Coopérative Uniré : Le Bio s’invite au débat

19 avril 2012

Profitant des cours élevés du Cognac, la coopérative Uniré a déstocké massivement ses vieux comptes. D’où des résultats en hausse significative. Pour tenter de « bouter » le lapin hors de l’île, une grande campagne de défrichage des ronciers va être lancée sur fonds d’écotaxe. Et le bio s’invite au débat dans un territoire toujours en pointe.

 

 

L’agriculture rétaise comme laboratoire. Dans un territoire insulaire qui accueille une population très « fashion », le bio ne pouvait pas échapper au débat. C’est ce qui s’est passé lors de la dernière assemblée générale de la coopérative le 27 janvier 2012. Elle soldait l’exercice 2010-2011,
arrêté au 31 juillet 2011.

Rester en marge du bio ou avec ? Telle est la question. La coopérative est régulièrement sollicitée par des aspirants agriculteurs qui aimeraient conduire en bio des cultures maraîchères en terre rétaise, pommes de terre notamment . « Nous voyons passer beaucoup de projets. Si certains tiennent la route, d’autres ne sont pas toujours bien ficelés » a commenté sobrement le directeur de la coopérative Christophe Barthère. Un de ces candidats s’est plaint de ne pas avoir reçu de la coopérative l’accueil qu’il espérait. Dans la salle, un certain nombre d’adhérents ont fait chorus. « Nous n’avons pas le droit de fermer la porte. On ne peut pas déplorer, d’un côté, le manque d’agriculteurs et, de l’autre, refouler les candidats. Il faut leur lancer leur chance. » Le président de la coopérative, Jean-Jacques Enet, a tenu à préciser qu’il avait longuement reçu l’impétrant et « qu’il était même assez bavard ». Plus fondamentalement, il a déclaré que la coopérative « n’était pas du tout fermée à la culture bio ». « Simplement, qui dit atelier bio dit chaîne de conditionnement spécifique et donc frais supplémentaires. Pour s’engager dans ce genre d’investissement, nous devons avoir des volumes en face. Si l’on nous annonce l’apport de tel produit à telle quantité, nous pourrons juger de la rentabilité. Mais, pour l’instant, nous n’avons rien de concret. »

J.-J. Enet a rappelé que la coopérative constituait un groupement de producteurs. « Quand un agriculteur individuel prend une décision, il n’engage que lui-même. Un groupement de producteurs ne jouit pas de la même marge de manœuvre. Ses éventuelles erreurs retombent sur la collectivité tout entière. » Il a rappelé les exemples fâcheux de l’atelier asperge ou de l’atelier chou-fleur qui, tous les deux, firent « chou blanc ». « Mais la coopérative, a-t-il dit, est ouverte à tout. Ce sera au conseil d’administration de la section maraîchère d’en débattre. »

Luc Servant, président de la Chambre d’agriculture de Charente-Maritime, présent à l’AG d’Uniré, a indiqué la ligne de conduite de l’organisme consulaire. « C’est impossible de passer à côté du bio. Aujourd’hui, il faut répondre “avec” et non “à côté”. Ce n’est pas du snobisme mais du réalisme. Par contre, les financeurs institutionnels soutiennent les filières organisées et ils ont raison. Les groupements comme les coopératives doivent être le fer de lance du bio. » Il a cité l’exemple des céréales bio et du silo de Saint-Jean-d’Angély récemment inauguré.

élément fédérateur

En bon politique, Lionel Quillet, président de la Communauté de communes de l’île de Ré, sait que tout projet, pour exister, a besoin d’une impulsion, d’un élément fédérateur. Il a souhaité qu’Uniré soit l’entité autour de laquelle s’organisera le projet bio. Une proposition « clé en main », une façon habile mais ferme de renvoyer la balle dans le camp de l’agriculture rétaise. Message reçu 5 sur 5 par une partie de la salle. « La coopérative doit se mouiller et prendre position pour l’avenir. Sinon le réveil risque d’être douloureux. » Applaudissements de plusieurs adhérents.

