Jean-Bernard de Larquier, nouveau président du BNIC

18 février 2015

C’est peut-être sous sa présidence qu’interviendront les premières plantations liées au Business plan. En tout cas, une chose est sûre ! Le nouveau régime des autorisations de plantation se mettra en place sous sa mandature. Assailli par les maladies du bois, le vignoble requiert un « plan Marshall ». Et la lutte pour la protection de l’appellation ne désarme jamais. A l’intérieur comme à l’extérieur de la région viticole, le président de l’interprofession exerce un rôle de vigile. Une sorte de « lanceur d’alerte ».

p6.jpgQuels sont les dossiers qui vous semblent les plus importants aujourd’hui ?

Clairement, la poursuite de la réflexion autour du Business plan Cognac et la mise en œuvre du régime des autorisations de plantation me semblent les deux dossiers majeurs de ce début d’année. Quelque part, les deux chantiers se répondent. Il y a deux ou trois ans, en jouant les défricheurs sur les questions de potentiel de production, les Charentes furent accusées par les autres régions viticoles de « mettre la pagaille ». Malgré tout, je pense que notre initiative fut positive. Elle a obligé l’ensemble de nos collègues à se saisir du problème. Et même s’ils ne nous suivent pas à 100 %, certains se disent peut-être aujourd’hui que nous n’avions pas foncièrement tort. En nous soumettant à une somme de contraintes, on voit bien où l’Europe veut en venir. Pour proposer une vraie vision d’avenir concernant le vignoble, il faudra que les régions soient suffisamment fortes. Pour certaines, ce sera très compliqué, d’abord parce qu’elles comptent beaucoup plus d’appellations que nous sur leur bassin mais aussi parce qu’elles n’ont pas anticipé le changement. En Charentes, nous avons pris le temps de la réflexion.

Où en est le Business plan ?

Après quelques mois de flottement, le fait d’avoir arrêté les outils de pilotage nous permet d’aller plus loin. Dans les semaines qui viennent, nous allons procéder à une remise à plat. C’est une très bonne chose. Ensuite, tous les ans, ces indicateurs de pilotage nous permettront d’évaluer la situation, afin d’éviter toutes dérives. Le Business plan est un projet à long terme. Il se doit d’être adapté à fréquence régulière.

Le négoce s’est beaucoup investi dans la défense du Business plan. Où vous situez-vous par rapport à cette question ?

Globalement, les deux familles nourrissent une vision assez partagée sur le sujet. Je suis d’accord pour dire qu’une région qui ne progresse pas recule. En volume, le Cognac ne représente que 1,7 % des spiritueux mondiaux. Il ne faudrait pas qu’un jour nous disparaissions des écrans radars. Malgré tout, un président viticulteur regarde avec toujours plus de prudence le projet de plantations nouvelles. C’est normal.

La vie interprofessionnelle ne se résume pas au Business plan. Quels autres sujets vous occupent ?

Comme je l’ai dit à mes collègues lors de ma prise de fonction le 18 novembre der-nier, deux dossiers voire trois me tiennent particulièrement à cœur : la création d’un contrat interprofessionnel, pour encadrer
la politique contractuelle régionale ; la promotion du PAPE ou d’une notion équivalente ; enfin la sécurisation de l’appellation à l’international, même si, dans ce domaine, il s’agit plus de conforter ce qui existe déjà que d’une création ex nihilo.

Pourquoi un contrat-cadre interprofessionnel ?

Qu’observons-nous sur le terrain ? Un foisonnement des types de contrats. En soi, ce n’est pas gênant, sauf si des difficultés survenaient et avec elles des litiges. C’est là qu’un accord-cadre interprofessionnel se justifierait, en aidant au règlement de ces litiges. Après, libre aux opérateurs d’adopter ou non l’accord-cadre interprofessionnel mais ils disposeraient au moins d’un garde-fou. J’aimerais bien qu’au cours de ma mandature, un tel dispositif soit approuvé, en sachant que c’est une œuvre au long cours. Un peu comme pour le rattachement de l’XO au compte 10, il faut laisser du temps au temps. L’échéance doit être suffisamment souple pour que tout le monde se mette au diapason. L’autre gros chantier, peut-être plus compliqué celui-là, concerne le PAPE (Potentiel annuel de production par exploitation). Je sais que c’est un sujet sensible, qui a pu froisser des personnes. Pourtant, si l’on veut s’ouvrir à l’évolution du vignoble, il faut bien trouver une solution de repli, au cas où la situation viendrait à se retourner. En permettant de produire sur moins d’hectares tout en conservant nos droits à produire, le PAPE remplit cette fonction d’adaptabilité. C’est un outil de sécurisation, comme peut l’être le contrat interprofessionnel. Dans la même veine de recherche de sécurité, je citerai le renforcement de la défense de l’appellation Cognac à l’international. Dans ce domaine, le maître mot est l’anticipation : anticiper les pro-
blèmes de falsification, d’alcools frelatés, de carafes de Cognac servant à d’autres
usages que le Cognac… Nous n’avons pas le droit à l’erreur. Imaginez ce qui arriverait si quelqu’un décédait en ayant bu du pseudo-Cognac ! D’ailleurs, ce périmètre de protection renforcé devra s’étendre à tout ce qui touche à l’environnement.

Le vignoble est aux prises avec les maladies du bois. En faites-vous un sujet prioritaire ?

Il n’y a pas de solution curative et nous ne sommes pas prêts d’en avoir. Mais réfléchissons un peu à la sélection clonale, comme ce qui fut fait dans les années 60 : marquage des pieds, multiplication… L’INAO vient d’accomplir un grand pas en acceptant que les raisins issus de l’expérimentation conservent leur nature de produit d’appellation. C’est une bonne chose.

On parle beaucoup cet an-ci de la gouvernance du BNIC. Qu’est-ce que cela veut dire ?

L’interprofession est au service de la viticulture et du négoce, c’est-à-dire de tous les opérateurs. Les négociants l’ont bien compris, qui perçoivent tout l’intérêt dégagé par la structure. J’aimerais que les viticulteurs s’approprient davantage l’institution, en étant convaincus des services qu’elle peut rendre. Par gouvernance il faut entendre une amélioration du fonctionnement : qu’avec les mêmes moyens
mais mieux structurés 1 + 1 ne fasse pas 2 mais davantage. Un service « veille et ana-lyse des risques » va être créé. Une personne sera recrutée à cette fonction. Faire ce que l’on dit et dire ce que l’on fait permet de déminer pas mal de problèmes.

N’est-ce pas compliqué de remplacer un négociant à la tête de l’interprofession ?

Jean-Marc Morel a très bien fait son travail. Tout en restant un négociant, il a écouté la viticulture et d’autant mieux que celle-ci était structurée. Je vais en faire de même. Sans oublier mes racines viticoles, je serai le président de l’interprofession et non de ma famille. Cela sera d’autant plus facile
que la vente en bouteilles m’a permis d’aller sur les marchés. Je me suis rendu en Chine et dans d’autres pays du monde. Devant mes collègues négociants, je sais de quoi je parle.

Vos premières impressions, après deux mois de fonctionnement ?

Je suis heureux de présider l’une des plus belles interprofessions de France. Je souhaite que nous trouvions la bonne position pour s’affirmer parmi les meilleurs sans pour autant être imbus de nous-mêmes. Cet équilibre me semble important.

 

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