Vinification des vins de distillation

10 août 2011

Le process de vinification des vins de distillation n’est pas simple à conduire lors de millésimes où les raisins présentent un fort potentiel de maturation. La mise en œuvre d’une technicité globale commençant à la vigne par un suivi de l’évolution de la maturité des parcelles, puis par une maîtrise du traitement de la vendange et du déroulement de la cinétique fermentaire est indispensable. Les vendanges 2011 seront précoces et sûrement propices à l’obtention de raisins potentiellement riches en alcool et peu acides. Si leur récolte intervient dans une période de forte chaleur, la conduite des vinifications deviendra encore plus délicate en raison de risques d’accidents qualitatifs accrus lors du traitement de la vendange et du déroulement de la fermentation alcoolique. De telles conditions doivent inciter les vinificateurs à mobiliser toute leur énergie dans une maîtrise cohérente des flux de vendanges, de moûts et de vins. Par ailleurs, la sécheresse persistante depuis presque six mois a eu une forte incidence sur le développement végétatif des parcelles et sur l’état de la récolte qu’elles portent. La charge de raisins et leur stade de développement semblent hétérogènes, ce qui suscite déjà des inquiétudes pour le déroulement de leur maturation. La séquence pluvieuse entre le 10 et le 20 juillet a bien « réhydraté » le vignoble et la véraison pourrait s’enclencher rapidement. La juste appréciation de l’état de maturité des raisins pour déclencher la récolte au moment opportun sera en 2011 un élément très important de la démarche de qualité globale.

L’élaboration d’eaux-de-vie nouvelles ayant une typicité aromatique affirmée est devenue un enjeu majeur pour toutes les grandes maisons de Cognac. Depuis plusieurs années, la conduite des vinifications est entrée dans une phase de recherche de qualité positive. Produire des vins sans défauts est à la fois indispensable et plus suffisant. La philosophie actuelle est de piloter les vinifications avec l’objectif d’élaborer des vins équilibrés et structurés sur le plan qualitatif pour obtenir, à l’issue de la distillation, des eaux-de-vie aromatiques (distillées avec ou sans lies).

Enrichir les vins en composés qui au cours de la distillation favoriseront l’extériorisation du potentiel aromatique des eaux-de-vie nécessite un peu plus de professionnalisme dans la conduite des vinifications. Bien cerner l’évolution de la maturité de son vignoble, être conscient des limites technologiques du chantier de récolte et de l’unité de vinification sont indispensables pour mettre en place sur chaque propriété l’organisation du travail la plus adaptée.

Les critères essentiels pour maîtriser la vinification des vins de distillation :

– Une parfaite connaissance de la maturité des raisins de chaque îlot de terroir.
– Traiter la vendange avec douceur et cohérence.
– Maîtriser le déroulement de la fermentation alcoolique
– Créer les conditions pour assurer la parfaite conservation des vins.

L’observation du déroulement de la maturation au niveau du parcellaire d’une propriété est un acte œnologique essentiel pour que les viticulteurs soient en mesure de piloter judicieusement les vinifications. Connaître les différences de maturité des îlots de terroir, apprécier finement l’état sanitaire, le niveau de maturité, les variations de rendements, permettent ensuite d’organiser les chantiers de récolte et aussi tout le déroulement des vinifications avec beaucoup plus de professionnalisme et de sérénité. Savoir apprécier la nature de la vendange récoltée avant de lancer les MAV dans les parcelles permet d’aborder de façon plus rationnelle la conduite du pressurage, des décantations et du suivi thermique des fermentations.

Chaque propriété possède également des infrastructures de récolte et de vinification dont les niveaux de débit et de performances doivent être appréciés de façon juste. La transformation des raisins de leur état solide en moût doit nécessiter à la fois de la cohérence et le plus grand soin. Dès la planification du chantier de récolte, il faut également se soucier « des potentialités de mise en fermentation » des lots de vendanges, leur température, la présence de botrytis, les teneurs en azote assimilable. S’organiser pour ne jamais surcharger la chaîne de traitement de la vendange et gérer les mises en fermentation des moûts de façon régulière. Tenir compte de la durée totale de vendange d’une propriété pour planifier la date de fin de la récolte. C’est cet élément qui doit déterminer la date de début de la récolte en tenant compte, bien sûr, de l’état de maturité. Garder une certaine souplesse dans l’organisation du chantier de récolte et des vinifications pour faire face à des retards liés à des incidents mécaniques (casse de matériel) ou à des événements climatiques pendant les vendanges (coup de chaleur ou fraîcheur excessive).

Conditions de maturité optimales des raisins à la récolte

L’état sanitaire

Le bon état sanitaire de la vendange ➞ Une vendange pourrie risque d’entraîner l’apparition de déviations aromatiques irréversibles dans les eaux de-vie.
La vinification de raisins sains est une priorité qualitative.
Le suivi de l’évolution du botrytis dans les 2 semaines précédant les vendanges est indispensable pour déterminer la date de récolte et planifier la récolte des différentes parcelles.

Un équilibre de maturité pour les vins de distillation

Ne pas rechercher les surmaturités qui rendent plus délicate la conservation des vins.
Des niveaux de TAV potentiel élevés s’accompagnent d’une forte diminution de l’acidité.
Lors des deux derniers contrôles de maturités, doser le niveau d’acidité et le pH est très important.
Identifier les parcelles ayant souffert de sécheresse ou portant une charge de récolte très abondante.

Rechercher un équilibre entre le TAV potentiel et l’acidité totale

L’absence de marqueurs de la maturité aromatique des raisins d’ugni blanc rend nécessaire de porter une attention particulière à l’équilibre sucre/acidité pour déclencher la récolte au moment le plus opportun.
Trouver un bon équilibre entre des teneurs en sucres suffisantes et des niveaux d’acidité corrects contribue à la valorisation du potentiel aromatique des eaux-de-vie. Toutes les grandes maisons de Cognac ont un discours technique cohérent sur l’importance de récolter des raisins mûrs ayant un bon équilibre sucre/acidité.
Année de forte maturité : prendre en considération l’acidité totale et le pH qui contribuent au développement de la concentration en ester aromatique dans les eaux-de-vie et qui constitue également un facteur de stabilité biologique durant la conservation des vins. Ne pas hésiter à avancer la date de récolte pour « conserver » de l’acidité.
Année tardive de faible maturité : une récolte à sous-maturité génère souvent des
composés herbacés dans les eaux-de-vie. Un titre alcoométrique potentiel trop bas et des acidités totales très élevées vont à l’encontre des objectifs de qualité des vins de distillation.

