UGVC, réunions publiques : transferts, business plan, des sujets importants en discussion

25 février 2017

Du 30 janvier au 9 février, le syndicat UGVC a tenu une série de huit réunions, sur l’ensemble du bassin Cognac. Au cœur de l’actualité, l’élection des délégués bien sûr mais aussi la question des transferts et celle du Business Plan Cognac, d’où découlent le rendement Cognac et le potentiel de production. La première réunion s’est tenue à Segonzac, le lundi 30 janvier.

A 21 heures, il n’y avait plus une chaise de libre dans la salle des aînés à Segonzac, les derniers arrivant s’appuyant comme ils le pouvaient sur les tables du fond et des côtés. Au bas mot, ils étaient bien une centaine de viticulteurs (trices) à s’être déplacés. A la tribune, trois administrateurs UGVC de Grande Champagne : Olivier Louvet, Eric Billhouet, Stéphane Denis.

 

Olivier Louvet a commencé par faire un point sur les transferts d’autorisations de replantation (information déjà traitée  en page….) en précisant que deux délégués UGVC étaient concernés. « Nous les avons priés de démissionner, ce qu’ils ont fait ». Eric Billhouet, lui, a expliqué la démarche de sensibilisation entreprise par le syndicat viticole auprès de ses homologues des régions cédantes (essentiellement Val de Loire et Languedoc Roussillon) ainsi qu’auprès des Préfectures et des Sous-préfectures de ces zones. « Nous essayons de les mettre en garde et nous exprimons notre farouche opposition à ces pratiques. » Des opérations de veilles sont également enclenchées, via différents réseaux. A Cognac, le syndicat rencontre régulièrement le négoce de place pour l’encourager à déclarer une fin de non-recevoir à ces surfaces « mal acquises ». L’UGVC est entendu. Reprenant la parole, Olivier Louvet a évoqué assez longuement l’action en justice qu’allait très probablement intenter le syndicat à l’encontre d’un ou deux viticulteurs.

 

Actions en justice

 

« Qu’un syndicat viticole porte plainte contre des viticulteurs, ce n’est jamais très agréable mais nous n’avons pas le choix. Pour 99 % qui jouent le jeu, 1 % ne joue pas le jeu. Alors que nous avons un Business plan qui prévoit une croissance et un développement de nos marchés, ces gens-là veulent aller plus vite que les petits copains et à moindres frais. Ce n’est pas acceptable ! » « Je pense que nous avons de forte chance de gagner » a ajouté O. Louvet. « Une fois la jurisprudence établie, nous pourrons attaquer tous les autres ». Pour s’interposer aux transferts, existe donc une piste judiciaire mais aussi une piste réglementaire nationale, comme d’obtenir du gouvernement français qu’il modifie le décret sur les transferts d’autorisation de plantation. Et puis il y a la piste communautaire qui, elle, porte sur le statut du vin. « Elle consisterait à inclure dans l’OCM vin un statut du vin apte à produire des eaux-de-vie de vin sous signe de qualité » ont indiqué les administrateurs. « A ce titre là, nous pourrions bénéficier des restrictions aux transferts applicables aux AOP et IGP ».

 

Statut du vin AOC

 

