C’est en 1998 qu’il rejoint l’exploitation de son père, producteur de cognac et de pineau depuis plus de 25 ans « Je voulais m’installer, mais sans agrandir l’exploitation. J’ai donc cherché d’autres débouchés commerciaux. » L’envie de faire du vin existe depuis longtemps dans un coin de la tête du jeune producteur que ses études (BTS à l’Oisellerie, mais aussi un an en Alsace et un an dans l’Hérault pour connaître le vin sur le terrain) l’ont par ailleurs préparé à cette culture.
Faire son propre vin
Les aides à l’arrachage, conséquence des problèmes du cognac, finissent de le décider et en 1998, il plante ses premières vignes pour faire du vin. « J’ai eu la chance d’avoir pour voisin la coopérative Thalassa, qui avait commencé le vin dès 1995. J’ai pu échanger avec eux, partager leurs expériences, pour choisir les cépages par exemple. » Dans un premier temps, Hugues Chapon se concentre sur le travail de la vigne et amène son raisin à la coopérative, mais très vite il est pris par l’envie de faire son propre vin et de s’essayer à la vente directe. Dès que la production est suffisante, il saute donc le pas et crée sa propre marque. « Je n’avais pas envie de lui donner mon nom comme on a l’habitude de le faire dans le cognac. On a pensé au nom du lieu-dit sur lequel est implantée l’exploitation, Roussillon, mais c’était déjà le nom d’un terroir riche en vins, alors par ressemblance on est arrivé à rouissoir, le nom des bassins dans lesquels on faisait “rouir” – tremper pour séparer les fibres – le chanvre cultivé dans les Charentes pour alimenter la corderie royale de Rochefort. »
Depuis la première vigne de 1998, Hugues Chapon a planté environ 1 hectare en vins de pays charentais par an, ce qui représente aujourd’hui 28 hectares, dont un tiers environ de cognac reconverti. « Le travail de la vigne n’est pas le même sur les cépages vins que sur ceux de cognac. Pour le cognac, on cherche un rendement maximum ; pour le vin, si l’on veut de la qualité, il faut freiner la production… une éducation que les Charentais n’avaient pas. Quand ils m’ont vu faire des vendanges en vert au mois d’août, les anciens se sont demandés si je n’avais pas pris trop de soleil sur la tête. »
Une partie des raisins produits est emmenée à la coopérative. Le vin produit avec le reste se répartit entre la vente à la propriété d’un côté, les cavistes, les restaurants et les salons de l’autre.
Un plus pour l’œnotourisme
Aujourd’hui, Hugues Chapon a décidé de privilégier la vente directe, par goût mais pour des raisons économiques également. La cure thermale de Jonzac, toute proche de l’exploitation, draine en effet presque toute l’année un grand nombre de touristes. Lorsque les Etapes du Cognac ont été créées, il a tout naturellement adopté cet excellent outil de fidélisation qu’est l’œnotourisme. « Là encore, le vin est un vrai plus : on peut expliquer d’autres savoir-faire, à faire goûter à un public plus nombreux. C’est aussi un produit que l’on consomme en plus grande quantité que le pineau ou le cognac. Les clients viennent souvent en rechercher, et ça donne des entrées pour d’autres produits. »
Les coopératives : des acteurs incontournables
Les coopératives produisent aujourd’hui 50 % des vins de pays charentais, toutes couleurs confondues. Tout autant que les producteurs indépendants, elles sont parties prenantes pour la pérennité de la filière. Exemple avec Charentes Alliance, le poids lourd du secteur.
Charentes Alliance travaille aujourd’hui avec 180 apporteurs qui exploitent quelque 400 hectares. La coopérative produit en moyenne 35 000 hectolitres par an, en vin rouge majoritairement, qu’elle vinifie sur 4 sites : Royan, Archiac, Siecq et Saint-Sornin. Elle commercialise cette production pour partie en vrac avec des partenaires embouteilleurs de différentes régions, mais aussi sous différentes marques (Thalassa, Père Fouras, Saint-Sornin…) en grande distribution, commerces de proximité et lieux de production.
« Charentes Alliance a beaucoup investi dans la filière des vins de pays charentais pour se diversifier lorsque le cognac était en crise, explique Vincent Painturaud, le directeur de la branche viticole de la coopérative. Le vin reste pour nous une production stratégique, en dépit de l’actuelle envolée du cognac. Nous nous efforçons d’encourager nos apporteurs pour qu’ils ne baissent pas les bras et qu’ils conservent leurs vignes. »