Le déstockage massif des eaux-de-vie comptes 6, 7, 8 et 9 sur l’exercice 2010-2011 a valu à l’activité « Vignerons » de la coopérative de boucler sur un chiffre d’affaires de 9,8 millions d’€, contre 7,3 millions d’€ lors de l’exercice précédent. Ainsi, un excédent de 2,2 millions d’€ a été dégagé sur la branche viticole.

Après le coup de frein imprimé par la tempête Xynthia, les ventes au détail de produits viticoles ont accompli une belle remontée pour finir, au global, à + 2,21 %. Dans le chiffre d’affaires de la « Vigneronne », les ventes bouteilles de Pineau, Cognac, vin de table et de pays ont représenté 57 % du chiffre d’affaires total en 2010-2011. En règle générale, elles sont plus proches des 75 %.

Le partenariat avec la société Camus pour son Cognac île de Ré Fine Island se poursuit. En compagnie de quelques invités, la société de Cognac est venue visiter les installations de la coopérative. En fin de journée, elle a découvert le site de La Flotte-en-Ré, derrière l’abbaye des Chateliers. Un projet existe de faire vieillir des eaux-de-vie en ce lieu ainsi que de replanter des vignes Ugni blanc autour. « Ce partenariat met nos eaux-de-vie en valeur » a noté Jean-Jacques Enet.

Les lapins de l’angoisse

La « problématique lapin » se pose de manière toujours aussi aiguë dans l’île de Ré. Le sujet pourrait paraître anecdotique voire rigolo. Il ne l’est pas. Ces indésirables « à la prolifération démesurée » (dixit le président de la coopérative) nourrissent l’angoisse des agriculteurs. Les lapins rongent les pieds de vignes, s’attaquent aux cultures. Un sentiment d’impuissance s’installe. De colère aussi. « Une colère qui pourrait s’avérer mauvaise conseillère » met en garde Jean-Jacques Enet. « N’attendons pas qu’un gros pépin arrive ! » Les élus locaux ont pris la mesure du danger. Une cartographie des zones sensibles vient d’être dressée et un grand chantier de défrichage se profile. Le conseiller général du canton sud, Léon Gendre, a indiqué que les outils juridiques se mettaient en place, pour obliger les propriétaires à entretenir leurs biens. Un opérateur foncier a été recruté à cet effet par la Communauté de communes. Il sera totalement voué à cette tâche. Les travaux de défrichage devraient rentrer dans leur phase active au cours du second semestre 2012. Ils seront financés par l’écotaxe du pont de l’île de Ré. Lionel Quillet, président de la Communauté de communes, a indiqué que la collectivité y consacrerait annuellement « un billet de 500 000 € », soit la moitié du budget d’entretien de l’estran et des zones humides. « On y mettra les moyens ! »

« Défricher, c’est bien, mais on ne peut pas faire que ça. Il faut aussi penser à détruire les populations » a martelé le président d’Uniré. « Les chasseurs locaux semblent dépassés. Et, de toute façon, plus on tue de lapins, plus on a l’impression qu’ils se multiplient, peut-être au nom de la survie de l’espèce. » Il a regretté « des tas de réunions avec l’Administration qui ne servent pas à grand-chose. Tout le monde traîne un peu les pieds. »

Le président Quillet n’est pas de cet avis. « Il y a un projet, des financements, une concertation. Ce que l’Etat nous demande, c’est de présenter un plan global, comme pour les digues. Tout le monde va se mettre en ordre de marche et banco ! Nous arriverons à bouter le lapin hors de l’île. »

Repères
p17.jpgSur la récolte 2010, la coopérative a vinifié 42 000 hl vol. Elle en a distillé 22 000 hl vol., soit une fabrication Cognac de 2 152 hl AP. Au 31 juillet 2011, le stock de Cognac de la coopérative s’élevait à 6 900 hl AP. L’activité « Vigneronne » d’Uniré a engendré un chiffre d’affaires de 9,8 millions d’€, en hausse de 35 %. L’activité Maraîchers a vu son chiffre d’affaires passer de 1,8 million d’€ à 2,2 millions d’€, en augmentation de 18 %. Sur le dernier exercice, Uniré a dégagé un chiffre d’affaires global de 13,3 millions d’€, en progression de près de 3 millions d’€.

 

 

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