Le vendredi 11 mai, le Syndicat des producteurs de Pineau a conduit une nouvelle action dans une enseigne régionale de la grande distribution. Objectif ! Dénoncer une remise ticket de 50 % sur le prix d’une bouteille de Pineau, promotion considérée comme destructrice d’image. « Nous continuerons tant qu’il le faudra » a annoncé le syndicat.
Le 17 février, cela se passait à Saintes. Le 11 mai 2012, même décor – un magasin de la grande distribution – mais lieu différent, Cognac et enseigne Leclerc au lieu de Système U. Sinon, même marque dans les deux cas. Cette fois-ci, il s’agissait d’une remise ticket Leclerc de 50 % sur une bouteille de Pineau affichée 7,40 €. La fois précédente, le prix de la bouteille était de 6,84 €, assorti de deux remises : 30 % de réduction immédiate et 20 % de ticket d’achat. Alors qu’à Saintes, le petit groupe de producteurs avait eu le temps de coller sur les bouteilles incriminées son « message sanitaire » : « Attention ! A ce prix, ce produit détruit une filière, des producteurs, un territoire » – il a été empêché de le faire à Cognac. Faute de munitions. Il est tombé sur des étagères vides. Bouteilles volatilisées. Raison invoquée par le propriétaire du magasin : « Les consommateurs se sont jetés sur la marchandise. Tout a été vendu dans la matinée. » Vrai ou faux ? En tout cas, le distributeur ne s’est pas précipité pour réapprovisionner son rayon avant l’arrivée de la délégation syndicale. L’opération devait durer 5 jours, le temps de l’anniversaire du magasin.
« Nous avons besoin de la grande distribution »
Les représentants du syndicat, son président en tête, ont redit qu’ils n’avaient rien contre les enseignes ni contre la société qui commercialise ce Pineau. « Nous avons besoin de la grande distribution et bien sûr de tous les metteurs en marché. » Mais il a prévenu aussi : « Nous interviendrons de nouveau, tant que dureront de telles opérations. Car elles sont destructrices d’image. Nous refusons que le Pineau des Charentes se réduise à l’aspect promotionnel. Nous ne voulons pas que notre produit soit enfermé dans un prix bas. »
« Nous ne sommes pas contre les actions promotionnelles, a pris la précaution d’ajouter Jean-Marie Baillif, tant qu’elles se cantonnent à des normes raisonnables, de l’ordre de 10, 15 %. Mais pas la moitié du prix ! Ce genre d’hyper-promo n’est pas cohérent avec un produit d’appellation comme le Pineau. » « Le piège, c’est que ces promotions sont redondantes. Même prévues sur de courtes périodes, elles se répètent tout au long de l’année, dans des magasins et des enseignes différents » a renchéri Jean-Bernard de Larquier, président du Comité interprofessionnel. Pour les responsables syndicaux, le plus choquant peut-être, c’est de constater que ces remises excessives concernent une marque leader. « Dans ces conditions, comment arriver à ce que d’autres marques se construisent ? Le syndicat déploie d’énormes efforts pour que tous les opérateurs puissent remplir leurs bouteilles et voir que tous ces efforts sont dilapidés… »
Centrale d’achat
Le propriétaire du magasin, venu à la rencontre des producteurs, a indiqué que ces promotions avaient été négociées au niveau de sa centrale d’achat, la Scachap*, qui réunit 36 ou 37 membres. Il a indiqué aussi « qu’un bon quart de la promotion était financé par le fournisseur mais qu’il prenait le reste à sa charge, sur sa marge. » Se défendant de brader le produit, il a admis sans peine « que toute chose avait un coût et que si on voulait faire de la qualité, il fallait y mettre le prix » . Pour autant, il a parlé de démarches quantitatives et de démarches qualitatives, qui ne s’excluaient pas et que la vie n’était faite que de « donnant/donnant ». Il a mis en avant son engagement pour les produits régionaux avec la création d’une association, « 100 % du coin ». Il a promis de faire remonter la colère des producteurs à sa centrale d’achat, tout en justifiant sa position d’acteur indépendant, doté de sa propre politique d’assortiment. « J’ai vraiment l’impression de faire un effort sur le rayon alcool régional. »
Les producteurs de Pineau lui en ont donné quitus et lui ont proposé un accompagnement de la filière. « Nous sommes ouverts aux échanges. » Le directeur s’est dit lui-même « open ». Puis il est rentré dans son magasin. Les producteurs, eux, ont pris le chemin du Leclerc Saintes où les attendait une action du même type. « Nous sommes des Charentais. La persévérance est notre principale qualité. A force d’être embêtées, les enseignes changeront peut-être leurs pratiques. Ce qui les fait bouger, ce n’est pas tellement les prix bas, c’est surtout de ne pas être plus cher que la concurrence. »
* Scachap : basée à Ruffec, la Scachap (Société centrale d’approvisonnement Charente-Poitou regroupe 37 hyper et supermarchés Leclerc situés en Poitou-Charentes, Limousin, Indre et Vendée.
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