Le salaire de la peur : L’annonce de l’éventuelle baisse de financement des chambres d’agriculture

27 novembre 2019

L’annonce de l’éventuelle baisse de financement des Chambres d’Agriculture inquiète

Dans le cadre de la loi de finance 2020, le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, Didier Guillaume, a annoncé une baisse de 15% de la taxe additionnelle à la taxe sur le foncier non bâti (TATFNB), ce qui amputerait les Chambres d’Agriculture de 6% de leurs revenus, déjà rognés par l’inflation. L’ACPA, l’Assemblée permanente des Chambres d’agriculture, a publié un communiqué dans lequel elle disait que « nous ne pouvons pas nous résoudre à une décision strictement financière qui conduirait à l’affaiblissement du développement économique de notre agriculture et de nos territoires ruraux. »

Luc Servant, agriculteur exploitant 183 hectares de céréales et de protéagineux à Benon, président de la Chambre d’Agriculture de Charente-Maritime, 1er vice-président de la Chambre d’Agriculture Nouvelle-Aquitaine, élu référent "Gestion de l’eau à Chambres d’agriculture France/APCA (Assemblée permanente des Chambres d’agriculture), est revenu sur ces annonces et l’épée de Damoclès au-dessus du monde agricole.

 

Comment avez-vous accueilli cette éventualité de baisse de financement des Chambres d’Agriculture ?

 

Nous en avons discuté à tous les niveaux. Ce fut vécu comme un coup de poignard dans le dos. Par rapport à tous les échanges avec les ministères, sur la volonté des chambres d’agriculture d’accompagner les agriculteurs dans la transition écologique et la mise en place de la loi Egalim [N.D.L.R. : Voir encadré], nous n’avons pas compris. Les nouvelles missions ne demandaient pas de moyens supplémentaires mais plutôt les mêmes. Depuis 6 ans, il n’y a pas de hausse d’impôts. Il n’ya a pas de prise en compte l’inflation, donc une baisse mathématique de nos ressources. Avec, pour 2020, une baisse possible de 15% de la taxe additionnelle à la taxe sur le foncier non bâti (TATFNB), nous serons amputés de 6% supplémentaires de nos revenus.

 

Avez-vous rencontré les élus et les politiques ?

Nous avons fait la démarche de rencontrer les parlementaires. Nous n’avons pas encore à ce jour les écrits, mais le ministre de l’agriculture a confirmé oralement la volonté de baisser cette taxe, lors du vote sur la loi de finance. Nous leur avons expliqué ce que nous étions prêts à faire des efforts mais non de nous amputer de moyens. C’est de l’argent du monde agricole, et non public, pour aider l’agriculture, et nous nous engageons dans la transition agricole. Nous avons du soutien Quand nous expliquons à nos députés (46 députés LREM ont signé une tribune dans Le Parisien du 28 juillet 20191), la région et le département, nous le faisons remonter au ministre, mais il reste droit dans ses bottes. C’est un peu surprenant, nous attendons davantage qu’il nous défende et que le Premier ministre soit l’arbitre de la situation.

 

Avez-vous des pistes afin de trouver d’autres sources de financement ? Travail en collaboration sur des événements (essais de matériel, davantage de formation et d’expertise, etc.) ?

Les autres sources de financement sont plutôt à la baisse, tous les ans nous réduisons nos moyens en maintenant notre service sur les agriculteurs. Nous poursuivons cet effort, car la part de l’impôt réduit. Nous allons essayer de défendre ce que l’on peut avoir. Si nous devons en arriver à faire payer nos services, seuls les agriculteurs qui ont les moyens pourront être accompagnés et les autres, qui ne pourront pas suivre, seront délaissés alors que nous avons une mission de service public.

 

Envisagez-vous une mutualisation avec les autres Chambres d’Agriculture ou garderez-vous vos spécificités territoriales ?

Nous avons engagé la mutualisation avec la Chambre d’Agriculture des Deux-Sèvres, l’idée est d’encore le développer dans un schéma original en France, nous allons très loin ensemble sans aller jusqu’à la fusion, dans le travail en commun. La régionalisation (en fonction des supports) se développe sur un périmètre très large, imposé par un décret de 2016, la partie financière est régionalisée depuis plus deux ans. Cela va se ressentir au service public.

 

Comment se passe cette transition de la Régionalisation ?

