La maturité des raisins Cognac confrontée au double enjeu Qualité/Economie

4 octobre 2018

Un potentiel de maturation important en 2018 à «surveiller » de prêt

 

            La maturité idéale des raisins destinés à la vinification des eaux de Cognac est devenue un centre d’intérêt majeur depuis quelques années car les conséquences l’évolution climatique ont modifié le déroulement des cycles de maturation. Les grappes d’ugni blanc dont le TAV potentiel à la récolte ne dépassait que rarement le niveau de 9 % vol dans les décennies 80 et 90 atteignent désormais facilement et régulièrement 10 à 11 % volume.

            L’augmentation des teneurs en sucres s’est accompagnée d’une baisse régulière des niveaux d’acidité, d’équilibres différents entre l’acide malique et tartrique, de valeurs de ph plus élevées, de teneurs en azote assimilable fluctuantes et d’une évolution de la concentration de nombreux composés secondaires.

            Le discours historique sur la maturité Cognac privilégiant la recherche de vins de distillation ayant une structure acide forte mais pas excessive reste d’actualité mais il est désormais « chahuté » par la succession d’étés secs et chauds et aussi les objectifs de productions régionaux.

            En effet, les objectifs économiques de production très élevés des dernières années interfèrent aussi de plus en plus sur les acquis historiques de recherche de maturité. Peut-on reprocher à des viticulteurs auxquels, on demande de produire régulièrement 12 à 15 hl d’AP/ha, de vouloir pousser au maximum la phase de maturation. Tirer le meilleur profit des belles arrières saisons pour gagner plus d’1 hl d’AP/ha est forcément un challenge d’actualité.

            Les bases de réflexions sur les attentes de maturité des raisins reposent sur des retours d’expériences dont le bien-fondé n’est pas à mettre en cause. L’accélération des phases de maturation lors des cycles végétatifs précoces est une problématique nouvelle qui interpelle tous les oenologues et les maîtres de chais de la région de Cognac. Le discours des acteurs techniques met en garde sur les conséquences d’une sur-maturation avec des niveaux d’acidités très bas à la récolte qui vont à l’encontre des objectifs qualitatifs cognac.

 

             La phase de maturation actuelle du millésime 2 018 laisse augurer de possibilités de maturation poussées dont la recherche excessive n’est pas souhaitable. L’hétérogénéité de l’évolution de la maturité semble cette année particulièrement forte. Les effets sols et entretien agronomiques font évoluer la maturité des parcelles a « des allures » bien différentes et cette réalité doit être prise en compte par les vinificateurs . Il est probable que la récolte sera  cette année étalée dans le temps pour  cueillir des fruits ayant le meilleur équilibre possible.

                                                          

            Dans le contexte de maturation du millésime 2018, le potentiel de qualité des grappes d’ugni blanc ne pourra se libérer au cours des vinifications que si le niveau de maturité des raisins au moment de leur cueillette est à la fois optimisé et bien raisonné.

            La notion d’équilibre de maturité idéal pour les raisins Cognac dont le principe doit désormais intégrer le fait que des niveaux de maturation poussés des grappes sont de plus en plus fréquents.

 

            Récolter des raisins plus mûrs, une réalité à anticiper

            Des raisins qui mûrissent plus vite et plus complètement ont permis d’élaborer des eaux-de-vie nouvelles qualité lors de nombreux millésimes (2 003, 2 005, 2 009, 2 011, 2 015) dans la mesure où un suivi de leur maturation permet pour prendre la juste mesure de leur évolution.

            2 018 sera probablement un millésime ou la tentation de pousser la maturité sera forte en raison des enjeux économiques. Le challenge qualité doit à la fois intégrer cet état de fait et les limites qui en découlent.

            La recherche de niveaux de TAV maximum engendre des  risques de non-qualité qui sont corrélés à un état de sur-maturité des grappes. Les phénomènes de sur-concentration du contenu des baies engendrent une série de réactions secondaires qui vont à l’encontre des attentes qualitatives cognac.

            La sagesse est toujours de récolter les raisins issus des différents terroirs dans la période ou ils ont la capacité de donner le meilleur : c’est dire à un stade suffisamment mur mais surtout pas sur-mûris.

 

            Identifier à la vigne les différences de maturité pour mieux vinifier

 

            Lors de tous les millésimes et tout particulièrement de ceux à fort potentiel de maturation, les effets natures du sol, du sous-sol et pratiques culturales sont beaucoup plus perceptibles d’où l’importance de réaliser au moins deux contrôles de maturité pour bien cerner l’état d’avancement des raisins avant leur récolte dans les différents îlots.

            Les réserves et le régime hydrique des terres de champagne, des sols de groies, des doucins, des sables et des argiles du Pays Bas très différents ont une incidence forte sur le déroulement de la phase de maturation qui est encore plus marquée lors des arrières-saison sèches.

 

 

                        La récolte des raisins sains favorise l’expression de la typicité de chaque millésime alors qu’une vendange altérée même légèrement la dégrade de façon irréversible

            Dans le processus de vinification des vins de distillation, aucun moyen ne permet de corriger ou de limiter fortement les déviations qualitatives engendrées par le botrytis et les autres formes de pourriture.

            Une vendange pourrie à seulement 5 ou 10 % constitue déjà un risque majeur pour la qualité des eaux-de-vie.

            La détection des toutes premières dégradations de l’état sanitaire est un élément clé pour déclencher au moment opportun.

            La mise en place d’une surveillance de l’état sanitaire lors des deux derniers contrôles de maturité est un acte anticipé de gestion raisonnée des vinifications.

            Une vendange à 0 % de botrytis est un objectif qualitatif majeur pour l’élaboration de vins équilibrés et de d’eaux-de-vie exprimant de belles potentialités.

           

 

 

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