S’intéresser à l’alimentation azotée

Des teneurs en azote des moûts suffisantes contribuent à assurer d’une part l’alimentation de la population de levures et d’autre part la synthèse de composés propices à la structure aromatique des eaux-de-vie.
Un dosage des teneurs en azote assimilable lors du dernier contrôle de maturité se justifie pleinement.
Les propriétés concernées depuis quelques années à des difficultés fermentaires ont intérêt à réaliser des dosages d’azote assimilable de façon plus systématique.
Attention aux effets parcelles en matière de teneur azotée des moûts, surtout si la climatologie estivale (pendant la maturation) entraîne un stress hydrique prolongé.

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En 2011, le risque de sur-maturité est important
Le début de la véraison des ugni blancs intervenant à partir du 20 juillet induit que toute la phase de maturation va se dérouler au mois d’août dans une période où le climat est généralement chaud, sec et peu pluvieux. Les conditions climatiques ont une incidence déterminante sur la structure qualitative des baies. Les niveaux de températures moyens interfèrent sur la vitesse de maturation et le cycle de dégradation de l’acidité. Des températures plus basses (liées à une maturation plus tardive comme 2010) ralentissent la vitesse de maturation et accentuent la dégradation de l’acide malique. A l’inverse, des températures moyennes élevées accélèrent le processus de maturation et amplifient la dégradation d’acide tartrique, ce qui a une forte incidence sur le pH des vins (plus élevés). L’équilibre physico-chimique des vins produits dans un tel contexte rend leur conservation plus délicate. Les vinifications du millésime 2003 élaborés suite à une canicule estivale intense ont laissé d’assez mauvais souvenirs à beaucoup de vinificateurs dans la région. La précocité du millésime 2011 pourrait conduire à un scénario de maturation en présence de forte chaleur en août.

 

Les conséquences de la sécheresse sur les teneurs en azote des moûts
La forte sécheresse à laquelle le vignoble est confrontée interfère sur l’alimentation des ceps de vigne. Le déficit hydrique persistant depuis plusieurs mois a conduit les parcelles à adapter leur développement végétatif. L’assimilation des composés nitritifs essentiels ne s’est pas forcément déroulée dans les meilleures conditions. Le déficit hydrique encore plus marqué depuis le début juin dans une majorité de parcelles de la région a bloqué le processus de minéralisation de l’azote dans la période cruciale d’assimilation floraison-véraison. Cela laisse présager que les teneurs en azote des raisins au moment de la récolte seront faibles surtout si le mois d’août est chaud et sec. Cerner précisément l’importance des apports correctifs d’azote à réaliser en début de vinification risque d’être un acte œnologique important en 2011 si les TAV potentiels sont élevés.
Réaliser un dosage des teneurs en azote dans les baies lors du dernier contrôle de maturation sera essentiel pour maîtriser le déroulement de la cinétique fermentaire
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Maîtriser les opérations pré-fermentaires

Les conditions de traitements de la vendange constituent un enjeu majeur vis-à-vis du déroulement des opérations
pré-fermentaires, de la conduite des fermentations alcooliques et de la qualité finale des vins de distillation. L’impossibilité de pouvoir corriger la turbidité des moûts avant la mise en fermentation doit inciter les viticulteurs à être très attentifs au processus de traitement de la vendange.

Une étape qualitative majeure

Le traitement de la vendange doit déboucher sur l’obtention de moûts ayant une structure qualitative équilibrée qui peut être définie au travers d’éléments clés :
– Limiter la libération excessive de bourbes tout au long de la chaîne de traitement de la vendange.
– Minimiser les effets de trituration provoquant la libération des précurseurs de composés extériorisant de la verdeur et le caractère herbacé dans les eaux-de-vie.
– Traiter la vendange dans des délais assez rapides pour l’imiter les incidences qualitatives négatives de populations de levures et de bactéries indigènes indésirables.
Les conséquences d’un excès de bourbes dans les moûts : l’excès de bourbes dans les moûts favorise ultérieurement la production d’alcools supérieurs au cours de la fermentation alcoolique. Ces composés présents en trop grandes quantités engendrent l’apparition de notes de lourdeurs dans les eaux-de vie-nouvelles et jouent un rôle masquant sur la structure aromatique.
Les conséquences des composés issus de la trituration : lors du traitement de la vendange, des réactions enzymatiques provoquent la formation dans les moûts de précurseurs de composés donnant ultérieurement dans les vins de l’hexanal, de l’hexanol, du cis 3 hexanol, du TDN… Ces constituants sont à l’origine de défauts majeurs de type végétal, herbacé dans les eaux-de-vie. Une fois que les précurseurs sont extraits dans les moûts, il n’est plus possible de les éliminer. La décantation rapide des moûts pratiquée à l’issue du pressurage s’avère efficace pour révéler la structure aromatique des eaux-de-vie mais pas pour corriger les excès de précurseurs de composés herbacés et de bourbes.

