Février 2014 – mai 2014. Des candidatures aux postes de délégués jusqu’à l’élection des administrateurs du syndicat, le 27 mai, jour de l’assemblée générale, trois mois se seront s’écouler. Un temps privilégié pour revenir sur le fonctionnement de l’UGVC, les interrogations, les attentes des viticulteurs.
Un rapide sondage mené auprès d’une dizaine d’entre eux permet de mesurer combien les sensibilités diffèrent toujours, même si une certaine homogénéisation des structures est à l’œuvre.
En ce qui concerne l’engagement syndical, faut-il être surpris de constater que les plus jeunes ne sont pas forcément les plus syndiqués. Manques de repère, déficit de culture syndicale et professionnelle, individualisme sociétal et « générationnel » – les tribus font-elles des syndicats ?… Pour qu’ils participent au débat collectif, il faudra les accompagner, mieux, aller les chercher. Un chantier est ouvert.
Les adhérents de l’UGVC maintenant. Quel degré de satisfaction expriment-ils ? Les avis sont pluriels bien sûr mais des attentes de fond ressortent : celle de la représentativité (de toutes les catégories d’exploitation), celle d’une certaine idée du débat démocratique, que doivent garantir les hommes en place. Certes Cognac n’est pas Maïdan (place de l’indépendance) mais tout de même. Quant à savoir si le syndicat doit être « revendicatif » ou pas, la question suscite un certain flou. « Oui » répond la majorité des viticulteurs. Mais pour revendiquer quoi ? Les réponses se font moins nettes. Une crise permettrait sans doute d’y voir plus clair. Ce n’est pas à souhaiter.
La vie syndicale enfin. Elle aussi génère des sentiments contrastés. A l’impression de lassitude voire d’usure exprimée par certains, qui ont beaucoup donné et depuis longtemps, répond une forme d’allégresse chez d’autres. Enthousiasme de nouveaux convertis ? Clivage des structures d’exploitations? Privilège de l’âge ? Décidément, l’unanimisme n’est pas de ce monde. Chacun vit différemment son engagement syndical. D’ailleurs, le terme de « syndicat » est-il encore le bon ?
Le syndciat n’est-il pas en train de connaître une sorte de mutation, d’hybridation en devenant un lieu de formation (ce qu’il était déjà), mais aussi de discussions, d’échanges, de convivialité ?
Une interview de Christophe Forget prolonge la série de témoignages. Où l’on voit le président de l’UGVC tel qu’en lui-même, mesuré et bienveillant. Des regrets déjà s’expriment à l’annonce de son intention de ne pas briguer un nouveau mandat de président.
Marlène Tisseire, directrice du syndicat, retrace le fonctionnement de la structure. Sans se vivre comme une « citadelle assiégée », l’UGVC a toujours privilégié une forme de réserve sur ses travaux, ses réflexions. Légitime peut-être mais à coup sûr peu propice à l’effet d’entraînement et de conviction. Les élections sont une bonne occasion de faire tomber quelques barrières.
Et parce qu’on ne voit bien les choses qu’à une certaine distance, Jean-Marie Baillif, président du syndicat du Pineau pour quelques semaines encore, apporte son regard extérieur (qui est aussi un regard de l’intérieur). Une mise en perspective intéressante.
Le scrutin UGVC représente un bon prétexte pour tendre le micro aux viticulteurs. Que pensent-ils du syndicat, des décisions prises, de l’avenir de la région ? Ce rapide sondage a volon-tairement ciblé les plus jeunes – autour de la trentaine – sans oublier quelques acteurs plus âgés. Les sensibilités se dévoilent, le degré d’implication est variable, voire inexis-tant chez certains. Mais, quels que soient les témoignages, la pêche est toujours fructueuse. On n’écoute jamais assez les viticulteurs.
Viticulteur, la cinquantaine, 25 ha de vignes, pratique la diversification, siège au conseil d’administration de l’UGVC.
« Je suis un ancien du SGV. A l’UGVC Nous avons appris à nous connaître les uns les autres. Le bilan est globalement positif.
En ce qui concerne le Business plan, je dirais qu’il m’inspire une satisfaction prudente. Je veux croire que tout le monde est sincère sur l’augmentation de surface. J’espère que, dans le futur, cette prudence sera toujours de mise.
