Cela s’appelle « honorer ses visiteurs ». La maison Camus, tout en manifestant une exigence au moindre détail, n’a pas souhaité faire de ce 150e anniversaire un grand « raout » à la gloire de l’entreprise. Son interprétation de l’événement s’est faite beaucoup plus subtile, plus personnelle, plus sensible et pour tout dire plus familiale. La famille Camus a reçu de manière très personnelle ses partenaires viticulteurs chez elle, au Plessis. Si rien n’était laissé au hasard, quelque chose de naturel et de simple persistait, qu’intuitivement chacun a perçu.
Accueil par Patrick Léger et Nathalie Marchais, respectivement maître de chai et chargée des relations avec les livreurs, petite coupe en main (cocktail créé spécialement pour les 150 ans), photo avec Jean-Paul et Cyril Camus, visite des pièces de réception du château avec quelques jalons emblématiques de la vie de la marque (étiquettes, publicités, flacons…), descente vers le jardin, photos de jeunes créateurs illustrant les principaux marchés, petits ateliers récréatifs évoquant l’ambiance sous les cinq générations de Camus, espace réceptif, bar flair… C’est dans un déroulé très progressif que la soirée s’est poursuivie.
Les origines de l’entreprise
Dans son discours, Cyril Camus s’est d’abord attardé sur les origines de l’entreprise, une famille issue du vignoble. En 1863, son ancêtre Jean Camus, installé dans les Borderies, se joint à d’autres propriétaires viticoles pour créer un consortium (une société commerciale), baptisée « La participation charentaise ». Son but ? Ecouler les eaux-de-vie de ses membres. En 1890, Jean-Baptiste Camus rachètera les parts de ses associés pour fonder « Camus la Grande Marque ».
Un « Cognac vrai »
Pour Cyril Camus, cette histoire fonde un attachement à un « Cognac vrai, quelque chose de plus fort que les cours de la bourse, que les crises, que les périodes d’emballement ; une passion du Cognac qui vous fait aller de l’avant et vous pousse à apporter votre propre contribution. » Avec son accent inimitable – celui d’un globe-trotter qui passe beaucoup de son temps sur les marchés à l’autre bout du monde – Cyril Camus a dit tout ce qu’il devait au Cognac – « ce produit incroyable, fabuleux » – mais aussi aux viticulteurs qui le produisaient. « C’est le fruit du travail de nombreuses personnes, à travers toutes les époques et les générations. » Il a parlé d’une responsabilité à l’égard des partenaires viticulteurs comme des clients. « Chez Camus, nous considérons que le Cognac est suffisamment beau sans avoir besoin d’en “rajouter”. Nos produits restent très simples, très purs. » Cyril Camus a évoqué l’ambition et la confiance en soi d’une société familiale qui entend bien voir perdurer son modèle « tout en demeurant elle-même ». Il s’est félicité de pouvoir fêter un événement aussi exceptionnel que les 150 ans de l’entreprise. Puis il a attiré l’attention des viticulteurs sur les pieds de vignes récemment plantés à l’entrée du Plessis. « Il y en a deux cents, a-t-il, comme le nombre de nos fournisseurs sous contrats. Vous repartirez avec une attestation numérotée d’un pied de vigne à votre nom. Par ce petit geste symbolique, nous voulons que vous sachiez que nous partageons ensemble un lien de fidélité fort. Vous faites partie de la maison Camus. »
Une gamme élégante
Assemblages, mono-crus, cuvées, millésimes… La gamme des Cognacs Camus livre des « biographies organoleptiques » dans de beaux flacons.
La gamme Camus repose sur un triptyque. D’un côté les deux mono-crus, Ile de Ré et Borderies, excellents vecteurs de communication ; de l’autre la gamme Elégance, Cognacs d’assemblage, qui représentent le gros des volumes de la marque ; et enfin la niche « iconique » de la maison, ses cuvées très haut de gamme.
On ne reviendra pas sur les deux mono-crus, dont le message est celui du terroir. La gamme Elégance (VS, VSOP, XO, Extra), créée en 2005, a été totalement relookée à l’occasion du 150e anniversaire. La signature de Cyril Camus figure sur les bouteilles et carafes. Le logo de la marque – la croix tréflée – est bien plus présent. Une légende raconte que cette croix tréflée s’inspire de la clé du Plessis. Des astuces packaging jouent avec les images phares de la société (grappe de raisin…).
Les cuvées, elles, existent depuis 2008. Une nouvelle édition sort chaque année. Ces séries limitées (1 500 unités) constituent la collection Masterpiece. Prix de vente consommateur : un peu plus de 5 000 €. Pour célébrer le 150e anniversaire, une cuvée très spéciale a vu le jour. Un bouchon noir en baccarat, d’une exécution complexe, orne la carafe en cristal conçue par Serge Mansau.
Chaque cuvée est dotée d’un code : 3. 128, 2.105, 5.150… Le premier chiffre renseigne sur le nombre d’eaux-de-vie composant l’assemblage, le second sur la somme des âges des eaux-de-vie.
Sortie en 2008, la première cuvée 3.128 comptait trois eaux-de-vie de 41, 43 et 44 ans, dûment garanties et « tracées ». « Chaque cuvée est l’occasion de raconter l’histoire de ces Cognacs » souligne le maître de chai, Patrick Léger.
Pour les 40 ans de Cyril Camus et les 65 ans de Jean-Paul Camus, fut lancée la cuvée 2.105. Quant à la cuvée qui accompagne le 150e anniversaire de la maison Camus, elle se nomme sans surprise 5.150. Des chiffres faciles à décoder.
Cinq générations
1863 – Jean Camus s’associe à la fondation du consortium qui deviendra trente ans plus tard « Camus la Grande Marque ».
1894-1896 – Edmond et Gaston, les fils de Jean-Baptiste Camus, prennent la tête de l’entreprise familiale. Grand voyageur, Gaston va ouvrir le marché russe. Camus devient le Cognac préféré de l’aristocratie impériale russe.
1932 – Né en 1911, Michel Camus, le fils de Gaston, arrive aux commandes entre les deux guerres. Il renoue avec le marché russe, sous l’ère des dignitaires soviétiques. Lui-même grand voyageur, il est un pionnier de la vente en duty-free. Jusqu’au jour de sa disparition en 1985, Michel Camus s’intéressera à la marche de la maison.
1967 – A 22 ans, Jean-Paul Camus intègre la maison familiale. Il la dirigera dix ans plus tard. Amoureux de la terre et des vignes, il sera l’homme de la synthèse entre l’enracinement et la conquête des marchés lointains. La maison possède aujourd’hui 180 ha de vignes en Borderies et exporte dans le monde entier.
2003 – Cette année-là, Jean-Paul Camus passe le relais à son fils Cyril, alors âgé de 32 ans. Cyril Camus va creuser la veine du grand export : Chine mais aussi Etats-Unis, Vietnam, Japon, Russie. « Je vis et je travaille entre plusieurs pays, plusieurs cultures. Mais pour faire du bon travail, j’ai besoin de retrouver mes racines cognaçaises, d’être au contact de l’entreprise et de ses fournisseurs. »
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