Il avait déjà fait rêver la viticulture charentaise au moment de la construction du syndicat unique SGV en 2000. Il est à nouveau la grande source d’inspiration de l’UGVC (Union générale des viticulteurs pour l’AOC Cognac), l’entité en cours de fondation entre les deux syndicats viticoles SGV et SVBC. Qu’un syndicat puisse rassembler 96 à 98 % de la profession, comme c’est le cas du SGV Champagne, génère bien des appétits, fait bien des émules. Christophe Véral, ancien président de la Fédération de syndicats FVBC, trouve des accents de tribun pour parler de l’UGVC. « Le nouveau syndicat viticole doit être incontournable au sein de la région, à Paris, à Bruxelles. On ne fera pas sans lui ! » Artisan de l’union, Jean-Bernard de Larquier revient sur un thème qui lui est cher : l’engagement des viticulteurs. « S’engager syndicalement, c’est pouvoir se montrer exigeants envers ses représentants. C’est avoir droit à la parole. » L’assemblée constitutive de l’UGVC est programmée le 8 novembre 2011 à 16 heures, salle de la Salamandre à Cognac. Elle se déroulera en présence des délégués. Auparavant, les deux syndicats auront procédé à leurs dissolutions respectives : à 14 h 30 le même jour pour le SGV et quelques jours plus tôt pour le SVBC : le 4 novembre à 17 h 30, non pas à Cognac mais à la salle des fêtes de Sigogne, réminiscences obligent. C’est là que le SVBC vit le jour, en 2002.
Que pensent les viticulteurs de cette union ? « Que du bien » répond l’un d’eux. « Il vaut mieux s’unir que perdre son temps à se bagarrer. C’est une très bonne chose. Après, la politique qui en découlera, je ne sais pas. » Cette réponse « plutôt figue mais un peu raisin » reflète assez bien le sentiment général. L’union est presque toujours plébiscitée, tellement elle relève de l’évidence, de la nécessité. Ensuite, le « vivre ensemble » et surtout le « projet de vie » sont davantage sujets à caution. « S’il y a un vrai débat démocratique, de vraies propositions, d’accord. Mais si c’est un syndicat à l’ancienne, à la charentaise, qui tourne au béni-oui-oui, on aura loupé quelque chose. J’attends de voir. » La crainte des viticulteurs, c’est que le débat soit tronqué, que les idées ne soient pas débattues mais « imposées », que le syndicalisme de proximité cède le pas à un syndicalisme porté par des gens « plus formés intellectuellement au débat d’idées mais qui tuent dans l’œuf les remontées de la viticulture de terrain. » « L’intérêt général sera-t-il suffisamment pris en compte par la no uvelle structure ? » « Quand tout va bien, il n’y a pas de souci mais en période de crise, cela tiendra-t-il ? » Un viticulteur de Bons Bois n’y va pas par quatre chemins : « Je suis très inquiet. Je vais me retrouver avec des gens qui ont voulu éliminer mon cru il y a quelques années. » Un syndicaliste, pourtant assez impliqué dans les instances professionnelles, épingle la rapidité de l’union. « Sans doute faut-il la relier aux élections ODG. Mais, personnellement, j’ai un peu le sentiment d’avoir été mis devant le fait accompli, le passage obligé. C’était assez ambigu. Tout se passait comme s’il fallait aboutir à l’union, coûte que coûte. Je crains que pas mal de gens se démobilisent, renoncent à s’engager dans le nouveau syndicat et, finalement, se laissent emporter par le scepticisme, une fois de plus. » Dans le catalogue des choses qui fâchent, il y a encore la présence, sur la liste UGVC aux élections ODG, de personnes qui n’avaient pas que la casquette de vigneron. « Le syndicat n’aurait jamais dû déroger à la règle du 100 % viticole pour ses représentants. »
