120 Châteaux et Domaines passionnés par les Vins de terroir

20 avril 2009

120 Châteaux et Domaines du Bordelais, tous issus de la rive droite et qui partagent les mêmes valeurs d’éthique de production et de qualité de vins, ont décidé de fonder une association originale pour dialoguer et pousser leurs réflexions personnelles plus loin. Le cercle Rive Droite de grands vins de Bordeaux a vu le jour dans le courant de l’été et en quelques mois d’existence, les choses sont allées très vite. Cette nouvelle structure, qui est désormais dans une phase opérationnelle, se veut être un lieu de débats consacrés aux démarches de production et de commercialisation des grands vins de terroir de la rive droite.

 

alain_raynaud.jpgHistoriquement, les vignobles de la rive droite possèdent une véritable culture de l’innovation et du respect des terroirs qui, au fil des siècles, n’a cessé de contribuer à la notoriété de l’ensemble des productions bordelaises. Cependant, l’identité spécifique des vignobles de la rive droite n’a jamais été formalisée de manière collective et cohérente. Le souci permanent de faire progresser la qualité des vins en valorisant les potentialités de sols, du microclimat et les conditions d’implantation des vignes a pourtant été très présent dans les démarches de production des propriétés d’une très grande aire géographique de nature hétérogène. Seule, la viticulture du grand Libournais a toujours su mettre à profit l’innovation pour développer la typicité des productions de cette rive et valoriser sa notoriété auprès des consommateurs.

Un sens inné de l’innovation et un attachement au terroir

La découverte des mèches soufrées, il y a plus de deux siècles, en est la meilleure illustration. A cette époque, les longs voyages des vins en barriques sur les bateaux entraînaient une dégradation irréversible de la qualité. L’utilisation des mèches soufrées a permis de préserver les vins de l’oxydation et d’aborder leur élevage et leur conservation de manière différente. La nature géologique des sols par ses dominantes de terroirs argileux a aussi amené au développement d’un cépage dominant, le Merlot, dont la notoriété est désormais mondiale. L’apport dominant du Merlot dans les assemblages avec le Cabernet Franc et le Cabernet Sauvignon confère aux vins issus de ces terroirs une harmonie tout en rondeur et en élégance. L’autre élément fédérateur de la qualité des vins est l’investissement humain des vignerons qui, de par leur ténacité et leur travail, ont façonné sur de petites propriétés des vins extériorisant pleinement les qualités des terroirs. D’ailleurs, le souci permanent d’améliorer l’expression de la typicité repose sur des valeurs de paysan vigneron et non pas seulement sur des maillons technologiques partiels. Les meilleurs professionnels du vin considèrent actuellement que les aspects fondamentaux en matière de recherche de qualité résident dans le savoir-faire des hommes pour valoriser leurs terroirs.

Un lien transversal d’éthique de la qualité

Les deux productions phares, Saint Emilion et Pomerol, sont bien sûr à l’origine de cette recherche de qualité permanente et cela a créé un véritable esprit d’émulation auprès des autres appellations. Depuis plusieurs décennies, le savoir-faire des hommes de la grande région du Libournais est courtisé au point qu’il s’exporte dans le monde entier. L’identité des vignobles de la rive droite a mis du temps à se construire et c’est la détermination de quelques hommes passionnés par les enjeux qualitatifs qui a permis de la formaliser par une association au service de la qualité et de l’éthique des vins de la rive droite. MM. Pierre Bourdotte, Jean-Louis Laborde, Alain Moueix, Michel Querre et Alain Raynaud ont constitué au cours de l’été dernier le cercle Rives Droite de grands vins de Bordeaux dont la finalité est de réunir des domaines unis par un lien à la fois géographique et éthique en terme de qualité et de personnalité de vins sur le plan de la production comme de la commercialisation. Le président de cette association, M. Alain Raynaud, explique très clairement que le cercle Rive Droite n’a pas vocation à se substituer au rôle majeur des syndicats viticoles et du CIVB en matière de défense des appellations. C’est plus simplement un lien transversal aux 15 appellations de la rive droite qui unit des hommes animés du même désir d’exigence de la perfection dans leur métier. D’ailleurs, le choix du terme cercle atteste de la volonté des fondateurs de créer une structure qui représente un lieu constructif de dialogue autour des valeurs d’éthiques qualitatives de la rive droite.