Les priorités

Adapter le rythme de récolte à la capacité de pressurage du chai ➞ Traiter la vendange avec des délais d’attente minimum.
Tenir compte de la nature de la vendange pour programmer les cycles de pressurage.
Maintien d’une parfaite hygiène au niveau de la chaîne de traitement de la vendange.
Attention aux effets mécaniques trop intenses qui sont toujours préjudiciables à la qualité des eaux-de-vie.
Anticiper et organiser la mise en fermentation rapide des volumes de moûts récoltés quotidiennement.
La réalisation des travaux de récolte et de pressurage par des prestataires doit tenir compte des capacités technologiques du chai au niveau des décantations et des départs en fermentation.
Raisonner l’organisation du chantier de récolte en tenant compte de la température de la vendange (des moûts) et de la présence ou pas dans les chais de moyens de mise à température en ligne des moûts.
Ne pas hésiter à adapter les horaires de récolte en fonction du climat pendant les vendanges (année très chaude : ne pas récolter de 12 à 20 heures ; année froide : récolter de 10 à 20 heures) pour essayer de rentrer de la vendange entre 15 et 17 °C.
Une baie de raisin est constituée de cellules plus ou moins fragiles qui sont réparties dans trois zones distinctes. Cette caractéristique leur confère une aptitude à libérer leur jus différente :

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Traiter la vendange en douceur

Limiter les phénomènes de trituration qui conduisent à l’obtention de teneurs en bourbes trop importantes et en composés.
Les installations de réception et de transfert de la vendange les plus courtes et les plus simples sont toujours les meilleures.
Plusieurs marqueurs analytiques sont en mesure de quantifier l’intensité des phénomènes de trituration au cours du traitement de la vendange : l’hexanol, le Cis-3-hexenol, le TDN et les teneurs en alcools supérieurs. Le dosage de ces éléments est actuellement réalisé systématiquement dans la plupart des démarches de sélection qualitative des vins des grandes maisons.
La présence d’une vendange constituée d’une fraction semi-solide et de volumes de jus libres importante rend son traitement délicat. Les jus libres sont naturellement plus riches en bourbes et il convient donc de les extraire après leur avoir fait bénéficier de l’effet d’autofiltration dans la masse de vendange. C’est une intervention statique qui permet d’éliminer une fraction significative de bourbes.

La conduite du pressurage

L’utilisation de plus en plus fréquente de pressoir de grande capacité peut parfois engendrer des durées de remplissage trop longues. L’idéal est de remplir une cage en 45 mn à 1 heure maximum.
Pour les pressoirs pneumatiques remplis en axial, attention aux rotations de cage excessives durant la phase de chargement. Cela provoque une libération de bourbes importantes. Ne jamais faire tourner la cage quand de la vendange est pompée dans le pressoir. Limiter les rotations à 1 à 2 tours pour égaliser la vendange quand la cage est remplie à 80 %.
Quel que soit le type de pressoir, chercher à tirer profit de la capacité d’autofiltration des moûts de la masse de vendange au moment du remplissage.

Adapter la programmation du cycle de pressurage à la nature de la vendange :
➞ Laisser les jus libres s’écouler sans montée de pression en début de cycle.
➞ Observer la turbidité des premiers jus coulés.
➞ La phase de basse pression entre 0 et 1 bar est capitale en terme de qualité.
➞ Privilégier les montées en pression progressives en évitant de bloquer les jus dans les cages
➞ Gérer avec progressivité les maintiens de pression.
➞ Limiter le nombre d’émiettages.
➞ La séquence de pressurage à haute pression (entre 1 et 2 bars) doit être abordée de façon plus rapide pour que le temps de pressurage total ne dépasse pas 2 heures.
➞ Au-delà 1 bar, la structure qualitative évolue profondément et pas forcément en bien.

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En présence de vendange grasse, surmûrie ou botrytisée, l’écoulement des jus est beaucoup plus difficile. Il faut laisser le temps au jus de s’écouler avec des montées en pression lentes et progressives.

Le tamisage des moûts

La filtration des moûts par tamisage aussitôt le pressurage est une intervention importante pour éliminer les particules solides (pépins, pellicules, fragments végétaux…).
En présence de vendange altérée par le botrytis, le tamisage des moûts avec des moyens technologiques plus performants peut en limiter partiellement les incidences négatives.
L’utilisation de filtre de type Alfa Laval s’avère efficace pour éliminer une partie des particules végétales libérées de la vendange botrytisée.

Le point sur les décantations rapides

Les priorités

La décantation rapide des moûts aussitôt le pressurage est une intervention qui est apparue au cours des dernières années.
La décantation est une opération de stabulation statique rapide des moûts aussitôt le pressurage qui contribue à améliorer la finesse et la richesse aromatique des eaux-de-vie (avec une distillation sur lies) et tend aussi à réduire les teneurs en alcools supérieurs. Elle permet aussi de conserver les vins sur toutes leurs lies aussitôt la fermentation alcoolique. La nature des lies beaucoup moins compacte facilite leur mise en œuvre au moment de la distillation.
Les maisons Hennessy et Rémy Martin préconisent à leur livreurs de mettre en œuvre cette pratique.
La maison Martell estime que sur vendange pourrie, la décantation se justifie alors qu’en présence de vendange saine et normalement mûre, sa systématisation n’est pas souhaitable.
La société Courvoisier considère que cette intervention ne se justifie pas si le pressurage est bien conduit.
En présence de vendange botrytisée, la décantation est une intervention corrective conseillée et bénéfique qui « ne gommera pas » tous les effets négatifs liés la pourriture.
Intégrer parfaitement le déroulement des différentes opérations liées à la décantation dans l’organisation de la chaîne d’extraction des jus.
Bien maîtriser la durée des décantations et le temps global entre l’arrivée de la vendange au chai et le soutirage des moûts décantés pour ne pas pénaliser le démarrage rapide des fermentations.
Opération à n’envisager que si on s’est donné les moyens techniques (en cuverie, pompes…) et humains de la réussir. Par exemple, il vaut mieux limiter la décantation aux deux premiers pressoirs du matin si on ne dispose pas de suffisamment de temps pour la réaliser dans de bonnes conditions au cours de la journée.