Nous l’avions fait en Poitou-Charente, nous le mettons en place parce que nous n’avons pas le choix, les résultats attendus économiques ne sont pas encore là, mais nous sommes en bonne voie. Nous n’avons plus qu’un seul service financier et de ressources humaines, mais de 4 à 12 départements, cela demande du temps. Cependant, nous changeons rapidement

 

Christian Daniau, agriculteur exploitant de 160 hectares de grande culture (en irrigation)  à Saint-Ciers-sur-Bonnieure, président de la Chambre d’Agriculture de Charente, président du Comité végétal en Charente (viticulture, arboriculture, maraichage, grandes cultures) administrateur à la Fédération Française des Producteurs d’Oléagineux et de Protéagineux, administrateur à l’ AGPM, Association Générale des Producteurs de Maïs, vice-président d’un syndicat d’eau potable, adjoint à la commune, est revenu sur ces annonces et l’épée de Damoclès au-dessus du monde agricole.

 

Comment avez-vous accueilli cette éventualité de baisse de financement des Chambres d’Agriculture ?

Je ne la considère encore que comme une éventualité, j’essaie de rester positif. Notre nouvelle équipe est arrivée en mars, avec beaucoup de jeunes, la moyenne d’âges des vice-présidents étant de 37 ans, avec l’envie de faire avancer les choses. Les enjeux sont énormes au niveau de la transition agricole, entre la volonté du gouvernement mais aussi des régions d’évoluer. L’attente sociétale est une chose, politiquement ils essaient de faire passer leur projet, il va falloir accompagner les agriculteurs encore plus qu’hier. Donc, forcément, enlever 15% à une jeune équipe d’élus, cela peut nous casser les pattes et nos motivations. Je compare cela aux nouveaux élus d’En Marche ! Je l’ai expliqué à Thomas Mesnier [N.D.L.R. : député LREM de la première circonscription de la Charente]. Beaucoup de nouveaux, de jeunes, sont arrivés en politique, avec beaucoup d’idées, mais ils ont un minimum de budget. Si 15% de leur budget était enlevé, comment réagiraient-ils ? Il ne suffit pas d’avoir envie. Si derrière il n’y a pas un minimum de moyens, et si, en plus, il nous en est enlevé dans ce contexte-là, cela va être très compliqué. Pour appliquer notre politique, pour répondre aux enjeux de demain, nous avions prévu de créer quelques postes, notamment sur la partie installation-transmission, qui est la priorité de la Chambre d’Agriculture de la Charente. Lorsque nous en parlons avec tous les autres collègues de France mais aussi des organismes agricoles ou para-agricoles, nous nous apercevons que l’installation est vraiment l’enjeu. Il va falloir à la fois assurer la fin de parcours des agriculteurs qui ont aujourd’hui cinquante ans pour qu’ils aillent vers cette transition. Ils n’ont pas forcément envie de modifier leurs pratiques, mais nous sommes obligés à le faire davantage, il va falloir les former et les accompagner. Et les jeunes qui vont arriver, sortant de l’école, ont un parcours agronomique moins complet qu’il y a vingt ans, avec des origines différentes – il y a beaucoup de jeunes hors cadre familial, et nous en avons besoin et il en faudra d’autres – et ces jeunes seront orientés vers des nouvelles techniques que nous ne maîtrisons pas en tant qu’agriculteur présent sur le territoire. Il va falloir se former encore plus et changer, tester des pratiques et voir si elles sont applicables par les agriculteurs, par les jeunes, mais le travail est énorme. Nous donner moins de financement, individuellement pour les agriculteurs, ce sera très compliqué. Nous sommes déjà seuls enfermés, si nous donnions un peu de moyens aux Chambres d’Agriculture de refaire des groupes, remettre de l’agronomie sur le terrain, c’est par là que nous arriverons à convaincre les agriculteurs de modifier leurs pratiques. Depuis 20 ans, nous faisons du réglementaire, de l’environnement, de la paperasse, les agriculteurs n’aiment pas trop cela. Nous voulons remettre de la technique sur le terrain, que ce soit en viticulture, en grande culture, en élevage. Nous nous apercevons, qu’il y a un besoin d’agronomie partout, cela intéresse les agriculteurs, mais cela ne peut se faire tout seul.

 

Avez-vous rencontré les élus et les politiques ?

Nous rencontré les parlementaires. Sandra Marceau [N.D.L.R. : député LREM dans la deuxième circonscription de Charente] a déjà signé la tribune au Parisien. Nous avons rencontré Thomas Mesnier avant les vacances, de nouveau fin août, nous avons bien échangé sur le dossier et je pense qu’ils comprennent, en tant que jeune élu, que pour les projets il faut un minimum de moyens.