« Et le statut du vin AOC ?» s’est alors exclamée la salle. Réponse d’O. Louvet – « Pour en avoir discuté avec Christian Paly, président du Comité vins et eaux-de-vie de l’INAO,  ce serait très long et très compliqué et nous n’avons pas le temps d’attendre. En fait, il faut savoir que, dans l’univers des appellations, ce sont les autres appellations qui acceptent ou non de vous intégrer dans la grande famille des AOC. Même si notre vin a toutes les caractéristiques d’une appellation – cahier des charges etc..- les autres régions ne sont pas franchement pressées de nous voir arriver. Nos gros rendements leur font peur. Quand Christian Paly nous l’a dit, ça nous  a fait l’effet d’une douche froide mais c’est ainsi. » Bronca des viticulteurs – « Ce serait pourtant la solution à nos problèmes. Tous les dix ans, la question revient sur le tapis et tous les dix ans on nous dit que c’est trop long et compliqué. Si l’on avait conduit la démarche voilà dix ans, on n’en serait pas là aujourd’hui ! » Un viticulteur s’est levé – « Qui est contre le statut d’AOC dans cette salle ? » Pas une main ne s’est levée. Un autre a pris la parole – « On tourne en rond, parce qu’il n’y a pas une vraie volonté de l’interprofession. Le négoce n’y est pas favorable  mais le vignoble appartient quand même plus aux viticulteurs qu’au négoce. Les vignes, elles sont à nous !  Ce que nous voulons, c’est un revenu ha et pas faire 15 de pur ha tous les ans. D’ailleurs, on ne les fera jamais. Chaque année, le rendement monte et les prix baissent ou du moins, ici, ne bougent pas. » « Et Trump, il ne vous fait pas peur Trump ! » a rebondi une viticultrice tandis qu’un de ses collègues tempêtait – « Le problème, c’est que vous ne voyez rien. Les viticulteurs s’inquiètent. Ils s’inquiètent grave ! » Face à ce soudain coup de chaud, Olivier Louvet a cherché à temporiser –  « Le vin AOC, c’est au bas mot 3 à 5 ans de délai pour l’obtenir. Rien n’empêche de le mettre en place mais en trouvant entre-temps, une solution palliative ».

 

Business plan Cognac

 

Après ce vent de contestation, la réunion a repris son cours avec une présentation du Business Plan par Olivier Louvet. « Alors qu’existait un outil de calcul du rendement Cognac, c’est le Business Plan qui, depuis deux ans, aide à la fixation du rendement.  Nous nous sommes aperçus que l’ancien outil de calcul, qui ne marchait pas mal, était extrêmement réactif. Sur une courte période, le rendement pouvait passer de 8,12 à 11,5 de pur ha. Les viticulteurs eux-mêmes réclamaient plus de visibilité pour mieux gérer leurs projets, leurs investissements. Il fallait lisser tout ça, faciliter un atterrissage en douceur.  Le Business Plan a été mis en place, un outil prospectif sur 15 ans qui s’appuie sur trois axes, les marchés, la production, les stocks. Parallèlement, des alerteurs ont été définis et le Businness plan est révisable, a minima, tous les trois ans, lors du renouvellement de la mandature du BNIC. » Même si Olivier Louvet ne l’a pas expressément dit, il est envisagé que, dans le cadre du Business Plan, la fixation du rendement Cognac s’établisse pour trois ans, soit pendant toute la durée de la mandature du BNIC. Ainsi, un même rendement Cognac s’appliquerait aux années 2018, 2019 et 2020.

 

Des alerteurs

 

Si, pour Eric Billhouet, la projection dans l’avenir n’est pas facile, elle n’est cependant pas impossible. – « C’est vrai que c’est un exercice compliqué mais le Business plan intègre des modèles de crises : crises conjoncturelles ou crises plus structurelles comme la crise financière de 2008/2009. L’idée ! Que les alerteurs sonnent mais à l’intérieur d’un « tunnel ». Ainsi, pour le modèle négoce (marchés), l’amplitude du tunnel est de + ou – 13 % sur un an (+ 9 % sur 2 ans). En clair, les alerteurs ne se déclenchent pas tant que la variation ne dépasse pas  + ou -13 % (+ ou – 9 % sur 2 ans). Même chose pour  le modèle production où là, le tunnel est de + ou – 17 % sur un an (+ ou – 8,5 % sur 2 ans). » Eric Billhouet a ensuite parlé du taux de fluidité. De quoi s’agit-il ? Face à des besoins en stocks à couvrir, on rajoute une fluidité de 7,5 % (avec un plancher à 4,5 % et un plafond à 10,5 %). Explications des administrateurs de l’UGVC – « Par rapport à un besoin de remplacement de 1 pour 1, la production de 7,5 % supplémentaire permet au négoce de s’approvisionner sans trop de souci. Elle aide aussi à réagir plus facilement aux aléas climatiques, confère de la souplesse aux viticulteurs qui souhaiteraient par exemple, pour leurs ventes, changer de comptes de vieillissement. Enfin, elle donne un peu d’air aux petites maisons. » Ce taux de fluidité se traduit par un taux de couverture du stock compris entre 1,045 et 1,105 pour les comptes C 0 à C 5 (comptes 0 à compte 5). Sur quelle période ? Ce point précis reste en discussion entre viticulture et négoce. Il fait partie des différents chantiers encore ouverts sur le Business Plan  : mise en place d’alerteurs sur les qualités vieilles C6 à C 10 (compte 6 à compte 10), intégration de la réserve climatique dans le stock… 