Au sujet des débats en conseil d’admimistration, j’observe que nombre de personnes ont du mal à s’exprimer. Trop de sujets sont abordés. Une certaine lourdeur marque les débats. En fin de soirée, tout le monde est fatigué. Cela nuit à la qualité des échanges. En fait, comme administrateur, nous recevons plus d’informations que nous en discutons vraiment. A mon avis, il n’y a pas suffisamment de débats. Espérons que ça ira mieux si le nombre d’administrateurs diminue, comme cela avait été prévu au départ, dans les statuts.
C’est vrai que le Cognac se porte bien. Les sujets de polémiques ont disparu. Une démarche constructive prévaut.
Est-ce que je me représenterai au poste d’administrateur ? Non, je ne pense pas. Je ne dispose pas d’assez de temps. Ma structure d’exploitation ne me permet pas de m’absenter trop longtemps. C’est d’ailleurs un problème. Les petites structures comme la mienne ne sont pas assez représentées. Je suis le seul chauffeur de tracteur sur l’exploitation. Quand je ne suis pas là, le travail ne se fait pas. Des collègues peuvent se libérer plus facilement. Ils ont des salariés permanents. Il y a quelques années, une réunion m’a obligé de faire l’impasse sur un traitement. Cela m’a valu une attaque en règle de mildiou.
Ce qui me fait jeter l’éponge ? Peut-être la lassitude, sans doute aussi le fait que nous n’ayons qu’une connaissance succincte, parcellaire des dossiers. Il est alors difficile de rentrer dans le débat. J’ai parfois l’impression que nous n’avons pas suffisamment de « grain à moudre ». Ceux qui possèdent la connaissance des dossiers, ce sont essentiellement les gens du bureau ou encore ceux qui siègent au BN, qui participent aux groupes de travail de l’interprofession.
Oui, il faut être honnête, il y a un vrai retour d’information vers les administrateurs. Le syndicat fonctionne de façon démocratique. »
« Les petites structures comme la mienne ne sont pas assez représentées »
La trentaine – Une structure viticole importante – A travaillé ailleurs avant de revenir sur l’exploitation.
Membre du conseil d’admimistration, du bureau de l’UGVC.
« J’ai fait partie du « canal historique » du SVBC avant de rejoindre les rangs de l’UGVC. Quand la réunion de deux syndicats s’est faite, j’étais un peu sceptique. Je me demandais comment tout cela allait pouvoir marcher. Depuis plusieurs années, les deux structures se combattaient et, du jour au lendemain, nous allions nous retrouver à égalité dans un conseil d’admimistration à 50. J’étais dubitatif. Et puis, finalement, nous avons fait du très bon travail ensemble. Dans ma précédente activité, je n’avais jamais travaillé au sein d’un groupe aussi important. Le conseil d’administration compte 54 membres. A chaque réunion, nous sommes jamais moins de 40 à nous tasser, au coude-à-coude, dans la salle de la Maison des Viticulteurs. Nous ne sommes pas toujours d’accord mais les échanges sont vachement constructifs, très intéressants. Je ne connaissais pas les gens du SGV. Nous avons appris à nous connaître, à nous apprécier.
Si j’ai le sentiment que le syndicat fait avancer les choses ? Non seulement je le pense mais nous l’avons fait. Nous avons pu défendre des idées parfois assez novatrices, pour lesquelles nous ne pensions pas pouvoir passer. Nous avons pu les porter au Bureau national grâce à la qualité de l’argumentaire débattu entre nous. Nous représentions plus de poids vis-à-vis du négoce.
Il y a encore plein d’autres idées à explorer. Le facteur limitant ! Il tient à la disponibi-lité des élus. Ce serait bien d’avoir plus de personnes impliquées dans les groupes de travail. Faute de candidats, les mêmes sont souvent sollicités, qui au conseil d’administration, qui au bureau. Il nous revient de convaincre les générations montantes.
Les pistes d’amélioration ? Peut-être im-pliquer davantage les délégués dans la réflexion.