 

Avez-vous des pistes afin de trouver d’autres sources de financement ?

Nous sommes obligés de trouver des aides de financement ailleurs. Le principal déteneur de l’économie est la région Nouvelle-Aquitaine. Nous allons essayer de chercher des accompagnements chez les partenaires : État, région, ou d’autres collaborations économiques. La Chambre d’Agriculture est la première porte d’entrée à laquelle il faut frapper pour parler d’agriculture. Nous avons des missions, données par l’État, très claires et exclusives. Nous aurons du mal à les réaliser s’ils nous enlèvent des ressources. Quand nous voulons remettre des points sur l’agronomie, recréer du lien sur le terrain, tester des méthodes alternatives, c’est le faire en commun. L’enjeu est tellement important, il faut que nous nous regroupons pour travailler ensemble, avec les négoces, les coopératives et les CUMA, sur les mêmes thèmes.

 

Travail en collaboration sur des événements (essais de matériel, davantage de formation et d’expertise, etc.) ?

Nous sommes tous au service de l’agriculture. Un agriculteur génère entre 6 et 8 emplois. Si nous partons de ce principe-là, il y a quelques agriculteurs qui ont des responsabilités dans les Chambres, les coopératives, les banques, etc., et qui se battent au niveau des syndicats pour essayer de faire avancer les choses, mais, ce que nous voudrions, c’est que toutes les personnes qui travaillent autour de l’agriculture se sentent concernés. Vous, [N.D.L.R. : Le Paysan Vigneron], également. Que tout le monde soit derrière. Si nous gardons un agriculteur de plus, ce sera bon pour notre territoire, pour l’économie, pour tout le monde. Nous faisons un des plus beaux métiers du monde et répondons au premier besoin de l’humanité qui est de se nourrir. Mais nous sommes très peu à nous en occuper.

 

Envisagez-vous une mutualisation avec les autres Chambres d’Agriculture ou garderez-vous vos spécificités territoriales ?

Nous sommes complètement intégrés dans la région Nouvelle-Aquitaine. Territorialement, nous sommes en contact direct avec six départements de la région, et aucun extérieur. Nous avons vraiment intérêt à travailler avec la région et c’est vraiment une volonté très forte de partenariat. Sur l’élevage, il y a déjà des mutualisations avec la Vienne

 

Comment se passe cette transition de la Régionalisation ?

Nous nous y inscrivons totalement. La régionalisation n’a pas été décidée par les agriculteurs, l’État a imposé aux Chambres d’Agriculture de se mettre en région. La Bretagne ou les Pays de Loire, c’était plus évident ; en Nouvelle-Aquitaine nous avons treize départements, la fusion de trois régions très rurales et différentes. Nous avons mutualisé certaines services (l’informatique est nationalisée, la comptabilité et les ressources humaines sont régionnalisées), la technique a des comités régionaux. L’idée est, lorsque nous sommes à Bordeaux pour la région Nouvelle-Aquitaine que nous parlions autant du Cognac que du Bordeaux.

 

LE POINT NTERNATIONAL 

C’est l’incompréhension. Nous recevons des demandes de consommer plus local, et profiter de notre agriculture qui protège les consommateurs, et nous ouvrons les portes avec des modes de production interdits chez nous, avec des prix plus bas. Même si le ministre de l’agriculture tente de nous rassurer, que des contrôles seront faits, il y a une incohérence. Nous allons en appeler en consommateur, à consommer ce qu’il souhaite réellement.

C’est une négociation, défendre l’industrie en sacrifiant l’agriculture. La filière élevage est très inquiète, et il y a des cotas qui ne sont pas neutres pour les marchés locaux (par exemple les marais de Charente-Maritime, au maintien des prairies naturelles lié à l’activité d’élevage). Nous nous attendions que la filière soit protégée que d’importer des quantités importantes de viande, encore plus le MERCOSUR d’Amérique du Sud.

 

 

Les grands points de la loi EGalim

 

Adoptée par le Parlement le 2 octobre 2018, la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable a été promulguée le 1er novembre 2018. Présentation des dispositions clés de la loi, issue des États généraux de l’alimentation poursuit plusieurs objectifs, par le site Internet du ministère de l’agriculture :

– permettre aux agriculteurs d’avoir un revenu digne en répartissant mieux la valeur ;

– améliorer les conditions sanitaires et environnementales de production ;

– renforcer le bien-être animal ;

– favoriser une alimentation saine, sûre et durable pour tous ;

– réduire l’utilisation du plastique dans le domaine alimentaire.