La mise en œuvre des décantations

● Chaque lot de moût provenant d’un même cycle de pressurage doit être isolé et collecté dans une même cuve. L’idéal est de posséder 2 cuves de décantation pour un même pressoir.
● Interdiction d’utiliser du soufre ou tout autre antiseptique.
● La durée de la décantation : maximum de deux heures après le début du remplissage de la cuve réceptionnant les jus provenant d’un même cycle de pressurage.
● Tenir compte pour les durées de décantation du temps total (intervalle de temps entre l’arrivée de la vendange au chai et le soutirage des moûts décantés) pour ne pas retarder le départ en fermentation.
● Elimination d’environ 2 à 10 % des volumes de fond de cuve et de la fraction surnageante.
● Pratique facile à réaliser et présentant peu de risque avec des moûts à 14-15 °C.
● Toujours bénéfique en année de pourriture.
● Pratique délicate en présence de moûts à 18 °C et plus. A ces niveaux de température, la flore indigène de levures et de bactéries est en mesure de se développer rapidement.
● La conduite des décantations doit s’accompagner d’une anticipation des départs en fermentation (bonne gestion des levurages ou de l’introduction des pieds de cuve).
● La décantation génère aussi une charge de travail importante au chai qu’il faut bien apprécier.
● L’utilisation de coude décanteur, de mireur et de vannes de vidange totale à 2 voies facilite le travail.
● La mise en œuvre de la décantation nécessite une parfaite propreté au niveau de la cuverie de réception. Entre chaque cycle de pressurage, les cuves doivent être systématiquement lavées.

En conclusion : la décantation est une pratique œnologique dont l’intérêt qualitatif est démontré mais sa mise en œuvre nécessite une bonne maîtrise technique, une surveillance permanente et une charge de travail
supplémentaire significative.

Favoriser un démarrage rapide de la fermentation alcoolique

Les caractéristiques de la vendange et des moûts, la température, l’état sanitaire, le niveau et les teneurs en azote ammoniacal jouent un rôle important sur la capacité qu’auront ultérieurement les levures à se multiplier au tout début de la fermentation pendant les phases de croissance. En effet, si dans les 2 jours suivant le départ en fermentation, la population de levures se multiplie suffisamment et montre une bonne activité, il y a de très fortes probabilités pour que la cinétique fermentaire s’achève sans incidents. A l’inverse, si les moûts présentent une insuffisance de teneurs en azote ammoniacal, des niveaux de températures trop bas ou trop hauts…, la multiplication des levures sera perturbée et les risques d’accidents fermentaires sont beaucoup plus importants.
Créer des conditions favorables à un démarrage rapide de la fermentation alcoolique est un acte œnologique important.

La température des moûts, c’est très important

La notion de température des moûts est capitale pour le lancement du processus fermentaire.
Les levures intéressantes sur le plan qualitatif ne peuvent se multiplier dans de bonnes conditions que si la température des moûts se situe entre 15 à 17 °C. Un moût trop froid (à 12 °C et moins) rend plus difficile l’implantation des levains de qualité au profit de souches indigènes cryophiles générant des composés secondaires indésirables (éthanal…) qui ne sont pas souhaitables pour la qualité des vins. Un moût trop chaud (20 à 22 °C) est un handicap pour toutes les productions de vins blancs car les levures indigènes se multiplient très rapidement et leur présence nuit à l’implantation des levains sélectionnés. Des températures élevées de moûts favorisent le développement rapide de levures oxydatives (Klockera, Pichia… occasionnant des déviations aromatiques dans les vins et les eaux-de-vie) qui, en l’absence de S. cerevisae en quantité suffisante, dominent le milieu. Des temps de latence trop longs pendant la phase pré-fermentaire favorisent aussi la multiplication des levures oxydatives.
Quand la récolte intervient dans une période chaude, le décalage des horaires de récolte tôt le matin (de 4 heures à 13 heures) permet de rentrer des raisins plus tempérés. En 2003, les propriétés qui avaient mis en œuvre cette stratégie de travail avaient beaucoup mieux maîtriser le déroulement des fermentation alcooliques.
La mise à température des moûts peut être assez facile à maîtriser avec des moyens simples et peu coûteux tant que les volumes récoltés ne dépassent pas 250 à 350 hl/jour. Par contre, dès que les apports quotidiens dépassent 400 hl/jour, la mise à température des moûts nécessite des moyens technologiques importants.

Un mauvais état sanitaire, la cause de nombreux problèmes

Le développement du champignon Botrytis cinerea sur les baies ou les fractions de grappes « consomme » une partie des réserves alimentaires (les substances azotées) destinées aux levures. La présence de baies altérées dans la vendange héberge des levures et des bactéries indésirables pour la qualité.
La présence de laccase et d’autres microorganismes consomme des quantités d’oxygène relativement importantes qui peuvent manquer aux levures en fin de fermentation et favoriser leur mortalité précoce.
Une vendange et des moûts botrytisés représentent un milieu peu favorable à la multiplication des « bonnes » levures. Il convient alors de pallier les insuffisances en matières azotées, en oxygène de façon préventive pour faciliter l’implantation des LSA ou des pieds de cuve dans les meilleures conditions.

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Maîtriser les apports d’azote

Depuis quelques années, les travaux de recherche conduits par la Station Viticole du BNIC ont mis en évidence d’une part la corrélation entre les niveaux d’acidité de la vendange à la récolte et la teneur en azote des moûts (des moûts acides sont riches en azote et inversement) et d’autre part la présence de teneur variable en azote dans les moûts influence fortement la production de composés volatiles dans la fermentation alcoolique.
Lors des millésimes 2007, 2008 et 2009, la récolte de raisins possédant une bonne acidité a permis d’obtenir des moûts riches en azote et les eaux-de-vie nouvelles ont extériorisé un potentiel aromatique généreux. Des travaux de recherche récents ont permis d’affiner l’incidence des teneurs en azote sur la structure qualitative des vins après la fermentation alcoolique.
La présence de teneurs en azote suffisantes dans les moûts est à la fois un gage de réussite pour le déroulement complet de la fermentation alcoolique et un révélateur de composés bénéfiques à la structure aromatique des eaux-de-vie. Or, en 2011, le TAV potentiel des moûts risque d’être élevé et la fermentation de teneurs en sucres importantes nécessite toujours des besoins en azote plus conséquents.
L’azote intervient aussi de façon indirecte sur la production de composés aromatiques bénéfiques à la qualité des eaux-de-vie. Une alimentation azotée suffisante des moûts facilite le développement des flores de levures sélectionnées beaucoup plus propices à la production d’esters fermentaires. Des teneurs plus élevées en azote limite aussi la production d’alcools supérieurs, ce qui contribue aussi à assurer une meilleure extériorisation du potentiel aromatique. L’augmentation des populations de levures présentent dans les moûts a aussi un influence sur l’impact aromatique des lies mises en œuvre au cours de la distillation. La qualité des lies est directement liée à la concentration d’esters d’acides gras provenant directement des cellules de levures présentes au fond des cuves.

