En 2008, l’agressivité du champignon est quasiment partout jugée supérieure à celle de 2007 qui a pourtant été identifiée comme une très grande année à mildiou. Aucun vignoble n’a été épargné.
Même s’il existe des nuances dans l’épidémie du mildiou entre régions viticoles, les grandes étapes de son déroulement peuvent être résumées ainsi :
l Un démarrage de la maladie relativement classique avec une présence de foyers le plus souvent épars vers les 20-25 mai.
l Une période historiquement favorable au champignon fin mai-début juin qui a coïncidé avec les stades préfloraison – floraison très sensibles à la maladie. Les pluies fréquentes et souvent intenses de cette période ont parallèlement fortement perturbé la mise en œuvre de la protection. La conjugaison de ces deux phénomènes ont pu induire des attaques sévères avec des pertes significatives de récolte (rot-gris).
l Une deuxième partie de campagne qui, malgré des épisodes un peu plus cléments, a été suffisamment arrosée pour maintenir une forte pression de la maladie jusqu’à la veille des vendanges. Même s’il fut moins conséquent que le rot-gris, le rot-brun causa également quelques dégâts et des dégradations du feuillage ont pu être observées durant la phase de maturation.
2008 s’inscrit ainsi parmi les plus grands millésimes mildiou sinon le plus grand des 50 dernières années.
Le propre de la démarche viticulture raisonnée est d’ajuster, chaque année, le programme de traitements aux risques afin d’obtenir les objectifs fixés en termes de qualité et de quantité avec un minimum d’interventions. Pour les aider dans cette tâche parfois délicate, les viticulteurs, en complément de leurs observations personnelles, peuvent s’appuyer sur les informations et les conseils diffusés par les Avertissements Agricoles® et/ou les bulletins techniques des organisations professionnelles.
Vis-à-vis du mildiou, les conditions de réussite de la lutte chimique sont d’autant plus favorables que sa mise en œuvre est accompagnée de mesures prophylactiques qui viennent limiter le développement du champignon. Trois d’entre elles peuvent être citées :
l Eviter la formation des mouillères en réalisant un drainage du sol.
l Eliminer tous les rejets (pampres à la base des souches, les semis de pépins…) qui favorisent l’installation des foyers primaires et participent au démarrage précoce de l’épidémie.
l Réaliser des rognages réguliers pour éliminer la jeune végétation très sensible au mildiou et permettre à la pulvérisation d’atteindre plus aisément sa cible.
Intervenir préventivement, soigner la pulvérisation sont des facteurs de succès de la protection antimildiou. Dans le cadre des bonnes pratiques agricoles, une gestion responsable des phénomènes de résistance est également importante. La présente note a pour objectif de décrire la situation de la résistance vis-à-vis du mildiou dans le vignoble français et de repréciser les conditions d’emploi des fongicides pour optimiser et pérenniser leur efficacité.
Le plan de surveillance 2008 permet de faire le point sur la situation de la résistance vis-à-vis des principaux groupes d’« anti-mildiou »:
l Pour le zoxamide, aucune dérive de sensibilité du mildiou n’est décelée.
l Pour les QoI (azoxystrobine, famoxadone, fénamidone et pyraclostrobine), les résultats confirment que la résistance est généralisée et que, dans une grande majorité des parcelles échantillonnées, la fréquence des souches résistantes est élevée (supérieure à 80 %). La comparaison avec 2003 révèle un maintien de la résistance à un haut niveau alors que l’utilisation des fongicides à base de QoI dans la lutte contre le mildiou est faible.
l Pour les anilides (bénalaxyl, méfénoxam), la résistance demeure bien implantée dans le vignoble français. Cependant, une légère amélioration de la situation par rapport à celle observée en 1999 est constatée. Ainsi en 2008, 30 % des populations de mildiou analysées contiennent moins de 10 % de souches résistantes alors que de telles populations étaient peu présentes en 1999. A partir de 2009, le bénélaxyl-M (ou chiralaxyl, isomère actif du bénalaxyl, également du groupe des anilides) sera présente sur le marché.
l Pour la famille de CAA (regroupant diméthomorphe et iprovalicarbe), nous observons une progression de la résistance dans différents vignobles (notamment Charentes, Pays de Loire, Bourgogne, Champagne et quelques vignobles du Sud-Ouest). Pour certains d’entres eux, la proportion de populations sensibles passe sous la barre des 50 %. Dans les vignobles de la façade atlantique, une progression avait déjà été notée en 2007. En Provence et Armagnac, les résultats des analyses confirment une forte implantation de la résistance. L’utilisation assez fréquente des fongicides à base de CAA en 2007 et 2008 dans des conditions souvent difficiles (présence de mildiou) peut avoir contribué à cette évolution de la résistance. Ce résultat conduit à insister sur l’importance du respect strict de la limitation annuelle de l’emploi des spécialités contenant des CAA pour préserver cette famille. En 2009, deux nouvelles substances actives (benthiavalicarbe et mandipropamid) viennent compléter ce groupe. Les spécialités contenant ces molécules doivent bien évidemment être prises en compte dans le dénombrement des applications à base de CAA.
Les conditions d’utilisation des fongicides « anti-mildiou »
Leur définition prend en compte d’une part les propriétés des substances actives qui les composent et d’autre part le respect des bonnes pratiques agricoles (BPA). Parmi les critères multiples qui entrent dans ces BPA, la gestion des phénomènes de résistance occupe une place prépondérante. Cette gestion repose notamment sur la limitation annuelle des applications des fongicides d’un même groupe chimique et l’alternance sur la campagne des fongicides appartenant à des groupes différents.
Ces mesures simples ont pour objectif, d’une part, de prévenir ou contenir les phénomènes de résistance et d’autre part de garantir l’efficacité des spécialités déjà concernées par la résistance. Dans le tableau ci-contre, les fongicides anti-mildiou sont classés par groupes chimiques ne présentant pas de résistance croisée entre eux.
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