Est-ce compliqué de participer à la vie syndicale ? En tant que délégué, cela se gère. Les réunions ont lieu une ou deux fois par an. Il s’agit de se tenir au courant, faire remonter ses idées. Mais si l’on commence à prendre des responsabilités syndicales et/ou interprofessionnelles, à ce moment-là, oui, il faut mettre une organisation en place. Certains sont très forts pour cumuler deux vies en une seule. Après, il existe plein de gens normaux pour lesquels c’est plus compliqué sur le long terme.
Que les élus du conseil d’administration, du bureau aient parfois l’impression de s’essouffler, c’est tout à fait normal. Il faut bien voir qu’à côté des réunions (conseil, bureau), il y a tout un pan d’activité lié aux groupes de travail. Car chaque commission de l’interprofession est dupliquée au niveau du syndicat. Prenons mon exemple. Je suis vice-président d’une commission au BNIC. Quand je reçois l’ordre du jour, je contacte les membres de la commission ad hoc de l’UGVC, afin de préparer la réunion. Si, entre nous, les points sont déjà bien préparés en amont, ce sera plus facile le jour de la réunion. Par ailleurs, sur des sujets précis, il n’est pas rare de demander un vote solennel en conseil d’administration, pour être sûr d’être pleinement d’accord sur le fond, de porter la pensée de tous.
Dans les débats en commissions, les représentants viticoles ne souffrent pas d’un défaut de légitimités, bien au contraire. Souvent, nos interlocuteurs, salariés du négoce, sont des experts ; leurs avis sont des avis d’expérience mais n’engagent pas leurs entreprises.
J’ai énormément appris au cours de ces trois ans. Auparavant, je travaillais dans un groupe industriel. Dans un tel environnement, l’on n’a pas la chance de pouvoir interagir avec son secteur d’activité. On vous demande juste de vous adapter rapidement à la nouvelle situation. Au sein de la filière Cognac, nous avons l’impression de pouvoir un peu changer les choses. C’est très intéressant. Cela confère une autre dimension au métier, même si l’entreprise individuelle n’en profite pas en tant que tel. Mais vous y gagnez en ouverture d’esprit.
Le syndicalisme, c’est aussi une plateforme d’échange. J’ai rencontré des viticulteurs que je n’aurai jamais eu la chance de connaître si j’étais resté tout seul dans mon coin. Aujourd’hui mes copains sont à Matha, à Archiac. C’est très riche.
Les gens de Grande Champagne, de l’île de Ré ne partagent pas exactement les mêmes problématiques. Et pourtant il faut intégrer toutes ces composantes. Le syndicat est pluriel. Il représente des situations, des personnalités au profil varié, dans tous les crus, tous les métiers. Il n’y a pas de baronnies ni d’aristocratie. Dans ses prises de positions, l’UGVC essaie d’intégrer les contraintes de chacun. Certes, existe toujours le phénomène du flux minoritaire, qui empêche le plus grand nombre d’évoluer, mais l’idée est de ne laisser personne au bord du chemin.
Christophe Forget fut un excellent président. Homme de consensus, il a réussi à écouter tout le monde, prenant tous les avis. Je trouve vraiment dommage qu’il ne continue pas. Pour moi, c’est une personne… « parfaite », même si le terme peu paraître excessif. Maintenant je comprends qu’il veuille s’arrêter. Il arrive de « tirer un peu trop sur la bête ». Il va falloir trouver quelqu’un d’aussi consensuel que Christophe a pu l’être. C’est un vrai challenge. Car la personne du président est importante, très symbolique. En tant « qu’ex du SGV », Christophe Forget s’est montré très respectueux des gens du SVBC, pas du tout dans le jugement. Nous nous sommes toujours sentis à l’aise. Il n’a jamais pratiqué de favoritisme et ça, c’est très précieux. »
Viticulteur, la petite cinquantaine, 25 ha de vignes, adhérent de l’UGVC, pratique la diversification.
« Mon sentiment, c’est quand même que bon nombre de viticulteurs, du moins dans mon secteur, viennent de structures assez importantes. Disons qu’ils sont plutôt de la tendance SVBC. Je ne pense pas que tout le spectre de la viticulture charentaise soit représenté aujourd’hui au sein de l’ UGVC. Je me pose la question de me présenter en tant que délégué (interview réalisée avant la clôture du scrutin NDLR). Oui, c’est ce je me suis dit. Il faut peut-être faire entendre une autre voix.