L’azote des moûts, l’aliment indispensable des levures

L’azote est un nutriment essentiel au fonctionnement de toutes les cellules vivantes et les levures n’échappent pas à cette règle. Les principales sources d’azote dans les moûts qui sont assimilables par les levures sont l’azote
ammoniacal et les acides aminés (sauf la proline). La nutrition azotée intervient sur le cycle de croissance des levures et, par voie de conséquence, sur l’activité fermentaire et la vitesse de fermentation.
Des teneurs élevées en azote dans les moûts favorisent l’augmentation des populations de levures et leur activité (une capacité à dégrader les sucres plus forte). Pour les distillations avec lies, la présence de fortes populations de levures contribue à renforcer la structure aromatique des eaux-de-vie nouvelles. Les cadavres de levures libèrent des acides gras qui sont à l’origine des esters aromatiques apportés par la mise en œuvre des lies.
Les moûts issus d’une vendange riche en sucres à pleine maturité, voire à surmaturité, se seront naturellement appauvris en substances azotées. A l’inverse, des moûts présentant un bon équilibre sucres/acidité ont généralement des teneurs en azote suffisantes pour assurer une bonne multiplication des levures.
Faire une analyse des teneurs en azote assimilable dans les moûts dans la majorité des parcelles lors du dernier contrôle de maturation sera en 2011 une sage précaution.

Maîtriser les apports d’azote et d’autres activateurs

Les levures mettent en stock de l’azote au début de leur cycle de vie. Si cette mise en stock est insuffisante, elles n’auront pas assez de résistance pour survivre dans un milieu qui devient de plus en plus alcoolisé. C’est pour cette raison que les apports d’azote en cours de fermentation ont une efficacité aléatoire.
L’utilisation d’activateurs de fermentation ne doit pas être systématique mais au contraire raisonnée, en tenant compte des caractéristiques de la vendange, des résultats analytiques et des objectifs de qualité de chaque propriété.
Quelques exemples de situation à risques :
• Vendanges très mûres, voire surmûries.
• Moûts issus de vendange botrytisée.
• Moûts blancs sévèrement débourbés.
• Vignes peu vigoureuses, enherbées en plein ou ayant subi un stress hydrique.

L’adjonction d’activateur doit toujours être abordée de manière préventive (ne pas attendre une chute de l’activité des levures pour intervenir), de façon à créer des conditions favorables au bon déroulement de la phase de croissance active des levures (les multiplications cellulaires).
En situation de carence avérée sur moût, l’apport en début de fermentation d’un complément azoté (en même temps que l’apport de LSA) va permettre d’augmenter la dynamique de multiplication des levures et d’accroître la capacité de fermentation des sucres par une présence importante de biomasse levurienne. En revanche, des apports tardifs d’azote suite à un ralentissement fermentaire ne sont pas assez efficaces pour assurer l’achèvement des fermentations.
Divers essais réalisés par la Station Viticole du BNIC ont démontré sur des moûts carencés l’intérêt d’apports préventifs de produits simples et peu coûteux comme le sulfate et le phosphate d’ammoniaque. L’utilisation de produits commerciaux associant plus de composés au sel d’ammonium n’avait pas donné de meilleurs résultats.
En année de forte maturité, l’utilisation de sulfate d’ammoniaque peut présenter un réel intérêt car cela engendre une baisse du pH significative des vins (dès que les rajouts sont significatifs).

Conseils

Les informations régionales sur les teneurs en azote des moûts de chaque millésime représentent seulement une tendance régionale qu’il convient de compléter par une analyse fine du « potentiel azote » de chaque propriété.
Avoir une connaissance précise des teneurs en azote des moûts des différents îlots terroir de sa propriété.
Ne pas systématiser les apports d’azote
➞ raisonner les complémentations en tenant compte du climat, de l’état de maturité et de l’effet terroir.
Avoir des teneurs en azote supérieures à 180 mg contribue à la révélation du potentiel dans les eaux-de-vie (distillées avec lies).
En situation de carence avérée, réaliser les apports d’azote précocement avant le départ en fermentation en même temps que le levurage.
Pour des complémentations importantes, il faut fractionner les apports en 2 fois, la moitié en début de fermentation et le reste autour de 1040 de densité.
L’adjonction d’azote provoque une activation du processus fermentaire dont il faut anticiper les conséquences, une élévation des températures de fermentation.

Les points clés au niveau des apports d’azote
➞ La teneur en azote est un levier technique important pour le bon déroulement de la cinétique fermentaire et l’apport indirect de composés aromatiques bénéfiques à la qualité des eaux-de-vie.
➞ Créer les conditions au vignoble pour obtenir des moûts riches en azote doit être intégré dans l’itinéraire technique de production viticole.
➞ Gérer les apports doit être effectué en s’entourant des compétences d’un œnologue car la mise en œuvre d’une complémentation est une intervention technique.
➞ Apporter des teneurs conséquentes d’azote accentue la vitesse de fermentation et les élévations de températures, ce qui, lors d’années chaudes, peut poser des problèmes
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Trois niveaux d’ajustement de la teneur en azote peuvent être envisagés :
– Niveau 1 : pour assurer une transformation complète des sucres.
– Niveau 2 : la recherche de vins équilibré en composés volatiles (arômes fermentaires et teneurs en alcools supérieurs réduites).
– Niveau 3 : la recherche de vins riches en ester d’acide gras.