120 membres leaders de la qualité dans leurs appellations

reception.jpgLe baptême du cercle Rive Droite a eu lieu le 25 septembre au Château de La Dauphine à La Rivière et l’ensemble des adhérents a été réuni pour la première fois pour présenter le millésime 2001. Cette première manifestation a été un franc succès de par les échanges entre membres du cercle et la présence d’un public nombreux de professionnels du vin et de journalistes spécialisés. Le président, M. Alain Raynaud, a tenu des propos qui traduisaient parfaitement l’éthique et les valeurs qui regroupent les adhérents : « L’initiative qui nous a amenés à créer le cercle Rive Droite est une communauté d’intérêts fondée sur une même éthique de la qualité. L’aire géographique de la rive droite n’est pas forcément homogène sur le plan de la nature des terroirs et des vins mais, dans chacune des 15 appellations, il y a des hommes qui sont des leaders en matière de déontologie de production, d’innovation et d’élaboration de vins extériorisant une véritable typicité. Ce sont ces valeurs qui unissent les 120 membres du cercle et leur adhésion à la charte de qualité constitue un gage de succès pour l’avenir. Le cercle Rive Droite est un cercle d’amis qui ont en commun la passion de leurs vignes et de leurs vins. »

Un engagement et des valeurs qui dépassent la hiérarchie des crus

Le cercle Rive Droite regroupe des propriétés réparties dans les appellations Bordeaux, Bordeaux Supérieurs, Sainte-Foy de Bordeaux, Premières Côtes de Bordeaux, Côtes de Blaye, Côtes de Bourg, Côtes de Castillon, Côtes de Francs, Fronsac, Canon Fronsac, Pomerol, Lalande de Pomerol, Saint-Emilion Grands Crus, Saint-Emilion Grands Crus Classés, Montagne Saint-Emilion, Puisseguin Saint-Emilion et Lussac Saint-Emilion. Il est d’ailleurs surprenant de voir se côtoyer au sein d’une structure des crus les plus prestigieux de Saint-Emilion, de Pomerol (des ambassadeurs du vignoble bordelais de par leur notoriété) avec des vignerons d’appellations plus génériques de Bordeaux, de Bordeaux Supérieurs et des Côtes de Blaye. Cela confirme bien que le lien fondateur entre toutes ces propriétés repose essentiellement sur des valeurs et des démarches qualitatives et non pas sur une hiérarchie de crus. Des techniciens et des œnologues du milieu viticole bordelais à l’audience mondiale ont souhaité intégrer leurs Domaines dans cette nouvelle structure, ce qui atteste du sérieux de la démarche. C’est le cas, entre autres, de M. Alain Moueix (Château Mazière à Pomerol, Château Fonroque à Saint-Emilion), de l’œnologue M. Michel Rolland (Château Le Bon Pasteur à Pomerol, Château Fontenil à Fronsac), du professeur d’œnologie M. Denis Dubourdieu (Château Reynon)…

Le fil conducteur de la charte qualité : Le respect des terroirs

Les membres se sont au départ cooptés en adhérant à une charte de qualité qui fait partie des statuts du cercle Rive Droite. Le fil conducteur de cette charte réside dans une idée simple, la mise en œuvre de pratiques viticoles et œnologiques naturelles et respectueuses des terroirs et des raisins. Cette philosophie, qui a toujours été très présente dans l’état d’esprit de production de nombreuses propriétés du Libournais, a par contre souvent été supplantée par des méthodes technologiques au cours des deux dernières décennies dans d’autres vignobles. Le cercle Rive Droite a été constitué autour des valeurs de « paysans vignerons » et depuis le baptême du mois de septembre, les structures se mettent en place progressivement. Chaque adhérent devra s’acquitter d’une cotisation proportionnelle à la surface du vignoble et la directrice, Mme Martine Héricé, assure la gestion de cette structure. Le conseil d’administration de 17 membres émane des 15 appellations et l’activité s’organise autour de 5 commissions. M. Alain Raynaud, qui possède une force de conviction et une passion pour l’innovation unanimement reconnues, a été élu président du cercle à l’unanimité. La vice-présidence sera assurée M. Alain Moueix, un homme de recherche et de réflexion issu d’une famille profonde attachée aux valeurs du Libournais et de la rive droite.

Une organisation propice au dialogue et aux échanges

table_reception.jpgLe cercle Rive Droite se veut être un lieu d’échanges et de réflexions dont tout le fonctionnement repose sur le travail des commissions. Des groupes d’une vingtaine de membres siègent dans chacune des cinq commissions avec comme présidents, Mme Catherine Pere-Vergé pour la commission stratégie et réflexion, M. Hervé Laval pour la commission promotion, M. Joël Elissade pour la commission technique, M. Jean-Daniel Rolland pour la commission juridique et fiscale, et M. Michel Querre pour la commission admission. L’ambition des fondateurs du cercle est, dans un premier temps, de créer une dynamique de réflexion de sujets qui constituent des préoccupations pour les membres. La démarche semble ne pas avoir laissé indifférent l’univers viticole de la rive droite puisque, après seulement quelques mois d’existence, de nouvelles demandes d’adhésions ont été enregistrées. Mme M. Héricé nous expliquait que l’objectif des fondateurs du cercle Rive Droite était de constituer une structure ne dépassant pas 150 membres afin de privilégier un dialogue véritable et constructif. Le prochain grand rendez-vous du cercle Rive Droite sera la présentation des Primeurs 2002 dans la dernière semaine de mars 2003.