Est-ce que j’ai envie de me retirer de l’UGVC ? Non pas du tout.
A l’origine, j’étais adhérent du SGV, dès sa création. La démarche m’avait assez sé-duite : un syndicat unifié, où toutes les sensibilités viticoles étaient prises en compte. Deux ans plus tard, certains ont provoqué la rupture, pensant qu’ils pourraient mieux défendre de l’extérieur ce qu’ils considéraient être les intérêts du Cognac.
Que l’unité se soit reconstituée à travers l’UGVC ? Oui, pourquoi pas, mais la mémoire a la vie dure. Chacun sait très bien les options, les tendances des uns et des autres, même si tout le monde se présente sous la même étiquette. Il y a un élément tout bête : à un moment donné, un système avait été imaginé pour faire voter non pas des électeurs mais des ha. Après, une cote mal taillée fut trouvée. Mais cette tentative est révélatrice de deux approches différentes. Aujourd’hui, l’approche SGV, je ne la retrouve pas pleinement dans l’UGVC. Mais bon, à un certain moment, il a fallu fusionner pour faire avancer les choses. Simplement, je trouve que le SGV s’est un peu dilué dans la fusion.
Aujourd’hui, les choses vont bien. Tout le monde a accès au marché du Cognac. Récemment, j’entendais un représen-
tant de l’UGVC dire en aparté : « Oh, vous savez, les rendements, tout ça, c’est lourd à gérer. Personnellement, je serais pour faire sauter tous ces verrous, en privilégiant une relation directe entre le viticulteur et le négociant. Vous vous engagez sur tant d’hl AP… »
En ce moment, l’économie du Cognac absorbe toute la production. Mais en cas de repli, tout le monde ne serait pas logé à la même enseigne.
Le système AOC Cognac est un bon système, un garde-fou. Si l’on se met à ouvrir des brèches dans sa gestion, si l’on se dirige vers un plus grand libéralisme, on cassera la poule aux œufs d’or. Le Cognac est un produit de marque qui a intérêt à être sécurisé, tant en quantité qu’en qualité.
Moi, mon objectif personnel, c’est que le plus grand nombre de gens puissent vivre de leur métier dans la région. Je ne suis pas sûr que cette ambition soit partagée par les adeptes du libéralisme.
Accorder des droits de plantation, faire sauter le verrou du rendement Cognac, c’est prendre le risque de voir le vignoble se concentrer, voir des viticulteurs intégrés devenir des sous-traitants du négoce.
Le prix des vignes atteint aujourd’hui des niveaux qui dépassent le raisonnement économique. Après, que certains soient mus par des velléités expansionnistes ou des préoccupations financières, pourquoi pas. Mais cette tension des prix rejaillit sur l’ensemble. Pour des exploitations moyennes de 25-30 ha, il devient très difficile de s’agrandir de 2 ou 3 ha supplémentaires. Pendant ce temps, des exploitations de 15-20 ha partent au plus offrant. Autant une structure de 100-130 ha peut supporter d’acheter 10 ha au prix fort, autant il est impossible à une petite exploitation de croître de 25 % d’un coup. Ces phénomènes conjugués – agrandissement, prix élevé – sont en train de changer radicalement la donne du vignoble, les conditions de sa détention. Or, selon moi, la diversité est source de richesse. N’oublions pas que derrière le Cognac, il y a des viticulteurs. Exercer le métier de viticulteur, c’est un tout. Cela ne se résume pas à être producteur de… »
Viticulteur, 45 ans, 30 ha de vignes, des responsabilités à l’UGVC et dans le syndicalisme général.
« Je me sens pas mal investi mais je me dis que le jour où Jean-Bernard (de Larquier) et quelques autres partiront à la retraite, nous aurons des questions à nous poser. Je pense que nous touchons à la limite du système. Le rythme des réunions s’accélère et c’est au détriment de la vie de famille, de la santé. Nous assistons à une surcharge de travail, tant du côté des salariées du syndicat que du côté des professionnels. Certes, il faut s’organiser mais avec ma surface, je ne peux pas me dispenser de mettre les pieds dans les vignes. Humainement, financièrement, il faut tenir le coup. Quand les membres du SVBC ont rejoint les gens du SGV, ils étaient plus « frais » que nous. Aujourd’hui, les ex du SGV commencent à être épuisés. Je m’inclus dans le lot.
