Le black rot sous surveillance au printemps 2016

26 mai 2016

Faut-il craindre le développement du black rot dans les vignobles Charentais et Bordelaisdans les semaines à venir ? Peu de techniciens se hasardent à formuler un pronostic,mais la plupart d’entre eux se montrent attentifs au vu « de la vigueur » de l’épidémiedu printemps 2015. Indéniablement, les propriétés qui, en 2015, ont été confrontéesà des attaques puissantes devront faire preuve de vigilance car l’inoculum est bien présentdans les parcelles.

Le black rot n’est pas a priori une maladiedifficile à maîtriser, car la protectioncouplée mildiou et oïdium bien gérée doitpermettre de la contrôler. Le véritable problèmeréside dans sa grande discrétionpendant 5 à 10 ans qui lui confère toujoursun effet de surprise lors de sa réapparition.Beaucoup de jeunes viticulteursayant actuellement 5 à 10 ans d’expériencen’avaient jamais vu dans leurs vignesde symptômes sur les feuilles et sur lesgrappes.C’est sans doute pour cette raison quele caractère localisé et explosif desdégâts de black rot au mois de mai 2015a autant marqué les esprits. Au final, lesdégâts n’ont pas concerné des surfacesimportantes dans la région, mais localementcertains îlots ont véritablement« dégusté ».

Des symptômes très caractéristiques sur l’Ugni blanc

La maladie a fait son retour dans l’ensembledu vignoble sous la forme dequelques taches disséminées qui sontapparues au cours du mois de mai. Lescumuls d’années discrètes et de millésimesde fortes expressions confèrentaux parcelles et à des petites zones unhistorique de sensibilité dont l’importancedoit être appréciée avec justesse.Les observations réalisées par les techniciensdepuis de nombreuses annéesont permis de mettre en évidence qu’ilexistait de nettes différences de sensibilitéselon les cépages. Les cépages trèssensibles et sensibles au black rot sontle Cabernet franc, le Cabernet Sauvignon,le Chardonnay, le Gamay, le Grolleau,le Sauvignon, la Folle blanche, le Cot, leMelon et l’Ugni blanc. Cela confère doncà toutes les régions viticoles des façadesatlantiques – le Bordelais, les Charenteset la vallée de la Loire – une sensibiliténaturelle qui s’est malheureusement bienexprimée en 2014 et surtout en 2015. Desfoyers de maladies ont été aussi identifiésdans le vignoble méridional au cours desdernières années.

Un retour discret en 2014 qui a été « le pied de cuve » de l’épidémie 2015

Cette maladie oubliée avait fait pourtantdes dégâts importants dans le vignoblede Cognac dans le courant des décennies1980 et 1990. À l’époque, le développementen début de saison des traitements à basede dithiocarbamates (mancozèbe, manèbe,méthirame de zinc) et l’arrivée des premiersIBS l’avaient quasiment fait dispa-raître. Sa réapparition sous la forme depetits foyers isolés durant l’été 2014 avaitété signalée par quelques techniciensaffûtés, mais l’information a été considéréecomme totalement marginale. C’estpeut-être à ce moment-là qu’il auraitfallu justement être plus réactif. Avec lerecul, il est facile de dire aujourd’hui quela détection des symptômes tardifs ettrès isolés de 2014 devait sûrement encacher d’autres plus nombreux qui sontpassés inaperçus. Il s’est probablementconstitué au sein des parcelles un réservoird’inoculum et d’organes de conservation– les baies momifiées – qui a étésous-estimé. La climatologie de l’été etde l’automne 2014, puis celle de l’hivertrès doux 2014-2015, a favorisé la maturationde ce réservoir infectieux. Il était enquelque sorte prêt « à nuire » au momentdes périodes d’humectation prolongées dela mi-avril et ensuite de la séquence pluvieuseabondante de la fin de ce mois. Pasde chance, peu de vignobles étaient couvertsà cette époque car les risques mildiouétaient annoncés faibles. Toutes lesconditions ont été réunies pour lancer ladynamique de l’épidémie.

Un inoculum présent dans les parcelles en 2016

Suite à ce constat, on peut donc se demandersi le niveau de risque black rot seraélevé en ce début de cycle végétatif 2016.Il est indéniable que l’inoculum s’estreconstitué dans les parcelles. Les baiesmomifiées, qui sont des conceptacles granuleux,évoluent au cours de l’hiver sousl’influence du climat vers des périthècesqui contiennent des ascospores. Il existed’autres organes de conservation, dessclérotes et des spermogonies dont le rôleest méconnu. Le pouvoir de conservationdes ascospores viables dans les parcellespeut durer 4 à 6 ans. C’est pour cette raisonque le black rot a cette capacité à sefaire oublier et à réapparaître brutalementdans les parcelles. Des travaux derecherche de modélisation ont été engagéspour mieux connaître l’échelonnement etles périodes de maturation des périthècesau printemps. Pour l’instant, cet outil techniquene s’avère pas encore opérationnel.L’observation des conditions climatiquesprintanières sera donc déterminante pourévaluer le risque black rot.

Bibliographie :• Patrice Rétaud, du BSV Charentes.• Nadège Brochard, de la chambre d’agriculture deLoire-Atlantique.

Comment apprécier les risques en 2016 ?

• Tenir compte de l’historique de sensibilitédes parcelles ou des îlots.• L’inoculum est présent dans les parcellessuite à la campagne 2015.• Bien observer les conditions climatiquesd’avril et de mai.• Bien observer les parcelles sensiblespour repérer les premièresexpressions foliaires.• Une vigilance accrue à partir dumoment où les 30 % des feuillesportent au minimum une tache.• Une protection obligatoire desgrappes pendant la sensibilité clé.

Les conditionspropices aux contaminations de black rot

1.La présence de l’inoculum dans lesparcelles• Une fois la maturité des périthècesatteinte, une pluie de 0,3 à 0,5 mm estsuffisante pour libérer les ascospores.Ces phénomènes peuvent se produirejusqu’à 8 heures après une pluie.• Les organes verts proches du solsont naturellement plus sensibles auxcontaminations.• La dissémination des ascosporespeut aussi s’effectuer par le vent.

2. La présence d’eau• Un besoin impératif d’eau libre oud’humidité relative pour déclencher leprocessus de contamination. Un délaide de contamination de 24 heures à10 °C de température et seulement9 heures à 29 °C.• Une durée d’incubation de 20 à30 jours au printemps et de seulement10 jours en été.• Le mycélium issu du tube germinatifperce la cuticule des feuilles et latache devient visible.

3. La sensibilité des organes végétatifs• Sur feuilles : les feuilles jeunes sontsensibles et les feuilles âgées sontrésistantes. Les premiers dégâts apparaissenten général courant mai oudébut juin. Les dégâts sur feuilles nourrissentl’inoculum pour les repiquagesau cours du cycle végétatif. En présencede fortes attaques, des dégâts surrameaux peuvent se produire.• Sur grappes : la période de fortesensibilité se situe entre les stadespréfloraison et fermeture de la grappe.

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