Maîtriser le déroulement des fermentations alcooliques

 S’intéresser au cycle de vie des levures

Le cycle de vie d’une levure se décompose en 4 phases distinctes de cycle de croissance:
1 La période de latence : au départ, les levures s’acclimatent au milieu sucré et alcoolique (légèrement) du moût.
2 La multiplication cellulaire : les levures se multiplient rapidement pour atteindre 120 à 130 millions de cellules/millilitre. Les besoins en azote sont importants et immédiats. Les levures utilisent l’azote d’une part pour constituer leurs parois cellulaires et d’autre part pour constituer des stocks. Une insuffisance de disponibilité en azote pendant cette phase réduit l’augmentation de la population de levures.
3 La phase stationnaire : pendant cette période, la population de levures reste stable et très active (vis-à-vis de la fermentation) mais le milieu est épuisé en azote. Les levures poursuivent leur activité grâce aux réserves accumulées pendant la phase de croissance. L’insuffisance de ces réserves peut conduire à une mortalité prématurée des levures et donc à un ralentissement brutal de la fermentation alcoolique (risque d’arrêt FA en présence de sucres résiduels).
4 La phase de déclin : l’accumulation d’éthanol dans le milieu provoque la dégradation des parois cellulaires de levures qui meurent.

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La quasi-totalité de la fermentation se déroule avec une population de levures en phase stationnaire, d’où l’importance de la réussite des phases d’acclimatation et de croissance.

Bien préparer les pieds de cuve

Maintenir un lot de moût à bonne température (entre 15 et 17 °C) dans lequel un ensemencement en LSA à la dose de 10 à 20 g/hl sera réalisé. Le pied de cuve ne pourra être utilisé comme « levain qualitatif » que si sa densité est supérieure à 1040. Incorporer 20 à 30 % de moût du pied de cuve dans la cuve à ensemencer (20 à 30 hl pour 100 hl).
Lors d’années chaudes, les mises en fermentation à partir de pieds de cuve ont certaines limites liées aux phénomènes inévitables de concurrence des flores de levures indigènes.
A la base, le pied de cuve doit être réalisé à partir de LSA.
Les pieds de cuve doivent être renouvelés assez fréquemment (tous les 3 jours) pour conserver leur rôle d’ensemencement en « bonnes » levures.
Des différences de températures importantes (7 à 10 °C) entre le moût frais et le levain posent le même problème qu’avec des LSA. Il faut alors réaliser une étape intermédiaire d’acclimatation.

Les LSA pour mieux maîtriser la F.A.

L’utilisation systématique des LSA est conseillé en année chaude où naturellement les populations de levures indigènes ont une plus forte capacité à se développer dès la libération des premiers jus.
Un démarrage rapide des fermentations réduit considérablement l’implantation de flore de levures et bactéries indésirables. Le déroulement de la fermentation plus régulier améliore généralement le rendement en alcool et l’investissement dans les LSA se trouve alors bien valorisé. Pour les vins de distillation, l’utilisation des LSA réduit le risques d’apparition de composés secondaires de fermentation indésirables pour la qualité (comme l’éthanal, l’acétate d’éthyle, les alcools supérieurs) et renforce les vins en arômes fermentaires et le potentiel aromatiques des lies.
D’une manière générale, il est intéressant d’utiliser dans un chai plusieurs souches de levures car cela contribue à
développer des typicités aromatiques différentes dans les vins et les eaux-de-vie. L’effet millésime qui s’avère tout de même plus déterminant sur les caractéristiques aromatiques des vins peut s’exprimer de façon différente grâce à l’effet souche de LSA.

Réussir les implantations de LSA

Verser dans de l’eau tiède à 35 °C du sucre en poudre en agitant jusqu’à sa complète dissolution. Incorporer les LSA dans l’eau sucrée en agitant lentement. Laisser les levures se réhydrater pendant 15 à 20 mn et ensuite le levain est prêt à l’emploi. Si une différence de température trop importante (de 7 à 10 °C) existe entre le levain et le moût, mettre en œuvre une phase intermédiaire dite d’acclimatation. Le levain sera incorporé dans un petit volume de moût (2 fois celui du levain) dont la température sera inférieure de 5 à 8 °C à celle du levain d’origine. Une fois que les premiers signes de l’activité des levures se seront matérialisés dans ce levain d’acclimatation, il sera incorporé dans la cuve finale (au bout de 1 heure maximum).

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Les priorités pour réussir un ensemencement de LSA :
• Avoir bien apprécier la capacité de fermentescibilité des moûts.
• Apporter une dose de levures suffisante : 15 à 20 g/hl.
• Choisir les souches de LSA correspondant au type de vin que l’on souhaite élaborer.
• Respecter les différentes phases de préparation des LSA.
• La phase d’acclimatation est souvent capitale en année froide ou chaude.

Utiliser les LSA qualifiées par le BNIC

La Station Viticole du BNIC, les responsables de production des maisons de négoce et les œnologues de la région tiennent des discours précis sur l’utilisation des levures, qui conseillent l’utilisation des seules LSA qualifiées.
Les souches pré-qualifiées doivent valider leurs potentialités qualitatives à l’issue d’un suivi dans les conditions de la pratique (sur de nombreux sites expérimentaux) durant 3 campagnes avant d’être définitivement qualifiées.

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Les préconisations de levurage Courvoisier

L’utilisation des LSA doit devenir systématique en raison de la succession de millésimes difficiles (évolution climatique).
Utiliser 2 ou 3 souches de LSA dans le même chai. Souches préconisées :
• FC9, 7013 (les valeurs sûres), la Zymasil, FC9 et Equinox B1.
• La SM 102 est déconseillée (en raison de ses capacités à synthétiser de l’étanal et à bloquer les malo).

Les préconisations de levurage HENNESSY

Utilisation des LSA à systématiser ➞ facteur de qualité pour les arômes et le goût des vins et eaux-de-vie.
Utiliser 2 ou 3 souches de LSA par chai
➞ moyen d’apporter de la diversité sur le plan aromatique.
Un type de levure par cuve.
Souches préconisées par Hennessy : 7013, FC9, Zymasil et sur des volumes moindres, essais des nouvelles souches qualifiées par le BNIC.