Il va falloir faire attention à qui nous allons porter à la tête du syndicat. Cela peut changer très vite.
Si plantations nouvelles il doit y avoir, le négoce doit s’engager. Nous avons besoin de sa confiance. Nous ne ferons pas le boulot du négoce mais le négoce ne fera pas non plus notre boulot.
Sur les prix et contrairement à ce que l’on pourrait penser, nous ne vendons pas plus cher qu’en 1970. Il y a eu un tel décrochage, pendant si longtemps, que la revalorisation actuelle a juste permis de « raccrocher les wagons ». Restons vigilants sur les prix. Ne les abandonnons pas au profit des volumes. La région ne supportera pas une crise, en sachant qu’au premier coup de vent, les crus périphériques trinqueront les premiers.
Les projections d’Eurogoup sont intéressantes, certes optimistes mais pas irréalistes. Cela dit, au cours des réunions de secteurs, je n’ai pas vu un seul viticul-teur se lever pour réclamer des droits de plantation tout de suite.
Le point noir à mes yeux, c’est la main-d’œuvre. Il y a bien des Roumains dans les vignes mais ils ne feront pas tout. Je m’étonne du peu de conviction manifestée par la région en matière de formation à la taille de vignes. Des stages décentralisés sont annulés, purement et simplement. Les personnes en recherche d’emploi ne parcourront pas 70 km pour apprendre à tailler. Je n’ai pas l’impression que cela se passe comme ça dans toutes les régions viticoles. Ici, manque une volonté politique.
La mobilisation syndicale ne fait pas recette. Les exploitations grandissent, les viticulteurs sont débordés, ils n’ont pas de temps à consacrer au syndicat. Mais quand on annonce un « gros pied » (sanglier) dans le coin, ils savent se libérer. Parfois, l’on se demande s’il ne vaudrait pas mieux faire autre chose que d’essayer de les défendre.
Le Cognac se plaint de ne pas être entendu par les autres régions viticoles mais, à un moment, il faudra peut-être se poser la question – quand fait-on de l’AOC, à la sortie de l’alambic ou dans la vigne ? »
« N’abandonnons pas les prix au profit des volumes »
Viticulteur, 31 ans, non syndiqué.
« Je ne suis pas inscrit à l’UGVC. Cela m’intéresserait plus ou moins d’y rentrer. C’est vrai que cela pourrait être bien. Je suis justement en train de remplir un dossier FranceAgriMer. Je pourrais avoir un suivi des plantations. On ne sait jamais trop les dates.
J’ai reçu un courrier en début d’année, pour savoir si je voulais adhérer. Je ne l’ai pas encore fait. De toute façon, pour l’élection des délégués, c’est trop tard.
C’est vrai que c’est intéressant de savoir ce qui se passe. Si j’ai l’opportunité un jour de participer à la vie du syndicat, pourquoi pas. J’ai pris la suite de mon père, de mon grand-père. Je suis fier de travailler dans le Cognac. La région me passionne. Je suis engagé dans la Fête du Cognac. En ce sens, je connais le sens de l’engagement.
La réserve climatique c’est bien mais il faudrait qu’elle serve uniquement à pallier les aléas climatiques, sans alimenter la réserve de gestion. Ce n’est pas la meilleure de choses.
Les droits de plantation, je suis un peu réticent. Je n’ai pas forcément connu ces moments-là mais j’en ai entendu parler. Les années qui ont suivi ne furent pas la panacée. Est-ce une bonne ou une mauvaise chose ? Je ne m’avancerai pas. »
Jeune viticulteur de Charente-Maritime – région de Jonzac – installé en société depuis 2005.
« Je me présente en tant que délégué. Il restait quelques places à pourvoir. On m’a sollicité. J’ai un peu moins de responsabilité aux JA (Jeunes Agriculteurs). Je vais pouvoir être un membre actif de l’UGVC. Me présenter au conseil d’administration ? Je ne pense pas. J’intègre le syndicat pour la première fois. Je veux être discret. Avant de s’investir, il y a toujours une phase d’apprentissage et de découverte. Un temps de latence de trois ans avant de nouvelles élections ! Ce n’est pas gênant. Dans cette région, nous avons l’habitude de nous engager sur le moyen terme. Que va m’apporter le syndicat ? Je n’attends par précisément qu’il m’apporte quelque chose. Je dirai plutôt que c’est l’inverse : faire remonter au conseil d’administration un ressenti de terrain, des idées.
