Un nouveau concept de robot : un chenillard à moteur hybride

22 août 2019

La Rédaction

  

Une technologie de robotique développée sur les base d’un équipement agricole

 

 

Est-il illusoire d’imaginer dans les propriétés viticoles d’ici 10 ans à côté des tracteurs fruitiers, des chenillards autonomes de travail du sol ? Le projet de développement du robot CEOL de  la société AgreenCulture (1) ouvre de nouveaux horizons car sa conception a été pensée sur les principes d’un équipement agricole. Cette démarche technologique intègre des aspects très novateurs, un système de correction RTK de hautes précisions, une motorisation de type hybride et d’une motricité avec des chenilles. L’utilisation depuis deux ans par les pépinières Bugnon des deux premiers prototypes conforte les responsables de l’entreprise qui envisagent désormais de s’intéresser à la vigne.

AgreenCulture fait partie de ces nouvelles sociétés qui abordent les problématiques du machinisme viticole du futur en développant des solutions novatrices fondées sur la robotique. Le créateur de l’entreprise, Christophe Aubé, un passionné de nouvelles technologies est aussi culturellement connecté aux réalités du monde agricole. Ce jeune expert en robotique est un fils d’agriculteur de la région du Lauraguais à côté de Toulouse. Son père exploite une propriété de grandes cultures de maraîchage de plein champs. La société a été créée en 2016 suite à la reprise d’une entité spécialisée dans les tous produits sophistiqués de géolocalisation. Ce capital de connaissances a été intégré dans la démarche de conception des robots agricoles d’AgreenCulture.

 

Des robots conçus sur les bases des équipements agricoles

 

            La particularité de cette Start-Up réside dans sa double culture de maîtrise des technologies de robotique et de connaissance des réalités concrètes de l’agriculture. L’équipe de techniciens et d’ingénieurs d’une vingtaine de personnes a pensé la conception des robots en ayant le souci de créer de véritables équipements agricoles. Leurs axes principaux de travail sont la maîtrise des aspects de localisation et de positionnement en temps réel, d’autonomie de fonctionnement, les exigences de puissances et l’utilisation d’outils agricoles classiques. La philosophie de cette PME est d’avoir une stratégie de développement globale de robots différents destinés aux grandes cultures, aux pépinières, à la vignes au travers de projets propres et en nouant parfois des partenariats avec des acteurs majeurs du machinisme agricole et viticole.

 

Une navigation de type GNSS avec leur propre système de correction RTK

 

            Les activités de géo-positionnement sont le cœur du métier de l’entreprise AgreenCulture. Plusieurs ingénieurs travaillent en permanence sur ces aspects qui constituent l’âme du fonctionnement des robots. Ils utilisent un système de localisation et de navigation de type GNSS reposant sur plusieurs couvertures satellitaires (le système GPS Américain, le système Glonass Russe et le système Européen Galileo) et ont développé leur propre système de correction RTK. Le mode de traitement spécifique des signaux satellitaires confère aux robots une précision et une constance guidage qui s’avèrent adaptées à leur circulation dans des cultures en ligne et pour la réalisation de travaux de précision. Le système RTK permet de travailler de jour comme de nuit et en présence de couverture nuageuse.

 

Une motorisation de type hybride

 

             Les robots développés par la société AgreenCulture présentent tous la particularité de fonctionner avec une motorisation hybride. Ce choix énergétique est l’aboutissement d’une analyse fondée à la fois sur les besoins de puissance et d’autonomie pour réaliser les travaux. Un moteur diesel fait fonctionner une génératrice dont la production d’électricité alimente, l’ensemble des fonctions de traction, d’autoguidage, d’attelage et d’utilisation des outils. La production d’électricité de manière continue au lieu de travailler à partir de batteries procure divers avantages, de la réserve de puissance, de la constance de fonctionnement et de l’autonomie. La constance de la production d’énergie n’est plus un facteur limitant pour s’adapter aux différences de demandes de puissance pour réaliser les travaux. Le bon dimensionnement des performances de la génératrice et du moteur diesel est assez facile à calibrer en fonction de la nature des travaux. La problématique de l’autonomie de fonctionnement du robot est uniquement dépendante de la capacité du réservoir de carburant du moteur thermique. Lors des essais des robots en grandes cultures et dans les pépinières, l’autonomie des matériels a atteint 24 heures.

 

Des robots chenillards compacts et respectueux des sols

 

            L’autre intérêt du choix d’utiliser une production d’électricité en continue est également d’avoir une puissance énergétique constante, modulable et plus facile à adapter aux besoins de traction et à la demande de puissance des outils attelés. Ce principe de fonctionnement facilite également les réglages des outils dans la durée et leur constance d’efficacité durant toute la durée des chantiers. Le déplacement des robots est assuré non pas par des roues pneumatiques mais avec deux trains de chenilles souples. Les ingénieurs de la société considèrent que ce mode de propulsion permet à la fois, d’améliorer la fiabilité de fonctionnement, d’optimiser les conditions de motricité, de limiter les effets de tassements des sols et de concevoir des robots d’un gabarit compact. Ils disposent aussi d’un attelage trois points arrière classique qui permet d’utiliser du matériel agricole courant.