Les préconisations de levurage MARTELL

Utilisation des LSA conseillée mais pas systématique sur l’ensemble des volumes de vin produit sur une propriété.
Souches préconisées :
• Utiliser des LSA qualifiées pour les vins de distillation.
• Ne pas privilégier des souches propres à la production d’esters.

Les préconisations de levurage rémy martin

Utilisation des LSA à systématiser (à la dose de 20 g/hl).
Levurer les cuves dans leur totalité dès l’arrivée des premiers volumes (respecter le protocole régional de préparation des levures).
Souches préconisées :
• Utiliser les souches qualifiées par le BNIC. Les souches pré-qualifiées ne doivent être testées que sur de petits volumes.
• LSA conseillées : SM102, FC9 et Zymasil.
• Utiliser 3 souches par chai.

Au cours du déroulement de la fermentation alcoolique, les excès thermiques à la hausse comme à la baisse sont en mesure de perturber fortement le processus de dégradation des sucres en alcool et la synthèse des composés propices à la révélation du potentiel aromatique final des eaux-de-vie. Des messages techniques confirment aujourd’hui l’intérêt de contrôler le déroulement des fermentations des vins de distillation :

➊ Avoir des températures de moûts autour de 15 °C favorise un démarrage des fermentations rapide. Un démarrage à basse température est propice à la production d’éthanal.

➋ Eviter des excès thermiques au-dessus 25 °C pendant la fermentation alcoolique. Cela contribue à renforcer la structure aromatique des vins et des eaux-de-vie. La synthèse d’alcools supérieurs est plus importante lorsque les températures de fermentation dépassent 25 °C.

Pour les vins de distillation, les exigences de maîtrise thermique durant la fermentation alcoolique doivent permettre d’éviter des excès de température au-dessus 25 °C. L’idéal est que la cinétique fermentaire s’effectue de façon complète et régulière pendant 5 à 7 jours maximum.

Un des enseignements importants des vinifications depuis quelques années est que lorsque les excès thermiques sont anticipés (sur vendange juste récoltée ou aussitôt le pressurage en blanc), ils sont ensuite beaucoup plus faciles à maîtriser.

Les préconisations de température de fermentation COURVOISIER

Eviter les extrêmes : en dessous 20 °C, processus fermentaire lent et au-dessus 28 °C, risque de mortalité des levures.

Les préconisations de température de fermentation HENNESSY

Entre 21 et 24 °C ➞ on obtient les meilleurs résultats qualitatifs.
A partir de 1020 de densité ➞ relâcher la maîtrise thermique dans les chais
équipés.

Les préconisations de température de fermentation MARTELL

Ne pas dépasser 25 °C est propice à l’obtention d’eaux-de-vie pleines de finesse.

En fin de fermentation, les trop basses et trop hautes températures représentent un danger pour l’aboutissement du processus fermentaire. La plage idéale de température de fermentation se situe entre 22 et 25 °C.Une bonne maîtrise de la fermentation alcoolique permet d’élaborer des vins équilibrés en arômes fermentaires qui contribuent en partie à la révélation de la typicité Martell dans les eaux-de-vie nouvelles.

Les préconisations de température de fermentation rémy martin

Lancer la fermentation entre 16 et 18 °C.

Des températures de fermentation entre 22 et 25 °C favorisent la production d’esters fermentaires propices à la révélation d’arômes floraux et fruités dans les EDV.
Eviter les excès thermiques au-dessus 25 °C.

Les priorités

Prendre conscience des risques ultérieurs de fortes ou faibles températures au moment de la réception des raisins et de la libération des moûts.
Une vendange ou un moût à 10 °C ou à 22 °C risque de poser bien évidemment des problèmes au moment du déroulement de la fermentation.
Les faibles comme les fortes températures des moûts ou de la vendange ont des conséquences directes sur le développement des populations de levures, la préservation du potentiel aromatique…
Le fait de pouvoir anticiper ces risques thermiques représente un acte de vinification majeur même si les chais ne disposent pas d’équipements de maîtrise thermique performants.

Comment diagnostiquer d’éventuels excès thermiques ?

➊ Connaître les températures de chaque lot de moût aussitôt le pressurage.

L’incidence du climat pendant les vendanges est importante :
• Année très froide ➞ t° moûts 10 °C
• Année fraîche ➞ t° moûts 14 °C
• Année tempérée ➞ t° moûts 18 °C
• Année chaude ➞ t° moûts 22 °C

La température des moûts idéale pour le démarrage de la fermentation alcoolique : 15-17 °C en sortie de pressoir.

➋ Tenir compte des volumes de moûts récoltés quotidiennement.

Plus ils sont importants, plus les besoins en refroidissement ou en réchauffage seront importants :
• 300 hl/jour ➞ 2,5 ha/jour
• 500 hl/jour ➞ 4 ha/jour
• 1 000 hl/jour ➞ 8 ha/jour

Lorsque les volumes de moûts récoltés quotidiennement ne dépassent pas 300 à 400 hl, un décalage des horaires de récolte est un moyen astucieux de rentrer une vendange plus tempérée.

➌ Evaluer les élévations de températures liées à la fermentation alcoolique.

La transformation des sucres en alcool par les levures s’accompagne d’un dégagement d’énergie qu’il est aujourd’hui possible de quantifier très précisément. La température ambiante autour de la cuverie, la contenance et le matériau des cuves, la température des moûts au départ de la fermentation sont des éléments qui influencent fortement les dégagements d’énergie au cours du déroulement de la fermentation alcoolique.

La température ambiante autour de la cuverie de fermentation. Le niveau de ventilation d’un chai accentue ou réduit les échanges thermiques d’une cuve (quel que soit le matériau) et les incidences du climat pendant les vendanges sont importantes. Une cuve enterrée ne pourra pas être ventilée alors qu’une cuve extérieure le sera naturellement beaucoup plus.