Globalement, je suis satisfait de l’UGVC. C’est déjà bien que nous ayons un syndicat uni. Mieux vaut ne pas se disperser. L’objectif des viticulteurs, normalement, doit être commun. Après, je pense que le syndicat présente un intérêt plus global, en termes d’accompagnement administratif, technique. Il y a plusieurs dossiers en cours. Le fait d’être un syndicat unique lui permet de diversifier ses prestations.
Le bémol que j’introduirai quand même, c’est qu’un syndicat de filière comme l’UGVC a peut-être perdu un peu de l’esprit syndical revendicatif. Or, il y a des positions à prendre. Je pense que des responsables professionnels ont la capacité de le faire si, derrière, ils sentent un soutien de la viticulture. En tant que représentant, on apprécie d’être soutenu.
J’espère que la prudence va l’emporter dans la région. Il ne faut pas s’enflammer. Après un peu de surchauffe, nous sommes revenus à davantage de temporisation. Quand je me suis installé, en 2005, la surproduction guettait. Ce n’était pas terrible. Nous avons une activité à pérenniser, des engagements financiers à tenir. Poursuivons dans la durée.
Les viticulteurs ont démontré leur capacité à renouveler le vignoble, replanter, faire produire à nouveau. Ce redémarrage demande un peu de temps mais nous y sommes presque. Les premières plantations anticipées arrivent en production.
Personnellement, je suis contre l’extension de surfaces. Aujourd’hui, le vignoble existant n’a pas encore retrouvé son optimum, l’intégralité de son potentiel de production. Il a encore de la marge. Si une chose reste à faire, c’est de poursuivre le renouvellement.
Les relations avec le négoce ? Elles sont plutôt agréables. Nous n’allons pas nous en plaindre. Ce qu’il faut espérer, c’est que ces relations perdurent, c’est tout. »
La quarantaine – S’occupe de la vente directe sur l’exploitation (foires, marché français, export) tandis que son frère gère la partie production.
« L’UGVC, cela ne me dit pas grand-chose. J’en étais plutôt resté aux SGV et SVBC. Je sais quand même qu’il y a eu rapprochement des deux syndicats. La réserve de gestion, la réserve climatique n’impactent pas vraiment ma partie commerciale. C’est plutôt mon frère qui suit ça. Il doit être au courant. En début d’année, l’UGVC a envoyé un mail pour nous dire que les droits d’accises avaient augmenté. Le premier à réagir fut le syndicat du Pineau, suivi du BNIC et enfin de l’UGVC, en 3e position. Je suppose que parmi les membres du syndicat, il y a plusieurs metteurs en bouteilles que la hausse des accises intéresse. Ce serait bien de le savoir le plus tôt possible.
Adhérent de l’UGVC ? Moi personnellement non mais l’exploitation oui. Si j’entends souvent parler du syndicat ? A une époque bien plus, quand il y avait la guéguerre entre les deux formations. On suivait le truc dans la presse. Après on n’en a plus entendu parler. Peut-être parce qu’il n’y avait pas d’information particulière à faire passer. Quand il n’y a rien à dire, pas la peine de mobiliser la parole.
Non, les élections, ça ne m’intéresse pas plus que ça. »
La trentaine – Structure importante, diversifiée – Des responsabilités au sein de l’UGVC.
« Ces trois années furent intéressantes, très constructives. Nous n’avons eu que des retours positifs de l’ensemble des viticul-teurs. Tout le monde a été ravi, satisfaits de la réunion des deux syndicats.
Réserve de gestion, réserve climatique – Ceux qui auraient pu nourrir un petit doute sur l’utilité de la réserve climatique ont pu apprécier l’opportunité d’une telle mesure lors de la dernière récolte.
