Entreprise Familiale Depuis Six Générations

2 mars 2009

En 1827, Jean-Baptiste Lapostolle fonde une distillerie à Neauphle-le-Château près de Paris. En 1870, Eugène Lapostolle rapporte des eaux-de-vie de la région de Cognac, qu’il a sélectionné au cours d’un voyage dans la région. En 1880, Louis-Alexandre Marnier-Lapostolle, gendre d’Eugène, passionné et inventif, crée la liqueur Grand Marnier, mariage du Cognac et d’un fruit exotique alors rare à l’époque, l’orange amère.

Comme toujours, c’est par une série de rencontres fortuites ou, au choix, d’intuitions géniales, que se construisent les « sucess stories ». La liqueur Grand Marnier n’y échappe pas. Si Eugène n’avait pas pérégriné dans la région de Cognac en 1870 (une date chargée d’histoire !) aurait-il eu l’idée d’utiliser du Cognac ? Et « quelle mouche le pique » de choisir la délicate « Citrus Bigaradia » pour en extraire l’essence aromatique d’orange amère ? A l’occasion du Printemps des liqueurs, le 13 mai dernier, le château de Bourg-Charente présentait le cycle de fabrication de la liqueur à travers quelques « bornes témoins » : photos de plantations, sacs d’écorces d’oranges amères, échantillons d’eaux-de-vie… L’histoire de Grand Marnier débute dans les plantations de Citrus Bigaradia (une rigolote petite orange verte) des Caraïbes. Coupés en deux, les fruits sont laissés à l’air libre aux pieds des arbres puis émondés mécaniquement pour en extraire la pulpe et la pellicule blanchâtre. N’est conservée que l’écorce qui, une fois séchée au soleil, est ramollie par trempage puis mélangée à de l’alcool. C’est cette décoction, moitié liquide, moitié solide qui sera distillée à Neauphle-le-Château dans de drôles d’alambics qui ressemblent à des Cocottes-Minute. Viendra ensuite l’heure de l’assemblage et de la maturation entre l’essence d’orange et le Cognac.

« toutes les deux secondes… »

Toujours fidèle au rendez-vous de la Sica Cognac, Claude de Jouvencel, directeur général adjoint de la société Marnier, a souligné « la grande chance qui consistait à travailler dans une entreprise familiale. On y privilégie la vision à long terme, sans que les résultats à court terme pèsent comme une épée de Damoclès ». Il a aussi salué l’intuition des fondateurs et des six générations successives « qui sont restées maîtres de leur affaire, avec un produit qui a traversé le temps sans jamais être en décalage ». Si la bouteille créée en 1880 a évolué par touches subtiles, restent les fondamentaux, la forme, le cachet de cire, le ruban rouge. « Toutes les deux secondes, il se vend une bouteille de Grand Marnier de par le monde » a indiqué Cl. de Jouvencel. Un résultat sans doute dû à la capacité de la marque à conjuguer tradition et modernité. Depuis plusieurs années déjà, la liqueur Grand Marnier a investi le créneau des longs drinks, des cocktails et autres apéritifs, le seul moyen de recruter des jeunes consommateurs. « C’est un véritable challenge pour nous. » Depuis le 1er janvier 2006, la marque a renforcé sa présence sur des pays cibles, avec l’installation à demeure d’experts auprès de ces marchés. « Auparavant, nous recourions à de grands voyageurs de commerce basés à Paris, qui passaient leur temps dans les avions. Dorénavant, nous avons choisi de les maintenir en résidence, non pour “fliquer” nos agents et nos distributeurs mais pour intensifier notre présence sur des marchés clés comme Canada, USA, Mexique… » Si la liqueur Grand Marnier est diffusée dans plus de 150 pays, s’applique à elle la grande loi économique qui veut que « 10 % des plus grands marchés représentent 90 % de votre business ».

Le manager a égrené les sept impératifs que la marque s’était fixés pour 2007 :
– Comme pour beaucoup de maisons, poursuivre notre croissance en Amérique du Nord « car l’économie saine des Etats-Unis génère un impact immédiat sur notre activité. Les Etats-Unis représentent pour nous un volume très important et suscitent des investissements très lourds, supérieurs à 20 millions de $ par an entre Canada et Etats-Unis
– Stabiliser notre performance en Europe, « une façon pudique de dire les choses ». « Il s’agit en fait de retrouver une certaine croissance, un travail difficile et en profondeur, qui ne s’accomplira pas en 24 heures. »
– Accompagner le lancement de Navan, la nouvelle liqueur de Grand Marnier à base de Cognac et de vanille, diffusée aux Etats-Unis et au Canada sous un positionnement premium de 40 $ la bouteille
– Réussir la mise en place des marchés stratégiques de demain : Japon, Chine, Taïwan, Mexique, Russie…
– Faire parler de la marque, jugée parfois trop discrète, par une « reprise de parole », dans les médias notamment
– Intensifier la stratégie de développement des « comptes clés internationaux » comme le Duty free. « Ces marchés ne réservent pas les mêmes marges que les marchés domestiques mais il faut parfois savoir faire des sacrifices pour être présents dans ces vitrines. »
– Entretenir l’image premium et de luxe de la liqueur « en faisant en sorte que le rajeunissement de notre cible consommateurs (30-40 ans) ne l’éloigne pas trop de nos fondamentaux ».

Claude de Jouvencel a rajouté un objectif plus personnel : « en tant que liquoriste et opérateur de spiritueux, agir de façon responsable auprès des consommateurs et notamment des plus jeunes ». « Nous ne pouvons pas nous exonérer de ce genre de devoir. »

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