L’Afrique, la dernière frontière : Pierre Pringuet, Directeur général de Pernod-Ricard

8 janvier 2013

A Chanteloup pour un passage éclair les 29 et 30 novembre dernier, Pierre Pringuet s’est livré au petit jeu des questions-réponses. Avec un tropisme assez marqué sur l’Afrique, présenté par le groupe de spiritueux comme une nouvelle terre de conquête, 25 ans après l’Asie. Pernod-Ricard est en train d’implanter des filières de commercialisation, dans cinq pays du continent africain.

p12.jpgL’Afrique, son dénuement, sa pauvreté, ses troubles… et ses richesses. Elles sont nombreuses. En terme de population tout d’abord. Sur 7 milliards d’individus peuplant la planète, l’Afrique en concentre un peu plus d’un milliard en 2012 et sa démographie va en progressant. Par ailleurs, le P-DG de Pernod-Ricard a bien veillé à tordre le cou à de vieilles lunes, telle une Afrique qui en serait restée « à l’âge de pierre ». Cette vision lui semble relever d’une approche éculée, pour ne pas dire néo-colonialiste. « L’Afrique compte des gens très bien formés, tant dans les universités locales qu’en Europe ou aux Etats-Unis. Nous sommes en train de construire nos équipes dans ces pays et nous avons eu aucun mal à trouver des collaborateurs sur place. » Quant au potentiel économique de l’Afrique, de plus en plus rares sont ceux qui l’ignorent. Tout le monde sait – ressortissants chinois en tête – que l’Afrique recèle du minerai, des terres rares, de l’or, sans parler de grands espaces propices à l’agriculture. P. Pringuet évoque aussi « une dynamique autogène » liée au développement des biens de consommation, à la construction d’usines…

« Le potentiel d’un pays, c’est aussi ce que vous en faites »

Interrogé sur l’importance de cette richesse, il a cette réflexion : « Le potentiel d’un pays ou d’une activité est bien souvent ce que vous en faites vous-mêmes. Croyez-vous que le marché chinois se serait développé à ce point si les groupes ne s’étaient engagés à corps perdu pour défricher le marché. » Par ailleurs, il a démontré l’inanité de toute tentative de percer l’avenir.

« Si, il y a 20 ans, j’avais dû vous traduire le potentiel de l’Asie, j’aurais sans doute été très en deçà de la réalité. »

C’est donc plus à un « sentiment de marché » qu’à une véritable étude que répondent les groupes quand ils se lancent dans l’aventure d’une implantation. Même si cela ne les empêche pas de s’entourer de quelques précautions.

C’est au début de l’année 2011 que fut prise chez Pernod-Ricard la décision de s’implanter en direct en Afrique. En d’autres mots, créer des filiales de commercialisation dans la zone sub-sahélienne (il possédait déjà une filiale en Afrique du Sud). Le groupe envoie en éclaireur un cadre confirmé, alors directeur général d’une filiale au Chili. Sa mission : définir les pays prioritaires et les méthodes d’implantation : joint venture, implantation en propre… Il en arrive assez vite à la conclusion qu’il vaut mieux s’établir en propre.

Cinq cibles prioritaires

Quant aux cibles prioritaires, il en désigne cinq : le Ghana, la Namibie, le Nigéria, l’Angola et le Kenya. Stratégie adoptée par le groupe début 2012. Les choses sérieuses peuvent commencer : appel à candidatures au sein de la société – qui veut devenir directeur général du Kenya, de l’Angola ? – installation avec femmes et enfants courant de l’été, recrutement des collaborateurs sur place. Le groupe fait appel à des chasseurs de tête locaux. Dans un pays comme le Kenya, la société spécialisée dans les ressources humaines se propose aussi de suivre les salaires. Bref, on rentre dans le concret.

Cette période n’est pas sans rappeler aux cadres de Pernod-Ricard les premiers pas en Asie, en 1987. A l’époque, se souvient P. Pringuet, le groupe possédait deux bureaux de représentation, l’un à Singapour, l’autre à Tokyo. A Singapour, le bureau comptait en tout et pour tout un cadre et une secrétaire. Cette période de pionnier remonte de façon très précise à la mémoire de Philippe Guettat (sans doute en faisait-il partie). « L’après-midi, nous visitions les restaurants et les hôtels, nous passions nos commandes par fax le soir, avant d’aller négocier les ventes dans les bars. » C’est ainsi qu’après Singapour, s’ouvriront les bureaux de Hong-Kong, Taïwan. Au départ, la Chine ne sera qu’une extension de Hong-Kong. Suivront les bureaux de Corée, du Vietnam. « Aujourd’hui, si le Vietnam n’est pas dans le top 10, il est au moins dans le top 15 » a indiqué le P-DG du groupe.

Si l’Afrique mobilise l’énergie du groupe, pourquoi ne rien dire du sous-continent indien, autre mastodonte planétaire. Commentaire de Piere Pringuet : « L’Inde est un très gros marché pour Pernod-Ricard mais où nous nous développons en premier lieu sur des marques locales. Les taxes à l’importation sont très élevées et constituent à ce jour un frein aux spiritueux importés, tels que le Cognac. »

En conclusion, Pierre Pringuet a redit combien Martell et la catégorie Cognac étaient absolument stratégiques au sein du portefeuille du groupe. « Nous nourrissons une très grande ambition et avons une confiance fondamentale dans cette catégorie. Vous pouvez être certain que Martell est au cœur de notre stratégie de groupe. »

Le P-DG du groupe Pernod-Ricard a reçu pour un petit déjeuner les responsables professionnels viticoles, Jean-Bernard de Larquier, Christophe Forget, Christophe Véral, Olivier Louvet. La veille, un dîner avait réuni à Chanteloup les distillateurs Martell.

 

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