« aider ceux qui ont bougé »
Avec la gestion de la récolte 2002 et le niveau de la QNV, l’autre grande idée du syndicat nouveau est de dire : « Il faut aider ceux qui ont bougé » et notamment ceux qui ont diminué leur surface Cognac par reconversion ou arrachage. Parlant d’expérience – Jean-Louis Brillet est le président de l’ACV – ce dernier considère que, dans le contexte actuel, la production de vins est compliquée « et qu’il ne faut pas se rater ». La reconversion réclame des investissements lourds – de l’ordre de 120 000 F/ha – alors qu’en moyenne, les aides ONIVINS ne dépassent pas 30 000 F/ha. « De 30 à 120 000 F/ha, il y a un sacré cap ! » Et le calcul du rendement agronomique pénalise ceux qui ont reconverti. « Encore une fois, relève J.-L. Brillet, ceux qui n’ont rien fait sont avantagés. Il faut arriver à inverser la tendance, faire en sorte que ceux qui bougent commencent à être récompensés. Or tout se passe comme si ceux qui avaient commencé à bouger étaient devant une forêt d’Ugni blanc et que l’intendance ne suivait pas. » Une idée, évoquée par le syndicat naissant, consisterait à obtenir de Paris que la QNV d’exploitation soit prolongée jusqu’en 2006. « De cette demande, dit-il, le Syndicat des Vignerons n’en a jamais parlé. » Au volet reconversion s’ajoute le volet arrachage. Le nouveau syndicat réclame « d’obtenir coûte que coûte une prime à 100 000 F pour tout le monde, sans condition préalable, c’est-à-dire sans CTE. Sinon, dit-il, à coup de 1 000 ha d’arrachage par an, nous aurons disparu avant que le vignoble soit assaini ». Les Pouvoirs publics sont pris à témoin : « Que nous proposez-vous ? » « Pour notre part, nous sommes prêts à nous engager sur 15 % d’extournement, à condition que l’on nous aide ! » Et d’évoquer au passage la piste de l’utilisation des droits pour un éventuel autofinancement. « Cognac fait partie des régions qui rapportent le plus de droits et taxes à l’Etat. Sur une bouteille, le prélèvement fiscal se solde par 35 ou 37 F d’accises, sans compter la TVA, soit 380 millions de francs par an. »
Les relations du nouveau syndicat avec le SGV Cognac n’ont pas manqué d’être abordées. Il est vrai que la plupart de ses membres, quelques jours plus tôt encore, se trouvaient dans le giron du syndicat présidé par Philippe Boujut et, pour certains, à des postes de responsabilité. « Le Syndicat général, a répondu J.-L. Brillet, a été une idée superbe en Charentes et nous y avons tous adhéré mais on ne peut plus se permettre d’attendre. Le produit principal qu’est le Cognac est mis à mal. Depuis cinq ans, l’on ne s’en préoccupe pas. En maintenant la QNV à 6 de pur, on fait le jeu de petits malins qui essaient d’agrandir leur surface. Des viticulteurs sur de faibles surfaces passent à la trappe alors que la vraie richesse de cette région tient justement à son nombre de viticulteurs. Arrêtons ce jeu de massacre ! La récolte 2002 arrive, l’on en mesure le potentiel. Cette récolte a-t-elle été gérée par le SGV ? Non. On va laisser 20 à 50 hl dans le caniveau. C’est une faute de gestion. S’il gelait en 2003, nous aurions l’air malin ! Cette analyse là n’est pas politique. Elle est purement économique. A vouloir s’occuper de tous les produits en même temps, on a perdu le produit principal qu’est le Cognac. Le SGV nous dit : acceptez le statu quo aujourd’hui, vous verrez l’an prochain, tout va changer ! Mais on ne peut plus se permettre d’attendre. Assez de l’immobilisme, rien ne se traduit dans les faits. D’autant que tout le système est axé sur l’affectation de surface qui, comme déjà dit, peut jouer comme une bombe à retardement. Faut-il conserver la double fin ou aller vers la non double fin ? D’autres régions sont toujours dans la double fin. C’est un débat à avoir, comme celui de l’INAO. L’avantage d’être constitué en syndicat, c’est aussi de pouvoir participer à ce genre de débat de fond. »
Si sa démarche se veut « exempte de toute animosité » et n’exclut pas de travailler « main dans la main » avec le SGV, le nouveau syndicat entend bien mener une active campagne d’adhésion. Et semble relativement confiant sur le résultat. « Les quarante premiers membres se sont retrouvés très facilement, de manière quasi spontanée. Les mesures que nous proposons sont simples et arrivent à un moment où les esprits sont mûrs pour les entendre. Si nous ne sommes pas rejoints, nous pourrons nous poser des questions sur la région. Maintenant, à chacun de se déterminer et de choisir entre les deux syndicats. De notre côté, l’enthousiasme est là. » L’appel se veut le plus large possible. « Le Syndicat des bouilleurs de cru viticulteurs du Cognac s’adresse à tous les bouilleurs de cru à domicile, à façon, aux détenteurs de stock chez eux, en coopératives, sica et tout organisme collectif, en tout 5 à 6 000 producteurs de Cognac bouilleurs de cru, sans clivage de crus ou de départements. » En marge des habituelles rencontres avec les élus, Pouvoirs publics, coopératives associées et maisons, programmées dans l’heure, le nouveau président propose la tenue d’états généraux régionaux d’ici à décembre pour établir des passerelles entre les différents produits. « Mais aujourd’hui, parlons Cognac » a-t-il pris la précaution de rappeler, pour rester cohérent avec son propos