 

Source : https://agriculture.gouv.fr/egalim-ce-que-contient-la-loi-agriculture-et-alimentationLuc Servant, agriculteur exploitant 183 hectares de céréales et de protéagineux à Benon, président de la Chambre d’Agriculture de Charente-Maritime, 1er vice-président de la Chambre d’Agriculture Nouvelle-Aquitaine, élu référent "Gestion de l’eau à Chambres d’agriculture France/APCA (Assemblée permanente des Chambres d’agriculture), est revenu sur ces annonces et l’épée de Damoclès au-dessus du monde agricole.

 

Comment avez-vous accueilli cette éventualité de baisse de financement des Chambres d’Agriculture ?

 

Nous en avons discuté à tous les niveaux. Ce fut vécu comme un coup de poignard dans le dos. Par rapport à tous les échanges avec les ministères, sur la volonté des chambres d’agriculture d’accompagner les agriculteurs dans la transition écologique et la mise en place de la loi Egalim [N.D.L.R. : Voir encadré], nous n’avons pas compris. Les nouvelles missions ne demandaient pas de moyens supplémentaires mais plutôt les mêmes. Depuis 6 ans, il n’y a pas de hausse d’impôts. Il n’ya a pas de prise en compte l’inflation, donc une baisse mathématique de nos ressources. Avec, pour 2020, une baisse possible de 15% de la taxe additionnelle à la taxe sur le foncier non bâti (TATFNB), nous serons amputés de 6% supplémentaires de nos revenus.

 

Avez-vous rencontré les élus et les politiques ?

Nous avons fait la démarche de rencontrer les parlementaires. Nous n’avons pas encore à ce jour les écrits, mais le ministre de l’agriculture a confirmé oralement la volonté de baisser cette taxe, lors du vote sur la loi de finance. Nous leur avons expliqué ce que nous étions prêts à faire des efforts mais non de nous amputer de moyens. C’est de l’argent du monde agricole, et non public, pour aider l’agriculture, et nous nous engageons dans la transition agricole. Nous avons du soutien Quand nous expliquons à nos députés (46 députés LREM ont signé une tribune dans Le Parisien du 28 juillet 20191), la région et le département, nous le faisons remonter au ministre, mais il reste droit dans ses bottes. C’est un peu surprenant, nous attendons davantage qu’il nous défende et que le Premier ministre soit l’arbitre de la situation.

 

Avez-vous des pistes afin de trouver d’autres sources de financement ? Travail en collaboration sur des événements (essais de matériel, davantage de formation et d’expertise, etc.) ?

Les autres sources de financement sont plutôt à la baisse, tous les ans nous réduisons nos moyens en maintenant notre service sur les agriculteurs. Nous poursuivons cet effort, car la part de l’impôt réduit. Nous allons essayer de défendre ce que l’on peut avoir. Si nous devons en arriver à faire payer nos services, seuls les agriculteurs qui ont les moyens pourront être accompagnés et les autres, qui ne pourront pas suivre, seront délaissés alors que nous avons une mission de service public.

 

Envisagez-vous une mutualisation avec les autres Chambres d’Agriculture ou garderez-vous vos spécificités territoriales ?

Nous avons engagé la mutualisation avec la Chambre d’Agriculture des Deux-Sèvres, l’idée est d’encore le développer dans un schéma original en France, nous allons très loin ensemble sans aller jusqu’à la fusion, dans le travail en commun. La régionalisation (en fonction des supports) se développe sur un périmètre très large, imposé par un décret de 2016, la partie financière est régionalisée depuis plus deux ans. Cela va se ressentir au service public.

 

Comment se passe cette transition de la Régionalisation ?

Nous l’avions fait en Poitou-Charente, nous le mettons en place parce que nous n’avons pas le choix, les résultats attendus économiques ne sont pas encore là, mais nous sommes en bonne voie. Nous n’avons plus qu’un seul service financier et de ressources humaines, mais de 4 à 12 départements, cela demande du temps. Cependant, nous changeons rapidement

 

Christian Daniau, agriculteur exploitant de 160 hectares de grande culture (en irrigation)  à Saint-Ciers-sur-Bonnieure, président de la Chambre d’Agriculture de Charente, président du Comité végétal en Charente (viticulture, arboriculture, maraichage, grandes cultures) administrateur à la Fédération Française des Producteurs d’Oléagineux et de Protéagineux, administrateur à l’ AGPM, Association Générale des Producteurs de Maïs, vice-président d’un syndicat d’eau potable, adjoint à la commune, est revenu sur ces annonces et l’épée de Damoclès au-dessus du monde agricole.

