L’hiver pour rêver

4 janvier 2022

L’hiver s’installe et les efforts se poursuivent. Entre la distillation et le début de la campagne de taille, le bassin Charentes-Cognac continue de s’activer à plein. À peine le temps de se retourner sur la dernière douzaine de mois que les douze suivants se préparent, amenant avec eux les premières questions quant au contexte à venir. À quelle sauce seront mangés les Français en 2022 ? Les restrictions imposées, puis levées, puis reprises partiellement, rythment depuis trop longtemps la vie dans les villes et les campagnes françaises, dans les entreprises comme dans la sphère privée. L’événementiel et les rendez-vous professionnels qui avaient enfin pu reprendre, pour la joie et la satisfaction de tous, sont à nouveau très largement contraints. Une fois de plus privés de la convivialité chère aux animaux sociaux que nous sommes, encore plus latente en cette période de fin d’année, nous patientons et attendons les prochaines mesures qui viendront dédire ou contredire les règles auxquelles nous nous astreignons bien malgré nous. Bonne résolution ou voeu pieux, chacun escomptera une année 2022 plus sereine à la vigne comme dans la vie.

Une agriculture sous pression météorologique et sociétale

 Du début à la fin, l’année 2021 fut très mouvementée. Après les inondations hivernales, les épisodes de gel printanier donnèrent le la du millésime. L’humidité constante – et notamment en juillet – poussa les viticulteurs à de nombreuses interventions tout au long de la campagne. Malgré quelques manqués, tous ont tenu bon pour un résultat satisfaisant ne permettant pourtant que partiellement de relâcher la pression. Ereintante cette année, comment qualifierons-nous les campagnes à venir ? Nouvel arrêté ZNT voisinage, révision de l’arrêté ZNT aquatique, questionnements sur l’intégration de la vigne dans le plan national en faveur des insectes pollinisateurs, incertitudes sur la réhomologation de substances à base de glyphosate et de cuivre… les exemples sont nombreux et non exhaustifs des évolutions à venir. Les efforts entrepris pour le déploiement d’itinéraires culturaux durables, aussi importants soient-ils, suivent un autre rythme que les décisions du législateur, soumis à la pression sociétale (parfois du voisinage) et médiatique (« l’environnement », sous toutes ses formes, était le sujet principal du journal Le Monde avant le début de la phase sanitaire). Pourtant, le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, Julien Denormandie, s’est montré très satisfait des premiers résultats du recensement agricole 2020 (entre le 1er octobre 2020 et le 15 mai 2021). « Ces premiers résultats montrent une agriculture qui conserve ses atouts : couvrant près de la moitié du territoire métropolitain, c’est un modèle agricole de qualité, à taille humaine et familial qui se dessine », lisait-on sur le site Internet de son ministère le 10 décembre dernier. Un encouragement à tenir bon ?

Bilan carbone, un avenir (in)certain

 Parallèlement se pose la question de plus en plus pressante du bilan carbone. Si les investigations sont nombreuses pour réduire l’empreinte carbone de la distillation, poste le plus énergivore de la filière, l’équation la plus délicate se pose à la vigne, entre les intrants et le carburant. Si la baisse des intrants est un des objectifs de toutes les certifications (en quantité comme en intensité), une de ses premières conséquences est l’utilisation plus importante des tracteurs et des outils de travail du sol, soit une augmentation de facto de l’empreinte carbone de l’exploitation. L’interprofession du Bordelais – lors de son rendez-vous « Cultivons demain », le 7 décembre dernier – a inscrit ces deux pans de travail dans la même analyse, afin de les corréler. Sans compter sur les autres conséquences de ce nécessaire changement de paradigme, sur le tassement des sols, l’augmentation de la charge de travail, mais aussi les charges à l’hectare de l’exploitation, ou encore les répercussions à la vigne, notamment si la plantation est ancienne. L’arrivée prochaine des variétés de vignes résistantes pourrait être un début de réponse à cette contradiction. Certains prendront les devants (ou les risques) pour en partager et interpréter collectivement les résultats, réussites, contraintes, au sein des instances gouvernant la filière, avant une éventuelle généralisation dans les différents domaines de la Charente et de la Charente- Maritime. Une même approche pointe du côté du Bordelais. La balance bénéfices/risques – très à la mode ces deux dernières années – mérite, ici, d’être étudiée en profondeur. Plus largement, le Plan national dépérissement du vignoble « traduit la volonté de la filière d’agir à tous les niveaux, de manière concertée pour lutter contre les dépérissements », dans le but d’apporter une réponse adaptée à chaque région viticole.

Une revue vivante

 Le Paysan Vigneron reste un lieu de débat et de discussion, où les points de vue émis dans les articles se répondent – au sein d’un même numéro ou d’un numéro l’autre. Charles Péguy disait qu’« une revue n’est vivante que si elle mécontente chaque fois un bon cinquième de ses abonnés. La justice consiste seulement à ce que ce ne soient pas toujours les mêmes qui soient dans le cinquième ». Le Paysan Vigneron est une revue bien vivante. Toute l’équipe du Paysan Vigneron souhaite à ses lecteurs de bonnes fêtes de Noël et de fin d’année. L’exercice 2021-2022 ne peut encore laisser paraître ses premières tendances. L’hiver (froid ? pluvieux ?) les donnera. Sera-ce « un voyage dans l’hiver et dans la nuit, nous cherchons notre passage dans le ciel ou rien ne luit » ou bien un voyage « dont le plus beau jour fut un jour de beau froid » ? Vienne l’hiver.

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