Originaire du bassin méditerranéen, le pin maritime agrémente les zones côtières d’une grande partie de la France métropolitaine mais aussi de nombreux jardins. Doté d’un génome 8 fois plus important que celui de l’humain, Pinus pinaster a démontré aux scientifiques de l’INRAE, de l’université d’Orléans, de l’université de Perpignan, du CEA, de l’institut technologique FCBA et de l’université de Lisbonne que le monde végétal dispose de mécanismes d’adaptation bien plus complexes qu’il n’y paraît.
Une mémoire épigénétique
Les chercheurs ont mis en évidence que les graines de pin maritime conservent des marques épigénétiques, c’est-à-dire des modifications de l’expression des gènes sans altérer la séquence ADN. Cette « mémoire » se conserve dans le jeune arbre durant 2 ans après la germination de la graine permettant, grâce aux « enseignements » de l’arbre parent, d’exprimer différemment certains de ses gènes afin de mieux s’adapter aux variations de température et à d’autres facteurs environnementaux tout au long de sa vie. Dix de ces gènes ont été identifiés, permettant d’ouvrir la voie à de nombreuses possibilités de sylviculture durable.
Implications pour la gestion forestière
Avec le dérèglement climatique, les forêts sont de plus en plus exposées à des épisodes de chaleur et de sécheresse, exposant les graines et jeunes plants à de nombreux stress. La compréhension de la manière dont les graines et pousses réagissent aux variations de température est un enjeu important, surtout dans le contexte d’un déclin observé de la production de graines de pin maritime depuis la fin des années 2000. En conditionnant les arbres dès la phase embryonnaire, il devient possible de les préparer à des environnements changeants et des conditions de plus en plus extrêmes, l’une des problématiques majeures de gestion durable des forêts et de la biodiversité.
Étude et méthodologie
Les scientifiques ont exposé des embryons de pin maritime provenant du même arbre à différentes températures (18 °C, 23 °C et 28 °C) durant leur maturation de trois mois. Les résultats ont montré que la température influençait non seulement le développement embryonnaire, mais aussi la croissance des arbres pendant au moins trois ans après germination. Après cinq ans, une fois que les jeunes arbres se sont développés et « établis », les différences de croissance s’estompent, indiquant que les variations ne sont pas causées par l’ADN des graines, mais par des marqueurs épigénétiques, transmissibles par division cellulaire au cours du développement et possiblement réversibles.
Transmission des modifications épigénétiques
L’étude démontre que les modifications épigénétiques peuvent être transmises de la phase embryonnaire à la phase post-embryonnaire, ce qui est crucial pour les végétaux à long cycle de vie comme les arbres. En transmettant des informations comme les températures d’exposition ou l’humidité dans ses graines, le pin maritime offre de nouveaux leviers aux gestionnaires forestiers, leur permettant d’adapter les pratiques de conservation et de gestion des ressources génétiques face aux changements environnementaux.
source: INRAE | crédit photo: Wirestock
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