les préconisations du maître de chai
Des degrés de vins relativement élevés et des acidités faibles incitent à la vigilance quant à la conservation des vins.
Parmi les conseils délivrés par le maître de chai Benoît Fil, figure l’analyse systématique des sucres résiduels, du pH et de l’acidité des vins. « Je vous conseille de revenir vers vos œnologues. » Il y a aussi la nécessité « d’adapter les distillations au profil qualitatif de l’année ». Le maître de chai a encouragé les viticulteurs à distiller le plut tôt possible, avec des températures de coulage qui ne devraient pas dépasser 12,5 °C, ainsi que des prélèvements de tête de 1,5/2 % en volume. Compte tenu des degrés élevés de l’année, il a attiré l’attention sur le volume de charge et le préchauffage des vins, d’au maximum 30 °C. En ce qui concerne la réserve climatique, Benoît Fil a recommandé de se montrer vigilant quant à la méthode de distillation. « Martell n’acceptera les eaux-de-vie issues de la réserve climatique que si elles sont distillées selon le même cahier des charges et présentent la même qualité que les autres eaux-de-vie. » La conservation de ces eaux-de-vie ne peut se faire que dans des cuves inox 316 L. « Attention à la fabrication de ces cuves et notamment aux soudures » a-t-il prévenu. Le maître de chai a souligné l’intérêt de loger la réserve climatique si possible en cuve pleine, en attirant aussi l’attention sur le problème du « rafraîchissement ». Sur le terrain, vont être systématiquement rencontrés les adhérents ayant eu des lots à problème en 2008 ainsi que les nouveaux adhérents. En 2008, 96 % des eaux-de-vie rentrées par la Sica furent classées au tarif A.