L’implantation d’un vignoble de 5 hectares de vins de pays rouges représente une démarche importante sur les plans techniques et économiques, et il convient d’aborder un tel projet avec beaucoup de professionnalisme surtout quand on décide de prendre en charge la commercialisation. C’est le pari qu’on fait Maria et Patrick Brillet en créant la production de vins rouges du Plantier de Chipre à la fin des années 1990. Leur projet a été construit dès le départ en ayant une réflexion globale intégrant les aspects techniques et commerciaux. Ce couple de viticulteurs avait une idée très précise du vin qu’il voulait élaborer et vendre avant même de réaliser leur première vinification. Le millésime 2003 du Plantier de Chipre est actuellement en cours de commercialisation et, sur le plan qualitatif, le vin reçoit un très bon accueil de la part des professionnels et des amateurs.
Le vin au cœur d’un projet global de développement du Domaine du Breuil
L’engagement dans la production de vins de pays sur cette propriété s’inscrit dans une démarche globale de valorisation des productions viticoles du domaine du Breuil qui s’est matérialisée depuis quelques années par le lancement d’une gamme de Pineaux et de Cognacs vendus en bouteilles et d’une approche de tourisme à la ferme avec l’ouverture d’un gîte rural. Maria Brillet ne cache pas que l’introduction de l’activité vins de pays sur l’exploitation a été un événement important : « C’est un projet familial qui s’est construit progressivement. Les contacts que nous avons sur le plan commercial depuis de nombreuses années nous ont permis de nous rendre compte que la démarche de vente à la propriété était porteuse et connaissait un certain développement. Les consommateurs semblent de plus en plus demandeurs d’informations sur les conditions de production, et un vigneron réalisant de la vente à la propriété est sans aucun doute le mieux placé pour aborder ces sujets. Par ailleurs, le fait d’avoir au catalogue du vin de qualité et pourquoi pas des vins bio représentait aussi un excellent produit d’appel pour capter l’intérêt d’une frange de clientèle nouvelle à la recherche de productions authentiques. » La particularité de la démarche de production de ce couple de viticulteurs est d’avoir conduit dès le départ une réflexion reposant sur une double approche à la fois technique pour élaborer un vin rouge de forte typicité et commerciale pour positionner leur production sur une niche commerciale générant de la valeur ajoutée.
Un investissement dans la formation avant de planter les vignes
P. Brillet a pris en charge les aspects techniques de mise en place de la production et il s’est donné les moyens de construire son projet en suivant une formation de viticulture et d’œnologie à l’Institut d’œnologie de Bordeaux pendant une année complète. Cela lui a permis de s’immerger dans l’univers de production des vins de qualité et de nouer des contacts avec des spécialistes et d’autres vignerons. Il a très vite pris conscience de la forte corrélation qui existe entre l’investissement technique au vignoble et la qualité finale des vins. L’obtention de raisins de grande qualité a été au cœur de toutes les préoccupations pour implanter ce vignoble. Les caractéristiques de la parcelle du Plantier de Chipre, une situation en sommet de coteaux, des sols de groie très superficiels et un long passage en jachère (presque 10 ans), représentaient sur le plan du terroir un potentiel exceptionnel qu’il convenait de savoir valoriser. L’implantation de ce vignoble de vins de pays s’est étalée sur deux années avec, en 2000, la plantation de 2 ha de Cabernet franc et en 2001 de 3,32 ha de Merlot. Les choix des deux cépages, des clones (N° 242, 107 et 109 pour le Cabernet N° 281 pour le Merlot), de porte-greffes à faible vigueur (fercal en majorité) répondent à un cahier des charges très qualitatif pour valoriser le potentiel du sol. La densité de plantation de 5 000 souches/ha (2 m sur 1 m) favorise les phénomènes de concurrence et la maîtrise de la vigueur. La forte hauteur du palissage confère à la vigne une grande surface foliaire, ce qui est toujours propice à la maturation des raisins.
Une conduite du vignoble en viticulture biologique pour profiter d’un créneau de marché porteur
L’autre particularité du vignoble du Plantier de Chipre est qu’il est conduit en viticulture biologique. Ce choix a été motivé à la fois par des contingences commerciales et aussi par une volonté personnelle d’élaborer des vins d’une manière la plus respectueuse des enjeux environnementaux. La situation complètement différenciée du reste de la propriété de l’îlot de production de vins de pays a aussi rendu possible l’agrément en viticulture biologique de l’atelier de production de vins de pays. P. Brillet tient sur ce sujet un discours cohérent qui traduit aussi toute son évolution personnelle de producteur soucieux de maîtriser les pratiques de protection du vignoble : « J’ai toujours porté une attention particulière aux aspects de lutte raisonnée sur la propriété. D’ailleurs, dès la fin des années 80, je m’étais rapproché d’un distributeur qui justement avait mis en place une véritable stratégie de protection du vignoble réellement raisonnée en fonction des risques parasitaires. L’implantation du vignoble de vins de pays sur le Plantier de Chipre à Saint-Simeux a été l’occasion d’aller plus loin en optant pour la conduite en viticulture biologique. Cela fait plusieurs années que je m’étais intéressé à ces approches de lutte bien différentes et leur faisabilité me paraissait en phase avec les attentes techniques de production des vins de pays. Les divers contacts avec des viticulteurs bio de la région nous ont fini de nous convaincre surtout par l’intérêt que suscitaient les vins bio auprès des consommateurs. Nous avons fait une étude de marché qui nous a confirmé qu’il existait une marge de progression intéressante sur ce créneau pour des vins de qualité. Aussitôt la première mise en bouteille, les premiers contacts avec des acheteurs de grande distribution au plan régional comme au niveau national nous ont confortés sur ce plan. »
Des charges de main-d’œuvre plus imporrantes
La conduite en viticulture biologique s’appuie sur un cahier des charges précis qu’il convient de respecter pour obtenir la certification. La philosophie de production repose essentiellement sur des interventions préventives, que ce soit au niveau de l’entretien du sol (pas d’herbicides) comme de la protection du vignoble. L’isolement et la surface suffisante de l’îlot de production de vins de pays du Plantier de Chipre ont permis d’aborder la gestion des travaux d’une manière rationnelle. La démarche de production a été soumise à plusieurs audits de contrôles réalisés par un organisme agréé Qualité France Véritas qui ont débouché sur l’obtention d’une certification Bio. Les vignes sont conduites en cordons bas palissés avec un objectif de rendement de 50 hl/ha qui correspond à un bon compromis de rentabilité économique et de qualité. Après avoir réalisé deux récoltes, P. Brillet considère que les raisins issus de la viticulture biologique possèdent naturellement une meilleure résistance aux pressions de parasitisme. Sur le Plantier de Chipre la parcelle de vigne semble avoir, malgré sa jeunesse, trouvé un bon équilibre de vigueur qui s’avère propice à de belles maturations. Ce viticulteur a aussi essayé de cerner les charges de production qui, sur le plan de la main-d’œuvre, sont supérieures de 30 à 40 % à celles d’une vigne large palissée de type Cognac. L’augmentation de ces coûts est essentiellement liée à des interventions spécifiques sur 5 000 ceps/ha comme l’égourmandage en vert, les vendanges manuelles en 2003, la vendange verte en 2004, et la réalisation d’un entretien des sols mécanique durant toute la saison.
Des premières vinifications en 2003 qui confirment le gros potentiel du terroir
Un cahier des charges encore plus ambitieux pour les vinifications 2004