Ambiance plutôt tendue ce lundi 16 juillet à Cognac, dans un établissement de la grande distribution. C’est la deuxième fois en deux mois que des producteurs de Pineau font irruption dans le magasin. Mais autant, lors de leur première visite, le 11 mai, ils avaient été reçus par un directeur plutôt débonnaire et courtois, cette fois un comité d’accueil plus musclé les attend. Portables, et gros bras sont de sortie. Au niveau de l’enseigne, l’exaspération est montée d’un cran. « Encore là ! »
Les producteurs captent le message cinq sur cinq et s’en arrangent plutôt bien. « Dites-leur que vous en avez marre de nous voir ! » lancent-ils au directeur.
La stratégie du bourdon
Car les producteurs de Pineau ont choisi d’adopter la stratégie du bourdon, de l’insecte piqueur : gêner, pour faire réagir. Dans l’œil du viseur, ces « hyper-promo » qui sabotent l’image du Pineau. En l’occurrence, ce qui les a fait bouger, ce lundi 16 juillet, c’est moins le pourcentage de remise (- 30 %) que le prix final de la bouteille : 6,23 € le litre soit 4,67 € pour une bouteille de 75 cl. C’est le prix qui s’affiche sur le catalogue, largement diffusé. Le directeur du magasin joue les naïfs. « Je croyais que jusqu’à 30 % de remise, ça le faisait ! » Les producteurs se sentent obligés de lui servir une petite explication de texte : « Oui mais sur un prix cohérent à la base. Et non sur un prix bas au départ. Nous ne sommes pas contre les promotions mais c’est une question de niveau. Ce qui compte, c’est la valeur finale du produit ».
« A ce prix-là, il n’y aura bientôt plus de Pineau, s’insurgent les producteurs. On se tire nous-mêmes une balle dans le pied. »
Ce qu’ils les insupportent le plus, c’est de voir le Pineau, produit de terroir et d’appellation, traité comme un vulgaire produit d’appel « pour attirer les consommateurs et remplir les caddies. » « Ce n’est pas innocent si les promos ont lieu l’été, quand les touristes sont là ! Simplement, quand ils rentrent chez eux, ils n’ont plus envie d’acheter du Pineau à un prix normal. Pour le Pineau, c’est le mécanisme de la double peine. »
Une, deux, trois
Voilà la troisième fois que le syndicat part en guerre contre ces pratiques de prix bas : le 17 février 2012, le 11 mai et le 16 juillet. Les deux premières fois, était visé un Pineau de marque, dans deux enseignes différentes. Le 16 juillet, il s’agissait d’un Pineau d’une autre marque, dans une des deux enseignes déjà épinglées. Comme c’est toujours le cas, l’hyper-promo ne concerne pas un seul magasin mais plusieurs, en l’occurrence les 34 magasins de la centrale d’achat.
Des producteurs se sont retrouvés à la même heure à Saintes, Royan et Cognac.
« Le Pineau n’a pas beaucoup de marques fortes. Quand ce sont ces marques qui mènent ce genre de politique, il y a malaise »
a expliqué Jean-Bernard de Larquier à Cognac tandis que Jean-Marie Baillif, président du Syndicat des producteurs, était à Saintes.
Le souhait le plus sincère des producteurs : ne pas avoir besoin de renouveler ce genre d’opération.