Voyages solidaires : Une autre manière d’envisager l’échange

20 novembre 2013

Donner du sens à son voyage, que la proximité soit source de partages, que le tourisme devienne un complément économique aux activités traditionnelles… Le tourisme équitable et solidaire est porteur d’un peu toutes ces valeurs.

 

 

Au début des années 2000, le tourisme solidaire attirait essentiellement un public de militants ; militants associatifs engagés dans l’interculturalité et l’échange. Ou encore un public d’agriculteurs, de paysans qui, dès le départ, manifestèrent une vraie sensibilité à ce type d’approche. Aujourd’hui, le tourisme solidaire gagne les familles, en tout cas celles qui se détournent du « club hôtel avec piscine » ; qui veulent « donner un peu plus de sens à leurs vacances ». « Nous restons une niche mais nous sentons une réelle demande » témoignent les professionnels du tourisme solidaire, regroupé au sein d’ATES* (Association pour le tourisme équitable et solidaire), une fédération nationale qui compte une quinzaine de voyagistes, engagés autour d’une charte commune. Certaines structures privilégient l’accueil chez l’habitant. D’autres préfèrent l’approche communautaire, organisée par les villages.

Toutes, cependant, elles se retrouvent autour de valeurs communes : une activité touristique considérée comme complémentaire aux activités traditionnelles, le plus souvent agricoles, respectueuses du mode de vie habituel – « nous ne demandons pas aux villageois de se transformer en hôteliers » – un retour financier équitable, l’accent mis sur les échanges, le partage d’expériences.

Chez un voyagiste solidaire, la décomposition du coût s’établit souvent de la façon suivante : 45 à 50 % du prix pour le vol (sachant qu’il y a 10 ans, cette part était plus proche des 32 %), l’acquittement de toutes les prestations sur place (nourriture, guides, minibus…). Reste entre 20 et 23 % pour couvrir les frais de fonctionnement du voyagiste, organisé la plupart du temps en association.

Le tourisme rural en France

A Boala, le premier contact avec un voyagiste remonte à 1999-2000, avec l’arrivée d’un couple de Français, Pierre Martin-Gousset et sa compagne. Ingénieur agricole de formation, P. Martin-Gousset travaille déjà dans le tourisme rural en France. Engagé à titre personnel dans l’action humanitaire en Afrique de l’ouest à travers plusieurs ONG, il se dit que l’activité touristique pourrait aider efficacement les pays du sud. Cela tombe bien. Le ministère des Affaires étrangères français partage la même analyse. P. Martin-Gousset obtient son soutien financier ainsi que celui de bailleurs de fonds complémentaires. Avec son association TDS** (Tourisme et développement solidaires) créée en 1998, le spécialiste du tourisme rural commence par mener une mission de prospection auprès de quatre villages du Burkina Faso (dont Boala). Il poursuit par l’ingénierie du projet : construction des campements, formation à l’accueil, recrutement des guides (accompagnateurs nationaux, guides locaux), séjours tests pendant deux ans… Sur place, un animateur africain s’occupe de l’interface entre TDS et ses nouveaux interlocuteurs.

Une concession de voyageurs

A Boala, le campement – que le voyagiste préfère appeler « concession de voyageurs » – ouvre en 2006. Il compte six cases doubles, une cuisine, une paillote… Le village met à disposition un terrain communautaire. En contrepartie, il hérite de la propriété de l’ensemble des installations. Les personnes qui travaillent sur le campement – économe, cuisinières, serveurs, gardiens de nuit, guides… – sont payées et le reliquat, s’il y en a – retourne à la collectivité. Au sein de la communauté villageoise, deux structures se mettent en place pour gérer le campement : le CGVA (Conseil de gestion en village d’accueil), fondé dès le départ et le CVD (Conseil villageois de développement) créé un peu plus tard, en 2008. Si les jeunes se retrouvent à l’intérieur du CGVA, le CVD, lui, se compose des sages du village, des responsables coutumiers. Cette architecture n’est pas neutre. Elle ménage l’équilibre indispensable pour légitimer le campement et ses activités.

CGVA et CVD se partagent les rôles. Au premier l’organisation matérielle du campement tandis que le second a vocation à récupérer toutes les retombées, dans la perspective d’actions de développement pour le village. C’est ainsi que des bacs à ordures, des latrines ont pu être installés au marché.

Où en est le campement aujourd’hui ? A vrai dire, il peine à trouver son équilibre économique. Le projet avait été conçu sur la base de 5 à 6 voyages par an. Certaines années, le nombre de voyageurs a été divisé par deux et même plus encore. Un problème alors que le temps des dépenses d’entretien arrive. Le muret d’enceinte, réalisé en banco (terre crue), tombe en ruine. Il faudrait le réparer. Comment attirer de nouveaux voyageurs, comment faire vivre le campement ? Parallèlement à TDS voyage, le Comité de jumelage de Cognac s’emploie à faire venir de nouveaux voyageurs. Nouveaux réseaux, nouvelle activité. L’histoire du village d’accueil se poursuit, en se réinventant.

* ATES : www.tourismesolidaires.org

** TDS : www.tourisme-dev-solidaires.org

 

 

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