Je fais partie des « petits jeunes » qui sont arrivés au syndicat dans les derniers. J’ai connu l’ère du SVBC mais pas vraiment l’ère des tensions. Le climat s’était déjà apaisé. Non les dissensions, je ne sais pas ce que c’est.
Jusqu’à présent, nous n’avons pas eu à vivre de situations compliquées. Autour de la table du conseil d’administration, un consensus se dégage toujours même si, c’est sûr, il faut y consacrer du temps.
S’impliquer au sein de l’UGVC, c’est défendre son métier, son avenir. Je participe à différentes commissions de travail. Tous les sujets traités touchent directement à la vie de nos entreprises. Quelque part, ne pas y être, c’est laisser le pouvoir de décision à des personnes qui ne seraient pas du métier.
Pourquoi les gens n’adhèrent pas ? A mon avis, il y a les réfractaires à l’idée d’adhérer à un syndicat et ceux qui ne sont pas d’accord à 100 % avec les thèses défendues. A cette dernière catégorie de personnes je réponds : adhérez sinon comment ferez-vous passer vos idées ? C’est un peu le chat qui se mord la queue.
Tout est devenu plus compliqué. Nous avons besoin d’assistances juridique, technique, administrative. Petit à petit, le syndicat s’organise pour fournir ces services, même si nous sommes loin d’être au niveau de la Champagne.
Christophe Forget l’a très bien dit : « la route tourne ». Les responsables professionnels ne sont pas comme nos députés et sénateurs qui veulent conserver pendant 30 ans leurs fauteuils. Et en plus, contrairement à la politique française, il n’y pas de rente de situation attachée au syndicalisme.
L’intérêt intellectuel, je trouve que c’est l’un des carburants de cet engagement. C’est stimulant d’échanger avec ses collègues, sur un tas de sujets : distillation, plantations, gestion du personnel… Entre deux réunions, on glane des idées, bien plus que si nous restions sur nos exploitations. Cela aide à se remettre en cause sur sa propre entreprise.
Nous sommes informés des dossiers, au courant de ce qui se passe. Prenons l’étude d’Eurogoup. Chacun d’entre nous a pas mal gambergé sur le sujet, essayant d’imaginer la situation idéale, discutant avec les collègues, échangeant des idées. Certaines se révèlent acceptables, d’autres, au contraire, complètement foireuses. Cela permet d’évoluer. On se pose des questions que l’on ne se serait jamais posées si l’on n’était pas sorti de son entreprise. On avance en se confrontant à la problématique des autres.
Comment en suis-je venu au syndicat ? Un peu par hasard. Mon père n’était pas du tout impliquer. A la création de l’UGVC, j’étais assez défiant sur le terme « syndicat ». Je trouvais qu’il renvoyait à quelque chose de péjoratif, syndicat de ceux qui râlent…Je ne voulais pas d’une structure contestataire mais d’une structure qui construise pour l’avenir. J’ai complètement adhéré au terme d’union. »
Viticulteur et céréalier, 30 ans, 20 ha de vignes, 130 ha de céréales.
« A vrai dire, je suis délégué de rien du tout. Je n’ai pas le temps de m’occuper de tout ça. Je suis seul sur une structure assez importante. Je ne fais appel qu’à des saisonniers. Je m’informe pas mal mais je ne vais pas aux réunions. Je ne suis pas trop pour la libéralisation des droits. Réserve climatique, réserve de gestion… C’est une bonne chose mais à condition de pouvoir en faire. Voilà deux ans que je grêle. La réserve climatique m’aurait bien servi même si, à l’heure actuelle, on gagne très bien notre vie.
Le syndicalisme ? Je ne fais pas partie d’un syndicat. De toute façon, on ne me l’a jamais proposé. On ne m’a jamais demandé d’être délégué comme vous dites. Je n’ai jamais reçu de courrier.
Allergique au syndicat ? Non pas du tout. Ce serait intéressant si on me proposait d’adhérer. J’imagine qu’il y a pas mal d’avantages. Mais je ne sais même pas à qui m’adresser. Je me suis installé en 2006. Mes grands-parents étaient viticul-teurs, pas mes parents. Ils n’ont jamais voulu faire ça. Je ne côtoie pas du tout les autres viticulteurs. Je ne les connais pas.