Ces critiques sont heureusement tempérées par pas mal d’espoir et une projection « par le haut », vers l’avenir. « En étant divisée, la viticulture perdait son pouvoir d’avancer et d’être maître des dossiers. Unis, nous serons plus forts pour traiter des dossiers qui nous appartiennent. Je pense à celui des droits de plantation. »
Elections à l’ODG
Le pendant au rapprochement de la viticulture, ce sont les élections à l’ODG Cognac. Aux yeux de beaucoup de viticulteurs, ces élections s’assimilent presque à un non-événement. Le fait de la liste unique UGVC a enlevé beaucoup de piquant sinon d’intérêt au scrutin, même s’il y a eu quelques candidats libres (26 au total, sur l’ensemble des crus). Ce sera d’ailleurs intéressant de mesurer l’importance du panachage. L’ODG Cognac (l’organisme de défense et de gestion de l’appellation Cognac) est souvent décrite comme une « nébuleuse ». « Depuis que le cahier des charges et le plan de contrôle ont été discutés, je ne vois pas trop ce qu’on y fait. » Pour les opérateurs, cela ne fait pas un pli. Peu ou prou, tout se passe au « BN » (Bureau national du Cognac). « On a l’impression que tout est décidé au comité permanent du BNIC. L’ODG ne joue que le rôle d’une chambre d’enregistrement. » L’épisode des 0,5 de pur libérable en compte 10 n’a fait que renforcer cette perception. « On nous a demandé notre avis par mail ! » Seule consolation : l’ODG Cognac n’apparaît pas trop contraignante aux opérateurs. « L’ODG Bordeaux l’est dix fois plus. »
Les élections à l’ODG Cognac se sont clôturées le 28 octobre à minuit, « le cachet de la poste faisant foi » puisqu’il s’agissait d’un vote par correspondance. L’enjeu peut-être le plus important de ce scrutin tient au taux de participation. Sur les 4 953 viticulteurs de l’aire délimitée Cognac, combien ont voté ? A moins de 3 500 suffrages exprimés, la profession viticole estime que ce serait une semi-victoire (ou une semi-défaite). Ont été élues 68 personnes, pour combler les 68 sièges de la section ODG Cognac. De ce vivier sortiront à coup sûr les représentants viticoles appelés à siéger à l’assemblée plénière du BNIC et à son comité permanent. A ce titre, les élections à l’ODG
Cognac font bien office de « rampe de lancement » pour les candidats aux responsabilités. Une dimension qui n’a pas échappé aux votants.
Le renouvellement du BNIC pour les trois prochaines années aura lieu le 29 novembre à 15 heures. Un temps fort de la vie professionnelle charentaise. Au nom de l’alternance, c’est un négociant qui présidera le BNIC durant la prochaine mandature.
Dernière minute – Lors de l’examen, par l’Assemblée nationale, du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, les députés ont voté, le jeudi
27 octobre, l’article 16 dans son intégralité. Cet article 16 concerne tout le dispositif alcool du projet de loi, soit, pour ce qui nous intéresse, la taxation sur les spiritueux (dont le Cognac) et celle des produits intermédiaires (dont le Pineau des Charentes) [Voir article pages 8 et suivante]. De nombreux amendements furent déposés, autant par les élus de gauche que de droite : amendements pour alléger la hausse des spiritueux, la répartir en deux fois sur deux ans, amendement pour baisser la cotisation de Sécurité sociale sur les liqueurs… Aucun de ces amendements n’a passé la rampe. Le texte a été voté en l’état. L’examen par le Sénat, à partir du 2 novembre, du projet de loi, constitue la deuxième étape. A ce niveau-là, tout reste possible. Si le Sénat ne vote pas le texte, il passera en commission mixte paritaire (CMP), sachant que c’est l’Assemblée nationale qui a le dernier mot. L’an dernier, la baisse des accises Pineau avait chuté devant la CMP. Si le texte ne va pas en CMP, il est possible d’être fixé à la mi-novembre.