Viticulteur Sur Trois Ha

5 mars 2009

C’est le nouvau pari d’Henri Jammet : vivre de la production de 3 ha de vignes mais 3 ha bien particuliers, des Chardonnay plantés à 10 000 pieds/ha. Son vin de « garage » serait plutôt un vin de « salon », qui revendique pourtant des origines paysannes.

« Le Paysan Vigneron » – Comment peut-on envisager sereinement de vivre sur trois ha ?

Henri Jammet – Il s’agit d’un vignoble bien particulier, planté à 10 000 pieds/ha, vinifié à la bourguignonne et qui, j’espère, sera bien valorisé. A cette densité de plantation, les travaux viticoles – éclaircissage, effeuillage… – risquent de m’occuper un certain temps, de même que les relations clients, si l’on veut qu’elles soient en adéquation avec le vin.

« L.P.V. » – Pourquoi avoir choisi la production de blanc ?

H.J. – Par déontologie vis-à-vis de la cave, qui ne produit que du vin rouge et aussi pour changer. J’avais envie de passer à autre chose. Quand je suis arrivé ici, jeune technicien viticole, je me suis bien amusé à implanter un vignoble, à l’exploiter de manière rationnelle. Une quinzaine d’années après, j’avais un peu fait le tour de mon activité et je ressentais le besoin de me frotter à un nouveau challenge, d’autant plus qu’il s’inscrivait dans une suite logique : porter le produit jusqu’au bout.

« R.L.P. » – Est-ce que le Chardonnay est bien adapté aux terres d’ici ?

H.J. – Le climat, un peu plus frais qu’en zone délimitée Cognac, convient bien et, pour l’élaboration des vins blancs, la technique prime. Ma vieille grange recèle un bon pressoir et de bons fûts. Avec du bon raisin et une vinification adaptée, je pense pouvoir faire quelque chose d’intéressant. Les premières récoltes le prouvent. La fermentation a lieu en fûts (neufs ou vieux d’une récolte) et l’élevage se poursuit dans les mêmes fûts. Il y a fermentation sur lies, avec bâtonnage pendant dix mois et la malo se fait à la demande.

« L.P.V. » – Au niveau commercial, comme cela se passe-t-il ?

H.J. – Jusqu’à maintenant, je n’ai pas eu trop à m’en préoccuper. Le vin s’est presque vendu tout seul. Il faut dire que le projet repose sur une démarche un peu particulière. Pour financer l’opération, j’ai créé un réseau de souscription, 65 personnes ont versé de l’argent en contrepartie d’une rémunération en nature, c’est-à-dire en bouteilles. Régulièrement, je les associe à la vie de ce fameux « Guimbelot », du nom d’un lointain occupant de notre maison. Pour vendre ce type de vin, qui s’adresse à une clientèle de particuliers, il est évident qu’il faut beaucoup travailler sur l’image. Aujourd’hui, le prix de vente TTC du Guimbelot s’élève à 8,5 euros mais ce prix est appelé à évoluer dans le temps.

« L.P.V. » – Economiquement, « ça passe » ?

H.J. – Entre les récoltes en cours de paiement à la cave et les Chardonnay qui arrivent en production, le tuilage va se faire. A terme, je ne serais plus livreur à la cave et donc plus président. De toute façon, dites-vous bien qu’aller du collectif à l’individuel, c’est la solution de facilité car on va dans le sens de ses intérêts privés. Par contre, cela suppose une prise de responsabilité plus grande.

« L.P.V. » – N’y a-t-il pas une certaine contradiction à prôner de « produire bon sur plus d’ha » et de choisir pour vous-même la rareté et l’excellence ?

H.J. – Cela ne répond pas à la même logique. Personnellement, quitte à paraître un peu instable, l’envie d’aller plus loin, de découvrir toute la complexité et la finesse d’un domaine nouveau, la vinification en blanc, me pousse à cette prise de risque. D’ailleurs, est-ce tellement une prise de risque ? Nous sommes perpétuellement en apprentissage. Pour paraphraser Gabin, « s’il y a une chose que je sais, c’est que je ne sais pas ». C’est un drôle de moteur dans la vie.

Il s’appelait Guimbelot. En 1807, il avait gravé son nom dans le linteau de la fenêtre de la maison qu’occupe aujourd’hui la famille Jammet. Ce Guimbelot-là avait eu quatre filles à deux ans d’intervalle, comme Henri Jammet et sa femme. La coïcidence était trop grande pour rester lettre morte. Le vin s’appellera Guimbelot et sortira de la vieille grange qui, en 1807, devait être flambant neuve. Sur les 3 ou 4 ha de Chardonnay prévus à terme, 1 ha est déjà planté. La première récolte a eu lieu en 2002. Un autre ha va être installé prochainement et le troisième suivra un peu plus tard.

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