Les vignes à fortes densités se sont imposées naturellement au Château Thieuley

chateau_thieuley.jpgM. Francis Courselles, du Château Thieuley à La Sauve-Majeur, est un des viticulteurs qui a adhéré au cercle Rive Droite et ses productions de Bordeaux blancs secs, de Bordeaux rouges et de Bordeaux supérieurs sont reconnues pour leurs très bonnes qualités. Cette exploitation ,située au cœur de l’Entre-Deux-Mers, a connu une véritable mutation de l’implantation de son vignoble et l’investissement dans les vignes étroites, inconcevable par son propriétaire il y a 15 ans, est devenu une réalité et un gage de stabilité pour l’avenir.

Ne pas faire de qualité, c’est à terme sortir des marchés valorisants

Le premier poste d’investissement d’un domaine viticole demeure toujours le renouvellement des plantations et pourtant M. F. Courselles n’a pas hésité à arracher ces dernières années des vignes larges dans la pleine force de l’âge. Sur ce vignoble, les plantations à fortes densités (7 000 ceps/ha) représentent actuellement plus de 50 % des surfaces et de l’aveu de son propriétaire, l’introduction de ces vignes a, d’une part, fait progresser de manière très significative la qualité des vins et, d’autre part, permis de trouver de nouveaux débouchés commerciaux plus valorisants. D’ailleurs, quand on pose la question à M. F. Courselles sur la valorisation des charges supplémentaires de productions des vignes étroites, sa réponse sur le sujet est très pragmatique : « Les circuits commerciaux valorisants, on ne peut les capter si la qualité des vins n’a pas atteint un certain niveau. Par contre, une fois que son vignoble est en mesure de permettre d’élaborer des cuvées plus haut de gamme, il n’est pas non plus garanti que le retour sur investissement soit immédiat. »

Densifier les p,lantations, c’est faire le choix des productions « typées terroirs »

Cet ingénieur en agronomie est revenu sur le domaine familial dans le milieu des années 70 avec l’ambition de valoriser un vignoble de vignes larges existant et bien structuré. Pendant presque deux décennies, le vignoble lui donnait entière satisfaction tant sur le plan de la qualité que celui des coûts de production et, commercialement, les vins du Domaine étaient écoulés sans aucun problème. Le déclic vignes étroites s’est produit en 1989 après l’acquisition d’une parcelle à forte densité de Sauvignon jouxtant des vignes larges du même cépage. Dès la première récolte, les écarts de maturité et d’état sanitaire étaient nettement en faveur des vignes étroites et, à l’issue des vinifications, la qualité des vins était bien meilleure. Dès l’année suivante, M. F. Courselles a remis en cause toute son organisation d’entretien du vignoble pour se lancer dans la plantation des vignes à fortes densités. 15 ans plus tard, il ne regrette pas de s’être engagé dans une démarche qualitative de vins de terroir qui se révèle être un bon choix sur le plan commercial. Ses propos sur le sujet attestent de son changement de philosophie de production : « Avec des vignes larges, la production de 3,5 à 4 kg de raisins par pied est trop importante pour créer de bonnes conditions de maturation, sauf les années très ensoleillées. Les vins blancs ou rouges issus des vignes larges conduites à des niveaux de rendement normaux ne correspondent plus aux attentes des marchés valorisants alors qu’à ce même niveau de productivité, des vignes étroites permettent d’élaborer des vins plus concentrés et extériorisant les caractéristiques du terroir. Dans nos régions, la climatologie durant l’été et l’automne ne créent pas systématiquement des conditions propices à l’obtention de raisins concentrés et c’est donc aux viticulteurs d’intervenir sur les conditions d’implantation et d’entretien des vignes pour pousser le processus de maturation le plus loin possible. Les vignes à fortes densités permettent d’y arriver beaucoup plus facilement car elles ne doivent alimenter que peu de raisins. »

 

A lire aussi

Le vin face aux nouveaux enjeux de consommation

Le vin face aux nouveaux enjeux de consommation

Le vin, symbole emblématique de la culture et de l'économie française, est en pleine mutation. Malgré un chiffre d'affaires annuel de plusieurs milliards d'euros, la consommation de vin en France a diminué de 23 % depuis 2000. Pour mieux comprendre cette tendance,...

error: Ce contenu est protégé