Actualité : Dix questions à Jean-Marc Olivier et Patrice Pinet

5 août 2009

Rencontrés le 12 juin dernier, Jean-Marc Olivier et Patrice Pinet ont relaté leur perception de la situation actuelle.

pinetolivier.jpg« Le Paysan Vigneron » – Comment se comportent les marchés ?

Jean-Marc Olivier, Patrice Pinet – Les marchés sont difficiles, cela n’échappe à personne. Ils le sont partout, avec cependant des nuances selon les zones. Si l’on considère le premier d’entre eux, le marché américain, la crise se ressent de façon notoire, sans que l’on puisse dire non plus que la consommation s’effondre. Nous restons assez optimistes en espérant quand même que la crise économique se résolve dans un laps de temps pas trop long. A partir de là, les ventes devraient repartir, au moins sur la tendance d’avant.

« L.P.V. » – On a beaucoup parlé de phénomènes de déstockage, qui ont creusé les mauvais chiffres du début d’année.

J.-M.O., P.V. – Avant de parler de déstockage, il faudrait évoquer le surstockage qui s’est produit courant 2008. Puis la situation s’est tendue. Comme toujours dans ces cas-là, les acheteurs ont tendance à alléger leurs stocks avant de se réapprovisionner. Aux Etats-Unis, le phénomène est accentué par une chaîne de distribution très très longue entre distributeurs, grossistes… Fatalement, les retards de commande font boule de neige. Je pense que la situation devrait se stabiliser assez vite et permettre une reprise des ventes.

« L.P.V. » – Et l’effet dollar ?

J.-M.O., P.V. – Il se ressent considérablement. Sur nos deux marques, Salignac et Courvoisier, l’une est en positif, Salignac, et l’autre en négatif, Courvoisier. Quand le pouvoir d’achat baisse, c’est une lapalissade de dire que le prix acquière un relief supplémentaire.

« L.P.V. » – Qu’en est-il des autres marchés ?

J.-M.O., P.V. – En Europe, je parlerai de l’Angleterre, notre principal marché. La crise est bien là et impacte nos ventes mais elle n’est pas exactement de même nature qu’outre-Atlantique. Par contre, s’il y a un marché qui va mal, c’est bien le marché russe, pour des raisons de crise économique mais aussi sous l’effet d’un recul du PIB (Produit intérieur brut) de plus de 9 %. Et là où il serait possible de travailler, une désorganisation complète du système bancaire prive les entreprises de moyens financiers. Malheureusement, ce marché ne nous inspire guère d’optimisme, au moins pour le court terme. C’est très dommage car le potentiel de développement est bien là. Le marché repartira c’est sûr mais quand ?

« L.P.V. » – Dans un tel contexte, que faire ?

J.-M.O., P.V. – Essayer de stabiliser nos positions.

« L.P.V. » – Et l’Asie ?

J.-M.O., P.V. – Globalement, les ventes de Cognac deviennent légèrement négatives sur cette destination, mais là non plus nous ne sommes pas très pessimistes. L’Asie aborde la crise dans un tout autre état d’esprit que la vieille Europe. Si les Asiatiques se montrent un peu fatalistes, ils sont aussi beaucoup plus positifs – « ça va moins bien mais ça va repartir ». Aujourd’hui, la Chine se consacre au développement de ses infrastructures. Certes la consommation a levé le pied mais je suis prêt à prendre le pari que c’est le marché asiatique qui repartira le premier.

« L.P.V. » – Est-ce que cette crise fait bouger les pions sur l’échiquier des spiritueux ?

J.-M.O., P.V. – Nous vivons dans un climat concurrentiel. Notre gros concurrent en Asie est le Whisky, largement dominant. Pour l’instant la Vodka n’est pas trop visible. Il faut tous les jours occuper le terrain, défendre notre image, notre qualité, nos prix, notre concept de luxe, bref préserver tous les attributs de la marque.

« L.P.V. » – Comment communiquer quand l’argent se fait plus rare ?

J.-M.O., P.V. – Chez nous, nous ne relevons pas le pied. Par contre nous communiquons différemment, avec des investissements peut-être plus ciblés. Dans un marché en crise, le rendement du budget communication est toujours meilleur. Ne pas communiquer, ne pas faire ce qu’il faut ne serait pas tenable. Cela se répercuterait forcément sur la marque.

« L.P.V. » – Selon vous, quel avenir attend le Cognac ?

J.-M.O., P.V. – Les chiffres de sorties devraient s’améliorer. A un moment donné – quand exactement, c’est toute la question – nous reviendrons à un profil d’équilibre et le Cognac, je l’espère, pourra repartir dans un cycle de croissance. Ceci dit, la crise que nous subissons ne doit étonner personne. C’est le contraire qui eut été surprenant : que le Cognac puisse échapper au marasme mondial. Par contre, par rapport à la crise de 1990, des marchés beaucoup plus atomisés nous rendent moins sensibles aux retournements de conjoncture. Des effets d’amortisseurs existent.

« L.P.V. » – Comment envisagez-vous votre politique d’approvisionnement et les prix de la récolte 2009 ?

J.-M.O., P.V. – Notre stock est équilibré mais nous restons vigilants à l’évolution de nos marchés, pour pouvoir réagir le cas échéant. Nous sommes sur une base de contrat triennal, qui comporte cependant une clause de variation volumique entre 85 % et 100 %. Nous sommes en train de regarder s’il va falloir réajuster un peu les volumes d’entrées 2009. La décision sera arrêtée en septembre. De même le pourcentage de livraisons entre les eaux-de-vie 00 et les comptes 1, 2 et 3 selon les crus pourra être amené à bouger. En ce qui concerne l’aspect prix, depuis la récolte 2007, nos prix ont fortement augmenté. Pour la prochaine récolte, nous allons voir comment appréhender cette composante. Hors frais de main-d’œuvre, les coûts de production ont augmenté d’1,5 % en 2008, toutes choses égales par ailleurs. Mais il est peu tôt dans la saison pour parler prix.

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