En fait, je ne demande aucune aide. Je finance tout tout seul. Je ne veux pas que l’Etat me demande de rembourser. Quand je veux planter, faire une aire de lavage, je ne réclame rien à l’Etat. Je me débrouille. »
Délégué, membre du Conseil d’administration de l’UGVC, 44 ans, 28 ha de vignes.
« Durant un laps de temps, les deux syndicats ont fonctionné au coude à coude, au sein d’une fédération. Mais la fusion a révélé des convergences beaucoup plus nombreuses qu’auparavant. En termes d’efficacité, c’est positif ; pour la filière et la région aussi.
Effectivement, la gestion de la production a connu des évolutions importantes, même avant le regroupement. Ce que l’on ne perçoit pas toujours, ce sont les difficultés des Charentais à défendre leurs dossiers auprès des instances nationales, INAO, CNAOC… Quelque part, nous vivons dans un monde où tout interfère sur tout. La région a du mal à faire passer des notions un peu novatrices. Je pense à un outil comme le Pape, qui permettrait de tenir le choc en cas de coup dur. Dans une viticulture de plus en plus spécialisée, des systèmes trop rigides nous emmènerons droit à la catastrophe. Le marché du Cognac connaîtra forcément des hauts et des bas. D’où la nécessité de s’adapter, de se donner les moyens de réagir. Pour autant, doit-on
rester « assis entre deux chaises » ? Je parle du vignoble de vin sans IG et du produit Cognac AOC ? A un moment donné, le débat du vignoble AOC va rejaillir.
Je n’ai pas peur de le dire. J’ai fait partie des gens qui ont défendu les rendements bas. Rétrospectivement, on peut se dire que nous sommes allés trop loin. Mais la con-
fiance n’était pas là.
Pour pouvoir engager des moyens considérables, le négoce a besoin d’avoir l’assurance qu’il pourra répondre aux sollicitations de marché.
Je ne suis pas hostile aux prévisions du cabinet Eurogroup, même si elles paraissent un peu optimistes. Soyons pragmatiques. Ne nous privons pas de débouchés. Par contre, il faut se donner des garanties, pour ne pas être confrontés à des situations compliquées. Les garanties ? Qu’il y ait déjà un partage du risque ; qu’en cas d’à-coups, les producteurs ne soient pas seuls à supporter le risque. Pour nous responsables professionnels, c’est compliqué de faire prendre conscience aux financiers des grands groupes que la filière Cognac travaille sur le long terme et non pas à l’échelon N + 1. Heureusement que les maisons sont impliquées par le biais de leurs stocks, mais il convient de marteler ces notions et d’autant plus que des bouleversements interviennent au sein des groupes. Les personnes changent, les savoirs se dispersent.
Ce qui m’interpelle aussi, ce sont les jeunes viticulteurs qui embrassent la profession. Souvent, ils ont été formés à d’autres métiers, sont partis vers d’autres horizons. Ils reviennent, grâce à l’embellie. On ne s’en plaindra pas. Mais ces jeunes n’ont pas l’expérience ni même la prescience de ce qui s’est passé avant eux, des crises que les gens de ma génération ont vécues. Ils ont tendance à oublier d’où ils viennent – sinon eux, leurs parents – et c’est un peu dangereux.
L’engagement ? Quand tout va bien, il se relâche, c’est clair.
La fiscalité, les droits de succession – Les prélèvements ont tendance à devenir de plus en plus confiscatoires. Est-ce le moment d’en parler ? En tout cas, il s’agit d’un vrai problème.
L’agrandissement – Les exploitations explosent en termes de surface. Ceci dit, les plus grandes ne sont pas forcément les plus performantes en termes de production alors que la productivité conditionne la rentabilité. Voir des exploitations s’agrandir de façon exponentielle sans maîtrise de la production confine à l’absurde. Je ne crois pas beaucoup au contrôle des structures. On peut toujours afficher les meilleures intentions du monde. Chacun sait bien qu’il existe 36 moyens pour contourner le système.
Constater que le négoce cherche à s’approprier une petite partie de l’outil de production ! Quelque part, c’est l’aveu qu’une parcelle de pouvoir leur échappe. Après, il ne faut pas que, comme en Champagne, toute une politique d’exclusivité se mette en place. Ce serait une sacrée reculade. »
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