• Année chaude ➞ température extérieure sur 24 heures de 22 °C.
• Année tempérée ➞ température extérieure sur 24 heures de 18 °C.
• Année fraîche ➞ température extérieure sur 24 heures de 14 °C.

Le matériau et la contenance des cuves. Dans les chais de vinification on utilise aujourd’hui des cuves en ciment, en fibre de verre ou en inox. Chacun de ces matériaux possède une capacité d’échange très différente. L’inox est très conducteur, la fibre de verre possède plus d’inertie et le ciment est peu conducteur. Techniquement, toutes ces données sont parfaitement connues et assez faciles à formaliser avec les moyens informatiques. L’augmentation de la capacité des cuves amplifie les niveaux des dégagements d’énergie durant la fermentation alcoolique.

➍ Envisager les solutions pour contrôler les excès thermiques.

Utiliser des moyens technologiques pour contrôler les températures de fermentation.

Présentation d’une étude thermique de contrôle des fermentations

Les éléments pris en compte pour réaliser l’étude thermique

Température de départ des moûts : 17 °C.
Titre alcoométrique potentiel des moûts : 9 à 12 % vol.
Durée de la fermentation alcoolique : 7 jours.
Maîtrise thermique à 25 °C.

3 hypothèses de climat pendant les vendanges :
• Année chaude
• Année tempérée
• Année fraîche
(Etude réalisée par Jean-Michel Maron, de la Chambre d’agriculture de la Gironde).

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Contrôler le déroulement des fermentations

Le mauvais déroulement de la fermentation alcoolique conduit à l’obtention de vins présentant des défauts majeurs qu’aucune intervention corrective ne permettra d’atténuer. La parfaite maîtrise du processus fermentaire est donc un acte œnologique primordial. Tous les vinificateurs peuvent être confrontés à « des cuves difficiles » ayant un démarrage trop lent, des montées en température plus importantes, des fins de F.A. languissantes… Dans de telles circonstances, un suivi quotidien des densités et des températures de fermentations permet de détecter tôt les prémices d’un accident fermentaire et d’en limiter les conséquences.

Le contrôle quotidien des fermentations alcooliques est le seul moyen d’observer si la cinétique fermentaire se déroule normalement. Prendre les densités et les températures de chaque cuve tous les jours est vraiment « un geste » œnologique de base indispensable. 

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Contrôler les fermentations : un protocole à respecter
➊ Prendre les températures et les densités de chaque cuve quotidiennement et à heure fixe.
➋ Enregistrer ces informations sur une fiche de vinification pour visualiser parfaitement le déroulement du processus fermentaire.
➌ Renforcer la surveillance de cuves en dessous 1020 de densité car « les derniers grammes » de sucre sont toujours les plus délicats à transformer en alcool. Prendre 2 fois par jour les densités et les températures.
➍ Une fois que les densités indiquent la fin de la fermentation alcoolique, une confirmation de l’achèvement du processus par une analyse de laboratoire s’impose (dosage : sucre résiduel et acidité volatile).
➎ En cas d’incident (arrêt aux fermentations languissantes), s’entourer des compétences d’un œnologue.

Conseils pour réussir la fermentation alcoolque

• S’entourer des conseils d’un œnologue de terrain pour définir et piloter l’itinéraire technique des vinifications.
• Un démarrage rapide des fermentations dans un délai de 6 à 12 heures après le pressurage est toujours favorable à la qualité.
• Un démarrage lent après 2 à 3 jours d’attente est toujours la cause d’apparition de défauts majeurs dans les eaux-de-vie : apparition d’odeur de piqué (acétate d’ethyle) ; risque de goût d’évent (éthanal) ; développement de moisissures ; production accrue d’alcools supérieurs ; mauvais rendement en alcool.
• Mettre à bonne température les moûts :
– Avant le départ en fermentation, des niveaux de températures des moûts trop bas ou trop élevés doivent interpeller les vinificateurs ; s’organiser pour essayer de lancer les fermentations des moûts à une température de 15 à 17 °C.
• En présence d’un mauvais état sanitaire, le levurage systématique, l’apport d’azote et la décantation des moûts s’imposent : ce sont les seuls moyens de limiter le développement des levures et des bactéries indésirables pour la qualité.
• Penser à « alimenter » les levures de manière préventive :
– Apport de l’azote (sulfate ou phosphate d’ammoniac) en même temps que le levurage. Sur des moûts carencés en azote, réalisez un apport
Combiné d’azote et d’oxygène au départ de la fermentation alcoolique.
• Assurer un déroulement régulier de la cinétique fermentaire :
– Une fermentation trop rapide (en 3 ou 4 jours) entraîne des pertes aromatiques, un mauvais rendement en alcool, la formation de composés secondaires pas favorables à la qualité (alcools supérieurs…) et de fortes élévations de températures (risques de mortalité des levures et arrêts des fermentations).
– Une fermentation trop lente peut se finir difficilement en provoquant la formation d’éthanal (en années froides) et un arrêt fermentaire en présence de sucres résiduels qui accentue les risques de piqûres lactiques.
– Conduire la fermentation alcoolique en 5 à 7 jours en maintenant les températureS en dessous de 25 °C.
– La maîtrise thermique en dessous de 24 °C allonge les durées de fermentation et provoque un enrichissement en composés aromatiques aux notes florales.
– Certaines grandes Maisons de Cognac ont formulé des exigences en matière de maîtrise des températures de fermentation :
– Suivre quotidiennement les densités et les températures de fermentation.
– Respecter les préconisations de vinification de chaque grande Maison de Cognac.
• Le suivi analytique et qualitatif des vins :
– A la fin de la fermentation alcoolique : doser les sucres résiduels et l’acidité volatile pour s’assurer de la fin du processus fermentaire. Soutirage à l’abri de l’air des vins laiteux ou conservation sur toutes les lies. Faire le plein des cuves et les maintenir pleines. Un sulfitage précoce même à petite dose est fortement déconseillé.
– Faire régulièrement les ouillages des cuves. Déguster régulièrement les vins.

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