 

Un alerteur sur le prix

 

 « Pourquoi pas un alerteur sur les prix ? » a interpellé la salle. Réplique d’Eric Billhouet  – «On ne peut pas parler prix au sein de l’interprofession car le Cognac est un produit industriel. En revanche, c’est possible au niveau du syndicat. Faites-nous remonter vos informations. » Commentaires d’O. Louvet – « Aujourd’hui, il est difficile de démontrer que les prix baissent, en tout cas ici. La situation est différente sur certains crus comme les Bons Bois. »

En ouverture de la présentation du Business Plan, Olivier Louvet s’était attardé sur les trois niveaux de rendements pilotés par le modèle : rendement agronomique, rendement Cognac, rendement de mis en stock. « Le rendement agronomique est le rendement que l’on estime atteignable par la viticulture sur la période actuelle et dans les 10 / 15 ans à venir. Le rendement Cognac est celui qui convient pour adapter la production aux sorties. Et le rendement de mise en stock correspond au rendement Cognac moins les freintes, les pertes de distillation, les prestations d’alcool vinique. C’est le rendement réalisé à la sortie de l’alambic. » L’administrateur de l’UGVC a indiqué que le rendement agronomique avait été fixé à 11,66 hl AP ha. « Nous avons décidé de le mettre à un certain niveau car un rendement agronomique un peu bas impliquerait qu’il faille planter plus d’ha. »

 

Plantations de 4500 Ha

 

Justement, à ce sujet, Olivier Louvet a indiqué que le  Business plan montrait qu’à partir de 2027, le modèle passait en dessous du taux de couverture du stock  (les 1,075). « C’est pour cela qu’il faudrait planter 4 500 ha à partir de 2024 pour retrouver un taux de fluidité de + 7,5 % en 2029. Mais comme il est plus facile de répartir les plantations dans le temps, nous avons préféré anticiper dès maintenant en demandant un contingent de 800 ha sur 2017. » Si les transferts d’autorisations de replantation acquis hors région, par définition, ne se retrouvent pas dans ce contingent de plantations nouvelles, ils apparaîtront forcément un jour, en l’occurrence au moment de l’affectation des surfaces. C’est alors là qu’ils devront être pris en compte dans le Business plan pour le calcul du rendement.

 

Critères d’attribution

 

Dans la foulée, Olivier Louvet a abordé le critère d’attribution des plantations nouvelles (ouverture dans Vitiplantation, de l’attribution du contingent de 800 ha du 1er mars au 30 avril 2017),. Renseignement pris, il semblerait que le scénario qui tienne la corde aujourd’hui soit celui de la mise en place d’un « plancher ». Autrement dit, il y aurait une autorisation minimale de plantation pour toute exploitation déposant une demande. Le critère de priorité J.A ne disparaitraît pas viendrait dans un second temps, au cas où il resterait des surfaces à distribuer. A noter qu’il s’agit juste pour l’instant de propositions. C’est le prochain Conseil spécialisé de FranceAgrimer, en février, qui tranchera. Malgré tout, ce souhait d’une partie de la viticulture française – et des Charentes en particulier –  rejoint  l’opinion des viticulteurs réunis à Segonzac – « Pourquoi ne pas diviser le nombre d’ha par le nombre de viticulteurs effectuant une demande ? Ce serait plus équitable ». Où l’on voit que tout esprit d’égalité n’a pas disparu des rangs viticoles, même en Grande Champagne.

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