Coopérative « vignerons d’oléron »

21 mai 2010

Avec ténacité, la coopérative est en train de gagner son pari : rémunérer correctement ses adhérents par la vente de produits « oléronnais ». Longtemps en situation de dépendance, la coopérative est sur le chemin de l’indépendance financière, une indépendance qui sonne comme une libération.

coop_olron.jpgEn ce début de printemps 2010, dans la jolie salle du camping des Gros Joncs, aux Sables-Vigniers, Louis Auvray, le président des Vignerons d’Oléron, était manifestement heureux d’annoncer les très bons chiffres de sa coopérative en matière de ventes de produits embouteillés. « Nous avons réalisé une très bonne campagne en CRD (capsules représentatives de droits). » Ventes au magasin comme ventes sur factures ont progressé respectivement de 88 000 et 94 000 € sur le dernier exercice clos au 30 septembre 2009. Conséquence : aujourd’hui la coopérative oléronnaise réalise près de la moitié de son chiffre d’affaires en produits conditionnés (essentiellement vins de pays et Pineau commercialisés aux couleurs d’Oléron). Une « indépendance » perçue ici comme une véritable libération, une manière de « s’assumer financièrement ». « Avant, ces produits conditionnés représentaient à peine un ou deux mois de la rémunération des vignerons. Aujourd’hui, ils représentent six mois » s’est réjoui L. Auvray. Révolu le temps où le sort de la coopérative était suspendu aux aléas des marchés de vrac. A l’époque, la coopérative avait tout misé sur le Cognac. Les eaux-de-vie faisaient les beaux jours – ou les mauvais jours – de la coopérative. La page a été définitivement tournée il y a une quinzaine d’années. La coopérative s’est alors lancée, courageusement, dans un plan de reconversion et de vente directe. A la clé, la difficile reconquête de son marché de proximité, en partant de rien ou presque avec, en prime, « de lourdes casseroles » à rembourser. Le chemin a été rude, le virage radical. La blessure d’il y a quinze ans est à peine refermée. Si la plupart des adhérents applaudissent à l’orientation prise – et frémissent au seul mot de « warrant » – une poignée semble encore nourrir des regrets. « On était mieux payé avant » disent-ils sans acrimonie. « On ne va pas refaire le passé » s’entendent-il répondre en écho. Et la passe d’arme, à fleurets très mouchetés, s’arrête là. Drôle de chemin parcouru sur le terrain de l’apaisement quand on se souvient des empoignades homériques du début des années 2000. En fin de réunion, alors que Louis Auvray lui témoignait, au nom de la coopérative, toute sa solidarité après la tempête, Jean-Jacques Enet, président d’Uniré, a eu des paroles d’encouragement très fortes à l’égard des Vignerons d’Oléron. « Louis l’a évoqué. Il a fallu aux adhérents de la coopérative un grand courage physique et économique pour dépasser les difficultés. Vous étiez proches de la banqueroute et aujourd’hui vous dégagez des bénéfices. Ce résultat est plus qu’honorable, il mérite le respect. Je voudrais saluer le courage presque démesuré de votre président et de votre directeur, M. Delage. »

une marge d’une dizaine d’hectares

Durant les vendanges 2008, les Vignerons d’Oléron ont vinifié 24 400 hl vol., dont un peu plus de 17 000 hl de vins blancs Cognac. Les surfaces des coopérateurs tournées vers la diversification représentent environ 90 ha. La structure s’accorde encore une marge d’une dizaine d’ha de plantations nouvelles, dont une partie en rouge. « Quand on atteindra le chiffre de 100 ha, il faudra être vigilant et s’interroger collectivement sur ce que l’on peut faire et ne pas faire. » Les hectares Cognac (Ugni blanc et Colombard) représentent un potentiel d’un peu plus de 230 ha. Dans le compte d’exploitation, ils tiennent bien sûr une place essentielle pour « lisser la trésorerie », notamment par la vente de vieux comptes. En 2009, la coopérative a souscrit un petit warrant (autrement nommé « billet de trésorerie ») pour pallier un niveau de prix des eaux-de-vie défaillant. « Je sais que cela réveille de mauvais souvenirs chez certains d’entre vous mais ce warrant ne porte pas du tout sur les mêmes montants et n’a pas été souscrit dans le même esprit qu’en 1991-1992 » a pris la précaution de dire Louis Auvray.

Le président de la coopérative est revenu sur le niveau de rémunération des adhérents. « Si l’on veut que les gens puissent vivre et acheter leurs vignes, nous devons dégager un revenu ha de 4 500 à 5 000 €. C’est notre objectif. » Et de rajouter. « Aujourd’hui, nous sommes au pied du mur. Si nous ne sommes pas capables de dégager de l’argent, c’est que nous ne serons pas bons. » La coopérative a réaffirmé son souhait de ne plus perdre de surface viticole. « Le vignoble de la coopérative ne peut plus diminuer. » Pour ce faire, il faut être capable d’installer des jeunes. C’est tout le problème de la reprise du foncier. Une réflexion de deux jours a été consacrée au sujet, avec un juriste. La coopérative s’oriente vers la mise en place d’une société relais, en sachant que l’idée n’est pas que cette société se substitue au repreneur, en achetant, louant ou cultivant les vignes. « Pour moi, il s’agit juste d’un relais » a confirmé L. Auvray.

A été évoqué d’un mot le Pineau des îles destiné à être vendu conjointement par les coopératives de Ré et d’Oléron. Positionné haut de gamme, hors région, ce Pineau a commencé d’être présenté à la grande distribution. Quelques pistes sérieuses se dessinent. Le nouveau magasin de vente de Saint-Pierre-d’Oléron devait ouvrir le 15 avril. « Il ouvrira coûte que coûte à cette date » promettait Louis Auvray le jour de l’AG, le 5 mars 2010.

En conclusion à la réunion, le président de la coopértive vinicole est revenu sur les dommages causés par la tempête Xynthia. Il a plaidé pour le bon sens paysan, qui incline à « garder les pieds sur terre ». « Le développement durable est bien sûr indispensable mais c’est aussi un produit marketing pour bobos parisiens. Arrêtons de penser uniquement à l’environnement en faisant courir des risques aux vies humaines. Les gens qui passent tout leur temps à compter les canards ont compté les morts après le passage de la tempête Xynthia. C’est un peu dommage. »

 

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