 

Comment avez-vous accueilli cette éventualité de baisse de financement des Chambres d’Agriculture ?

Je ne la considère encore que comme une éventualité, j’essaie de rester positif. Notre nouvelle équipe est arrivée en mars, avec beaucoup de jeunes, la moyenne d’âges des vice-présidents étant de 37 ans, avec l’envie de faire avancer les choses. Les enjeux sont énormes au niveau de la transition agricole, entre la volonté du gouvernement mais aussi des régions d’évoluer. L’attente sociétale est une chose, politiquement ils essaient de faire passer leur projet, il va falloir accompagner les agriculteurs encore plus qu’hier. Donc, forcément, enlever 15% à une jeune équipe d’élus, cela peut nous casser les pattes et nos motivations. Je compare cela aux nouveaux élus d’En Marche ! Je l’ai expliqué à Thomas Mesnier [N.D.L.R. : député LREM de la première circonscription de la Charente]. Beaucoup de nouveaux, de jeunes, sont arrivés en politique, avec beaucoup d’idées, mais ils ont un minimum de budget. Si 15% de leur budget était enlevé, comment réagiraient-ils ? Il ne suffit pas d’avoir envie. Si derrière il n’y a pas un minimum de moyens, et si, en plus, il nous en est enlevé dans ce contexte-là, cela va être très compliqué. Pour appliquer notre politique, pour répondre aux enjeux de demain, nous avions prévu de créer quelques postes, notamment sur la partie installation-transmission, qui est la priorité de la Chambre d’Agriculture de la Charente. Lorsque nous en parlons avec tous les autres collègues de France mais aussi des organismes agricoles ou para-agricoles, nous nous apercevons que l’installation est vraiment l’enjeu. Il va falloir à la fois assurer la fin de parcours des agriculteurs qui ont aujourd’hui cinquante ans pour qu’ils aillent vers cette transition. Ils n’ont pas forcément envie de modifier leurs pratiques, mais nous sommes obligés à le faire davantage, il va falloir les former et les accompagner. Et les jeunes qui vont arriver, sortant de l’école, ont un parcours agronomique moins complet qu’il y a vingt ans, avec des origines différentes – il y a beaucoup de jeunes hors cadre familial, et nous en avons besoin et il en faudra d’autres – et ces jeunes seront orientés vers des nouvelles techniques que nous ne maîtrisons pas en tant qu’agriculteur présent sur le territoire. Il va falloir se former encore plus et changer, tester des pratiques et voir si elles sont applicables par les agriculteurs, par les jeunes, mais le travail est énorme. Nous donner moins de financement, individuellement pour les agriculteurs, ce sera très compliqué. Nous sommes déjà seuls enfermés, si nous donnions un peu de moyens aux Chambres d’Agriculture de refaire des groupes, remettre de l’agronomie sur le terrain, c’est par là que nous arriverons à convaincre les agriculteurs de modifier leurs pratiques. Depuis 20 ans, nous faisons du réglementaire, de l’environnement, de la paperasse, les agriculteurs n’aiment pas trop cela. Nous voulons remettre de la technique sur le terrain, que ce soit en viticulture, en grande culture, en élevage. Nous nous apercevons, qu’il y a un besoin d’agronomie partout, cela intéresse les agriculteurs, mais cela ne peut se faire tout seul.

 

Avez-vous rencontré les élus et les politiques ?

Nous rencontré les parlementaires. Sandra Marceau [N.D.L.R. : député LREM dans la deuxième circonscription de Charente] a déjà signé la tribune au Parisien. Nous avons rencontré Thomas Mesnier avant les vacances, de nouveau fin août, nous avons bien échangé sur le dossier et je pense qu’ils comprennent, en tant que jeune élu, que pour les projets il faut un minimum de moyens.

 

Avez-vous des pistes afin de trouver d’autres sources de financement ?

