Le débat autour des réserves de substitution - souvent appelées méga-bassines pour les plus vastes-, s’est intensifié en France ces dernières années, cristallisant des oppositions entre agriculteurs, écologistes, élus et citoyens. Le sabotage d’une réserve de substitution à Fouqueure la semaine dernières, revendiqué par le collectif DU PLOMB, marque un nouvel épisode dans cette controverse nationale.
Les retenues de substitution, sont des ouvrages artificiels conçus pour stocker l’eau prélevée en hiver dans les nappes phréatiques ou les cours d’eau. Cette eau est ensuite utilisée en été pour irriguer les cultures, notamment dans les régions sujettes à la sécheresse. Ces installations peuvent contenir plusieurs centaines de milliers de mètres cubes d’eau et sont souvent financées en partie par des fonds publics. Pour les défenseurs des méga-bassines, principalement issus du monde agricole, ces installations ont plusieurs avantages :
- Sécurisation de la production agricole face aux aléas climatiques.
- Réduction des prélèvements estivaux dans les nappes phréatiques.
- Adaptation au changement climatique, avec des réserves constituées en période d’abondance.
La Coordination Rurale et la FNSEA soutiennent ces projets, estimant qu’ils sont indispensables pour garantir la souveraineté alimentaire et la pérennité des exploitations agricoles.
Cependant les opposants, parmi lesquels figurent des collectifs comme Bassines Non Merci, Les Soulèvements de la Terre ou Extinction Rebellion, dénoncent :
- Un accaparement de la ressource en eau par une minorité d’agriculteurs.
- Des impacts écologiques négatifs, notamment sur la biodiversité et les zones humides.
- Un modèle agricole intensif, jugé incompatible avec les impératifs environnementaux.
Ils pointent également les pertes par évaporation, les risques de pollution et le manque de concertation démocratique autour de ces projets.
Le 8 juillet 2025, à la veille du vote de la controversée loi Duplomb, quatre méga-bassines ont été vandalisées, dont celle de Fouqueure. Le collectif DU PLOMB (Débâchages Unis Pour L’Obstruction aux Méga-Bassines) a revendiqué l’action dans une vidéo diffusée en ligne. Les bâches de la réserve ont été lacérées au cutter, rendant l’installation inutilisable.
Dans son communiqué, le collectif dénonce :
- La loi Duplomb, qui facilite la construction de bassines et la réintroduction de pesticides controversés.
- La « mafia agro-industrielle » et la complicité de l’État.
- L’absence de débat démocratique et les atteintes à l’environnement.
Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a condamné fermement ces actes, les qualifiant d’« inacceptables » et appelant à ce qu’ils ne restent pas impunis. La Coordination Rurale 85 a parlé d’« acte terroriste » et exigé des sanctions exemplaires.
De son côté, la FNSEA a exprimé son soutien aux agriculteurs touchés et appelé à une réponse pénale ferme, soulignant que ces sabotages visent à empêcher l’application de la loi Duplomb.
Le débat sur les méga-bassines dépasse la seule question technique de la gestion de l’eau. Il interroge le modèle agricole français, la gouvernance environnementale et les formes de mobilisation citoyenne. Alors que les tensions s’exacerbent, la France semble engagée dans une véritable guerre de l’eau, où chaque bassin devient un terrain de lutte entre visions opposées du futur rural.