 

Deux prototypes fonctionnent dans des Sapinières à Saint Bonnet sur Gironde

 

            Le premier prototype de robot CEOL fonctionne depuis deux ans dans les sapinières des pépinières Bugnon implantées dans les marais de Saint Bonnet sur Gironde. L’activité de culture des sapins est conduite sous la forme de plantation d’arbres en ligne dont le cavaillon et les interlignes ( de 1,25 m)sont soit cultivées mécaniquement, soit enherbées en plein. L’entretien des sols des 45 ha de sapinières dont l’âge varie entre 3 et 10 ans était effectué jusqu’à présent avec «des tracteurs enjambeurs adaptés maison». L’attention soutenue de conduite des automoteurs et l’accès aux parcelles chaque début de printemps représentaient des contraintes que Thomas Bugnon cherchait depuis longtemps à résoudre. L’utilisation des robots à chenilles souples est en passe de devenir une solution alternative fonctionnelle. Le mode d’entretien des sols des sapinières est assez proche de celui des vignes avec le retour du travail mécanique des interlignes et du cavaillon.

 

Les deux chenillards autonomes cultivent chacun 10 ha

 

            Les deux robots CEOL utilisés dans cette pépinière ont permis à la société AgreenCulture de faire considérablement évoluer leur projet technologique qui est passé du stade des premiers tests de fonctionnalité à une phase pré-opérationnelle. En 2018, les essais ont permis de véritablement caler les aspects de guidage et de navigation autonome dans les parcelles et de vérifier les capacités de traction (en broyage d’herbe et en travail mécanique) en toutes situations de portance des sols. Depuis le mois de février dernier, les deux robots entretiennent chacun 10 ha, l’un en tonte et l’autre en travail mécanique superficiel et les résultats sont assez surprenants. Ils circulent dans les interlignes, tournent en bout d’allées, reprennent les rangées suivantes et remontent,baissent et tractent les outils sans aucune interventions humaines. L’un des robots est équipé d’un petit canadien à dents en V avec deux roues Kress pour nettoyer les cavaillons. La vitesse d’avancement de l’ensemble se situe autour de 4 à 5 km/h et l’autonomie de travail avec un réservoir de carburant plein est de 18 à 20 heures. Le second équipement assure la tonte avec un petit gyrobroyeur doté de deux satellites escamotables. Les rotors de tontes fonctionnent avec un moteur électrique et l’avancement moins rapide permet de broyer une surface de 2 ha en 24 heures.

 

 

Les points clés du Robot CEOL :

 

  • Un robot créé par la société AgreenCulture, une start-up de la région Toulousaine

  • Une base technologique pensée pour être avant tout un équipement agricole

  • Un produit destiné en priorité aux secteur des pépinières et de la vigne

  • Un chenillard autonome de 600 kg doté d’une motorisation hybride faisant fonctionner une génératrice électrique

  • Un système de positionnement et de navigation de type GNSS doté d’un système de correction RTK  très précismis au point par AgreenCulture

  • Un attelage 3 points classique et une animation électrique des outils

  • Deux prototypes fonctionnent depuis début 2018 pour l’entretien de  Sapinières des Pépinières Bugnon

  • Une pré-série de plusieurs robots CEOL sera testé dans les vignes en 2020

  • La société AgreenCulture a développé et finalisé un concept de robot pour les grandes Cultures, le Centeol, avec le groupe Kuhn

  •  

    Après 850 heures d’utilisation, l’équipement s’avère fiable

     

                 Le vécu d’utilisateur de T Bugnon est riche d’enseignements : « Après une phase de mise au point au cours de l’année 2018, les résultats depuis la fin de l’hiver sont  très encourageants. Le matériel a atteint un bon niveau de fonctionnalité. Le guidage dans les parcelles, une fois la cartographie enregistrée, a donné pleine satisfaction. En travail mécanique du sol, le robot a pu passer dans des conditions de sol humides sans que cela ne génère de phénomènes de tassement. Des essais en situation de coteaux ont démontré sa bonne motricité même dans des situations de dévers. L’autonomie en tonte comme en travail mécanique est de 18 à 20 heures par jours avec une consommation horaire de gas-oil n’excédant pas 1,5 l/H. Le premier robot après 850 heures de travail s’avère fiable. Il ne s’est produit aucun incident au niveau du moteur ou de la génératrice. Les trains de chenilles souples sont encore pleinement opérationnels. Je pense qu’avec un robot, on sera en mesure d’entretenir le sol de 35 ha de sapinière . L’intérêt économique de cet équipement me paraît aussi accessible pour notre activité.  Le niveau de prix d’achat de l’équipement même s’il n’est pas fixé encore précisément, me paraît cohérent. Il correspondrait à la valeur d’un tracteur fruitier de milieu de gamme ».

     

    Le souhait de tester plusieurs modèles  en 2020 dans les vignes

     

                Après ces deux années d’essais dans la plus totale discrétion, les responsables d’AgreenCulture estiment que leur concept de robot à chenilles souple avec une motorisation de type hybride a démontré sa fonctionnalité. A partir de 2020, les premières fabrications de quelques robots en présérie seront testées à plus large échelle. Jérôme Asmard, le responsable du développement agronomique considère que la configuration générale du robot CEOL est adaptée aux activités de pépinières et de la viticulture : « L’état d’avancement et surtout de validation des principes du robot CEOL va nous permettre de passer à une étape de développement plus large avec l’utilisation d’une dizaine d’équipements en 2020. Nous réfléchissons actuellement à la fabrication de robots adaptés aux spécificités des vignes d’écartement de 2 m, 2,50 m et peut-être de 3 m. Les données que nous avons pendant deux ans au sein des pépinières Bugnon sont en mesure de nous permettre d’adapter la puissance et le gabarit de nos appareils à l’univers viticole. C’est un challenge qui intéresse notre entreprise. Par ailleurs, nous venons de conclure un partenariat avec la société Pellenc pour développer un robot pour les vignes étroites ».
                                                                                                 

    (1) : AgreenCulture, CEEI Théogone, 10 Avenue de L’Europe, 31520 Ramonville-Saint-Agne – T : 05 34 32 03 60

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