Nous sommes obligés de trouver des aides de financement ailleurs. Le principal déteneur de l’économie est la région Nouvelle-Aquitaine. Nous allons essayer de chercher des accompagnements chez les partenaires : État, région, ou d’autres collaborations économiques. La Chambre d’Agriculture est la première porte d’entrée à laquelle il faut frapper pour parler d’agriculture. Nous avons des missions, données par l’État, très claires et exclusives. Nous aurons du mal à les réaliser s’ils nous enlèvent des ressources. Quand nous voulons remettre des points sur l’agronomie, recréer du lien sur le terrain, tester des méthodes alternatives, c’est le faire en commun. L’enjeu est tellement important, il faut que nous nous regroupons pour travailler ensemble, avec les négoces, les coopératives et les CUMA, sur les mêmes thèmes.

 

Travail en collaboration sur des événements (essais de matériel, davantage de formation et d’expertise, etc.) ?

Nous sommes tous au service de l’agriculture. Un agriculteur génère entre 6 et 8 emplois. Si nous partons de ce principe-là, il y a quelques agriculteurs qui ont des responsabilités dans les Chambres, les coopératives, les banques, etc., et qui se battent au niveau des syndicats pour essayer de faire avancer les choses, mais, ce que nous voudrions, c’est que toutes les personnes qui travaillent autour de l’agriculture se sentent concernés. Vous, [N.D.L.R. : Le Paysan Vigneron], également. Que tout le monde soit derrière. Si nous gardons un agriculteur de plus, ce sera bon pour notre territoire, pour l’économie, pour tout le monde. Nous faisons un des plus beaux métiers du monde et répondons au premier besoin de l’humanité qui est de se nourrir. Mais nous sommes très peu à nous en occuper.

 

Envisagez-vous une mutualisation avec les autres Chambres d’Agriculture ou garderez-vous vos spécificités territoriales ?

Nous sommes complètement intégrés dans la région Nouvelle-Aquitaine. Territorialement, nous sommes en contact direct avec six départements de la région, et aucun extérieur. Nous avons vraiment intérêt à travailler avec la région et c’est vraiment une volonté très forte de partenariat. Sur l’élevage, il y a déjà des mutualisations avec la Vienne

 

Comment se passe cette transition de la Régionalisation ?

Nous nous y inscrivons totalement. La régionalisation n’a pas été décidée par les agriculteurs, l’État a imposé aux Chambres d’Agriculture de se mettre en région. La Bretagne ou les Pays de Loire, c’était plus évident ; en Nouvelle-Aquitaine nous avons treize départements, la fusion de trois régions très rurales et différentes. Nous avons mutualisé certaines services (l’informatique est nationalisée, la comptabilité et les ressources humaines sont régionnalisées), la technique a des comités régionaux. L’idée est, lorsque nous sommes à Bordeaux pour la région Nouvelle-Aquitaine que nous parlions autant du Cognac que du Bordeaux.

 

LE POINT NTERNATIONAL 

C’est l’incompréhension. Nous recevons des demandes de consommer plus local, et profiter de notre agriculture qui protège les consommateurs, et nous ouvrons les portes avec des modes de production interdits chez nous, avec des prix plus bas. Même si le ministre de l’agriculture tente de nous rassurer, que des contrôles seront faits, il y a une incohérence. Nous allons en appeler en consommateur, à consommer ce qu’il souhaite réellement.

C’est une négociation, défendre l’industrie en sacrifiant l’agriculture. La filière élevage est très inquiète, et il y a des cotas qui ne sont pas neutres pour les marchés locaux (par exemple les marais de Charente-Maritime, au maintien des prairies naturelles lié à l’activité d’élevage). Nous nous attendions que la filière soit protégée que d’importer des quantités importantes de viande, encore plus le MERCOSUR d’Amérique du Sud.

 

 

Les grands points de la loi EGalim

 

Adoptée par le Parlement le 2 octobre 2018, la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable a été promulguée le 1er novembre 2018. Présentation des dispositions clés de la loi, issue des États généraux de l’alimentation poursuit plusieurs objectifs, par le site Internet du ministère de l’agriculture :

– permettre aux agriculteurs d’avoir un revenu digne en répartissant mieux la valeur ;

– améliorer les conditions sanitaires et environnementales de production ;

– renforcer le bien-être animal ;

– favoriser une alimentation saine, sûre et durable pour tous ;

– réduire l’utilisation du plastique dans le domaine alimentaire.

 

Source : https://agriculture.gouv.fr/egalim-ce-que-contient-la-loi-agriculture-et-alimentation

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